Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.


Décimales.

La division générale des Dixmes est en inféodées & en Ecclésiasiques. Les inféodées sont celles qui sont possédées de temps immémorial par les Laïques, qui, comme dit duMoulin , sont réglées en ce Royaume en toutes choses, comme tous les biens patrimonieux & profanes 1 : c’est pourquoi la connoissance en appartient indistinctement au Juge lay ; c’est-à-dire, tant au pétitoire qu’au possessoire : même pour lier les mains au Juge Ecclésiasstique, il suffit d’alléguer l’inféodation, & sur cette allégation faite sans preuve, le Juge d’Eglise est obligé de renvoyer la Cause ; autrement il commettroit abus.2 Les Dixmes Ecclésiastiques sont celles qui ne peuvent être possédées qu’en vertu d’un Titre Ecclésiastique. On les divise en ordinaires & en insolites ; dont la principale différence est, que les ordinaires sont dûes absolument, & sans que le Titulaire du Bénéfice soit obligé d’en alléguer aucune possession, parce qu’elle sont dûes par un droit universel & imprescriptible, sinon quant à la quotité, laquelle est prescriptible ; mais la prescription néanmoins ne s’en peut acquérir par la possession sur une chose singuliere, mais seulement par une possession conforme sur le plus grande partie des héritages d’une même Paroisse. Les Dixmes insolites, au contraire, ne sont dûes qu’en tant qu’on les a possédées, étant par conséquent prescriptibles absolument, aussi-bien qu’en la quotité : de maniere qu’il est nécessaire que le Titulaire qui les prétend, justifie sa possession à l’égard de l’héritage sur lequel il demande la Dixme ; ne lui suffisant pas de prouver cette possession à l’égard du plus grand nombre des héritages de la même Paroisse. En cas de cette preuve, les Parties doivent être réglées à faire preuve respective.3

Entre les Dixmes insolites, sont celles des Bois, sur lesquelles il y a plusieurs choses à observer. Il n’est jamais dû de Dixme des Boix de haute-fûtaie, de quelque maniere qu’ils soient plantés, soit en avenues & en plusieurs rangs, soit sur des fossés ou en haies, soit qu’ils ayent été ébranchés, soit qu’ils ne l’ayent point été. Ce qui a été jugé par plusieurs Arrêts ; parce que les Bois de haute-futaie, c’est-à-dire, qui ont une excroissance de plus de quarante années, sont réputés faire partie du fonds ; c’est pourquoi on en doit le treizieme en cas de vente.4

a l’égard des Bois taillis, la Dixme n’en est pas dûe, quand le Propriétaire les consume pour son usage, soit sur le lieu où ils sont excrûs, soit ailleurs où ils ayent été transportés : ce qui a été jugé par plusieurs Arrêts ; & on a même rejetté l’offre faite par le Curé, de prouver qu’il avoit été payé de la Dixme des Bois que le Propriétaire avoit consumés pour son usage.5

Quoique la Dixme des Pommes & des Poires semble être ordinaire & solite, on a néanmoins jugé qu’elle pouvoit avoir été prescrite absolument, & que les Habitans d’une Paroisse étoient exempts de la payer, parce qu’ils ne l’avoient jamais payée, par deux Arrêts, l’un du 8 de Mars 1629, & l’autre du 16 Juillet 1666, rapportés parBasnage . Par ce dernier Arrêt on jugea de plus, qu’il n’étoit point dû de Dixme des Arbres des Pépinieres, tant de ceux que le Propriétaire avoit transplantés sur son fonds, que de ceux qu’il avoit vendus pour être plantés dans la Paroisse du Curé, qui avoit droit à la Dixme.6

Ce qui croît dans les Jardins, qui ne sert que pour le divertissement & pour l’usage de la maison, n’est point décimable7. Les terres labourables qu’on convertit en herbages ou prairies, sont sujettes à la Dixme. On a néanmoins jugé, par un Arrêt donné en forme de Réglement, le 28 de Février 1647, rapporté parBasnage , que si les Propriétaires laissent en labourage le tiers des terres qui leur appartiennent, ils sont exempts de payer Dixme de leurs autres terres qu’ils ont changées en herbages ou prairies. Les terres semées en Sain-foin ne sont comprises en ce Réglement, la Dixme du Sain-foin étant ordinaire & solite, comme il a été jugé par un Arrêt du 9 Juillet 1675, rapporté parBasnage .8

La Dixme de la Laine & des Agneaux, se paye au Curé sur le Paroisse duquel la Bergerie est située ; encore que la principale habitation du Propriétaire, & que les terres sur lesquelles le troupeau pâture, soient dans l’étendue d’une autre Paroisse ; ce qui a été jugé par plusieurs Arrêts.9 Les Curés ont les Dixmes des Novales, des Verdages & des choses domestiques, à l’exclusion des gros Décimateurs, comme il a été jugé par plusieurs Arrêts. Par un Arrêt donné en l’Audience de la Grand’Chambre, le 10 d’Août 1650, rapporté parBasnage , les Dixmes inféodées ne doivent point contribuer au payement de la Portion congrue des Curés, quand les Dixmes Ecclé-siastiques sont suffisantes pour la payer. Voyez sur cette questionLouet , D. 8 & 60.10

Les Chevaliers de Malte sont exempts de payer Dixmes, à l’égard des terres qui sont de l’ancien domaine de leurs Commanderies ; soit qu’ils les fassent valoir par leurs mains, soit qu’ils les ayent baillées à ferme : leurs Fermiers même sont exempts de payer les Dixmes domestiques, par un Arrêt du 5 de Juillet 1530. Tous ces privilèges sont particuliers à cet Ordre ; car Cluny & Citeaux, qui ont l’exemption de payer les Dixmes, ne l’ont que lorsqu’ils font valoir par leurs mains ; De plus, les Chevaliers de Malte peuvent bailler en emphitéose, & retenir le droit de percevoir les Dixmes sur les héritages fieffés.

VoyezLouet , D. num. 57. Le Haut-Justicier ne connoît point des Dixmes : jugés par un Arrêt du 9 Janvier 1665. Tous ces Arrêts ci-dessus datés sont rapportés par Basnage sur cet Article De Patronage d’Eglise.

Il y en a un Chapitre, qui est le cinquieme de la Coutume. De Clameur de Loi apparente. Il y en a un Chapitre qui est le troisieme de la Coutume. De Clameur révocatoire.

La clameur révocatoire est une action pour faire rescinder un Contrat ; à cause de la lésion qui a été faite ; parce que la chose valloit plus que la moitié qu’elle n’a été vendue ; c’est pourquoi les Auteurs ont écrit, qu’elle étoit fondée sur un dol réel, qui consiste dans l’inégalité & disproportion du prix, dolus repsa ; pour le distinguer du dol pervonnel, qui procede du mauvais artifice d’un des contractans, par lequel artifice l’autre contractant a été surpris & déçu. Cette restitution est appuyée de l’autorité de la Loi 2 C. De rescinddenda venditione. Elle doit être intentée devant le Juge du défendeur, parce qu’elle est personnelle, ayant son origine d’un Contrat ; & sa conclusion étant contre la personne, elle est réputée être entre les biens du vendeur ; c’est pourquoi elle peut être intentée par ses créanciers. Elle a lieu contre l’acheteur & non contre le vendeur, sur qui on ne peut répéter une partie du prix, quelqu’excessif qu’il ait été. Elle n’a pas lieu dans les Baux à ferme ou emphitéotiques, ob incertum fructuum proventum ; jugé par un Arrêt du 26 de Juin 1667 : ni dans la vente des droits universels & successifs, ob incertum homen hoeredis ; nec enim tam res quam spes & alea emitur, ideoque hoeredis qualitas non est in pretio ; ni dans les ventes faites par décret, ob authoritatem Judiciorum & folemnitatem venditionis ; ni dans les Contrat d’échange, dans lesquels le supplément de prix ne peut être admis, un chacun des contractans n’ayant point voulu de prix ; c’est-à-dire, de l’argent ; mais une autre chose subrogée en la place de celle qu’il met hors de ses mains ; ce qui a été jugé par plusieurs Arrêts. VoyezCujas , lib. 16 observationum cap. 18,Louet , B. 14, 5, 7. & 10 & 11.11.

Ce qu’il faut limiter aux échanges pures ; car à l’égard de celles qui sont faites avec un supplément d’argent, que la Coutume appelle solde, on peut objecter qu’on a abusé de la nécessité en laquelle se trouvoit réduit celui qui a reçu le supplément, qui n’a contracté sous la forme la forme d’échange, que pour avoir de l’argent qui pût remédier à son besoin.

Le demandeur ne peut pas conclure à la restitution de la chose venduë, mais seulement au supplément de juste prix ; parce qu’il est à l’option de défendeur, de rendre ou retenir la chose en faisant le supplément. Quand on propose les moyens de la rescision d’un Contrat, cela s’appelle le rescindant ; & en tant qu’on demande l’effet de la rescision, comme le supplément du prix, ou d’être renvoyé en possession de la chose vendue, cela s’appelle le rescisoire. Il faut que la lésion soit plus de moitié du prix, dont le treizieme payé par l’acheteur est réputé faire partie. L’estimation qu’on doit faire de la chose, se doit faire par rapport au temps du Contrat, l. 8. C. De rescindenda venditione. Il faut intenter cette action dans les dix ans, à compter du jour de la vente, comme les autres qui tendent à la rescisiion des Contrats.

Des Priviléges Royaux.

On les peut appeller Cas Royaux, parce qu’ils font réservés à la Justice Royale ; d’autant que le Roi y a intérêt pour la conservation de ses droits domaniaux ou fiscaux ; ou pour maintenir son autorité dans la police générale, qui lui appartient dans toute l’étendue de son Royaume : VoyezLoyseau , chap. 24. des Seigneuries. Par une Ordonnance de Henri IV, le crime de Duel est déclaré un Cas Royal ; & sur ce fondement, la compétence en a été attribué au Juge Royal, à l’exclusion du Haut-Justicier, par un Arrêt du 17 de Juillet 1646, rapporté parBasnage . Voyez ce qui est remarqué sur l’Article XIII, à la fin. De nouvelle Dessaisine.

Il en est traité en l’Article L.

De Mariage encombré.

Il y en a un Chapitre qui est le vingt-unieme de la Coutume.

De Surdemande.

Il en est traité en l’Article LII.


1

Les comptes des Tresors & Fabriques doivent être rendus devant l’Archidiacre du Diocese ; mais les Instances sont portées devant le Juge séculier : Arrêt du Conseil des premier Avril 1600 & 12 Février 1627, cités parBérault , Edit du mois d’Avril 1695, Art. XVII.Duperray , observ. sur cet Edit.

Voyez, à l’égard de l’administration des Fabriques, plusieurs dispositions de l’Edit de Melun, de celui de 1606, un Arrêt du Conseil d’Etat du 2 Avril 1679, des Arrêts de ce Par-lement des 20 Juillet 1735, 8 Mars 1736, & 19 Décembre 1739, un Réglement du 26 Juillet 1751, un Arrêt postérieur, en interprétation de l’Article XVII du Réglement sur la distribution des Fondations.

Quand les contrats de Fondation ne déterminent pas la part qui en doit revenir à la Fabrique, il n’y a pas d’inconvénient de lui en accorder le tiers : Arrêt au rapport de M.

Guyot , du 30 Août 1761, dans le cas néanmoins d’une nécessité urgente, ou d’une évidente utilité ; car hors ces cas on ne déroge pas aux intentions présumées du Donateur : Edit de Melun.

On décidoit au Parlement de Paris, dès le commencement de ce siecle, que les Tresoriers & Fabriciens étoient tenus de faire la recette, tant des rentes dues aux Tresors qu’aux Obitiers : observ. deDuperray , sur l’Edit de 1695. On suit actuellement cette Jurisprudence en Normandie : Arrêts des 12 Juillet 1754 & 30 Août 1761. Les Tresoriers, pour plaider sur le fait du recouvrement des revenus des Fondations, n’ont point besoin de l’autorisation du Commissaire départi ; cet embarras anéantiroit le peu de zele & d’activité qu’ils ont à suivre les affaires de cette nature : Arrêts des 13 Décembre 1737 & 15 Février 1760.

On tente d’assujettir les simples Gentilshommes aux sonctions de Marguillier comptable, ainsi que certains Officiers ; ces fonctions seroient peut-être mieux remplies par de notables Bourgeois & de bons Propriétaires : C’est le voeu du Concile de Vienne, pour l’administration des Hôpitaux, & la décision de l’Art. I de l’Ordonnance de 1561, & de l’Art. LXV de l’Ordonnance de Blois.


2

La Dixme, dans sa définition véritable, est une portion des fruits de la terre que payent, sous ce Titre, les cultivateurs, mieux déterminées, à tous égards, par l’usage que par tout autre Réglement.

Les Canonistes ont combattu, avec des armes assez foibles, les Dixmes inféodées ; ils ont supposé que les Dixmes sont dûes à l’Eglise de Droit divin ; & pour embrasser un foible nuage, ils ont essayé de confondre les temps & les époques. Pasquier a fort bien remarqué l’erreur commune qui impute à Charles Martel l’origine des Dixmes inféodées ; aucuns des Auteurs contemporains, même de ceux qui ont le moins épargné ce Prince, n’ont rapporté ce fait ; ils n’auroient pu, sans pudeur, le placer dans un siècle où dans tout l’Occident la prestation de la Dixme n’étoit tout au plus que de Conseil. Cependant les Jurisconsultes se sont laissé ébranler, ils ont cru gagner des avantages en réfutant quelques opinions accréditées par l’ignorance de nos peres. En vain Philippe IV revendiqua son autorité contre la décision du Concile de Latran ; il faut encore aujourd’hui, pour s’éjouir des Dixmes inféodées, joindre à la possession un Titre déclaratif, ou prouver une possession centenaire. L’Edit du mois d’Avril 1695, en les assujetissant subsidiairement à la portion congrue des Curés, s’est écarté de l’esprit de la Déclaration de Philippe IV. Trente ans auparavant le Parlement de Normandie les en avoit affranchies, son Arrêt étoit conforme aux regles ; dès que, suivant la Philippine, les Dixmes inféodées sont des biens profanes, elles ne sont pas plus affectées à la subsistance du Curé que les autres fonds de la Paroisse.


3

On a essayé plusieurs fois, & en différens temps, de contraindre les Habitans de payer la Dixme à la onzieme partie de la Récolte des gros fruits, s’ils n’entreprenoient la preuve contraire ; mais pourquoi charger les Habitans seuls de l’embarras de la preuve ? Suivant l’esprit & la lettre de nos Loix, la Dixme doit être payée à la maniere accoutumée ; l’Habitant est donc aussi favorable que le Décimateur : Ordonnance de Blois, Art. L, Edit de l’an 1579, Art. XXIX.


4

L’Edit du mois de Décembre 1606, maintient les Ecclésiastiques, qui ont Titre & possession, dans la perception de la Dixme du prix de la vente des Bois de haute-fûtaie : le Chapitre de Mortain la perçoit sur les ventes de la Forêt de Lande pourie, qui appartient à M. le Duc d’Orléans ; mais hors le cas d’exception porté par l’Edit, il est toujours de maxime que le Bois de haute-fûtaie ne doit pas de Dixme. Les Religieux de Jumieges ont, sur ce sujet, fait reparoître, avec beaucoup de chaleur, les anciennes Contestations ; l’entreprise a été proscrite par Arrêt du 9 Mars 1729. Heureux échec ! s’il parvient à contenir les gens de Main morte.


5

Des Décimateurs se sont imaginés être dans le droit de percevoir la Dixme du Cercle, au lieu du Gaulage, en contribuant à la main-d’oeuvre ; cette idée a été proscrite par Arrêt du 27 Juin 1749 ; la Dixme se leve sur les productions de la nature, telles qu’elles sortent de ses mains.

La Dixmes des Jones-marins est dûe lorsque le Propriétaire les vend, ou les échange avec de la Chaux, si les terres ont été labourées par & depuis le temps de droit : Arrêts des 14 Juillet 1735, & 17 Août 1745.


6

Les Pépinieres ne sont sujettes à la Dixme que quand elles sont excrues sur des fonds qui ont payé Dixme par & depuis quarante ans, & sur les arbres vendus pour être transplantés hors la Paroisse ; ces conditions doivent concourir pour rendre les Pépinieres décimables : Arrêt en Réglement du 4 Mars 1763.


7

La Dixme des Légumes sur les dosages, quand le Décimateur a la possession, se paye par estimation en deniers, soit de gré à gré ou par experts : Arrêts des 17 Juillet 1722 & 11 Mars 1757. Je trouve singulier qu’on tolere l’usage de lever cette Dixme dans les canton soù les autres fruits sujets à Dixme sont considérables.


8

La Cour, par Arrêt du 16 Juillet 1749, a adopté la maxime générale proposée par Pesnelle ; les Terres labourables, converties en Herbages depuis 40 ans, sont décimables, quoique le Propriétaire laboure plus du tiers de ses héritages ; l’utilité respective du Décimateur & de l’Habitant, semble comporter qu’il soit permis à ce dernier de convertir quelque portion de ses Terres en Prairies, dans les Lieux où les Pâturages sont rares. Si cependant dans un corps de ferme il ne se trouvoit qu’une portion de terre labourable, sous une Paroisse différente de celle de la principale habitation, on payeroit la Dixme de cette portion convertie en Herbage ou en Pré : Arrêt en 1758, au rapport de M. de Neuvillette. Régulierement le Sain-foin n’est considéré comme Dixme solite, que quand il est semé dans des terres précédemment labourées : coupé en verd, il n’est point décimable, même en vertu de la possession : Arrêt du 29 Mai 1727 ; & s’il est coupé dans sa maturité, il faut une possession de quarante ans pour y prétendre dixme sur des terres qui n’ont point auparavant porté de fruits décimables.


9

La prestation en argent d’une redevance dûe en espece, quelque longue qu’elle ait été, paroît conserver au Créancier la liberté de l’exiger, conformément au Titre, s’il n’y a d’autre dérogation particuliere : ainsi l’opinion, qui tend à autoriser le Décimateur à percevoir en essence la Dixme des Laines & Agneaux, nonobsyant l’usage con-traire, a été long-temps accréditée ; mais enfin on a reconnu l’erreur dans l’application du principe, & on a jugé le 21 Mars 1765, au rapport de M. d’Hattanville, que l’usage d’une Paroisse de payer cette espece de Dixme en argent ne fait pas présumer de Droit qu’elle a été autrefois payée en essence, le Décimateur doit justifier du fait ou s’arrêter à la prestation en argent. La tranquillité du Cultivateur exige que cette Jurisprudence ne varie pas : au reste cette sorte de Dixme se regle, par la possession, sur le plus grand nombre des Habitans.


10

Comme la qualité de grosse Dixme s’induit de la consommation de certaines especes de grains ou de fruits dans un Canton plutôt que dans un autre, la Dixme de Sarrasin fera grosse Dixme, si ce grain sert à la nourriture de l’Habitant, & s’il y emploie une portion notable de ses terres ; d’où l’on peut conclure que cette Dixme est dûe, quoiqu’elle n’ait jamais été exigée, quand le produit de la Dixme est beaucoup diminué par ce nouveau genre de culture.Bérault , panche vers l’exemption, fondé sur l’Ordonnance de Philippe IV, de l’an 1303, sur l’Article L de l’Ordonnance de Blois & l’Arrêt de Sigy.

Quand les gros Décimateurs reclament cette Dixme, les Curés se cantonnent dans leur possession quadragénaire ; mais ils doivent prendre garde de ne pas s’étayer d’une possession inutile ou vicieuse, comme d’une possession précaire, ou évidemment contraire à leurs Titres. L’Arrêt, en faveur du Chapelain de Proussi, rapporté par Routier, Pratique Bénéficiales, multiplie les questions de fait. Il me semble que pour adjuger la Dixme de Sarrasin au Curé on ne doit considérer qu’une possession valable ; on examine inutilement si le Sarrasin est une récolte de conséquence dans une Paroisse, si la Dixme qu’on en perçoit est grosse ou verte Dixme. Je dirois, que tel est l’esprit d’un Arrêt rendu en Grand’Chambre le 12 Juillet 1759, au rapport de M. d’Equaquelon, contre les Religieux de Belle-Etoile, au profit du Curé de Flers ; mais on m’opposeroit que les Religieux n’avoient précisément articulé qu’en cause d’appel, & presqu’à la veille du jugement des faits pour prouver que la récolte du Sarrasin étoit à Flers une récolte très considérable. Quoiqu’il en soit, l’opinion que j’avance est conforme à l’équité, & tend à maintenir la paix entre le Curé & le Décimateur étranger.

Etendez, aux terres Novales, les fonds de terre qui n’ont point été cultivés depuis un temps immémorial, quoique l’on y remarque des traces de sillons ; car cette impression ne justifie point qu’une terre ait été labourée, on desire des témoignages plus certains, Prat. de Routier, Arrêt du 11 Janvier 1753.

Quand le Cultivateur cesse, sous quarante ans, de cultiver une terre Novale, elle cesse aussi d’être décimable, en prouvant la qualité de la terre : Arrêt du 10 Mai 1742. Si une terre, pour avoir labouré, étoit aussi-tôt assujettie, sans retour, à la Dixme, les progrès de l’amélioration souffriroient une atteinte. Le Cultivateur, craignant de gréver ses fonds d’une servitude aussi onéreuse, ne tenteroit point ses essais avec les mêmes espérances. Le Roi, dans la même vue d’encourager l’Agriculture, a exempté, par sa Déclaration du 13 Août 1766, les terres, nouvellement défrichées, de la prestation de la Dixme pendant le temps déterminé par cette Loi, en se conformant aux formes qu’elle prescrit.

Plusieurs ordres Religieux ont le privilége de percevoir, dans les lieux où ils sont gros Décimateurs, la Dixme des Novales que les Cures n’ont point perçue par quarante ans.

Une Déclaration du 28 Août 1759, a terminé, d’après ce principe, des Procès immortels entre les gros Décimateurs & les Curés.

Régulierement le domaine des Cures est exempt de la Dixme, & quand les Privilégiés sont des aliénations de leur fonds, la Dixme en appartient au Curé.Bérault .

Quand deux Décimateurs contestent sur le fonds de la Dixme, on décide sur le mérite des Titres, ou sur une possession quadragénaire bien justifiée : Arrêt du 17 Avril 1739.

Observés dans cette matiere que l’art si compliqué, & réduit depuis bien des siecles en principe, de s’agiter par des procès, a rendu si obscure quelques notions générales propres à en arrêter le cours. Dans le doute, déterminez-vous en faveur du Cultivateur qui supporte les charges publiques plutôt qu’en faveur du Curé ; décidez dans le doute pour le Curé à cause de la sollicitude pastorale contre le Décimateur étranger ; comparez, dans l’examen des Titres de ce dernier, les actes qu’il représente avec les actes autentiques du même temps ; renfermez-les dans leurs bornes ; discutez les transactions, dont la plùpart sont simoniaques ou confidenciaires ; donnez à la possession du Curé toute la force que nos Loix peuvent lui accorder ; recevez, avec beaucoup de réserve, les demandes en subrogation, soit qu’elles soient formées par le Curé ou un autre Décimateur, cette Jurisprudence fait naître la plùpart des contestations : le quod decimatum, semper decimandum, doit être entendu sainement. N’oublions jamais l’Ordonnance de 1303, que le Clergé a toujours attaquée, qu’il attaque, & qu’il attaquera sans cesse, parce que cette Loi est le bouclier du Cultivateur.

Sur les obligations d’avertir & réavertir le Décimateur, avant aucun enlevement ou pendant le cours de la récolte, la maniere de percevoir la Dixme des Fruits naturels, celle des

Sarrasins, des Chanvres & Lins, le lieu où les Dixmes doivent être répostées, le prix auquel il convient de vendre les pailles du froment & autres grains aux Paroissiens, le partage des Dixmes entre les Décimateurs & le Curé de la Paroisse, les caracteres d’un abonnement légitime, les cas où les Dixme arreragent. VoyezBasnage ,Forget ,Vanespen , le Maire, Perray deHéricourt , du Perray, Joai, Routier.

Voyez, sur les Portions congrues, qui sont une Charge des Dixmes, l’Edit de Charles IX, du mois d’Avril 1571, Art. IX ; l’Ordonnance du mois de Janvier 1629, Art. XIII ; une Déclaration du 18 Décembre 1634 ; celles des 29 Janvier 1686, 30 Juin 1690, 30 Juillet 1710, & 15 Janvier 1731 ; & l’Edit du mois de Mai 1768, qui, prenant en considération l’agumentation survenue dans le prix des denrées de premiere nécessité, fixe la Portion congrue du Curé à 500 liv. & celle du Vicaire à 200. Remarquez que le voeu des Parlemens est que la pension des Vicaires soit portée à 250 liv. & les Vicaires l’exigent de fait, ce qui gêne beaucoup les Curés portionnaires. Voyez le Traité des Portions congrues.


11

Bérault , sous cet Article, que l’Action en clameur révocatoire, tendante à recouvrer un héritage, qui n’est point assecté aux dettes de l’Acquereur, dépossédé par le défaut de supplément de prix, est plus réelle que personnelle ; & que l’estimation, pour constater la vilité du prix, se fait convenablement devant le Juge de la situation du Fonds.

L’estimation se regle sur le pied de la valeur intrinseque de l’Héritage, les Boix & les autres accessoires entrent en considération ; la Cour a quelquefois porté le scrupule jusqu’à ordonner que les Experts seroient entendus en genre de témoins : Arrêt du 13 Avril 1617, cité parBérault .

Bérault prétend qu’en matiere de Clameur révocatoire, les édifices, élevés sur Héritage, doivent être séparément ; la question a dû être ainsi jugée par Arrêt du 3 Mars 1608. J’employerois cependant une distinction, s’il y a sur le fonds vendu des Bâtimens de conséquence, & destinés à l’usage d’un riche Propriétaire. J’appliquerois à ce cas le décision de l’Arrêt ; mais s’agit-il de simples Bâtimens de premiere nécessité, uniquement propres à l’exploitation de l’Héritage, trop de rigueur dans l’estimation seroit déplacée & injuste.

Le temps de la vente regle l’estimation ; on ne compte pour rien l’augmentation survenue, dans la valeur des Fonds, depuis le Contrat, car l’Acquereur auroit supporté la perte dans l’événement contraire ; il es donc juste qu’il prosite du gain. Après avoir balancé long-temps la question, la Clameur révocatoire a été enfin admise dans les Baux à fieffe, par Arrêts des 14 Mars 1749 & 13 Mars 1758 ; le contraire avoit été jugé par Arrêt du 26 Avril 1667, cité parBasnage . Quand il y a une disproportion d’outre moitié, entre la Rente de fieffe & les revenus des Fonds fieffés, on présume facilement qu’il est entré dans l’Acte du dol personnel, joint à la perte effective que souffre le Fieffant ; l’avanatge de la sûreté, contre les cas fortuits, ne balance pas les torts causés par un pareil retranchement du produit des Héritages ; d’ailleurs, les Contrats de fieffe & de vente ont entr’eux beaucoup de rapport d’analogie. Voyez la Consultation 14 deDuPineau , sur la Rescision pour lezion dans les Fieffes.