Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.


CCLXXIX.

Les Pere, Mere, Aïeul, Aïeule ou autres Ascendans, peuvent disposer du tiers de leurs héritages & biens immeubles, ou de partie dudit tiers assis au Bailliage de Caux, & lieux tenans nature d’icelui, à leurs Enfans puînés, ou l’un d’eux, sortis d’un même Ma-riage, soit par Donation, Testament ou autre disposition solemnelle par écrit, entre-vifs ou à cause de mort : à la charge de la provision à vie des autres Puînés non compris en ladite disposition ; & de contribuer tant aux dettes que mariage des Filles, au prorata de ce qui leur reviendra de la totale succession : demeurant néanmoins le Manoir & Pourpris en son intégrité au profit de l’Aîné, sans qu’il en puisse être disposé à son préjudice, ni qu’il soit tenu en faire récompense ausdits Puînés.

Quoiqu’il semble que les puinés, ausquels le pere ou la mere ont laissé le tiers de Caux, ne possedent ce tiers qu’à titre de donation ; il est portant certain, que par l’acceptation qu’ils font de la disposition faite en leur faveur, ils. se rendent héritiers, vu qu’ils sont obligés au payement des dettes & au mariage des filles, à proportion de ce qu’ils amendent de la succession de celus qui a fait cette disposition, comme il est déclaré par cet Article.

C’est une maxime certaine en Normandie, que les préciputs qui sont accordés aux ainés, les engagent à contribuer au payement des dettes, à propor-tion de leur valeur. La Coutume de Paris est contraire en l’Art. CCCXXXIV.

VoyesLouet , D. 16. C’est pourquoi, encore qu’il soit statué par cet Artiele CCLXXIV, que le Manoir & Pourpris appartient intégralement à l’ainé, sans qu’il en puisse être dilposé à son préjudice, ni qu’il soit obligé d’en faire aucune récompense aux puinés, il a néanmoins été jugé, que l’ainé étoit tenu de contribuer aux dettes & au mariage de ses seurs, à proportion de ce precipue, comme il est atresté par l’Article L. VI dudit Réglement.

Et d’autant qu’il n’étoit pas convenable que les seurs eussent plus de droit sur ce même préciput, que leurs freres puinés, qui sont exclus d’y rien pretendre, on a de plus jugé, que la valeur de ce préciput n’entroit point dans l’estimation qu’on fait pour régler le mariage avenant des filles, suivant l’Article LVII dudit Réglement, comme il a été remarqué sur l’Article CCLXII5 de sorte qu’à cet égard, ce même préciput est considéré comme un bien qui est hors de la succession.

Mais si toute la succession consistoit au préciput de Caux, les puinés & les seurs n’auroientrils aucune légitime ; On a jugé en ce cas la même chose qu’au cas de l’Article. CCCXLVI, qui est, quand il n’y a qu’un Fief pour tous biens dans une succession, les puinés ont une provision à vie, les charges de la succession déduites, entre lesquelles sont les mariages des seurs, qui en ce même cas ont l’avantage de faire évaluer leur légitime en deniérs, suivant l’Article CCCLXI.1


1

Il y a des extensions de la Coutume de Caux dans la Vicomté de Roüen ; les partages & les droits de ceux qui y resident & y ont des fonds, se gouvernent par les principes de cette Coûtume ; mais on ne présume point que des héritages situés sous la Vicomté de Roüen dependent de la Coutume de Caux : Arrêt du 2 Avril 1745.

On observoit autrefois dans le Comté d’Eu l’ancienne Coutume de Caux ; on en a conservé plusieurs des maximes dans la réformation de 1580. Quoique cette Coutume soit défigu-rée par l’intrusion de quelques principes puisés dans des sources étrangeres, elle mérite d’être consultée. Voyey le Coutumier général, tome

Il n’est pas toujours aisé de bien limiter le préciput de Caux, il semble réduit, par la Coutume, au manoir & poupris en son intégrité, cependant il seroit souvent périlleux d’en détacher des objets qui, sans en être une dépendance essentielle, ne semble convenir qu’à lui, une avenue, un bouquet de bois, une masure acquise par le pere de famille, qui joint à la proximité du manoir la destination de l’union, tout cela n’est il pas l’appanage du manoir à Si vous en privez l’ainé, vous l’exposez à une lezion dans le partage, ou a des discussions de longue durée, ou vous le forcez de souffrir un voisin incommode ; vous lui enlevez enfin les avantages de la Loi : d’un autre côté, cette Loi est déja trop onéreuse au puiné, & on ne peut, sans injustice, rendre, pour l’agrément de l’ainé, sa condition plus mauvaise. L’équité, dans ce cas, conseille un tempérament ; on accorde à l’ainé ce qui peut lui procurer une habitation commode & agréable : mais on le condamne à rembourser à son puiné la vraie valeur de ce qui n’est point le manoir & le pourpris que la Coutume lui défere : Arrêt du 22 Mars 1727.

Voyez mon Observation sur l’Art. CCCLVI