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CCX.

Nul ne peut faire construire de nouveau Pêcherie ouMoulin , si les deux rives de la Riviere ne sont assises en son Fief.

Par l’Article CLx, les Moulins sont mis entre les appartenances de Fief. Il faut donc avoir un Fief pour pouvoir avoir unMoulin , soit à éau, soit à vent : mais les Seigneurs de Fief ne peuvent pas être empèchés d’en bâtir, quelque préjudice & diminution qui arrive aux Moulins voisins ; ce qu’il faut entendre, avec la limitation de l’Article CCVI, pourvu que cela se fasse sans dommage d’autrui : car si les Moulins faisoient déborder la Riviere, & inonder les terres des voisins, ils pourroient être contraines de les démolir-Or il y a des Moulins bannaux & d’autres qui ne le sont pas ; ce qu’il faut aussi dire des Fours. Ce droit de bannalité ne fe peut prescrire, parce que c’est une servitude ; il faut donc un titre valable pour l’établir, ou des Aveux & dénombremens anciens, comme porte la Coutume de Paris en l’Artiele LXXI.

Pour se maintenir en la jouissance de ces droits, il faut que la possession accompaone le titre : car on peut prescrire la liberté contre la servitude, par l’Article DCVII. L’effet de ces droits est, que le Seigneur peut obliger ses Vassaux de venir moudre & cuire dans ses Moulin & Four ; & faute par eux d’y venir il peut saisir la farine & le pain dans l’etenduë de son Fief, & les confisquer ; & hors de son Fief, il peut poursuivre les sujets pour le payement de ce qui lui est dû pour ces droits, & les faire condamner à l’amende & à ses dépens : que si les Vassaux étoient assujetiis par des titres valables à ces servitudes de bannalité, un petit nombre qui en prétendroit l’exemption seroit obligé de la prouver ; mais il ne suffiroit pas que la plus grande partie des tenans y fût sujette pour établir ce droit sur les autres, dont le nombre feroit un peu considérable. Voyez les Arrêts rapportés parBérault . Ceux qui ont ce droit de bannalité, doivent tenir leur Moulin en bon état ; car s’il cesse faute d’entretenement, ou même par manque d’eau, les obligés peuvent impunément aller moudre ailleurs ;Louet , M. 17. C’est pourquoi un Moulin à vent ne peut être bannal, par l’Article LXXII de la Coutume de Paris.1 Outre le droit de Bannalité des Moulins, il y en a un de Verte-moute, qui est distinct & plus ample que le premier ; il faut un titre spécial pour l’éta-

blir. Il consiste dans l’obligation qu’ont les Vassaux de payer une partie des grains qu’ils recueillent sur les terres dépendantes du Tief, encore qu’ils n’y réfident point, par rapport à ce qu’ils pourroient consumer pour la nourriture de leurs familles, en cas qu’elles résidasient sur le Fief. Quelques droits de Verte-moute renferment une obligation encore plus ample ; c est-à-sçavoir de payer une partie de tous les grains recueillis sur le fonds servant, ordinairement c’est la seitieme gerbe, comme la seizième partie du boisseau est la redevance la plus commune des iioulins bannaux.2


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Quand le seigneur n’a point aliéné son Moulin bannal, il peut fieffer a tels de ses Vassaux qu’il juge à propos la faculté de construire des Moulins, pourvu que les nouvelles cons-tructions ne causent point un préjudice notable aux Terres voisines La Bannalité du Moulin a bien plus d’étenduë dans la Normandie que dans la plûpart des autres Provinces : les Vassaux sujets à cette charge sont tenus de faire moudre les grains qu’ils consument, ou dont ils font commerce de la farine & du pain, soit qu’ils soient excrus sur leurs fonds ou qu’ils les ayent achetés au marché, soit que le pain soit vendu dans l’etenduë. qu’hors la mouvance du Fief : Arrét de l’Echiquier d’Alencon du 12 Octobre 1573.Bérault .

Arrêts de la Cour des 2é Avril 1683, & premier Août 1747. On a jugé de même à l’Audience de Grand’Chambre du as Février 1782, contre un Boulanger : dans le fait, il n’occupoit, sous la Bannalité, qu’une Masure, son Logement, & son FourPoyezVigier , sur Angoumois, Art. XXI ;Soefve , tome 2, Cent. 4, Chap. 53.Bro -deau sur Paris, Art. LXxl ; le Grand, sur Troyes, Art. LXIV Le plus grand nombre des Vassaux étant obligé de sui-re le ben duMoulin , les oppositions du petit nombre dont les Aveux ne renferment point cette sujétion, ne sont écoutés qu’àctant qu’on peut raisonnablement présumer qu’ils n’ont point voulu accepter des Iiéritages. sous cette condition.Bérault , Quoique le seigneur qui a droit de bannalité ait laissé son Moulin en ruine pendant plus de 4o0 ans, des que son Moulin sera en état il pourra reclamer la bannalité. Observations de M. de la Bigotière, sur l’Art. CCXCIV de la Coutume de Bretagne.

La Bannalité est un Droit réel il s’étend sur le Gentilhomme comme sur le Roturier, sur le Curé de la Paroisse comme sur l’Habitant. On a ainsi jugé, par Arrêt rendu au rapport de M. de Pelletot le 10 Mai 17ôt, quoique le Curé tint son Presbytere en ce que nous appellons, sans le bien comprendre, pure aumône.

Le Seigneur, qui a un Moulin bannal, peut empécher ses Vassaux banniers d’avoir des Moulins à meule, que l’on tourne à force de bras : Arrét du 9 Mars 1743.

Lorsque les Areux établissent le Droit de bannalité purement & simplement, le Propriétaire du Moulin peut exiger le Droit de moute en essence, nonobstant la possession qu’opposeroient les Vassaux de l’avoir payé en argent, si la prestation en deniers n’a pas été uniforme entre les banniers ; il n’y a que ce moyen de donner au Droit de moute une détermination certaine : Arrêt en Grand Chambre, au rapport de M. d’Equaquelon, du 48 Mai 1783, en faveur de M. le Duc de Iuxembourg.

L’usage général de cette Province a fixé le Droit de moute au seizieme du boisseau, s’il n’y q un titre contraire ; & on a sans doute condamné, sur des titres particuliers, les Boulangers de Lisieux, par Arrêt du sMars 1758, à payer, pour Droit de moute, la quatrieme partie du boisseau.

On ne peut prescrire contre la bannalité duMoulin , si ce n’est par une Communauté d’Habitans : Arrét du Parlement de Paris, au rapport de M. Pasquier, du 2 Mars 1758 en faveur de M. le Duc de la Trémouille ;Iacquet , Traité des Justices de Seigneur, &c.

Mais la prescription ne court que du jour qu’ils ont joui publiquement au vu & au scu du Seigneur, d’une liberté contraire au titre d’assajettissement, ou piutôt au titre d’inféodation.

Un Arrêt du premier Septembre 17ad renouvelle les dispositions des anciens Réglemens sur la nécessité & la Police des Poids, Balances & Mesures dans les Moulins.

Par Arrét du premier Octobre 172d, il est défendu aux Meiniers d’avoir aucune porte ni entrée de leur Chambre, Appartement ni ouverture particuliere pour avoir communication avec la Tremuie du ; il est aussi de regle que Paire du Moulin Moulin soit pavée, qu’il n’y loge point de Chevaux, & qu’il n’y entre point de volatiles qui puissent faire tort aux Vass-ex.

Le Cormier, dans son Code, Tit. des Fiefs, 4. Part. Art. CCexx, dit que le grain du Vassal doit se moudre dans les ad heures de l’apport, ou que le Vassal a la liberté de faire moudre ailleurs : La Décision de M. le Cormier se trouve dans l’Art XXV de la Coutume d’Anjou ; le grain doit être moulu dans l’ordre que chacun arrive au Moulin ;Chopin , sur Aniou, Art. XIX ; d’Argentré , sur Bretagne, Art. CCCLXV.

Les Vassaux ne sont point, dans l’esprit des décisions, assujettis à la Bannalité, tandis que le Moulin du Seigneur n’est point dans l’état prescrit par les Réglemens : mais ils ne peuvent se rendre justice à eux-mêmes, l’exception contre la Bannalité n’a lieu que du moment qu’elle est proposée par les Vassaux., Si la farine des Banniers qui vont moudre en fraude est saisie sur le Fief, elle doit être confisquée ; mais on ne comprend point dans la forfaiture les bêtes & le harnois. Le Meûnier peut arrêter ceux des Vassaux qu’il trouve en contravention, sans le ministere d’un Huissier ou d’un Sergent : Arrét du 2d Janvier 178s, Quand le Meünier vient par action, il obtient, la contravention étant prouvée, des interéts proportionnés au droit de moute, au temps de la contumace, & au nombre des personnes qui résident chez le Vassal délinquant, Mais plus la Bannalité est rigoureuse en Normandie, plus on doit sevir avec force contre le Meunier qui malverse ; il y a des circonstances ou l’interét des Vassaux, tres souvent compliqué avec celui du public, exigent qu’on inflige des peines capitales aux Meüniers infideles.

Ainsi jugé par Arrêt du 23 Août 154, contre le Meanier de Sainte Croix de Bernay.

Apres la Bannalité, on traite de l’obligation au chariage des meules, souvent dans les Aveux il y a une alternative de lieu désignée pour l’achat des pierres de moulage, l’un est plus proche du Fief, l’autre est plus éloigné, bien des motifs portent à décider que le Seigneur a le droit d’opter. Les Vassaux tiennent leurs fonds de la concession du Seigneur ; les Redevances féodales sont ordinairement trés. modiques, un Moulin bannal sur le Fief est d’une grande commodité, & les Vassaux sont bien moins génés dans le chariage de la pierre que le Seigneur qui fournit le prix de la matière. Ainsi jugé par Arrêt du mois de Juin 1758. au rapport de M. de Normanville.

L’obligation à la Bannalité & au chariage des meules, paroit emporter celle de charier les matériaux nécessaires à la cage du Moulin ; mais il n’en résulte pas que les Tenans doivent voiturer ceux qui seront employés au lieu de la résidence du Meunier, il faut un titre expres.

Consultation de M. Thouars Le curage du bieu du Moulin est bien moins une corvée que l’exécution même du Titre par lequel le Seigneur consent de construire un Moulin sur son Fief, & les Vassaux s’obligent d’y porter leurs grains. On a même assujetti, par Arrêt du 8Avril 1701, le Propriétaire des deux Rives d’un petit Courant de le curer une fois par an pour l’usage des deux Moulins bannaux en faveur du Propriétaire Il y a cependant bien des Droits qui semblent des dépendances de Fiefs, que l’on s’est habitué à regarder comme des corvées odieuses ; les abus de quelques Seigneurs ont fait naître ces idées


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Le Droit de Verte-monte n’est point une suite de la Bannalité duMoulin , il faut un Titre pour l’établir, on n’argumente point du grand nombre contre le petit ; des Aveux rendus au Seigneur suzerain, énonciatifs de ce Droit, n’ont de force qu’autant qu’ils sont sou-tenus d’une possession de a0 ans sans protestation des Vassaux ; cette possession, étant toute de fait se renferme dans le cercle des hommes & tenans qui en ont souffert l’exercice : Arrét du 23 Juiller 1736. Quelques-uns ont cru cependant que la Verte-moute étoit un dédommagement qui appartenoit, de droit, au Seigneur sur les Vassaux non resséans ils argu-mentoient de l’Article CLXXXVIII de la Coûtume & d’anciens Arrêts ; mais suivant cette opinion, le même Propriétaire payeroit la Verte moute dans le lieu où il ne demeure pas, & la moute dans le lieu de sa résidence : il en résulteroit encore que la Verte-moute s’étendroit non-seulement sur les grains de confommation, mais sur ceux qu’il pourroit vendre : la demande est donc exorbitante, elle doit donc être fondée en titre & en possession.

Le Champart se regle a peu prés dans cette Province comme la Verte moute : le Seigneur doit établir son droit sur la chose même, & le plus grand nombre des Vassaux n’oblige point en ce cas le plus petit ; mais si les Aveux sont prescrits, le Seigneur peut justifier par la preuve vocale sa possession : Arrêt du 1a Juillet 17ûr, au rapport de Me d’Ambrun.

Cependant il paroit singulier qu’un Seigneur qui a une Jurisdiction pour maintenir ses Droits, & que la Coûtume autorise à les faire reconnoître par l’Article CLXXXV, ait laissé écouler un si long temps sans former aucun Acte d’interruption.

On prétend que le Champart ne s’étend point sur le Sarrasin, quand le Seigneur n’est point en possession de le percevoir sur cette sorte de grains ; & on allégue en preuve un Arrêt du 16 Mai 172z, rendu au rapport de M. Pigou. Quelque faveur que mérite la dibération, on doit penser que le droit du Seigneur est fondé sur la tradition du fonds Dans les cantons de la Province où le Sarrasin exige une façon de terre & sert de nourriturs à l’homme, quel est le prétexte de priver le Seigneur du Champart sur une pie : e de terre où il est en possession de le percevoir lorsqu’elle est ensemencée d’autres grains Le Seigneur de Fleury a été maintenu, par Arrét du S Juillet 172d, au rapport de M.

Hubert, dans la possession d’exercer le droit de Champart sur les fruits des arbres plantés dans les terres de ses Vassaux sujettes à ce droit, dans la proportion qu’il le percevoit en prain : cet Arrét est juste, & il n’accorde au Seigneur qu’un désintéressement. I’abandonne mille autres questions sur le Champart