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CCIX.

Roteurs ne peuvent être faits en eau courante ; & si aucun veut détourner eau pour en faire, il doit vuider l’eau dudit Roteur, ensorte que l’eau d’icelui Roteur ne puisse retourner au cours de la Riviere.

Ces Articles ne se doivent entendre que des petites Rivières ; car les navigables sont d’un droit publie, & sur lesquelles les particuliers ne peuvent rien vinnover, non plus que sur les grands chemins. Mais quoiqu’il semble que la Coûtume attribue la propriété des Rivieres au Seigneur, quand les deux rives font en son Fief, en lui permettant d’en détourner l’eau tant qu’elle coule le long. de sa Terte ; il ne peut pas néanmoins rien faire qui soit au dommage d’autrui, comme il est dit dans l’Article CCVI, & qu’il est prouvé par l’exemple des trois Articles suivans. le, fondement de ces décisions est, que l’usage des caux courantes est d’un droit public & commun à tous les hommes : Quid prohibetis aquas Usus est communis aquarum.1


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Le Seigneur des deux Rives est presumé Propriétaire de la Riviere qui n’est point navigable ; la propriété s’établit par la situation de la source de la Riviere qui est sur nos Terres, la concession du Prince, d’anciens Aveux, ou une possession immémoriale.Basnage .

Sur l’état des Fleuves & Rivieres, voyezBouteiller , Boyer, Cliopin, leBret , Bacquet des Droits de Justice, Chap. 30 ; Néron, tome 2.

Quoiqu’une source faillisse sur le fonds du Vassal, il n’en peut pas changer arbitrairement le cours à la sortie de ses fonds ; ces changemens pourroient faire naître de la confusion dans la perception des Droits féodaux, l’inconvénient seroit plus notable, si, par la nouvelle direction du Vassal, l’eau, qui se confondoit dans le bieu du Seigneur venoit à se perdre dans les Terres. PariArrét du IS. Juillet 175s, il a été jugé que le Seigneur Propriétaire des deux Rives. d’une petite Riviere qui couloit dans son Fief, pouvoit, au prejudice du Propriétaire des Moulins au dessous, l’arrêter par un batard. d’eau depuis le Soleil couchant du Samedi jusqu’au lendemain à pareille heure.

La Chambre de Réformation a rendu un Arrét intéressant le 2 Juillet 168y, dont je vais rendre compte des principales dispositions. Les Riverains de la Riviere d’Iton, qui coule du Becquet à Breteuil, y sont condamnés de réparer les chaussées de cette Riviere, & de les tenir en tel état de hauteur & de largeur, que l’eau ne puisse se perdre : il leur est ordonné de faire couper les bois, racines & herbes qui en peuvent retarder le cours & boucher les rigoles qu’ils ont le long de la Rivière : ce Réglement leur tolere une rigole par quarante toises de longueur, mais chacune ne doit prendre que six pouces d’eau, tant en hauteur que largeur ; elles ne peuvent être ouvertes pour arroser les Prairies, que depuis le quinze Mars jusqu’au jour S. Jean de chaque année, & seulement le Samedi depuis cinc heures du soir jusqu’au Dimanche suivant à pareille heure. Il a été jugé à peu prés dans les mêmes termes, par Arrêt rendu au rapport de M. de S. Just, le a Juillet 173s, au sujet d’une Riviere pres Argentan. L’objet de ces sages réglemens est de donner un moyen aux Propriétaires des Prairies de les rendre fertiles, & de conserver le droit des Propriétaires des Moulins qui souffriroient un dommage notable, occasionné par la multiplicité des rigoles sur-tout dans la saison de l’été. Voyex Mornac de Molendinis.

Le bieu ou bief d’un Moulin est un canal qui, de droit, appartient au Propriétaire du Moulin, ainsi nul n’y peut faire de saignée, ou détourner les eaux, pour arroser ses héritages.

Les Articles CCVII & CCVIII renferment avec assez de probabilité des appartenances de Fief ; car il pourroit arriver qu’un Vassal tenant roturierement, par la connivence des gens d’affaires d’un Seigneur, dépréciât considérablement sos Moulins, ses Etangs, par des Fosses & Ecluses, ou le privât de ces cascades, de ces napes & jets-d’eau, qui font une déco-ration dans une maison de campagne : ce qui n’est pas équitable. l’oyes Duret sur Orléens, Art. CLxx, d’Argentré , sur Bretagne, 2by ;Gousset , sur Chaumont, Art. Cûl ;Coquille , sur Nivernois, Tit. des Eaux, Rivieres & Etangs, Art. IV. Mais sans adopter cette opinion, qui ne paroit pas se rapprocher assez du Texte, on pourroit fixer le terme d’ancien-neté à une possession immémoriale ; cependant on s’arrête aux Articles & & Xl de la Chiarte Normande, qui ne desirent qu’une possession de 40 ans. On pourroit encore dire que la faculté portée dans l’Art. CCVIII, se borne à faire un amas ou assemblage d’eau paur le ménage, ou pour abreuver les bestiaux ; car l’Ecluse n’est rien autre chose, suivant du Cange congregatio aquarum : elle differe de l’Effeau construit peur tirer l’eau d’une Riviere & la conduire dans une Prairie ; sous ces aspect, les Fossés ou Ecluses deviennent plus tolérables ils sont quelquefois de nécefsité. Consultez l’ancien Coûtumier, chap. 10.

Les Rotoirs dans les Rivieres sont tres-préjudiciables, la Cour s’éleve de temps en temps eontre cet abus, mais inutilement : les Meuniers font trafic des Rotoirs, ce qui fait perir la poisson.