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A PRES que la Coutume a fait connoître dans les trois Chapitres immediatement précédens, les différences des successions à l’égard des lignes directes & collatérales, à l’égard des personnes mâles ou femelles, à l’égard des biens, soit à raison de leur qualité, comme Fiefs ou Rotures, propres ou acquêts & conquêts, soit à raison de leur situation, comme dépendans de la Coutume générale, ou de la Coutume de Caux, ou étant en bourgage : elle fait un quatrieme Chapitre, qui est celui-ci, dans lequel elle propose des choses communes à toutes ces diffé rentes matieres.1 On le peut diviser en quatre parties. La première, contient l’inégalité dos partages, tant par l’option des préciputs, que par les autres avantages qu’ont ies ainés : elle est comprise dans dix-ncuf Articles ; sçavoir, dans les dix-sepe premiers & les CCCLV & CCCLVI. La seconde, prescrit ce qu’on doit observer pour faire les partages ; elle se traite en trois Articles, qui sont le CCCLII & les deux suivans. La troisième partie reprend ce qui est de partieulier pour les filles, soit qu’elles soient leules héritiers, soit qu’elles soient reçues à partager avec leurs freres, soit qu’elles ayent un mariage avenant : cette partie est renfermée dans l’Article CCCLVII & les sept suivans. Quant à la quatrieme, elle est des dots des femmes, en tant qu’elles doivent être

reprises sur les biens propres des maris, sans diminution du droit qu’ont les femmes aux partages des acquêts & des meubles, ce qui se fait en vertu de la consignation qui en a été faite, & est contenue dans les deux derniers Articles de ce Chapître.

La premiere partie, qui est subdivisée par la confidération des préciputs, & par la déclaration des autres avantages qui sont attribués aux ainés, peut être expliquée suivant l’ordre de la Coutume ; c’est-à-dire, en commençant par les préciputs. Ils ont été introduits pour maintenir les familles, principalement les Nobles, dans leur éclat & leur dignité : ( Dat census honores, cen-sus amicitias, pauper ubique jacel, ) en empechant que les principaux biens ne soient dissipes par le partage des cohéritiers, & en les tenant toujours réunis en la personne des ainés. C’est pourquoi les préciputs ne sont pas des avantparts ou hors parts, comme ils sont par la notion qu’en donne le Droit civil, ou par les autres Coûtumes, dans lesquelles les ainés qui ont un préciput, partagent les autres biens de la succession avec leurs cohéritiers, sans être tenus de contribuer aux dettes à raison de la valeur de leur préciput, qui est comme une portion privilégiée par la Loi, exempte du partage & de la contribution des charges communes à tout le reste des biens de la succession Coutume de Paris, Articles CCCXXXIV,Louet , D. 16. C’est pourquoi ce préciput étant attribué à l’ainé d’une maison, il n’y en a qu’un seul dans toute une succession, & il n’y en a point que dans les successions directes ; Loüer, E. 7 & son Commentateur, Coûtume de Paris, Articles CCCxxVII & CCexXXI.

Mais tout le contraire se remarque en Normandie, où les préciputs sont toute la part héréditaire de ceux à qui ils sont déférés par droit d’option car ils excluent de prendre part aux autres biens immeubles de la succession commune, par l’Article CCexXXVIII, ils obligent au payement des dettes & aux charges de cette succession, à proportion de leur valeur, & de Pavantage qu’ils donnent à ceux qui les ont optés par l’Article CCCLXIV. Il y en peut avoir plusieurs dans une méme succession, tant en ligne directe qu’en la collatérale, par les Articles CCCXVIII & CCCXXII, & ensin ils sont accordés non-seulement aux ainés ou à ceux qui les représentent, mais même aux plus âgés des puinés, suvant leur ainesse ; c’est-à-dire, en leur rang, qui est suivant l’âge, par l’Article CCCxxXXIX.

De plus, s’il n’y a qu’un Fief pour tout en une succession sans autres biens, il appartient à l’ainé, & tous les puinés ne peuvent en ce cas, avoir qu’un usufruit du tiers du Fief, les chrges de la succession déduites, par l’Article CCCXLVI. Aprés ces observations générales faites sur les préciputs, il en faut considérer les usages & les exceptions, suivant qu’elles se rapportent aux Articles de ce Chapitre.


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Il y a des Coutumes qui reglent le partage par la consideration de la qualité des personnes & celle des biens réunies, cette manière de partager a de grands inconveniers. Loyc d’Argentré , du Partage des Nobles ;Hévin , surFrain ,du Pineau , sur Aniou, Art. CCl-Ii e CCLIII, les Commentateurs, sur la Coutume du Maine, Art. CCLXX, CCLXXI & CCLXXII.

Parmi nous les biens se divisent suivant leur qualité, sans distinction entre les Nobles & les Roturiers. Nous regardons les successions comme des choses réelles, & il nous paroit, per exemple bien singulier qu’en Bretagne deux enfans d’un premier lit partagent roturièrement la succession de leur mere, & que deux autres enfans sortis d’un second mariage partagent entr’eux la même succession noblement, selon la qualité des mariés M. le Président de Montesquieu se rapproche de la Coûtume de Bretagne ; il soutient comme elle, que l’usage des préciputs n’est pas bon dans toutes les conditions ; qu’il tend, par exemple, à détruire le commerce en introduisant l’inégalité parmi les enfans d’un mêrie pere. M. le Président Hainault s’explique encore plus clairement ; voici ses propres termes : y Un Gentilhomme veut perpétuer son nom, & doit, suivant le préjugé transmettre sans partage tous ses biens à son ainé ; un Commerçant, dont la passion est l’etenduë du comn merce & l’accroissement des biens dans sa famille, doit, au contraire, partager entre ses n enfans les richesses qu’il a acquises, pour que chacun soit en état de le représenter & pour D pouvoir, par eux, multiplier ses talens & son crédit. La Coûtume de Normandie est nén cessaire dans les vues du premier, & la Loi & la Coutume doivent faire un partage égal m dans la famille du second n. Abregé chronologique ; Remarques particulieres sur la troisieme Race.