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CHAPITRE DES SUCCESSIONS EN Propre au Bailliage de Caux, & autres lieux où ladite Coutume s’étend en la Vicomté de Rouen, suivant qu’il fut rédigé en 1583.

ARTICLE CCLXXIX de la Coutume générale.

L E frère aîné a la succession de ses pere & mère, aïeul, aïeule & autres ascendans, & l’ancienne succession de ses parens collatéraux, sans en faire aucune part ou portion héréditaire à ses freres puînés.

ARTICLE CCLXXX.

Les freres puînés ne peuvent demander partage à leur frere aîné, ains se doivent contenter de la provision à vie, qui n’est que la troisieme partie en l’usufruit des héritages délaissés après la mort du pere, mere, aïeul ou aïeule, & conséquemment de tous ascendans en ligne directe.

ARTICLE CCLXXXI.

Tous les puînés ensemble ne peuvent demander plus d’un tiers pour leur provision, laquelle après le décés de tous les puînés retourne à l’aîné, sans que leurs enfans y puissent prétendre aucune chose.

ARTICLE CCLXXXII.

Les filles venant à partage, elles ont toutes un tiers pour leur part en propriété, à la charge de porter la provision de leurs freres puînés.

ARTICLE CCLXXXIII.

Ne peuvent les puînés pour leur provision, ni les filles prenant partage en Caux, contraindre leur frere aîné ou ses enfans à partager les Fiefs, ains se contenteront de rotures, & de tels autres biens qu’il leur pourra bailler, revenant néanmoins à la valeur de ce qui leur peut appartenir.

ARTICLE CCLXXXIV.

Quand il n’y a qu’un Fief feul en la succession, les filles sont tenues prendre leur part par estimation, qui est évaluée au denier vingt.

ARTICLE CCLXXXV.

Si en la succession il y a héritages assis, partie en lieux où l’on use de la Coutume de Caux, & partie hors la disposition d’icelle, l’aîné prend tout ce qui est en Caux ; & outre, il partage avec ses freres les biens qui sont hors de Caux, & a le choix par préciput, si bon lui semble, tout ainsi que s’il n’y avoit point de biens en Caux.

ARTICLE CCLXXXVI.

En ce cas les puînés ont le choix de demander provision aux biens situés sous la Coutume de Caux, ou bien prendre partage aux biens situés hors ladite Coutume, en l’un des six autres Bailliages, & en prenant l’un, ils perdent l’autre, encore que le partage fut pris en bour-gage.

ARTICLE CCLXXXVII.

Il est passé à la pluralité des voix même des Députés du Bailliage de Caux uniformément, horsmis deux du tiers-Etat, que le tiers que les puînés souloient avoir à vie & par provision leur demeurera en propriété pour eux & leurs hoirs : demeurant néanmoins à l’aîné le Manoir & pourpris sans aucune estimation ou récompense, & qu’il pourra retirer ledit tiers, s’il est en roture au denier vingt, & en Fief noble au denier vingt-cinq. Mais sur la difficulté & diversité d’avis pour la contribution du mariage des filles, tant par l’aîné que par les puînés, pour leur cotte-part, & pour le tiers que d’ancienneté la Coutume a donné en propriété aux filles ; ensemble, si les puînés ayant ledit tiers en propriété, prendront part aux biens situés hors la Coutume de Caux ; & si le pere, outre ledit tiers, peut donner un autre tiers, ou bien si lesdits puînés se doivent contenter de la donation que le pere leur aura faite : Il a été ordonné, que les Commissaires ou aucuns d’eux, se transporteront audit Bailliage de Caux & lieux tenant ladite Coutume, pour assembler les Gens des trois Etats, soit au Siége principal dudit Bailliage, ou par les Vicomtés, ainsi qu’ils verront être plus expédient, prendre leur avis sur ce que dessus, & autres Requêtes présentées par lesdits puînés, dont ils dresseront Procès-verbal, pour icelui vu, être ordonné de l’homologation, ainsi qu’il appartiendra ; jusqu’à ce, l’ancien usage ci-dessus déclaré tiendra.

LA surséance ordonnée par ce dernier Article dura jusqu’à la fin de l’année 1586, en laquelle les nouveaux Commissaires nommés par les Lettres Patentes du Roi Henri III, des 14 d’Octobre 158s, & 8 d’Août 1586, pour faire arrêter & rédiger par Articles plusieurs autres Usages Locaux, qui étoient semblablement demeurés irrésolus en l’Assemblée de 1583, ayant fait assembler & conférer les Députés des trois Etats des Bailliages de Roüen & de Caux, il fut enfin résolu par l’avis uniforme des Délibérans, que les vingt-cind Articles qui composent le présent Chapitre, seroient insérés en la Coûtume géné-rale, sous le Titre des Successions au Bailliage de Caux, au lieu des neuf publiés sous le même Titre en l’année 1583, comme il est certifié par le Proces-verbal qui fut fait en l’année 1586.

Or les quatre questions qui n avoient point été décidées en 1583, & qui sont sommairement proposées dans ledit Article dernier, se trouvent résolues dans lesdits vingt-cind Articles homologués en 1586.

Car la premiere, qui est touchant le droit des filles, est comprise dans trois de ces Articles, qui sont les CCXCVII, CexCVIII & CCXCIX, ce qui sera expliqué ci-aprés.

Pour la seconde question, qui étoit de sçavoir, si les puinés ayant le tiers en propriété, au lieu de la provision à vie qu’ils avoient par l’ancien Usage, auroient part aux autres biens situés hors du Pays de Caux ; elle est décidée par l’Article CCCI, absolument en faveur des puinés, quand ils ont le tiers par la disposition de la Coutume, & avec limitation par l’Article CCLxxx, qui déclare que les puinés qui ont ledit tiers en vertu de la donation qui leur en a été faite par les ascendans, ne sont point exclus de prendre part aux autres biens, que quand le donateur l’a expressément ordonné.

La troisieme question, qui est du pouvoir qu’ont les peres & autres ascendans de donner, se trouve réglée dans les Articles CCLXXIx, CCLXXXI & CCLXXXII, qui enseignent que les ascendans peuvent disposer du tiers de leurs biens en Caux, mais précisément en faveur de tous, ou de quelquesuns de leurs enfans puinés.

Reste la quatrieme question, qui est résolue par l’Article CCLXXXVIII, & les six immédiatement suivans, qui ont déclaré que les puinés peuvent renoncer au don qui leur a été fait ; & de plus, quels sont les effets & les con-séquences de cette renonciation.

Aprés cette remarque, on peut diviser les matières de ce Chapitre en deux parties : dans la première, qui est la principale, il est traité de la succession directe : dans la seconde, il est traité de la succession collatérale, & elle ne contient que deux Articles, qui sont le CCC & le CCCIIIe. Tous les autres Articles de ce Chapitre concernent la premiere partie, qui se peut subdiviser au droit qu’ont les males, & en celui qu’ont les filles. Le droit des filles est déclaré, comme il a été remarqué dans trois Articles, qui sont le CCXCVII, CCXCVIII & CCXCIX. Quant au droit des mâles, il a requis une plus longue explication, parce qu’il y faut faire trois distinctions : car ou les pere, mère, aicul ou aieule ont fait une donation du tiers de leurs biens de Caux, ou ils n’en ont point fait : s’ils n’en ont point fait, le partage de leurs successions entre l’aine & les puinés, est réglé par les Articles CCXCV, CQxCVE,

CCCI & CCCII. Mais si les ascendans on fait quelque disposition touchant ledit tiers, en faveur de tous ou de quelques-uns des puinés, il est premierement expliqué, par qui, en faveur de qui, & comment cette disposition doit être faite ; & il est ensuite enseigné, quels en sont les effets quand elle est acceptée, Cc’est le cas de la seconde distinction ) dans l’Article CCLXXIN, & les neuf suivans. Mais quand cette disposition des ascendans est répudiée par les puinés, ( c’est le cas de la troisieme distinction ) les effets & les suites de cette renonciation sont déclarés depuis l’Article CCLXXXVIII, jusques & y compris l’Article CCXCIV.

Pour suivre l’ordre de la Coutume, il faut en commencer l’interprétation par le cas de la donation faite par les ascendans. Pour le mieux entendre, il faut se souvenir que par l’ancienne Coutume du Pays de Caux, tous les biens appartenoient en propriété aux ainés dans la succession directe, sans que les puinés pussent y rien prétendre qu’une pension à vie, que la Coûtume appelle provision ; & partant, les puinés étant réputés comme étrangers dans la succession de leurs ascendans, rien n’empéchoit qu’ils ne fussent capables de re-cevoir une donation, telle que celle qu’on peut faire à des étrangers : mais la rigueur de cette ancienne Coûtume ayant été modérée, en ce que le tiers des biens immeubles a été attribué en propriété & par droit successif aux puimés, on a voulu conserver aux ascendans la liberté de disposer de ce tiers pour tous, ou pour quelques-uns des puinés, au préjudice des autres.

Cela supposé, il est traité d’abord de ce pouvoir conservé aux ascendans & des dispositions faites en conséquence, jusqu’en l’Article CCLXXXVIII. Le même pouvoir donné au pere & à l’aieul, est aussi donné à là mère & à l’aicule, qui peuvent, sans le consentement de leurs maris, & sans être autorisées par Justice, disposer du tiers de leurs héritaves situés en Caux, pour les puinés & leurs descendans, par les Articles CCLXXIx & CCLXXXV.

Mais afin que ces dispositions soient valables, il est requis qu’elles soient ffaites aux puinés d’un même mariage : car quand le pere ou la mère se sont remariés, ils ne peuvent faire avantage aux enfans du premier ou du second dit, au préjudice de ceux qui sont nés de l’autre mariage, par l’Art. CCLXXXI.

Or les personnes ci-dessus désignées ont un tel pouvoir de disposer de ce tiers de Caux, qu’ils peuvent ordonner que la portion d’un des puinés donataire mourant sans enfans, aecroitra aux autres puinés, sans que l’ainé y prenne Aucune part, par l’Article CCLXXXII, qui partant autorise une espuce de substitution.

Il est de plus requis, afin que ces mêmes dispositions subsistent, d’y observer quelques solemnités : car si elles sont faites par Testament, il faut que les formalités prescrites pour la validité des Testamens, y ayent été accomplies.

Il faut en outre distinguer, si cette disposition du tiers est faite pour tous les puinés : car en ce cas, en quelque-temps qu’elle ait été faite un moment même avant la mort du donateur, elle sera valable, que si elle est faite en faveur seulement de quelques-uns des puinés, alors il est nécessaire, afin qu’elle soit maintenue, qu’elle ait été faite quarante jours avant la mort du donateur autrement, le profit en reviendra à tous les puinés en semble. Tout ceci est ordonné par les Articles CCLXXXIII & CCLXXXIV.

De plus, soit qu’elle soit faite par un Testament, ou par un Acte entreoifs, elle doit être infinuée, à peine de nullité, mais il suffit que l’insinua-tion en soit faite six mois aprés la mort du donateur, & sert l’insinuation d’acceptation, par l’Article CCLXXXVI Il faut confidérer ensuite les effets de cette disposition, quand elle est acceptée par les donataires. Ils sont obligés, en premier lieu, de fournir la pen-sion viagere aux autres puinés non compris dans la donation, lesquels n’ont aucune propriété des biens, mais seulement une provision à vie, ce qu’il faut entendre, quand la totalité du tiers a été donnée à quelques-uns des puinés car s’il ne leur a été donné qu’une partie du tiers, alors la provision a vie dûe aux autres puinés, sera payée proportionnément par l’ainé, qui aura l’autre partie du ciers non comprise dans la donation ; sans que les donataires, aprés leur acceptation, puissent avoir aucune pait à ladite provision, en tant qu’elle aura été payée par l’ainé, laquelle en ce même cas retournera à l’ainé ou à ses héritiers, apres la mort des puinés qui en auront joui : c’est l’espèce de l’Article CCLXXXVII.

En second lieu, ces donataires sont obligés de contribuer aux dettes de la succession & au mariage des seurs, comme étant héritiers, par Article CCLXXIY.

Ces donataires toutefois ne peuvent avoir rien au Manoir ou Pourpris : ce sont les termes dont la Coutume s’est servie pour signifier ce qu’elle appelle une masure logée aux Champs, en l’Article CCLXXI, & un Munoir ro-turier, dit anciennement hebergement & chef d’héritage, en l’Article CCCLVI, 3. qui est réservé tout entier à l’ainé : ce qui sera expliqué plus particulièrement sur ledit Article CCLXXIX.

Mais d’ailleurs, cette donation n’empéche pas les donataires, non plus que les autres puinés qui n’y sont pas compris, de prendre part aux autres biens de la succession, soit de bourgage, ou situés hors la Coutume de Caux, à. moins que le contraire ne soit déclaré dans la disposition, par l’Art. CCLXXX.

Que si cette disposition est répudiée par ceux en faveur desquels il semble qu’elle a été faite, elle ne laisse pas d’avoir des effets fort differens, qui confistent à attribuer à l’ainé tous les avantages qu’il avoit par l’ancienne Coutu-me de Gaux : c’est ce qui est déclaré depuis l’Article CCLXXXVIII, jusques & compris l’Article COXCIV, car en ce cas de répudiation faite par les donataires, tous les biens de Caux appartiennent à l’ainé, sans qu’il soit obligé de donner à ses puinés autre chose qu’une provision à vie, qui n’excédera pas le tiers de l’usufruit des immeubles de la succession, lequel usufruit ne pourra être pris que sur les rotures, & tous les autres biens que l’ainé voudra bailler & nullement sur les Fiefs, de maniere qu’il doit suffire aux puinés d’avoir la valeur de ce qui leur peut appartenir pour leur usufruit, qui s’éteint par leur mort au profit de l’ainé, sans que leurs héritiers y puissent prétendre aucune chose, par les Articles CCLXXXIX, CexC, CexCI & CeXCII.

De plus, cette répudiation ne prive pas seulement ceux qui l’ont. faite, de la propriété du tiers de Caux ; mais elle les exelut au cas qu’ils prennent la provision viagere, de prendre part aux autres biens de la succession fitués hors Gaux : car ils ne peuvent avoir l’un & l’autre, mais seulement l’un des deuxà leur choix, encore que le partage fût pris en bourgage, par les Articles.

CCXCIII & CCXCIV, ce qui ne va pas ainsi aux cas des Articles CCLXXX & CCGI.

Apres avoir remarqué les effets. de la disposition faite par les ascendanss, soit qu’elle soit acceptée, soit qu’elle soit répudiée, l’ordre de la division cidessus proposée, requiert qu’on explique comment la succession directe se par-tage entre l’ainé & les puinés, quand les ascendans n’ont rien ordonné : en ce cas, les puinés ont pour eux le tiers en propriété de tous les biens, pour être partagé entr’eux également, réservé néanmoins à l’ainé son préciput roturier, de l’Article CCLXXIX. Mais l’ainé a la faculté de retirer ce tiers des mains des puinés, par le prix & dans le temps prescrits par l’Article CCXCVI. ce qui y sera spécialement expliqué.

D’ailleurs, la propriété attribuée aux puinés audit cas, ne les exelut pas de prendre leur part aux autres biens de la succession, qui ne sont point dépendans de cette Coûtume de Caux, par l’Article CCCI. Tout le contraire s’observoit par l’ancienne Coutume ; car les ainés avoient la propriété de tous les héritages, & n’étoient obligés que de donner une pension viagere aux puinés, laquelle consistoit en l’usufruit du tiers desdits héritages, & laquelle d’ailleurs excluoit les puinés de pouvoir rien prétendre aux autres immeubles de la succession fituée hors Caux ; c’est pourquoi elle étoit appellée provision, comme n’étant donnée que pour pourvoir à la subsistance des puinés dénuéa de tous autres biens.

Que s’il n’y a point d’autres héritages en Caux qu’un Fief, les puinés n’y auront aucune part en propriété, mais ils auront seulement l’usufruit du tiers3 ce qui ne les excluera pas de partager les autres biens dépendans de la Coutume générale, par l’Art. CCCII. Comme à l’opposite, l’ainé en prenant ce Fief-par préciput, non-seulement ne s’exclut pas de prendre part aux autres biens de ladite Coutume générale, mais même d’y prendre un autre préciput, soit noble ou roturier ; ce qui sera déclaré plus au loug au Titre du Partage d’heritage.

Quant au droit qu’ont les filles, à l’égard des biens de Caux qui composent les successions de leurs ascendans, ( ce qui fait une autre partie de la division proposée ) il est à propos de remarquer ; premierement, que quand la succession tombe aux filles par faute d’hoirs mâles, suivant l’expression de l’Ar-ticle CCLXXII, elle se partage également, tant à l’égard des biens de Caux que des Fiefs, parce que la raison sur laquelle est fondée uniquement l’inégalité des partages, qui est la conservation des biens dans les familles, n’a pas de lieu à l’égard des filles, qui passent de la famille de leurs peres dans celle de leurs maris. C’est pourquoi il n’y a aucune disposition particulière fous ce Titre, pour regler la succession des biens de Caux entre les filles seules héritieres, comme il été remarqué sur ledit Article CCLXXII.

Mais quand les filles ont des freres, qui les excluent desdites successions, la difficulté de régler leurs droits parut si grande aux Commissaires & aux Députés, qui travaillerent à réduire la Coutume en l’année 1583, qu’ils ne la vou-furent pas réfoudre : Mais, depuis ce Chapitre ayant été réformé par vingtcinq Articles qui le composent, comme il a été remarqué, il y a trois de ces Articles, sçavoir ; le CexCVII, CexCVIII & CeXXCIx, qui renferment tout ce que la Coutume a ordonné touchant la legitime qu’ont les filles sur les biens de Caux. II paroit par ces trois Articles qu’on n’a point voulu attribuer aux filles en aucun cas, le droit de partager avec les frères les biens de Gaux ; car par l’Article CCXCVII les filles doivent être mariées sur les meubles delaissés par les peres & meres & autres ascendans, s’ils le peuvent porter : Ce qui signifie que la legitime des filles se doit prendre & payer sur les meubles, quand ils sont suffisans pour acquitter cette charge du mariage des filles. De manière qu’en ce cas, les puinés qui partagent également avec l’ainé les meubles, ( la Coutume de Caux n’ordonnant rien de particulier, sinon à l’égard des immeubles ) contribuent également avec lui au mariage des seurs ; nonobstant l’Ar-ticle CCCLXIV, qui déclarc, que les freres contribuent au mariage des seurs, selon ce qu’ils prennent, plus ou moins, aux successions directes, tant paternelles que maternelles. Il a même été jugé par un Arrêt du mois d’Avril 1651, rapporté parBasnage , qu’y ayant trois seurs, & les meubles ne pouvant porter que le mariage de l’ainée, ce mariage devoit être pris sur les meubles, & que le mariage des deux autres seroit pris sur les immeubles, suivant la proportion prescrite par ledit Article CCXCVII.

De plus, l’Article suivant CCXCVIII fait connoître, que quoique les freres ayent été négligens de marier leurs seurs, les seurs ne peuvent point demander partage, mais seulement mariage avenant, quand elles ont atteint l’âge de vingt-cind ans : ce qui contient deux différences fort remarquables de i2 Coûtume générale, aux Articles CCLXI, CCLXIV & CCLXVII, par lesquels, premierement, les filles se peuvent marier par l’avis de leurs parens, apres l’âge de vingtun ans ; & en second lieu, la négligence des frères peut être punie, en admettant leurs seurs au partage : ce que la Coûtume de Caux n’autorise en aucun cas, puisque les parens, au, cas de cette négligence des freres, doivent seulement arbitrer le mariage ; mais avec cette restriction, que le mariage de chacune des filles ne doit point être estimé à plus grande valeur que celle de la portion d’un des puinés, suivant les termes expres de l’Article CCXCVIII.

Mais cette intention des Réformateurs d’exclure absolument les filles de partager avec les frères les biens de Caux, est encore prouvée plus évidemment, par ce qu’ils ordonnerent en ladite année 1586, en autorisant les vingt-cind Articles qui furent insérés en la place des neuf qui avoient été employés sous le Titre des Successions de Caux, en l’année 1583 ; car il est certifié par le Pruces-verbal, qu’ils abrogerent en même-temps tous les Articles dans lesquels le partage des filles avec les freres, à l’égard des biens de Caux, étoit approuvé, il y en avoit trois, dont les deux premiers avoient été rangés sous le Titre des Successions en Cauz, & le dernier avoit été mis sous le Titre de Partage d’héritage. Voici ce qui est énoncé en termes formels dans ledit Proces-verbal. L’Article CCLXXXII, contenant, Les filles venant à pariage, ont toutes ensemble un tiers pour leur parl en propriété, à la charge de porter la provision des freres puinés, a été abrogé du tout : Le CCLXxxIV, contenant, Quand il n’y a qu’un Fief feul en la succession, les filles sont tenues prendre leur part par estimation, qui est évaluée au denier vingt, a été abrogé du tout : Le CCCXLVIle Article, contenant, Les filles non mariées peuvent demander pour leur partage, le tiers en propriété des héritages situés au Bailliage de Caux, 6 autres lieux tenans nature d’icelui, à la charge de la provision des freres puines, cs outre ce qui leur appartient en bourgage, a été abrogé du tout.

Quant aux successions collatérales des propres de Caux, elles sont réglées, comme il a été remarqué, par les deux Articles CCC & CCCIII : ce qui sera expliqué particulièrement sur ces deux Articles.

Aprés avoir proposé dans un ordre méthodique, les regles qui sont particulieres au partage des biens de Caux, il est à propos de reprendre tous les Articles contenus sous ce Titre, suivant qu’ils y ont été placés, afin d’y faire les observations qui sont en outre nécessaires pour les faire mieux entendre.


CCLXXIX.

Les Pere, Mere, Aïeul, Aïeule ou autres Ascendans, peuvent disposer du tiers de leurs héritages & biens immeubles, ou de partie dudit tiers assis au Bailliage de Caux, & lieux tenans nature d’icelui, à leurs Enfans puînés, ou l’un d’eux, sortis d’un même Ma-riage, soit par Donation, Testament ou autre disposition solemnelle par écrit, entre-vifs ou à cause de mort : à la charge de la provision à vie des autres Puînés non compris en ladite disposition ; & de contribuer tant aux dettes que mariage des Filles, au prorata de ce qui leur reviendra de la totale succession : demeurant néanmoins le Manoir & Pourpris en son intégrité au profit de l’Aîné, sans qu’il en puisse être disposé à son préjudice, ni qu’il soit tenu en faire récompense ausdits Puînés.

Quoiqu’il semble que les puinés, ausquels le pere ou la mere ont laissé le tiers de Caux, ne possedent ce tiers qu’à titre de donation ; il est portant certain, que par l’acceptation qu’ils font de la disposition faite en leur faveur, ils. se rendent héritiers, vu qu’ils sont obligés au payement des dettes & au mariage des filles, à proportion de ce qu’ils amendent de la succession de celus qui a fait cette disposition, comme il est déclaré par cet Article.

C’est une maxime certaine en Normandie, que les préciputs qui sont accordés aux ainés, les engagent à contribuer au payement des dettes, à propor-tion de leur valeur. La Coutume de Paris est contraire en l’Art. CCCXXXIV.

VoyesLouet , D. 16. C’est pourquoi, encore qu’il soit statué par cet Artiele CCLXXIV, que le Manoir & Pourpris appartient intégralement à l’ainé, sans qu’il en puisse être dilposé à son préjudice, ni qu’il soit obligé d’en faire aucune récompense aux puinés, il a néanmoins été jugé, que l’ainé étoit tenu de contribuer aux dettes & au mariage de ses seurs, à proportion de ce precipue, comme il est atresté par l’Article L. VI dudit Réglement.

Et d’autant qu’il n’étoit pas convenable que les seurs eussent plus de droit sur ce même préciput, que leurs freres puinés, qui sont exclus d’y rien pretendre, on a de plus jugé, que la valeur de ce préciput n’entroit point dans l’estimation qu’on fait pour régler le mariage avenant des filles, suivant l’Article LVII dudit Réglement, comme il a été remarqué sur l’Article CCLXII5 de sorte qu’à cet égard, ce même préciput est considéré comme un bien qui est hors de la succession.

Mais si toute la succession consistoit au préciput de Caux, les puinés & les seurs n’auroientrils aucune légitime ; On a jugé en ce cas la même chose qu’au cas de l’Article. CCCXLVI, qui est, quand il n’y a qu’un Fief pour tous biens dans une succession, les puinés ont une provision à vie, les charges de la succession déduites, entre lesquelles sont les mariages des seurs, qui en ce même cas ont l’avantage de faire évaluer leur légitime en deniérs, suivant l’Article CCCLXI.1


CCLXXX.

La disposition dudit tiers faite ausdits Puînés, ne les exclut de prendre part & portion aux biens situés tant en Bourgage, qu’autres lieux étant hors la Coutume de Caux, si le contraire n’est declaré par ladite disposition.

Cet Article fait voir, que les peres & meres ont le pouvoir de disposer du tiers de Caux, autant pour favoriser l’ainé que les puinés, puisqu’ils peuvent ordonner, que les puinés donataires en acceptant, seront privés de prendre part aux autres biens de leur succession. Cette intention de la Coûtume paroit évidemment dans le cas qu’elle propose dans l’Article CCLXXXVII, qui est, quand l’ascendant a disposé seulement d’une partie du tiers de Caux en faveur de quelques-uns des puinés ; car en ce cas, l’ainé a l’autre partie du tiers de laquelle il n’a point été disposé : de sorte que les puinés qui n’ont point été compris dans la donation, n’ont aucune propriété, mais seulement une pension à vie, qui leur doit être fournie par l’ainé & par les donataires, à pro-portion de la part que les uns & les autres auront en la propriété du tiers ; & conséquemment cet usufruit s’éteignant par la mort des puinés ausquels il appartenoit, la propriété en appartient à l’ainé ou à ses représentans, par rapport à cette proportion, suivant laquelle l’ainé a dû contribuer au payement de ladite pension.2

Mais cette même intention paroit encore par l’Article CCLXXXVIII, & les suivans, jusqu’au CCXCV, par lesquels il est déclaré, que les puinés donataires renonçans à leur don, sont privés de la propriété du tiers qui leur eût appartenu, si leur pere ou mere n’avoit point disposé du tiers ou de partie d’icelui ; & qu’en ce cas de renonciation, ils ne peuvent demander qu’une provision à vie, qui ne consiste qu’en l’usufruit du tiers des biens situés en Caux laquelle d’ailleurs ils ne peuvent avoir, sans s’exclure de prendre part à tous les autres biens immeubles de la succession, comme il est disposé par l’Article CCXCIV, par où l’on voit qu’un pere faisant une disposition désavantageuse à ses puinés, les engage à laisser la propriété du tiers à l’ainé, en re-nonçant à cette disposition ; & que s’ils l’acceptent, il les peut priver de prendre part à tous ses autres biens immeubles. Il paroit par l’Arrêt de Mr du Mesnil-Costé, du 3 Août 164t, rapporté par Basnage sur l’Article Cexe, qu’un pere ayant disposé d’une petite portion du tiers de Caux, à l’égard de son fils puiné qui étoit seul : ce puiné n’ayant point voulu accepter cette disposition, l’ainé soutint contre lui, que sil renonçoit, il ne pouvoit avoir aucune propriété au tiers de Caux, mais seulement un usufruit ; & qu’en ce même cas, il demeureroit exclus de prendre part à tous les autres biens immeubles de la succession, en prenant cet usufruit. Il fut jugé par cet Arrêt, que le Testament du pere, qui contenoit cette disposition, seroit exécuté.


CCLXXXI.

Et où ledit Donateur ou Testateur convoleroit en secondes Nôces, ou auroit Enfans de divers lits ; en ce cas il ne pourra faire la condition des Enfans d’un lit meilleure que celle des autres lits.

Cet Article explique ces mots de l’Article CCLXXIX, CEnfans puines, on l’un d’eux sortis d’un même Mariage. y3


CCLXXXII.

Le Donateur ou Testateur pourra, si bon lui semble, ordonner que la portion d’un Puîné mourant sans Enfans, accroîtra aux autres Puînés, sans que l’Aîné y prenne part.

Voila une substitution autorisée par la Coutume en cet Article ; c’est pourquoi par l’Article LIV dudit Réglement il est attesté, que quoiqu’en Nor-mandie on ne puisse instituer un héritier, ni substituer à la part que la Coûtume donne aux héritiers, cela ne préjudicie pas aux dispositions permises dans le Titre des Successions en Caux. Cette substitution d’ailleurs dépend de la maxime exprimée par l’Article suivant dudit Réglement, qui est, que le donateur peut aussi entre-vifs & par Testament, ordonner que les choses par lui données, passeront apres la mort du donataire, à celui ou à ceux qu’il aura nommés par la donation ou Testament.

Il faut remarquer qu’il n’y a que le cas de cet Article CCLXXXII qui soit ouvertement contraire à l’intérét de l’ainé, en tant que par la substitution que les peres & meres peuvent faire l’ainé est privé du droit de succéder aux puinés, qui ont été lubstitués réciproquement les uns aux autres.

Mais il faut de plus remarquer, que cette substitution est limitée à la personne des puinés, qui peuvent succéder. les uns aux autres, quand ils meurent sans enfans ; mais elle ne s’étend point hors du cas de la succession au premier degré, qui est des frères, de sorte que quand il s’agit de la succession d’un oncle où d’un neveu, cette substitution n a pas son effet.4 Il a d’ailleurs été jugé par un Arrêt du 30 de Juin 1638, rapporté par Basnage, que cette substitution ne pouvoit être faite par les peres & meres à l’égard de la dot des filles, à la succession de laquelle les puinés ne peuvent être substitués, à l’exclusion de l’ainé.


CCLXXXIII.

La disposition est réputée solemnelle, en laquelle est observé ce qui est prescrit par les premier & second Articles du Titre des Testamens.


CCLXXXIV.

La disposition & donation du tiers ou partie dudit tiers, faite à tous les Puînés est bonne, en quelque-temps qu’elle soit faite ; mais si tous les Puînés n’y sont compris, elle ne sera estimée valable au profit des Donataires, si elle n’est faite quarante jours auparavant la mort du Donateur, & en reviendra le profit à tous les Puînés ensemble.


CCLXXXV.

La même liberté accordée aux Hommes, est pareillement concédée aux femmes, encore qu’elles soient en la puissance du Mari, & ne se soient réservées permission de tester par leur Contrat de mariage, & en pourront disposer sans le consentement de leur Mari.

CCLXXXVI La disposition faite entre vifs n’est sujette à l’insinuation du vivant du Donateur ; mais soit entre-vifs ou à cause de mort, il faut qu’elle soit insinuée six mois après la mort, à peine de nullité, & sert l’insinuation d’acceptation.


CCLXXXVII.

Le Puîné ou Puînés au profit desquels aura été fait donation ou disposition dudit tiers ou de partie d’icelui en acceptant icelle, ne pourra demander provision à vie sur le surplus, laquelle provision appartiendra aux autres Puînés non compris en ladite disposition, qui retournera aprés leur mort au Frere aîné ou ses Héritiers.

Ces cinq Articles & les quatre précédens, déclarent par qui, en faveur de qui, & comment la donation du tiers de Caux doit être faite à tous les puinés, où à quelques-uns d’eux ; & sont de plus connoître quels sont les effets de cette disposition, lorsqu’elle est acceptée par les donataires, suivant ce qui a été remarqué dans le discours général.5


CCLXXXVIII.

Mais si les Puînés donataires veulent renoncer à leur don ou disposition, ils auront leur provision à vie avec les autres Puînés.


CCLXXXIX.

En ce cas, le Frere aîné a la succession de ses Pere & Mere, Aïeul, Aïeule & autres Ascendans, sans en faire aucune part ou portion héréditaire à ses Freres puînés.


CCXC.

Les Freres puînés renonçans à ladite donation ou disposition, ne peuvent demander partage à leur Frere aîné ; ains se doivent contenter de la provision à vie, qui n’est que la troisieme partie en l’usufruit des héritages délaissés après la mort du Pere, Mere, Aïeul ou Aïeule, & conséquemment de tous autres Ascendans en ligne directe.


CCXCI.

Tous les Puînés ensemble ne peuvent audit cas, demander plus d’un tiers pour leur provision, laquelle après le décès de tous les Puînés retourne à l’Aîné, sans que leurs Enfans y puissent prétendre aucune chose.


CCXCII.

Ne peuvent les Puînés pour leur provision contraindre leur Frere aîné ou ses Enfans, à partager les Fiefs ; mais se contenteront de Rotures, & de tous autres biens qu’il leur pourra bailler, revenans néanmoins à la valeur qui leur peut appartenir.


CCXCIII.

Si en ladite Succession y a Héritages assis, partie en lieux où l’on use de la Coutume de Caux, & partie hors de la disposition d’icelle, l’Aîné prend tout ce qui est en Caux ; & outre il partage avec ses Freres les biens qui sont hors Caux, & a le choix par préciput, si bon lui semble, tout ainsi que s’il n’y avoit point de biens en Caux.


CCXCIV.

Et en ce cas, les Puînés ont le choix de demander provision aux

biens situés sous la Coutume de Caux, ou bien prendre partage aux biens situés hors ladite Coutume, en l’un des six autres Bailliages ; & en prenant l’un, ils perdent l’autre, encore que le partage fût pris en Bourgage.

Ces sept Articles expliquent les effets & les suites de la répudiation que les puinés donataires fout de la donation ou disposition faite par leurs ascendans, ce qui est un membre de la subdivilion qui a été faite & expliquée audit discours général, à quoi il ne se à pas inutile d’ajouter, que quand il est dit en l’Articie CCXCI, que la provision à vie retourne à l’ainé aprés le déces de tous les puinés, on doit entendre, que toute cette provision est éteinte entierement par la mort de tous ceux qui y avoient part ; mais non pas qu’elle ne se peut éteindre divisément & en partie par la mort d’un chacun des puinés ; car la part qu’un prémourant avoit à la provision, n’accroit pas aux survivans.6


CCXCV.

Mais si lesdits Pere, Mere ou autres Ascendans décedent sans disposition ou testament, le tiers de toute la succession appartiendra propriétairement aux Puînés ; demeurant néanmoins à l’Aîné le Manoir & Pourpris, sans aucune estimation ou récompense.


CCXCVI.

L’Aîné pourra retirer ledit tiers un an aprés le décès de son Pere, s’il est Majeur, ou s’il est Mineur, un an après sa majorité, en payant le denier vingt pour les Terres Roturieres, & le denier vingt-cinq pour les Fiefs Nobles : ce que pareillement pourront faire les Tuteurs des Enfans de l’Aîné, s’il décede devant son Pere, ou aupara-vant que d’avoir fait ladite déclaration, sans pour ce payer Reliefs ni Treiziemes.

Ces deux Articles & le CCCII, reglent comment la succession des biens de Caux en ligne directe doit être partagée entre les freres, quand les ascendans n’ont fait aucun Acte de derniere volonté, touchant leurs biens immeu-bles situés au Pays de Caux ; car l’Article CCXCVI, ne se doit entendre que quand les puinés ont le tiers par la disposition de la Loi ; car quand ils l’ont par la volonté de leurs pere ou mere, l’ainé ne le peut retirer, suivant qu’il est attesté par l’Article LVIII dudit Réglement, ce qui fait voir qu’il est quelquefois plus avantageux d’avoir le tiers de Caux par la volonté des ascendans que par la disposition de la Loi.7

On a demandé, si les Tuteurs des enfans de l’ainé peuvent retirer ce tiers apres l’an & jour ; c’est-à-dire, si les Mineurs auront encore la faculté de retirer dans l’an de leur majorité. Il y a grande raison pour répondre, que ce droit de retirer est de la même condition que les autres retraits, dont le temps. court aussi-bien contre les Mineurs que contre les Majeurs, sans espèrance de restitution, par l’Article CCCCLVII, que si la Coutume a accordé aux ainés.

Mineurs le droit de retirer dans l’an de leur majorité, c’est un cas particulier qui ne doit pas être tiré à conséquence ; parce que quand l’ainé est Mineur il est nécessaire que ses puinés soient Mineurs : c’est pourquoi il n’y a point d’inconvénient à proroger le temps de ce retrait jusqu’apres l’an de la majorité de l’ainé. Mais quand les enfans de l’ainé sont Mineurs, il peut arriver que leurs oncles sont Majeurs auparavant le déces de leur frere ainé, & partant si on prorogeoit le temps du retrait jusqu’à la majorité de leurs neveux, ils demeureroient trop long-temps dans l’incertitude de leur partage. C’est pour-quoi la Coûtume, en l’Article CCXCVI, a expressément déclaré, que les Tuteurs des enfans de l’ainé peuvent faire ce retrait.


CCXCVII.

Les Filles seront mariées sur les meubles délaissés par les Pere, Mere & autres Ascendans, s’ils le peuvent porter ; & où ils ne seroient suffisans, le Mariage se payera à la proportion de toute la succession, tant en Caux, Bourgeoisie, que hors Caux, pour la part qui écherra tant à l’Aîné que Puînés.


CCXCVIII.

Et où lesdits Freres seroient négligens de les marier elles se pourront marier ayant atteint l’âge de vingt-cinq ans, par l’avis de leurs Parens & Amis, qui ne pourront estimer le mariage de chacune fille à plus que l’une des portions des Puînés.


CCXCIX.

Le Fils aîné aura la garde de ses Soeurs jusqu’à ce qu’elles se marient, en contribuant par les Puinés à la nourriture & entretienne-ment, au prorata de ce qu’ils auront de la succession.

Il faut voir ce qui a été dit de la legitime des filles, dans le discours général, & remarquer l’Arrét des Demoiselles Baillard, par lequel il fut jugé, qu’ayant été réservées à partage, elles ne pouvoient avoir aucune part aux biens de Caux ; mais seulement sur les autres biens dépendans de la Coûtume générale ; & qu’en renonçant à la qualité d’héritieres qu’elles avoient prise à quoi elles furent autorisées par l’Arrest ) elles auroient leur mariage avenant, eu égard à la valeur de tous les biens de la succession de leur pere qui les avoit réservées, tant en Caux que hors Caux. L’Arrét & les raisons de part & d’autre sont rapportés par Basnage sur l’Article CCLXXIX ; mais il a omis la principale raison, qui peut prouver que les filles ne doivent pas être reques au partage des biens de Caux, qui est, que par la Coûtume réformée, tous les Liens ont été partagés entre l’ainé & les puinés ; l’ainé ayant les deux tiers & le préciput, & les puinés l’autre tiers : de sorte qu’il ne reste plus de part qui puisie être attribuce aux filles ; ce qui n’étoit pas dans l’ancienne Coutume, par laquelle les puinés n’ayant aucune part ou propriété, les seurs pouvoient avoir le tiers des biens de Caux en propriété pour leur partage, au cas qu’elles y fussent réservées : mais en ce cas, elles étoient obligées de porter l’usufruit qui appartenoit aux puinés ; comme il a été remarqué dans le Discours général, où l’on a référé un Article, qui étoit le CCLXXXII de la Coutume, & qui fut du tout abrogé en 1586.8


CCC.

Si aucun des Puînés décede sans Enfans, l’Aîné aura les deux tiers aux biens de la succession paternelle ; & les Puînés, l’autre tiers.


CCCIII.

Le Frere aîné a l’ancienne succession de ses Parens collatéraux, sans en faire part ou portion à ses Freres puînés.

Ces deux Articles se doivent interpréter par ce qui est attesté par les Artides LIX & LXI dudit Réglement, qui font connoître clairement que l’Arti-cle CCCIII, en attribuant l’ancienne succession des parens collatéraux au frere ainé, sans en faire aucuné part à ses freres puinés, n’a pas compris les freres sous la qualité de collatéraux, puisque le frere ainé n’a que les deux tiers en la succession de ses freres puinés, quant aux biens qui sont de l’ancienne succession, qui sont indubitablement ses propres : ce qu’il faut néanmoins limi-ter aux propres qui sont provenus du pere ou des autres ascendans ; car si la succession d’un frere étoit composée en partie de biens qui lui fussent échus par succession collatérale, il paroit que l’ainé & ses descendans devroient hériter de tous ses biens, à l’exclusion des puinés & de leurs descendans, suivant la restriction bien exprimée en l’Article CCG, à l’égard des biens de la succession paternelle9 Ce qui doit paroître plus étrange, est ce qui est attesté par l’Article LX dudit Réglement, que le frere ainé étant décedé, toute la succession de ses propres appartient au second fils ; c’est-à-dire, au plus âgé des puinés, à l’exclusion de ses autres freres : vu qu’à l’égard de l’ainé, que la Coûtume de

Caux favorise en toutes rencontres, la succession d’un de ses freres n’est point réputée une ancienne succession d’un collatéral, puisqu’elle ne lui est point attribuée entière, mais qu’il la doit partager avec ses autres freres : & qu’au contraire sa succession est attribuée au plus âgé de ses puinés toute entiere, comme d’une ancienne succession collatérale.

Ce que l’on a jugé pour la succession des frères, a été jugé pour la succession des seurs, dont les dots ont été remplacées en biens de Caux, ou consignées sur les biens du mari situés en Caux ; car l’ainé n’y a que les deux tiers, & les puinés y ont l’autre tiers.

Quand tous les freres sont décédés, & qu’il s’agit de partager la succession d’un oncle au propre, cette succession est ancienne, & les enfans de l’ainé l’ont toute entière, à l’exclusion des enfans des puinés : mais quand il y a un frère survivant, la succession d’un de ses frères se partage avec lui & les enfans de ses autres freres décédés, comme il est déclaré par ces deux Articles dudit Réglement, parce qu’en ce cas il s’agit de la succession d’un frere, qui est le premier degré de la collatérale, dans lequel on a établi un ordre particulier de succéder au propre pour le Pays de Caux10.

Sed quid ) Si le pere ayant substitué les puinés les uns aux autres pour le tiers de Caux, à l’exclusion de l’ainé, suivant l’Article CCLXXXII, l’un des puinés vient à décéder sans enfans, comment la part qu’il avoit cue audit tiers sera-t’elle partagée entre les autres puinés également, ou le plus âgé d’iceux aura-t’il les deux tiers à Il semble que non, parce que le droit d’ainesse, qui consiste dans l’inégalité du partage, n’appartient qu’à l’ainé, les puinés partageans entr’eux également, en sorte que l’ainé étant exclus du partage des biens substitués, ces biens se doivent partager entre les substitués, de la même maniere qu’ils l’avoient été en conséquence de l’institution ; c’est-àdire, de la donation faite par les ascendans.


CCCI.

Les Puînés ayant ledit tiers en propriété, pourront néanmoins prendre part aux biens situés hors la Coutume de Caux.


CCCII.

S’il n’y a qu’un Fief noble en ladite succession sans Rotures, les Puînés n’y auront que leur tiers à vie, suivant la disposition de la Coutume générale ; & outre, ont part ès autres lieux.

Ces deux Articles se rapportent, au cas que les pere & mere & autres ascendans, n’ont fait aucune disposition du tiers de Caux, comme il a été remarqué.11



1

Il y a des extensions de la Coutume de Caux dans la Vicomté de Roüen ; les partages & les droits de ceux qui y resident & y ont des fonds, se gouvernent par les principes de cette Coûtume ; mais on ne présume point que des héritages situés sous la Vicomté de Roüen dependent de la Coutume de Caux : Arrêt du 2 Avril 1745.

On observoit autrefois dans le Comté d’Eu l’ancienne Coutume de Caux ; on en a conservé plusieurs des maximes dans la réformation de 1580. Quoique cette Coutume soit défigu-rée par l’intrusion de quelques principes puisés dans des sources étrangeres, elle mérite d’être consultée. Voyey le Coutumier général, tome

Il n’est pas toujours aisé de bien limiter le préciput de Caux, il semble réduit, par la Coutume, au manoir & poupris en son intégrité, cependant il seroit souvent périlleux d’en détacher des objets qui, sans en être une dépendance essentielle, ne semble convenir qu’à lui, une avenue, un bouquet de bois, une masure acquise par le pere de famille, qui joint à la proximité du manoir la destination de l’union, tout cela n’est il pas l’appanage du manoir à Si vous en privez l’ainé, vous l’exposez à une lezion dans le partage, ou a des discussions de longue durée, ou vous le forcez de souffrir un voisin incommode ; vous lui enlevez enfin les avantages de la Loi : d’un autre côté, cette Loi est déja trop onéreuse au puiné, & on ne peut, sans injustice, rendre, pour l’agrément de l’ainé, sa condition plus mauvaise. L’équité, dans ce cas, conseille un tempérament ; on accorde à l’ainé ce qui peut lui procurer une habitation commode & agréable : mais on le condamne à rembourser à son puiné la vraie valeur de ce qui n’est point le manoir & le pourpris que la Coutume lui défere : Arrêt du 22 Mars 1727.

Voyez mon Observation sur l’Art. CCCLVI


2

Le pere, en défendant au puiné, par l’acte de disposition d’un bien de Caux en sa faveur, de prendre part, tant aux biens de bourgage qu’à ceux sirués hors la Coutume de Caux, ne statue pas sur le sort des biens de Coûtume générale ou de bourgage ; cette faculté lui est interdite, mais il impose seulement une condition à la donation de Caux, de sorte que le puiné renoncant à la donation, peut prendre part aux biens qui ne sont pas gouvernés par la Coûtume de Caux,


3

L’intention de la Coutume est de prétunir un pere contre les dangers de la séduetion d’une seconde ou troisieme femme ; il n’en est que trop qui n’auroient rien négligé pour persunder à leur mari de gretifier de la propruté d’tiers des héritages les enfans sortis de leur mariage, & réduire à la provision les fruits d’un autre hymen.


4

Observez que dans le cas de la substitution permise par cet Article, le frere puiné ayant succedé à son frère ainé, ne peut concourir dans la succession d’un autre puiné avec son troisieme frère : Arrét du 3 Mars 1643.

Puisque cet Article ne renferme point une substitution proprement dite, le puiné pourra disposer de sa portion, quoique le pere ait ordonné que par son déces elle accroitra aux au tres puinés survivans à l’exclusion de l’aine, d’autant que la disposition du pere ne milite que contre le frère aine, & n’affecte point la part du puiné pendant sa vieSi le puiné échange les biens de Caux contre des biens de Coûtume générale, s’il les aliene & les remplace en héritages hors Caux, l’espèce de substitution du pere s’évanouit, le frère ainé entre en partage avec les puinés des fonds acquis sous une autre Coûtume que celle de Caux, sans examiner la source dont ils proviennent, par la regle que les héritages se partagent suivant la Coutume des lieux où ils sont situés, au temps de l’echéance de la succession.


5

Le délai de quarante jours est de rigueur, & on ne distingue point si la donation a été faite en santé ou en maladie.Bérault , sous l’Article CCLXXXIV.

On est forcé de reconnoître que cet Article n’est pas toujours fort avantageux au pusné, qui n’est point compris dans la donation. Supposez qu’il appartienne de droit a deux puinés pour le tiers de la succession, mille livres de revenu, & que quelques jours avant de mourir le pere ait donné à l’un d’eux un fonds du produit de 40y liv. ; en partageant ce fonde en deux, chacun aura 2o0 liv. de revenu, ce qui ne vaudra pas un usufruit de 500 liv. La disposition de la Coûtume ne profite au puiné non donataire que lorsque la part qu’il peut recla-nier en la donation est de plus grande valeur que sa provision.

Les donations que la femme peut suivant l’Article CCLXxxV, faire à ses enfans en Caux ne préjudicient point le droit de viduité du mariQuoique Godefroy ait bien observé, sous l’Article CCIXXXVII, que la disposition de la Coutume est imparfaite, puisque les peres ont la liberté de l’éluder on peut dire qu’un pere se sert de la Loi comme d’un aiguillon pour faire observer la vertu dans sa maison, ou d’un frein pour retenir ses enfans dans les bornes du devoir.


6

Terrien , ibid, dit que, selon l’ancien droit, il n’y avoit que les puinés des maisons nobles qui pussent exiger une provision sur leur frere aiue. En Caux, entre Roturiers, il sussi soit que l’ainé entretint ses freres puinés, qu’il leur fit apprendre un métier, ou qu’il leur facilitât par toute autre voie les moyens de se pourvoir : cette rigueur s’adoucit enfin, & par Arrêt du 2d l’anvier 1521, il fut arrété que les puinés de Caux, sans distinction de la naissance, auroient en provision à vie le tiers des héritages de la succession de leur pere, rabattu, dit le même Auteur, la portion des filles. L’Auteur des Additions surTerrien , dit que cette provision avoit été préjugée en faveur des Roturiers comme des Nobles, par Arrêts des 14 Mars 151s & trois Février 1518.

Bérault , sous l’Article CexC, dit que l’ainé déduit sur la provision des puinés leur part contributive aux charges ; car sans cette déduction, ajoute-til les puinés jouiroient des biens de la succession au delâ du tiers, contre la disposition précise de la Coûtume. Basnage déclare, sous l’Article CCeXLVI, que le puiné ayant le tiers du Fief à vie, doit payer le tiers des charges & des rentes, de sorte que si l’ainé en fait le rachat, il peut exiger l’intéret du puiné sur le taux fixé par l’Ordonnance dans le temps de l’amortissement.

Terrien , Liv. 6, Chap. 4, dit que la provision est incompatible avec le partage des biens de bourgage, situés dans le pays de Caux ; mais il ajoute que si les puinés partagent avec leur ainé des fonds situés hors la Province de Normandie, ils pourront cependant demander une provision sur les héritages de Caux, comme il fut, dit-il, jugé par Arrét du ar Juillet 3536 entre les freres Marchis.

L’Article CexCI peut donner matière à une contestation entre l’ainé & les puinés sur le retour de la provision, & il a été jugé par un ancien Arrêt rendu en GrandiChambre sur un partage des Enquêtes, que la part d’un puiné décéde revient aux autres puinés. Bérault est de cet avis ; Basnage le trouve équitable ; mais il observe qu’il ne seroit pas suivi dans la rigueur. Péronne, Art. CLXXV, dit que le quint viager ne revient à l’ainé que les puinés ne soient décédes. Ponthieu, Tit. 1, Art. I, dispose au contraire, que si aucun des puinés va de vie à trépas, appréhension par lui faite du quint, sa part revient à l’héritier, & non en rien aux enfans. Cette derniere opinion paroit véritable, puisqu’il n’est question entre les puinés que d’une provision alimentaire L’Artiele CexCII prouve que les puinés, quoique réduits à une provision à vie, peuvent demander partage des corps héréditaires, sous la limitation de la Coutume, d’où il faut conelure, quand on ne veut point forcer le sens du texte, que l’ainé ne peut les contraindre de recevoir une composition annuelle en argent.


7

L’ainé peut, en Caux comme en Coûtume générale, choisir un Fief par préciput Noble ; & S’il y a plusieurs Fiefs, le premier puiné d’aprés lui a la même liberté, & les Rotu-res demeurent aux autres puinés sans aucune prérogative entr’eux ; mais ils ont cet avantage, que l’ainé n’est pas recevable à les rembourser des Rotures : Arrêt de ce Parlement, y présidant M. le Chancelier Séguier.

Quand on ne s’arrête qu’au texte de la Coutume, on est tenté de penser que si une succession de Caux est composée de Fiefs & de Rotures, les Fiefs se divisent entre l’ainé & les puinés, comme entre filles, à l’exception néanmoins que l’ainé seul en a les deux tiers. Les étrangers entrainés par leur Jurisprudence, doivent naturellement adopter cette idée ; cependant ce n’est pas l’intention de la Coutume, même de Caux. Quand les Auteurs disent que les Fiefs y sont mis en partage ils veulent signifier qu’ils ne sont pas choifis comme préciput Noble, les puinés peuvent bien avoir, dans leur partage, un Fief noble s’il s’en trouve plusieurs, partie du Domaine non fieffé, & des Rotures ; mais quand il n’y a qu’un seul Fief & des Rotures, ils ne peuvent démembrer le Fiefi

Des Coûtumes qui, comme la nôtre, donnent à l’ainé le droit de rembourser les puinés de leur part héréditaire, ne font commencer le delai que du jour du partage : cette précaution est juste ; car des puinés peuvent, sur des incidens, tenir long-temps leur frere aine dans les entraves d’un proces. Cependant les termes de notre Coutume sont précis, & il n’est pas permis de les étendre : on peut dire qu’il suffit, parmi nous, que l’ainé intente son action dans le délai de la Loi, sfur l’action on liquidera les sommes à rembourser, & en cas de refus la consignation aura lieu.

Les baux du pere commun paroissent être d’un grand poids quand on ne peut les soupconner d’avoir été concertés par quelque motif particulier ; ils ne suffisent cependant pas pour fixer l’estimation des fonds. Un Auteur célèbre a proposé de s’arrêter aux trois derniers baux : méthode qui n’est point assez exacte ; la convention d’Experts dans le doute peut seule fixer’incertitude, & il seroit à souhaiter qu’elle pût être déterminée par les parens. L’estimation. doit se faire, ditBasnage , sur la véritable & ordinaire valeur des fonds. EtRicard , sur Amiens, ajoute que l’intention de la Coûtume n’est pas de rien ôter aux puinés de leur portion, mais de les récompenser de ce qu’ils quitrent suivant sa juste valeur, en leur donnant moyen d’acheter un autre héritage de pareille qualité

La plupart des Auteurs étrangers prorogent le délai de rembourser les puines, àcause de la minoriré du fils de l’ainé mort, dans le temps de droitRicard , sur les Art. LXXIII, LXXIV LXXV d’Amiens ; la Villette, sur l’Art. CLXXl de Péronne. Ils invoquert l’autorité de duMoulin , sur l’Art. CCXV de Bourbonnois : Si non plenè S pefecie jus quesitum, & medium inhabile interveniat, quod impediet extremoram conjunctionemt, tute extrema non conjunge, & ils disent que le cours des délais statutaires est intetrompu quand il vient à tomber en lapersonne d’un mineur héritier de celui avec lequel la prescription avoit commence de courir.

Notre Jurisprudence est plus équitable, en accordant ur temps meins long pour enlever aux puinés une propriété qui leur est acquise en vertu de la Contume.

Bérault remarque que le frere ainé ne peut céder & transporter le droit qu’il a de retirer le tiers des puinés : car la Coutume, en accordant à l’ainé cette façulté, n’a eu d’autre vue que celle de réunir sur sa tête la totalité des héritages de ses pere & mére ; c’est encore l’opiniont de cet Auteur, que la portion des puinés retirée par le frère aire, est un propre dans sa succession, d’autant que le retrait dérive de la Coûrume qui déferoit, avant la réformation, à l’ainé la propriété universelle des biens de ligne directe.


8

Lorsqu’il y a en Caux un ou plusieurs Fiefs nobles choisis par préciput, on liquide le mariage avenant des filles de même que dans la Coûtume genérale ; mais si la succe ssion censiste en effets mobiliers, biens roturiers ou Fiefs nobles mis en partage, on s’attache à con-noître le nombre des frères & des soeurs pour faire un juste caleul des droits des suurs Lorsqu’il y a plus de soeurs que de freres puinés, on donne aux siiles le tiers entier de la succes-sion, sans y. comprendre le préciput de l’ainé ; s’il y a plus de freres puinés que de sigurs, il faut faire à chacune des filles un mariage égal à la part de chacun puinè, fa contribution au mariage déduite ; mais le nombre des freres puinés & des suurs est il éual, donnez à toutes les filles le quart de la succession, & n’y comprenez pas le préciput de l’ainé.Everard .

La différence qui regne entre la Coutume générale & la Coutume de Caux, exige deux observations. 10. En Coûtume générale le préciput noble pris par l’ainé, peut augmenter le ma-riage des filles en proportion qu’il diminue la contribution des puinés. En Caux, le manoir & pourpris prélevé par l’ainé n’augmente point le mariage des filles, quoique l’ainé y contribue à cause de ce même manoir : Art. LVI & LVII du Réglement de 1obs, & cette maxime ne me paroit pas difficile à entendre, Supposez que le nombre des seurs excede celui des freres & qu’il y ait un préciput valant le quart de la succession, le mariage des seurs est du tiers qui reste aprés le préciput levé, l’ainé y contribue seul d’un quart & des deux tiers ; comme la contribution du quart va uniquement à la décharge des puinés, sans augmenter le ma-riage des seurs, la condition des freres puinés devient meilleure. 20. En Coûtume générale, pour régler la contribution, on fait une masse du mobilier qui supporte la contribution au sol la livre du mariage des filles : en Caux, les meubles délaisses par les pere & mere & autres ascendans doivent être employés au mariage des filles, s’ils peuvent suffire ; & lorsqu’ils sont insuffisans, les mariages doivent être payes à proportion de toute la succession, pour la part qui échoira, tant à l’ainé qu’aux puines ; cela veut dire uniquement qu’apres la liquidation du mariage avenant, il faut, pour le payer, épuiser d’abord le mobilier des suc-cessions qui le doivent : pratique tres préjudiable aux puinés, dont la contribution peut être riage avenant des filles ; mais on déduit auparavant toutes les dettes mobilieres passives de aussi forte que celle de l’ainé, dans le cas où les meubles sont en état de supporter le mala succession, non sunt enim bona nisi deducto cre alieno. D’ailleurs cela n’a pas lieu lorsque le pere décede domicilié en bourgage, quoique dans l’etenduë de la Coutume de Caux : Arret du 2 Decembre 1701.Basnage .

Pesnelle conclut de l’Arrét des Demoiselles Baillard, tres-difficile à combiner dans ses dispositions, que la réserve à partage ne peut avoir lieu en faveur des filles sur les biens de Caux.

Il a fort bien remarqué qu’en 1586 on a abrogé les Articles CCLxxxII, CCLxxxIV & CCCXLVII, qui l’autorisoient par des dispositions relatives. On ne dira pas, en effet, aprés cette abrogation, que la Coûtume de Caux ne renfermant aujourd’hui aucun Article qui soit en ce point contraire à la Coutume générale, rien n’empéche d’y observer une Loi qui régit le reste de laProvince : le Proces-verbal de l’an 158Sest un monument qui ne cesse de déposer contre cette opinion. Si les habitans de Caux eussent voulu conserver une pareille liberté, ils n’au-roient pas détruit, en 1586, de la manière la plus expresse, ce qui avoit été proietté avec répugnance en 1583. Ils ne pouvoient mieux marquer leur intention de s’éloigner de la Coutume générale ; le pouvoir arbitraire des ascendans peut réduire les puinés mâles à un simple viage ; ils auroient eu à combattre, en adinettant la faculté de réserver, & le fils de la prédileetion de la Loi, fondée sur les moeurs du peuple, & l’assiduité constante des soeurs dans la maison, toujours à portée de se faire remarquer de leurs parens, & vanter leurs services ; on n’auroit vu que des puinés viagers. Aussi l’opinon de Pesnelle paroit être l’opinion dominante du Barreau ; les partisans de la réserve pensent qu’elle ne peut avoir lieu que dans le concours d’un frere & une seur, ou lorsque les painés ne la contestent pas formellement.

Dans l’espece du célebre Arrêt du y Juillet 1vr8, qui confirme la réserve en Caux, la Demoiselle de Brosville n’avoit point de frère ainé, & dans l’espece d’un pareil Arrêt en 1724, les freres ne la contestoient pas. Si un frere recoit en Caux sa suur à partage, & que le par tage ne nuisse être commodement & sans division assigné sur une terre noble, il sera pris sur les Terres roturières de la même succession ; & dans le cas d’insuffisance, il suffira au frere de lui constituer une rente au denier 2o : Arrét du dernier Mai 1560. Sentence des Requêtes du Palais, du premier Août 1rôz.


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Brodeau , sur Loiiet, Som. 13, n. 3, dit, en parlant du quint hérédital en usage dans plusieurs Coûtumes, & qu’on peut assimiler au tiers de Caux, que le quint hérédital est une légitime coutumière qui appartient solidairement, & pour le tout, à chacun des puinés, lesquels sont substitués les uns aux autres jusqu’au dernier à l’exclusion perpétuelle de l’ainé, comnes unus sunt & pro uno habentur. Les habitans du Comté d’Eu ont fait ajouter à l’Art.

CXIV de leur Coûtume, Tit. des Successions, sauf que de biens patrimoniaux la part du puiné uéeédé sans enfans, ou sans avoir disposé par acte entre-vifs, doit retourner aux autres puinés, sans que l’ainé y puisse prendre aucune chose ; l’Article CCC de la Coutume de Caux appelle au contraire l’ainé dans le cas de décés d’un puiné sans enfans, aux deux tiers de la succession paternelle. Voyez Amiens, ClXXXI, & les Commentateurs sur cet Article La Coûtume n’a point décidé comment les deniers du remboursement fait par l’ainé à un puiné de sa part héréditaire en Caux, qui se trouveront dans sa succession, se partageront entre l’ainé & les puinés survivans. Réputera t’on ces deniers meubles ou immeubles & mé-me propre de Caux I On peut dire que la part du puiné avant passé sur la tête de l’ainé par le retrait, elle n’est point sortie de la famille ; il y a de la différence entre l’effet du retrait de l’ainé & celui d’une aliénation faite par le puiné de sa part à un étranger. Les Auteurs qui ont écrit sur le Retrait du quint hérédital usite dans plusieurs Coûtumes, estiment que le prix doit tenir lieu de la chose, & ils citent duMoulin , 5. 20, n. 61 de l’ancienne Coutume de Paris : Quantum ad hoc ne quis indebite lucretur ex aliend re, vel alteri debita protium bene succedit luco rei. Si l’on peut réputer les deniers meubles, les puinés les partageront également, si on les répute propre de Caux, l’ainé y aura les deux tiers ; & les Auteurs étran-gers, qui leur communiquent la nature du fonds, ont en vue l’intérét des puinés, à cause que seurs Coûtumes ont des dispositions contraires à la nôtre. Voyes Dufresne, sur Amiens, des Successions. Ce qu’il y a de certain, c’est que Basnage répute propres les acquêts faits des deniers du remboursement de Caux. Quelques uns pensent qu’on doit réputer les deniers pro-pres de Coûtume genérale ; mais si le puiné est décédé sous la Coutume de Caux, on ne peut réputer ces deniers propres, sans les reputer propres de Caux.


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On a jugé le y Août 1750, que le fils ou la fille du premier puiné a l’entière succession en Caux des propres de son oncle, frère ainé de son pere ( tous les freres étoient décé-dés ) c’est communiquer au fils les avantages que son pere auroit eu par l’Article LX du Reglement de 1666.

Dans la succession d’un puiné héritier aux acquêts de son oncle, ces acquêts devenus propres, sont régardés comme une dépendance d’une succession ancienne.Basnage .

Quand la veuve, par voie de décret ou d’envoi en possession, prend des biens de son mari hors Gaux pour lui valoir de remplacement de ses fonds situés en Caux, quelques déclarations que la femme passe, ce remplacement se partagera suivant la Coûtume générale.Berault . Concluez de l’Article CCCIII que les puinés en Caux peuvent être donataires en ligns gollatérale du tiers de l’ancien propre.


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Puisque cet Article est de Coûtume générale, l’ainé n’a aucun prétexte pour distraire le Manoir principal, & affoiblir ainsi la provision des puinés. Basnage agite une question inutile.