Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.


CXVII.

Le seigneur ne peut prescrire les Héritages saisis en sa main, ains est tenu de les rendre au Vassal ou ses Hoirs, toutes les fois qu’ils se présenteront, en faisant leurs devoirs.

La jouissance qu’a le Seigneur en vertu de la réunion, qui lui est adjugée enconsequence de sa saisie, ne lui attribuant pas une véritable & parfaite posses-sion : Cûm sit potiûs in possessione, quam possessor ; il ne peut prescrire par quelque temps que ce soit : car il ne peut jamais changer la cause en vertu de-laquelle il a commencé à jouir : Cûm nemo nullû extrinsecus accedente causâ, possessionis causam sibi mutare possit, l. S. C. De acqutrenda possessione, l. 8..

S. 29. ff. eodem. Il a été jugé que le Seigneur poursuivi pour la restitution de l’héritage prétendu avoir été réuni, étoit obligé de représenter le Registre de sesPleds & Gage-Pleges, par un Arrêt du 15 Mars 1661, rapporté parBasnage .

Que si le Seigneur a possédé pendant quarante ans l’héritage de son Vassal, par un autre principe que celui de la reunion, cette possession lui peut valoir de titre pour la propriété aux termes de l’Article DXXI. Par une raison semblable, le Vassal qui aura possédé pendant quarante ans le Fief du Seigneur, le pourra avoir acquis par preseription, & conséquemment par ce moyenindirect, il aura prescrit l’obligation de la foi & hommage.1

Il faut remarquer que pour obtenir la main-levée de l’héritage réuni, il ne suffit pas de se présenter pour faire les foi & hommage, ou de bailler un Aveu 3 il faut de plus faire cesser toutes les causes qui ont donné lieu à la réunion ; c’est-à-dire, qu’il faut payer les reliefs & treiziemes, & les rentes, & mêmes les frais, comme il fe peut inférer de l’Article Cxx, ce qui a été jugé par un Arrêt du 23 de Mars 1543, comme Bérault l’a remarqué.

Ce même Auteur rapporte deux Arrêts, par lesquels il a été jugé, que le-

Bailleur à fieffe avoit pu prendre la possession de l’héritage fieffé, en exécution de la clause par laquelle il avoit été stipulé, qu’il pourroit le faire sans fommation précédente, ou autre formalité de Proces, au cas que le preneur eût été défaillant de payer pendant trois ans la rente du Bail d’héritage, quoique par un usage du Droit coutumier, les clauses commissoires ne s’exécutent point sans Ordonnance de Juge. Les Mineurs ni l’Eglise ne sont point exceptés de cette rigueur : Voyez la Loi 38. ff. De Minoribus, & la Loi 135. 8. scia, f. De verborum obligaiionibus. Si le Prelat ou Mari apres le temps de la commise, reçoivent le payement des arrérages de la rente fonciere, bien qu’ils eussent un droit acquis pour rentrer en possession de la fieffe, cette renonciation tacite à l’execution de la clause commissoire, préjudicie au Successeur du Benéficier & à la Femme, qui ne peuvent plus prétendre au droit & à la peine de la commise.2


1

Feudum prehensum, dit duMoulin , S. 22, n. 148, remanet penes Vassalum quantam ad utile dominium, 8 ejus dispositionem, quantum autem ad fructus est in manu Patront qui non insistit feudo tanquam suo, sed tanquam alieno, ad instar creditoris hypothecant possidentis donec solvatur qui prescribere non potest, secus si mutasset sibi causam possessionis & pro suo possedisset. Quoique le Seigneur ne puisse prescrire les héritages de son Vassal qu’il tient à titre de réunion, si cependant un tiers en a joui par do ans à titre particulier, en a acquis la propriété, & il ne reste au Vassal qu’une Action en dommages & intérête contre le Seigneur ; à moins qu’il ne justifie que l’Acquereur au temps du Contrat, nignoroit pas le titre de la détention du Seigneur ; car sa possession même, plus que qua-dragénaire, ne seroit d’aucune considération.


2

La Jurisprudence des Arrêts rapportés parBérault , & dont Pesnelle fait mention, cessé depuis long-temps d’être en usage. Les clauses commissoires employées dans les Contrats de Fieffe n’ont point d’exécution sans formalités de Justice ; l’intéret du Fieffataire seroit alors non-seulement compromis, mais ses Créanciers courroient un risque contraire à la bonne foi, souvent par les impenses & soins du Fieffataire la valeur du Fonds fiefsé s’accroit : cet accroissement facilite les emprunts, & par le retard du payement des arrérages, dans un moment imprévu, les hypotheques s’évanoairoient : Arrét du 13 Mars 1760.

Le Contrat de Fieffe est susceptible de toute stipulation, de même que les autres Contrats commutatifs ; on stipule utilement que le Fieffataire ne pourra vendre ou rétroceder tout ou partia des Fonds fieffes, sans le consentement du Fieffant : cette clause doit être exécutée ; & le tiers Acquereur, qui n’a pas pris la précaution de faire intervenir le Fieffant dans l’Acte de vente, peut être dépossédé : Arrêt du 18 Mars 1757 On stipule utilement sur des risques ou diminutions à venir ; ainsi le dixieme denier ne se déduit pas sur une Rente de Fieffe, stipulée payable en exemption de toutes charges prevues & imprévues : Arrêt du 21 Mai1744. On a jugé la même chose par Arrét au rap-port de M. de S. Gervais, du ro Juillet 17ûr, dans ie fait de ce dernier Arrêt, le Fieffant avoit stipulé en 1715, que la Rente lui seroit payée nette & quitte Quoique le temps de la commise, déterminé par le Contrat, ne soit pas encore échu si par le défaut des réparations le Bailleur à Fieffe voit sa Rente en peril, comme s’il est question d’une Rente sur unMoulin , dont les réparations sont négligees, il peut demander la résolution de la Fieffe : Arrêt du 9 Juin 1750. On cite un pareil Arrêt rendu au rapport de M. de Breauté, le 2o Août 175y, dans le fait de cet Arrêt, le Fieffataire ne s’étoit pas borné à négliger les réparations sur les Batimens, il avoit encore détérioré les Fonds fieffes Lorsqu’en vertu d’une clause de son Contrat, le Fieffant est rentré dans la possession de ses fonds, la clause, suivant nos maximes, est consommée ; le Preneur à Fieffe cu les Créanciers essayeroient en vain de purger sa contumace ; il y a moins de probleme lorsa le Créancier a été réintégré dans la possession de son fonds, par une Sentence qu’il a execurce car le débiteur est combattu par deux fins de non recevoir, l’une tirée du Contrat qui fait la Loi des Parties, & l’autre de l’Ordonnance : Arrêt du 4’Avril 1748. On a même jufié, par Arrét du ro Mai 176d, qu’aprés une Sentence d’envoi en possession obtenue par le Fieffant contre le Fieffataire, & un Proces-verbal de prise de possession, le tiers Acquereur qui n’avoit été appellé ni à la Sentence ni au Proces-verbal, n’étoit pas recevable à s’opposer à l’exécution de la prise de possession du Fieffant, nonobstant le remboursement & les Sûretés qu’il avoit pu offrir. Il est vrai qu’il y avoit, dans cette espèce, un intervalle assez considérable entre la derniere procédure du Fieffant & l’opposition formée par l’Acquereur, & que le Fieffant avoit déja disposé des fonds.

Cependant, hors ces cas, il est pénéralement vrai que non-seulement l’Acquereur du Fieffataire, mais ses Créanciers, ont le droit de purger sa contumace : Et par Arrêt rendu le 21 Mai 1733, au rapport de M. l’Abbé de Canappeville, on a maintenu un Créanciec subrogé du Fieffataire, dans la jouissance des Fonds fieffés à son debiteur malgré l’opposition formée par le Fieffant, qui, par le défaut de payement des arrérages depuis un grand nombre d’années, & à cause du mauvais état des Bâtimens, concluoit à l’envoi en possession ; le Créancier avoit offert à limine litis les arrérages de la Rente, & des assurances fuffisantes pour la réfection des Bâtimens assis sur les fonds

Quand le Créancier de la Rente de Fieffe rentre dans son fonds par in Traité qui renferme une somme de deniers ou une libération, qui est une numération civil, le sonds reste hypothéqué aux Créanciers du Fieffataire, & est clamable.

C’est une maxime triviale que lorsque, par une force majoure, le Fieffataire est dépouillé des fonds fieffes ou de la meilleure portion, le Contrat est résolu : Arrêt du 20 Iuin 1755.

Observez que dans cette espèce, le Fieffataire avoit obligé, pour la Sureté de la Rente, tous ses biens par générale hypotheque ; mais le fonds pris à Fieffe avoit été entièrement absorbé pour faire un grand chemin.