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LXXXVIII.

a chacune des trois Assises, défaut doit être pris sur les Lignagers. & Parens du Défunt, qui ne se portent Héritiers absolus ; & aprés le dernier desdits trois défauts, sera encore fait une Criée d’abondant & Assignation aux autres Assises ensuivant, avec déclaration que si aucun ne se présente, le Bénéfice d’Inventaire sera adjugé.

Le domicile où le défunt est réputé décédé, & auquel il faut faire la perquisition ordonnée par la Coûtume, est le lieu où le défunt faisoit sa princi-pale résidence, avec ses domestiques, femme, enfans & serviteurs : Uhi negotia agit, ubi vendit, ubi contrahit, ubi dies festos celebrat : Ibi magis domici-lium habere censerur, quam ubi colendi causâ diversaiur, suivant qu’il est dit dans la Loi 27. S. 1. ff. Ad municipalem1. Au reste, la précaution plus nécessaire

pour éviter les inconvéniens & les abus d’une acceptation d’hérédité par bénéfice d’Inventaire, étoit d’obliger le prétendant à ce bénéfice, de faire sceller incontinent aprés le déces, de mettre les meubles, effets & écritures dela succession en fûre garde, & de faire enfuite un bon & loyal Inventaire en la préserce de personnes publiques & intéressées, tels que sont les Notaires & les Créanciers, suivant qu’il avoit été prudemment disposé par l’Artiele CXXVIII de l’Ordonnance de 1629. : ce que la Coutume a omis d’ordonner, s’étant contentée de dire dans l’Article XCII, que l’héritier bénéficiaire doit, dans les quarante jours du déces, faire faire un Inventaire : ce qui ne s’observe pas à la rigueur, le bénéfice d’Inventaire s’accordant à celui qui le veut requérir long-temps aprés l’échéance de la succession, quand elle est demeurée abandonnée & jacente2. Les quatre Criées que la Coûtume prescrit devoir être faites à l’issuc des grandes Messes paroissiales, aux jours de Dimanche aussi-bien que les défauts qu’on prend aux Assises, contre les parens du défunt capables de succéder ; c’est-à-dire, jusqu’au septieme degré inclusivement, sont des formalités requises nécessairemont, mais inutilement, & qui se font avce des frais aux dépens des Créanciers. Il semble qu’il auroit été plus à propos de donner un temps compérent comme d’un an, aux parens pour se déclarer héritiers absolus, aprés l’entérinement fait en fustice des Lettres. de Benéfice d’Inventaire : Ce qui se pratique à Paris, en exécution de plusieurs Arrêts, conformes à plusieurs Coûtumes, qui ont exclu les héritiers absolus apres l’an, comme il est rapporté dans le Commentaire deLouet , H. 1. Mais d’autant que les enfans ou descendans d’un défunt, ne peuvent être exclus de la succession quoiqu’ils ne la veuillent aecepter qu’en vereu des Lettres de Bénéfice d’Inventaire ; il paroit qu’il est inutile de faire des recherches & des proclamations. pour découvrir si quelques parens veulent se déclarer héritiers, absulus ; de sorte qu’en ce cas, sans observer tant de formalités, le Juge devroit, envoyer les Impétrans des Lettres en possession de l’hérédité, à la charge d’accomplir. ce qui est prescrit par la Coûtume, aux héritiers bénéficiaires.3

Il faut remarquer, que celui à qui le Bénéfice d’Inventaire a été adjugé sur des diligences mal faites, peut bien être débouté de l’effet dudit Benéfice ; mais il ne sera pas en conséquence réputé héritier absolu, pour être obligé à toutes les detes, à moins qu’il n’eût commis de la fraude dans la confection de l’Inrentaire, ou dans l’estimation, appréciation ou vente des biens de la succession


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Quand le Defunt avoit deux Domiciles où il faisoit un séjour égal, les diligences du énéfice sont valablement solemnisées dans la Jurisdiction où il est decédéLes Glossateurs ont embarrassé les questions sur le domicile d’une foule de distinctions. & de subrilités ; le lieu où nous avons commencé de reipirer est sans doute, cher à nos coeeurs, c’est la où sont ordinairement les monumens des vertus de nos peres, où reposent leurs cendres, où vivent nos proches, nos amis, ceux avec qui nous avons partagé les amusemens de l’enfance ; mais des emplois, des acquisitions, le noeud d’un mariage dans une autre Contrée, peignent bien un Domicile dont les caracteres ne peuvent être détruits par des circonstances équivoques ; ce n’est pas qu’un homme, hors le cas de célée bration du mariage, n’ait la liberté, dans un seul jour, de faire la conquête d’un Domicile nouveau, pourvu que les preuves en soient incontestables. Vuyer les Observations de M. de la Bigotière, sur l’Art. CCCCLXXV de Bretagne ; d’Argentré, ibid. Journal du Palais, sur un partage dans la maison de Rohan ;Cochin , tome 8 3 & 5. Voici le sommaire des notions générales que ces Auteurs donnent : ce Domicile se constitue par l’habitation réelle, & par la volonté de le fixer dans le lieu qu’on habite ; la volonté suffit pour le conserver, elle ne suffit pas pour le perdre ; ceux qui ne sont pas maîtres de leur volonté, ne sont pas maîtres de se choisir un Domicile ; on connoit le Domicile par des preuves de fait & des conjoctures de la volonté ; quand la volonté paroit évidemment contraire aux présomptions, elles doixent être ecartées.

On a introduit les Domiciles de ficton, par exemple, celui du Seigneur de fief au principal manoir de la Seigneurie, du Bénéficier au lieu de son Benéfice, du Titulaire d’un Office dans la ville où il en exerce les fonctions ; mais ces Domiciles fictifs n’operent seuls que pour le Fief, le Bénéfice ou les fonctions de l’Office ; il y a un Domicile cox tractuel pour l’exécution d’un Acte, il ne change rien parmi nous dans l’ordre des Jurisdictions qui sont patrimoniales ; on connoit enfin un Domicile d’élection chez un Procureur, dans le lieu ou se fait une Saisie mobiliaire, dans la Ville de l’établissement de la Jurisdiction où l’on poursuit un Décret : cette demiere efpèce de Domicile n’a été introduite que pour faciliter l’abrévintion des Proces.


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Suivant l’ancien style de procéder, cité parBérault , il doit s’écouler 4o jours entiere depuis la premiere Criée jusqu’au premier Défaut ; & on peut, dit-il, ajourner les Héritiers à la seconde Assise, quoiqu’elle soit éfoignée de plus de 4o jours, lorsque de la Criée à la première Assise les do jours ne sont pas complets


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Bérault a observé que lorsqu’une succession est peu considérable, & qu’il est vraisemblable qu’elle fera absorbée par les frais quiexige l’entérinement du Benéfice d’Imentaire, l’équité & la justice prescrivent que l’on rétranche une partie des solemnités ordinaires, il cite l’autorite deBarthole , & la décision dePirrhus , sur la Coutume d’Orléans, Titre des Successions, chap. 18.

La Jurisprudence est maintenant d’accord avec le sentiment de Pesnelle : l’Impétrant des Lettres de Benéfice d’Inventaire en ligne directe est dispensé de faire les perquisitions. & les Criées prescrites par la Coutume ; la premiere trace que nous ayons de cette sage Jurisprudence, se remarque dans un Arrét sur Requête du S Juillet 1729. On avoit fait un premier pas vers l’équité en adoptant l’Art. CCexIIl de la Coutume de Paris ; mais les plus grands hommes ont besoin de réflexion pour être conséquents.