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CCXLII.

Les Pere & Mere excluent les Oncles & Tantes de la succession de leurs Enfans : & les Oncles & Tantes excluent l’Ayeul & l’Ayeule en la succession de leurs Neveux & Nieces, ainsi des autres.

Ces deux Articles proposent & ensuite prouvent par exemples, que la succession ne peut remonter à l’ascendant, au préjudice de ceux qui sont descen-dus de lui, de sorte que les Freres préferent en ces successions le Pere & la Mere, & tous les autres ascendans ; comme les Oncles & Fantes excluent l’Aieul & l’Aieule en la succession de leurs Neveux & Nieces, qui sont les Petits-fils desdits Aieul & Aieule. Mais ces Oncles & Tantes ne préferent pas en cette méme succession, le Pere ou la Mere desdits Neveu & Nieces, parce que les Pere & Mere sont plus proches, & d’ailleurs ne sont pas ascendans, mais parens collatéraux desdits Oncle & Tante, qui sont leurs Frere & Soeur Cette maxime ne s’étend pas tant des propres, qui, suivant le proverbe de la plupart des Coûtumes ne remontent point, que des acquêts & des meubles, ausquels les descendans succedent, à l’exclusion de tous leurs ascendans dans lesdites successions, ce qui doit faire juger, que ces deux Articles & le suivant CCXLIII, eussent été beaucoup mieux placés sous le Titre des Successions des meubles & des acquets.1

Il a été jugé par un Arrêt rendu en l’Audience, le 17 de Décembre 1649, rapporté parBasnage , que les Freres utérins préferent le Pere du défunt, quoiqu’ils n’en soient pas descendans, parce que par les dispositions qui sont sous le Titre des Successions des meubles é acquets, les Freres & les Soeurs, tant utérins que conjoints ex utroque latere, tiennent le premier ordre dans lesdites successions de meubles & d’acquêts. Il avoit été jugé auparavant, par un Arrêt du 1s de Mars 1543, rapporté parBérault , qu’un Frere de Pere seulement, préféroit la Mere en la succession de sa Soeur, fille de cette Mere.

Sed quid S Les ascendans ne succéderont-ils point aux choses par eux données, à l’exclusion de leurs descendans ; Cette question a été décidée par l’Ar-ticle CCexIII de la Coutume de Paris, qui dispose, que les ascendans succedent aux choses par eux données à leurs descendans morts sans enfans ou descendans d’eux : ce qui est mis comme une exception à la maxime, que le propre ne remonte point ; Cquoique cette maxime n’ait été recue que pour conserver les propres in linea, & comme une suite de la regle paterna pateris, maierna maternis, suivant l’avis de duMoulin , cité parLouet , P. 47.

Ce qui a paru si équitable au Parlement de Paris, qu’il a ordonné, que cette exception auroit lieu dans toutes les Coûtumes qui ne l’ont pas expressément rejettée comme il paroit par les Arrêts rapportés parLouet , audit nombre. La raison de cette Jurisprudence est fondée sur l’équité, & sur une forte présomption de l’intention des donateurs, de n’avoir pas voulu se dépouiller de leurs biens, sinon en faveur de leurs enfans leurs donataires ; lesquels étant décédés sans enfans & deseendans d’eux, la cause & la fin de la donation cessent : c’est pourquoi par un droit, qu’on doit plutôt appeller de réversion que de succession, les donateurs rentrent en la possession des choses par eux données, par l’effet d’une tacite stipulation suppléée par la Loi, comme étant une condition inhérente & naturelle à la donation. Néanmoins on a jugé en Normandie, qu’un Pere qui avoit promis la dot à une de ses Filles, étoit obligé de la payer à ses autres Gendres, aprés la mort de la donataire décédée sans enfans, par Arrêt du 14 d’Août 185y, rapporté parBasnage . Les donateurs donc feront prudemment de stipuler la réversion de la chose donnée à leurs enfans, au cas de la mort desdits enfans sans enfans & defcendans d’eux.2


1

Propres ne remontent. On faisoit autrefois un étrange usage de cette regle, il en résu’toit que les ascendans étoient non-seulement exclus du droit de succéder par ceux à qui ils avoient donné le jour, mais par les collatéraux de ces ascendans : l’oncle du défunt excluoit son pere, purceo que, ditLittleton , est une maxime en le ley, que in her tance poet linearement discender, mes nemy ascender. L’Auteur des anciennes Loix Françoises dit que cet abus, qui subsistoit en Neustrie lorsque Raoul en prit possession, se perpétua en Angleterre, il ne fut réformé chez nous que vers le regne de Philippe Auguste, & notre ancien Coutumier adopta la réformation : le but de cette regle est maintenant d’empécher la confusion des héritages procédans de diverses lignes ; cette regle est plus clairement posée dans l’ancien Coûtumier, Chap. 25, que dans la Coutume réformée, on en jugera par comparaison. Voici comme elle est concue dans l’ancien Coutumier : n l’éritaige des enfans revient au pere quand il n’y a nul y qui soit descendu de lui, se l’éritaige est descendu de lui, aussi doit l’en dire de la necre de n l’ael, du besael, & du tiers-ael, & de l’aelle de la besaelle, & de la tierce-aelle. n On saisit dans le texte la fin que se propose la loi du pays.

Bérault prouve que cet article est bien placé sous la succession des propres : car les biens hérités de l’aieul par les petits-enfans à cause de la renonciation du pere, les fonds qu’ils ont retirés à droit lignager, ceux venus par avancement de succession, le tiers-coutumier délivré aux enfans à l’occasion du dérangement des affaires de leur pere : voilâ des propres dans la succession des enfans qui n’ont point de descendans.


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Le droit de reversion en ligne directe est si favorable, que, suivant du Moulin sur l’Artiele LXXVIII de Valois, & LXXIV d’Artois, il a lieu dans toutes les Coûtumes qui n’en parlent point, hoc justum est & observandumt, dit cet Auteur, sur l’Art. I de Montargis, & quamvis in quibusdant consuetudinibus contrarium reperiatur hoc errore irrepsit S corrigendunt est. Du Moulin attaque ainsi l’ancienne Coûtume de Melun, qui depuis a été réformée.

La Coutume d’Anjou, Article CCLXVIII & CCLxx, & celle du Maine, Article CCLXXXVIII. Notre Coûtume n’a aucune disposition contraire à la reversion, & les ArtCexLI & CeXIII n’ont d’autre but, comme je l’ai observé, que de conserver les propres dans chaque ligne, cependant on oppose l’Arrét du 14Août 1857, cité par Pesnelle d’apresBasnage .

Trois puissans motifs déterminent contre cet Arrêt ; le premier de consoler un pere qui a vu troubler l’ordre naturel dans le prédéces de sa fille : le second, d’encourager les peres à doter leurs filles, en les assurant que si elles venoient à mourir ils rentreroient en ce cas dans les biens qu’ils auroient donné : enfin le troisieme, qui consiste à dire, qu’en mariant sa fille, le pere est presumé avoir voulu pourvoir non-seulement à sa fille, mais à sa postérité ; en sorte que la fille mourant sans enfans, on doit lui restituer ce qu’il a donné dans cette vue, sur le fondement de la préfomption de sa volonté. P’ajoute que l’Arrét de 1857 a pu être rendu à cause d’une prédilection marquée par le pere en faveur d’un de ses enfans. On ne peut pas opposer que le pere en dotant sa fille, acquitte une charge au nom de ses autres enfans, & pour eux ; car dans la vérité le pere ne préfere ici que sa fille à soi-même. Ainsi raisonne seBrun , des Successions, qui a épuisé cette matière. VoyezRenusson , des Propres, Chap. 2, sect. 19.Ricard , des Donat. part. 3, Chap. 7, sect. 4, n. 757. Journal du Palais, tome 2 Basnage conseille, pour prévenir cette difficulté, de stipuler le retour ; mais ce n’est qu’un demi-remede, c’est assujettir la reversion à un Tabellion plus ou moins éclairé, une pareille question mérite d’autant plus un Réglement, qu’elle concerne les Contrats les plus im-portans dans l’ordre de la société

La clause de retour, stipulée par le donateur en ligne directe, ne prive pas à Paris le donataire du droit d’angager & de vendre les choses données, d’autant que le donateur pouvoit ne donner que l’usufruit & se retenir la propriété.Renuss . des propres, Chap. 2, sect. 1o, n. 35. Ricard restraint cette décision aux Coûtumes qui considerent le droit de retour, comme un droit qui tient a celui de succéder ; & il ajoûte que la clause de retour étant nussi ancienne que l’acte de donation, elle opere généralement une espèce de fidei commis & qu’elle à un effet rétroactif au jour du Contrat.Ricard , part. 3, Chiap. 7, n. 798, & 799.