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CHAPITRE QUATORZIEME. DE PARTAGE D’HÉRITAGE.

A PRES que la Coutume a fait connoître dans les trois Chapitres immediatement précédens, les différences des successions à l’égard des lignes directes & collatérales, à l’égard des personnes mâles ou femelles, à l’égard des biens, soit à raison de leur qualité, comme Fiefs ou Rotures, propres ou acquêts & conquêts, soit à raison de leur situation, comme dépendans de la Coutume générale, ou de la Coutume de Caux, ou étant en bourgage : elle fait un quatrieme Chapitre, qui est celui-ci, dans lequel elle propose des choses communes à toutes ces diffé rentes matieres.1 On le peut diviser en quatre parties. La première, contient l’inégalité dos partages, tant par l’option des préciputs, que par les autres avantages qu’ont ies ainés : elle est comprise dans dix-ncuf Articles ; sçavoir, dans les dix-sepe premiers & les CCCLV & CCCLVI. La seconde, prescrit ce qu’on doit observer pour faire les partages ; elle se traite en trois Articles, qui sont le CCCLII & les deux suivans. La troisième partie reprend ce qui est de partieulier pour les filles, soit qu’elles soient leules héritiers, soit qu’elles soient reçues à partager avec leurs freres, soit qu’elles ayent un mariage avenant : cette partie est renfermée dans l’Article CCCLVII & les sept suivans. Quant à la quatrieme, elle est des dots des femmes, en tant qu’elles doivent être

reprises sur les biens propres des maris, sans diminution du droit qu’ont les femmes aux partages des acquêts & des meubles, ce qui se fait en vertu de la consignation qui en a été faite, & est contenue dans les deux derniers Articles de ce Chapître.

La premiere partie, qui est subdivisée par la confidération des préciputs, & par la déclaration des autres avantages qui sont attribués aux ainés, peut être expliquée suivant l’ordre de la Coutume ; c’est-à-dire, en commençant par les préciputs. Ils ont été introduits pour maintenir les familles, principalement les Nobles, dans leur éclat & leur dignité : ( Dat census honores, cen-sus amicitias, pauper ubique jacel, ) en empechant que les principaux biens ne soient dissipes par le partage des cohéritiers, & en les tenant toujours réunis en la personne des ainés. C’est pourquoi les préciputs ne sont pas des avantparts ou hors parts, comme ils sont par la notion qu’en donne le Droit civil, ou par les autres Coûtumes, dans lesquelles les ainés qui ont un préciput, partagent les autres biens de la succession avec leurs cohéritiers, sans être tenus de contribuer aux dettes à raison de la valeur de leur préciput, qui est comme une portion privilégiée par la Loi, exempte du partage & de la contribution des charges communes à tout le reste des biens de la succession Coutume de Paris, Articles CCCXXXIV,Louet , D. 16. C’est pourquoi ce préciput étant attribué à l’ainé d’une maison, il n’y en a qu’un seul dans toute une succession, & il n’y en a point que dans les successions directes ; Loüer, E. 7 & son Commentateur, Coûtume de Paris, Articles CCCxxVII & CCexXXI.

Mais tout le contraire se remarque en Normandie, où les préciputs sont toute la part héréditaire de ceux à qui ils sont déférés par droit d’option car ils excluent de prendre part aux autres biens immeubles de la succession commune, par l’Article CCexXXVIII, ils obligent au payement des dettes & aux charges de cette succession, à proportion de leur valeur, & de Pavantage qu’ils donnent à ceux qui les ont optés par l’Article CCCLXIV. Il y en peut avoir plusieurs dans une méme succession, tant en ligne directe qu’en la collatérale, par les Articles CCCXVIII & CCCXXII, & ensin ils sont accordés non-seulement aux ainés ou à ceux qui les représentent, mais même aux plus âgés des puinés, suvant leur ainesse ; c’est-à-dire, en leur rang, qui est suivant l’âge, par l’Article CCCxxXXIX.

De plus, s’il n’y a qu’un Fief pour tout en une succession sans autres biens, il appartient à l’ainé, & tous les puinés ne peuvent en ce cas, avoir qu’un usufruit du tiers du Fief, les chrges de la succession déduites, par l’Article CCCXLVI. Aprés ces observations générales faites sur les préciputs, il en faut considérer les usages & les exceptions, suivant qu’elles se rapportent aux Articles de ce Chapitre.


CCCXXXV.

En Normandie il y a Héritage partable, & Héritage non partable.


CCCXXXVI.

Tous Fiefs nobles sont impartables & individus ; néanmoins quand il n’y a que des Filles héritieres, le Fief de Haubert peut être divisé jusqu’en huit parties, chacune desquelles huit parties peut avoir droit de Cour & Usage, Jurisdiction & Gage-Plege.

Quand la Coutume déclare que les Fiefs sont impartables, ce n’est qu’afin que les préciputs qu’elle attribue aux ainés des familles, soient de plus grande valeur, & les principaux biens des successions, car les Fiefs ne sont pas impartables de leur nature, puisqu’ils se peuvent partager entre les filles, lorsqu’elles sont seules héritieres, & jusqu’en huit portions, dont chacune peut avoit Cour & Usage, Jurisdiction & Gage-Plege, par les Article CCCXXXVI & CCCLx, ce qui est le fondement de la tenure par parage, par l’Art. CXXVII.

De plus, les Fiefs se peuvent partager entre les mâles cohéritiers, quand auc un d’eux ne les veut opter par préciput, comme il s’infère de l’Art. CCCXIII.

Le fisc même, ou les créanciers n’ayant pas l’option des préciputs, à la représentation des confisqués ou des debiteurs, aux droits desquels ils sont subro-gés, doivent partager également avec les héritiers, par l’Article CCCXLV.

Le qui fait conclure qu’en ce cas les Fiefs ne sont pas absolument impartables ; car quoique l’essentiel des Fiefs, qui consiste dans la Seigneurie & la Justice ne se partage point, sinon entre filles lorsqu’elles sont seules héritieres : néanmoins ce qui est le matériel & l’accident des Fiefs se peut partager, c’est-à-sçavoir, le domaine non-fieffé & les redevances annuelles, de la même manière que le propriétaire du Fief le peut desunir & comme dêmembrer, par l’Article CCIV. Ce nonobstant, il faut tenir que suivant l’intention de la Coutume, les Fiefs ne doivent pas être partagés, mais être maintenus dans leur intégrité, comme il paroit par les Articles DLXVII & DLXVIII, & les remarques qui y ont été faites ; & sur l’Article CCCXCIx, à l’égard du tiers légal, qui ne peut être prétendu en essence, quand toute la succession ne consiste qu’en un Fief.2


CCCXXXVII.

Le Fils aîné, au droit de son aînesse, peut prendre & choisir par préciput, tel Fief ou Terre noble que bon lui semble, en chacune des successions, tant paternelle que maternelle.

Ce droit de prendre un préciput dans chacune des successions, tant paternelle que maternelle, a été étendu au-delâ de ce qu’on pourroit juger par les termes de cet Article : car il sembleroit qu’un ainé ne pourroit prendre qu’un préciput en chacune de ces successions, d’autant plus que ce même droit se trouve limité par l’Article CCCXLVII, qui établit une confusion des fuccessions paternelles & maternelles, dans un certain cas qui est proposé, expresse-ment pour empécher que l’ainé n’ait l’avantage de prendre deux préciputs ; c’esta-sçavoir, un en chacune desdites successions : ce qui sera plus amplement ex-pliqué sur ledit Article. Mais il est d’un usage certain, qu’un ainé peut prendre deux préciputs dans une seule succession, soit paternelle, soit maternelle, lorsque cette succession est composée de biens situés hors Caux & en Caux : car ces biens qui font partie d’une même hérédité, sont néanmoins réputés provenir comme de deux successions, en tant qu’on en fait les partaoes séparément, de maniere que les ainés peuvent prendre deux préciputs, l’un sur les biens hors Caux, & l’autre sur les biens de Caux, comme si c’étoient deux successions distinctes & séparées : ce qui se pratique tant en ligne directe qu’en la collatérale, & tant à l’avantage de l’ainé, que de quelques-uns des puinés qui ont un droit d’ainesse, suivant l’expression dudit Article CCCXXXIX.

Or ce droit d’opter des préciputs, appartient de telle manière aux ainés, que quoique les pores & meres puissent en quelque-temps que ce soit, changer la qualité & la situation de leurs biens, a dessein de priver leurs enfans des preciputs qu’ils auroient droit de prendre, en vertu de cet Article CCCXXXVII, parce que la cause qui oblige les peres & meres à faire ces changemens, n’est pas imputée à une haine injuste, mais plutôt à un amour égal envers tous leurs enfans, & à un desir de légalité qui convient à l’équité, que les particuliers, aussi-bien que les Législateurs doivent rechercher ; ) ils ne peuvent néanmoins, par dons ou avancemens qu’ils fassent de leurs biens à quel-ques-uns de leurs enfans, priver leurs ainés de ce droit de préciput : ils ne peuvent pas même y faire renoncer valablement les ainés, parce que quelque renonciation ou cession qu’ils eussent faites, leur pere vivant, ils pourroient aprés la succession échue, opter les préciputs qui leur sont accordés par la Coutume.3

Il a même été jugé qu’un pere s’étant démis de ses biens sur ses enfans qui ensuite en avoient fait partage de son vivant, l’ainé pouvoit nonobstant ce partage demander à en faire un nouveau aprés la mort du pere ; tout ce qui s’étoit fait auparavant n’étant réputé que provisoire, & les droits fucs cessifs ne devant pas être réglés suivant l’état où les biens étoient lors de l’avancement, mais suivant leur condition lors de l’échéance incommutable de la succession. Le changement qui étoit arrivé dans l’espèce de cet Arrêt, ( qui est rapporté par Basnage sans l’avoir daté, mais lui étant l’Avocat de l’ainé, ) est qu’il étoit mort des frères de la succession desquels l’ainé se voyoit exclu par l’option qu’il avoit faite d’un préciput, en conséquence dudit avan-cement : La question étoit fort douteuse vu la démission faite par le pere ; parce qu’elle l’avoit dessaisi de tous ses biens, pour en revétir ses enfans ; de forte qu’ils avoient pu en faire des partages irrévocables. Ce qu’on ne peut pas dire au cas d’un simple avancement, qui n’étant qu’une anticipation de la future succession, n’est pas permanent ni immuable ; parce que ceux qui ont été avancés peuvent en rapportant leur don, demander le partage de la succession, lorsque la mort du donateur a changé leur qualité de donataires’en celle d’héritiers.

Aprés l’échéance de la succession, il n’y a pas de doute que l’ainé peut valablement renoncer au préciput qu’il avoit droit d’opter ; mais on demande, si sa renonciation peut donner ouverture au droit de préciput, à l’avantage du frere qui est le plus âgé apres lui. Pour réfoudre cette question, on distingue trois cas : le premier quand le frère ainé renonce absolument à la suc-cession échue : le lecond, quand acceptant la succession, il ne veut point opter le préciput pour sa part héréditaire ; & cette espèce se divise en deux au-tres ; c’est-à-sçavoir, si dans la succession il n’y a qu’un Fief, ou s’il y en a plusieurs. Au premier cas, il est indubitable, que le second frère devient par la renonciation absolue de son ainé, le plus âgé des cohéritiers, & qu’en cette qualité il a le droit de choisir un préciput, parce que ce droit n’est pas un privilége personnel, attaché uniquement & nécessairement à la personne de l’ainé, mais est communiqué aux autres freres, lorsqu’ils sont les plus âgés, sinvant l’Article CCCXXXI, qui autorise les autres freres chacun en leur rang à prendre des préciputs, s’il y en a plusieurs dans la succession : mais au second cas, quand le fils ainé étant héritier, veut partager la succession sans vouloir prendre le préciput, il n’exelut pas le second frère de prendre préciput dans cette méme succession, pourvu qu’en icelle il y ait plusieurs Fiefs, parce que le droit de ce second frère, ne dépend point de la volonté & de la résolution de son ainé, mais lui appartient par la disposition dudit Article CCCXXXIX & du CCCXI, qui attribuent aux frères le droit d’opter des préciputs, suivant leur ainesse & leur rang, quand il y a plusieurs Fiefs dans la succession : il faut donc dire qu’en ce cas, le Fief que le frère ainé auroit pu prendre par préciput, sera mis en partage, & que le second frère demeurera réservé à prendre tel autre Fief qu’il voudra choisir, pour lui tenir lieu de sa portion héréditaire. Dont resulte la résolution du troisieme cas, quand il n’y a qu’un seul Fief dans la succession, que le frère ainé n’a point voulu choisir, parce que l’ainé en ce cas, peut vouloir efficacement, que ce seul Fief soit mis en partage, le second frère ne le pouvant empécher ; parce qu’il ne peut forcer son frère à prendre un préciput, qui dépend absolument de son option, & que d’ailleurs il n’a aucun droit de prendre un préciput, sinon lorsqu’il y a plusieurs Fiefs, ou que son ainé a absolument renoncé à la succession.4

On a de plus demandé, si les Fiefs dépendans du Domaine du Roi, dont Paliénation renferme une faculté perpétuelle de rachat, ayant été pris par préciput, & depuis retirés par le Roi, les freres ainés qui les auroient optés, seroient obligés de rapporter le prix, pour être partagé également entr’eux & leurs freres cohéritiers : on a jugé au Parlement de Paris, que les deniers de ce, rachat devoient être rapportés comme prix d’un immeuble, dont le pere n’avoit jamais été propriétaire incommutable, le titre en vertu duquel il avoit possédé étant résolu par une cause nécessaire, inhérente au contrat d’engagement, comme Louet & son Commentateur l’enseignent, D. 30.5

Mais on oppose à cette décision une maxime qui y est contraire ; fçavoir, que quand il s’agit de partager une succession, on ne considère les biens que selon l’état où ils se trouvent au temps de l’addition de l’hérédité, & que les changemens qui arrivent à ces mêmes biens apres le partage quoique par une cause, par quelque rapport & égard nécessaire, mais contingente d’ailleurs, ne doivent point changer le droit qui a été acquis aux héritiers par le partage. Ce qui se développe & confirme par deux exemples : le premier, est des rentes constituées, qui quoique perpétuellement rachétables, se partagent comme des propres, & qui étant amorties depuis le partage, n’obligent pas celui qui en est devenu propriétaire à en rapporter le prix, comme étant un meuble également partable entre les cohéritiers : l’autre exemple est des ventes faites avec condition de reméré ; car quoique ces. Contrats se puissent réfoudre par une cause nécessaire, inhérente au Contrat, c’est-à-sçavoir, la condition de rachat qui y est insérée, néanmoins l’exécution de cette clause dépendant de la volonté du vendeur ( ce qui est une seconde cause, mais contingente, la vente subsiste toujours & emporte son effet, qui est de rendre l’acheteur & ses héritiers propriétaires & possesseurs de la chose venduë, tant qu’ils n’en sont point dépossédés, en exécution de la condition retenue par le vendeur.6

Basnage a remarqué, sur cet Article, que dans les successions collatérales qui se, partagent par, souches, les puinés. d’une souche, ne peuvent, pas empecher que leur ainé ne, choisisse un des lots, dans lequel il y aura un Fief, dans le dossuin, de leuprendre par préciput, encore que-ce lot consiste uniquement en ce FiefaDe sorte qu’en ce. cas, quoique tous les freres ayent également la qualité d’héritiers, le choix d’un lot ne se fait point à la pluralité des voix des c0x-héritiers, mais la volonté de l’ainé prévaut à celle de tous les puinés : ce qui aété jugé par un Arrêt du 15-de Iuin. 1595, rapporté par ce même Auteur.


CCCXXXVIII.

Et au cas que l’Aîné choisisse ledit Fief Noble par préciput, il laisse le reste de toute la succession à ses puînés.

Il ne s’entend que des immeubles ; car pour les meubles, ceux qui ont opté des préciputs, ne sont pas exclus d’en prendre leur part : les rentes & les Offices sont réputés immeublés à cet égard, ce qui a été long-temps doûteux pour les Offices : mâis enfin cela a ête décidé par un Arrêt du 9 d’Août 1680, donné sur’-un partage de la Grand Chambre, rapporté parBasnage .7


CCCXXXIX.

Et si en chacune desdites successions il y a encore autres Fiefs nobles, les autres Freres les peuvent choisir par préciput, selon leur aînesse, chacun en leur rang.

Il prouve qu’il peut y avoir plusieurs préciputs dans une seule succession & de plus, que non-seulement l’ainé d’une maison ou ses représentans, mais même les plus âgés des puinés, peuvent opter des préciputs en ce cas qu’il y a plusieurs Fiefs, comme il a été remarqué en la Préface ou Discours général.8


CCCXL.

Après le choix fait du Fief ou Fiefs nobles par l’aîné ou par les aînés à droit de préciput, les puînés partageront entr’eux tout le reste de la succession.

C’est au cas de cet Article, encore plus qu’en tout autre, qu’à lieu l’Article XLVII du Réglement de 168d, qui atteste que les freres ne peuvent obli-ger leurs seurs de venir en partage au lieu de mariage avenant, & on a jugé que l’offre des puinés de recevoir leurs seurs à partager également avec eux les biens qui leur avoient été laissés par l’ainé ayant pris un préciput, n’étoit pas valable, & ne pouvoit décharger l’ainé de la contribution au mariage avenant des seurs : ce qu’il faut entendre, quand les filles n’ont pas été réservées à partage ; car quand elles sont reservecs, elles doivent s’arrêter à l’option qui est faite par leurs freres puinés, suivant ce qui est remarqué sur l’Article CCCLXI.


CCCXLI.

L’Aîné, ou autre ayant pris préciput, avenant la mort de l’un des puînés, ne lui peut succéder en chose que ce soit de la succession, ains lui succederont les autres Freres puînés ayant partagé avec lui, & leurs descendans, au devant de l’Aîné.

Par cet Article, les ainés qui par l’option des préciputs ont laissé tous les autres biens immeubles de la succession à leurs cohéritiers, se sont non-seulement privés de prendre aucune part à tous ces autres immeubles, parce que le préciput est toute leur part hérdditaire, comme il a été dit : mais ce qui est étrange ils se sont de plus exclus de succéder à tous ces biens par Cux abandonnés à leurs cohéritiers, que la Coûtume semble substituer les uns àix autres à cet égard, à l’exclusion des ainés. Ce qui fait naître une question, sçavoir, si cette exclusion a son effet, non-seulement à l’égard de l’ainé, mais même de ses descendans, ou si elle se termine précisément à la personne ce lainé : il femble par les termes de cet Article, qu’elle n’a lieu qu’à l’égaid de la succession des puinés, qui ont partagé entr eux, & non à l’égard des successions dans les degrés plus éloignés ; & que même elle ne doit pas s’étendre hors de la personne de l’ainé, parce que la Coûtume ne parle que de la suecession des puinés qui ont partagé entr’eux, & de la personne de l’ainé qui a pris le préciput : de sorte que la substitution que la Coûtume autorise à l’égard des descendans des puinés, paroit ne devoir être entenduë que lorsqu’il s’agit de la succession d’un puiné à qui l’ainé soit survivant, parce que les substitutions étant contraires à l’ordre de succéder établi par la Loi, se doivent restreindre uniquement au cas qui est exprimé dans la disposition qui les autorise. On peut dire au contraire, que la représentation ayant lieu jusqu’au septieme degré à l’égard des propres, les puinés & leurs descendans jus-qu’audit degré, ont droit d’exclure l’ainé & ses descendans, des biens faisant partie de la succession, dans laquslle l’ainé a pris préciput ; parce qu’à l’égard de ces biens, la Coûtume a introduit un ordre particulier d’y succeder, non par la voie de substitution, mais de repirésentation. Ce qui se doit inferer de cet’Article CCCXII, par lequel non-seulement les puinés doivent succeder les uns aux autres à l’exclusion de l’ainé, mais même leurs descendans, qui est un terme indéfini, qui se doit entendre de tous les degrés de la ligne descendante. Cela se peut confirmer par l’exception apportée par l’Article sui-vant, dans laquelle non-seulement l’ainé, mais ses descendans, sont expressement compris, ce qui doit faire juger que par l’intention de la Coutume, ces descendans étoient compris dans la même exclusion que leur prédécesseur. Mais on peut proposer une troisieme opinion qui semble plus probable ; sçavoir, que tant qu’il s’agit de la succession d’un puiné, l’ainé qui a pris le préciput & ses descendans, en sont exclus par les autres puinés copartageans, & par leurs descendans ; mais que cette exclusion ou substitution ne subsiste pas hors de ce cas, & quand il s’agit de la succession d’un descendant ou héritier d’un des puinés.9


CCCXLII.

Néanmoins, s’il y avoit aucun Fief partagé avec les autres biens de la succession, sans avoir été choisi par préciput, avenant la mort sans enfans de celui au lot duquel il est échu, l’aîné ou ses représentans succedent en ce qui est Noble, & peut prendre ledit Fief par préciput.

Cet Article est une exception du précédent : on y propose cette question, sçavoir, si l’un des puinés ayant changé la qualité des biens de son partage, en les ayant remplacés, ou en d’autres lieux non sujets à la Coutume de Normandie, où en Terres nobles, l’ainé & ses descendans n’y pourront pas succé der, nonobstant l’exclusion portée par ledit Article précédent ; On répond, que c’est une Jurisprudence certaine, que les successions, tant directes que colle térales, se partagent suivant l’étatitauquel elles se trouvent lors de leur échéance : éc qui a été attesté par l’Article LXVII dudit Réglement, à l’égard de la situation des biens ; & ce qui est conforme au Droit Romain, par lequel la succession se considère par le temps de la mort de celui à qui on succede : Esit enim jus, in id quod defunctus hubuit tempore mortis, l. si alienam, & in extraneis, ff. De horedibus instituendis, l. in quantitate, ssi Ad legem falcidiam. Il faut donc dire sur la question proposée, r que l’ainé ou ses représentans suecéderont non en vertu de l’Article COCXLII, mais par le droit conimun, d’autant qu’ils ne sont point dans l’exclufion déclarée par l’Article CCCXII, laquelle n’est qu’à l’egard des biens faisant partie de la suc-cession dans laquelle l’aiué a pris préciput.10


CCCXLIII.

Avenant le décès du Fils aîné avant les partages faits de la succession qui leur est échue, le plus aîné des Freres survivans, peut choisir tel Fief qu’il lui plaît à la représentation, & comme héritier de son Frere aîné, sans préjudice du droit de préciput qu’il a de son chef, & n’y peuvent les autres Freres prétendre aucune part, légitime, provision ou récompense sur ledit Fief.


CCCXLIV.

Pareillement avenant la mort du second Fils avant les partages faits de la succession, l’aîné peut prendre par préciput, comme héritier de son Frere, le Fief qu’il eût pu choisir de son chef, & ainsi consécutivément des autres, tant qu’il y a Fief en la succession.

La raison de douter contre ce qui est décidé par ces deux Articles, est que la déclaration d’option paroissant nécessaire par lostermes de l’Art. CCCXXXVII ce qui est confirmé par les Articles CCexLVII, CCexLVIII & CCexLI les freres semblent n’être pas recevables à demander un préciput au droit de leur frere décédé, sans avoir fait aucune déclaration, ni de l’addition de l’hérédité, ni d’option de préciput : mais la raison de décider est prise de la ma-xime, le mort saisit le vif, en vertu de laquelle les freres ont leur droit acquis sur les successions de leurs pere & mere, dés le moment de la mort desdits pere & mere ; & ainfi un des freres venant à mourir, sa succession n’est plus la succession de son pere ni de sa mère, mais une succession collatérale, qui doit être partagée comme telle, sans distinguer s’il y avoit des partages ou des options faites a l’égard des successions du pere ou de la mère, dans lesquelles la Coûtume a bien admis une confusion dans le cas de l’Article CCCXLVII mais qui ne peut être reconnue dans toute autre succession, non seulement en ligne collatérale, mais même en la directe, comme il sera remarqué fux dedit Article CCCXLVII.11


CCCXLV.

Le Fisc on autre créancier subrogé au droit de l’aîné avant le partage fait, n’a le privilége de prendre le préciput appartenant à l’aîné, à cause de sa primogéniture ; mais aura seulemeut part égale avec ses autres Freres.

Il a pour fondement la même raison sur laquelle est appuyé l’Article CCLXIII, touchant le droit qu’ont les filles sur les successions deleurs pere & & mére.

Quand il est dit avant le partage fait, on a voulu signifier que l’acte du partage doit être pleinement consommé, ce qui ne peut être qu’apres la choisie faite : il ne suffit donc pas que le partage ait été gagé ; c’est-à-dire demandé, ou les lots faits & présentés comme au cas de l’Article CCCXLVII. Par créancier subrogé, on entend tous les créanciers généralement, parce qu’ils sont réputés subrogés par une raison générale qui les autorise d’exéecer les actions. de lears débiteurs, suivant ce qui a été remarqué sur ledit Art. CCLXIII.12


CCCXLVI.

Quand il n’y a qu’un Fief pour tout en une succession sans autres biens, tous les Puînés ensemble ne peuvent prendre que provision du tiers à vie sur ledit Fief, les rentes & charges de la succession déduites.

Il faut juger la même chose, quand toute une fuccession consiste en plusieurs Fiefs, qui sont pris par préciput par les ainés, suivant le rang de leurs ainesses en la ligne directe : car en ce cas, tous les puinés, qui n’ont rien eu aux immeubles de la succession, doivent avoir leur provision à vie, comme elle est réglée par cet Article : mais on a demandé s’ils auront cette provi-sion ou usufruit sur tous les Fiefs, ou seulement sur celui qui aura été opté par le puiné ; Il semble qu’ils la doivent avoir sur tous les préciputs, parce que cette provision est une charge de tous les biens de la succession, dont les héritiers détenteurs doivent porter leur part pro modo emolumenti.13


CCCXLVII.

Les successions paternelles & maternelles étant échues auparavant que l’Aîné ait judiciairement déclaré qu’il opte par préciput un Fief, ou gagé partage à ses Freres en celle qui premierement étoit échue, elles sont confuses & réputées pour une seule succession ; tellement que l’Aîné n’a qu’un préciput en toutes les deux.


CCCXLVIII.

Mais si l’Aîné a fait judiciairement déclaration du Fief qu’il prend par préciput, ou gagé partage à ses puînés avant l’échéance de la seconde succession, il aura préciput en chacune des deux, encore que le partage n’ait été actuellement fait ; & par le moyen de ladite déclatation judiciaire, les deux successions sont tenues pour distinctes & sé-parées pour le regard des Freres puînés.

Ces deux Articles, représentent un cas, qui, au moyen de la confusion des successions paternelles & maternelles, peut donner une ouverture à une exception de l’Article CCCXXXVII, par lequel le fils ainé peut prendre un préciput en chacune de ces successions. Mais la confusion qui sert de fundez ment à cette exception, n’est précisément que pour empecher que l’ainé neprenne deux préciputs nobles, & n’est point à l’égard des autres appar-enan-ces de ces successions, comme sont les partages & le payement des dettes. : c’est pourquoi elle n’a lieu que quand il y a des Fiefs dans chacune des successions du pere & de la mère ; car si une de ces successions ne consiste qu’en rotures & biens partables, il n’y a aucune confusion, & l’ainé pourra prendre le Fief par préciput, & partager l’autre succession où il n’y aura point de Fiefs, avec ses freres, dans laquelle même il pourra prendre, ile préciput roturier de l’Article CCCLVI, comme il a été jugé par un Arrêt du 16 de Jan-vier 1649, rapporté parBasnage .

De plus, il n’y a point de confusion au préjudice du préciput de Caux, parce qu’il appartient à l’ainé ipso jure, sans qu’il soit requis aucune déclaration ouoption de sa part : ce qui n’est pas à l’égard des preciputs nobles, ou du rotu-rier de l’Article CCCLVI, qui ne sont acquis pleinement que par un choix fait par l’ainé.14

Il faut en outre remarquer, que cette confusion n’est admife que dans la concurrence des successions du pere & de-la nièro, mais ne s’étend pas au cas de toutes les autres successions, même en la ligne directe, comme de celle diipere & ifle l’aictilipatepnet, tou-de, lgy imonze & sde : l’aitulePmiaiernelle : car il a été jugé, qu’un pûtirefils ; à : la représentation ide son pere ou de sa mere3 pouvoit prendre un préciput en la succession de son aieul ou de-son aieule, Echue depuis le déces de son perc ou de sa mere, & un autre préciput en la succession de son pere ou de sa mère, encore qu’il n’eût fait aucune déelaration d’opter un préciput sur la prémière succession, avant l’échéance de la seconde, par deux Arrêts, l’un du 15 de Janvier 16o4, rapporté par Bérault ; & l’autre du 26 d’Avril 1652 rapporté parBasnage . Mais la decision de ces Arrêts se doit limiter au cas que les deux Fiefs, qui se rencontrent dans ces suecessions distinctes, ne proviennent pas de la même personne ou souche, com-me de l’aieul ou de l’aicule : car si l’aieul ou l’aicule avoient donné à un de leurs fils un Fief par avancement de leur succession, il n’y aura pas de raison à dire, que leur petit-fils sorti de ce fils donataire, pourroit prendre par préciput cet avancement dans la succession de son pere prédécédé, & prendre encore un autre préciput en la succession depuis Cchue de l’aieul ou de l’aiculequi seroient les donateurs.


CCCXLIX.

Si l’Aîné est mineur, son Tuteur doit faire ledit choix ; & à faute de le faire dans le temps dû, doit répondre de tous dommages & intérêts de son Pupille.

Il contient une décifion remarquable, que le Tuteur peut préjudicier irrévocablement par sa négligence au droit de son mineur, qui n’a point d’autre recours que contre son luteur, pour le faire condamner à ses intéréts. Il en est statué de même, tant à l’égard des retraits, par l’Article CCCCLVII, qu’à légard des décrets qui se font des biens des mineurs, par les Articles DXCE & DCXCII, ausquels on peut ajouter les Articles DLIx & DLXXII15 .

On infère de cette décision que l’absent, pour quelque cause que ce puisse être, n’est point restituable conre l’omission spécifiée en cet Article, parce que l’absent est beaucoup moins excusable que ie mineur, qui est dans une impuissance d’agir ; mais un absent peut user de prévoyance, & choisir un Procureur pour suppléer à tout ce qu’il pourroit faire, s’il étoit présent. On peut demander ce que la Coutume entend par le temps dif en cet Article à On répond, que c’est le temps dans lequel le Tuteur à accepté ou dû accepter la succession au nom de ses mineurs.16


CCCL.

L’aîné Fils, par la mort de ses Pere & Mere, est saisi de leur totale succession, & doivent les Puînés lui en demander partage.


CCCLI.

Il doit aussi avoir la saisine des lettres, meubles & écritures, avant qu’en faire le partage aux autres Puînés, à la charge d’en faire bon & loyal Inventaire incontinent après le décès, appellés ses Freres ; & s’ils sont mineurs ou absens, deux des prochains Parens ou deux des Voisins, un Sergent, un Tabellion ou autre personne publique, qui seront tenus signer ledit Inventaire.


CCCLV.

Les lots & partages des Puînés, qui ne sont présens lors desdits partages, demeurent en la garde & saisine de l’Aîné, jusqu’à ce que es Puînés le requierent.


CCCLVI.

S’il n’y a qu’un Manoir roturier aux Champs, anciennement appelle Hébergement & Chef d’Héritage, en toute la succession, l’Aîné peut avant faire lots & partages, déclarer en Justice qu’il le retient avec la Cour, Clos & Jardin, en baillant récompense à ses Puînés des Héritages de la même succession ; en quoi faisant, le surplus sera entr’eux également partagé : & où ils ne pourroient s’accorder, l’estimation dudit Manoir, Cour & Jardin, sera faite sur la valeur du revenu de la terre & louage des Maisons.

On joint ces quatre Articles, parce qu’ils contiennent les autres avantages qu’ont les ainés dans les successions, outre les préciputs nobles. Le premier de ces avantages est, que l’ainé aprés le décës de celui & qui on succede, est saiside la totale succession, jusqu’à ce que le partage lui en soit demandé par ses frères, suivant-l’Article CCCI., qui paroit être une répétition de l’Article CCXXXVII. Voyez ce qui est remarqué sur l’Article CCCLXXX. Mais il a reçu une interprétation plus étenduë d’une part, & restreinte d’autre part ; en ce qu’on a jugé, que cet avantage de l’ainé avoit lieu, tant dans les successions directes que dans les collatérales, soit pour le propre, soit pour l’ac-quet, par un Arrêt du 14 de Février 1503, rapporté parBérault . Mais il est d’autre part certain, que l’ainé ne fait les fruits siens que dans les successions directes, qui sont les cas desdits Articles CCXXXVII & CCXXXVIII.

Un autre avantagé de l’ainé est, qu’il doit avoir la saisine ( c’est le terme dont la Coûtume s’est servie des lettres, meubles & écritures de la succession mais à la charge d’en faire un bon & loyal Inventaire suivant qu’il est prescrit par l’Article CCCII, que si l’ainé manque à faire cet Inventaire, comme il lui est ordonné, il sera condamnable aux dommages & intérêts de ses cohéritiers, suivant l’estimation qui en pourra être faite suivant la commune re-nommée, ou par le serment desdits cohéritiers, jurejurando in litem, suivant LaLoi 3. ff. De administratione & periculo Tutorum.17

L’ainé, de plus, à l’avantage de choisir, aprés que les lots ont égté faits & présentés dans toutes sortes de successions : outre qu’il demeure saisi du partage de ses puinés, qui ne sont pas présens à la choisie des-lots ; mais c’est à la charge de les garder, par l’Article CCCLV.

Mais un autre avantage plus utile pour l’airé, & qui mérite plus d’explication, est celui du préciput roturier que l’ainc peut prendre, tant dans la suc-cession de son peté, qu’en celle de sa mére. Il est proposé dans l’Article CCCLVI, qu’on peut ( pour l’expliquer plus nettement ) diviser en trois parties, dont la première est de la consistance & dépondance de ce préciput ; la seconde fait connoître ce qui en exclut l’aine, & la tr-, neme est de la récompense qui en est due aux puinés.

Quant à la première partie, la Coûtume semble l’avoir assez éclaircie, en disant, qu’il faut que ce préciput soit un Mianoir roturier, appellé anciennement Hcbergement & CheE-d’héritage : l’Article CCLXI dit en outre, que la Coutume l’appelloit ancienement Ménage ; ce qui fait entendre que ce doit être un logement destiné & propre pour l’habitation d’une famille ; on y ajoûte la cour, clos & jardin, comme des dépendances requises pour rendre une habitation commode :. & on a jugé par un Arrêt du 13 d’Auril rStay rapporté parBérault , que les brimens contenus dans la cour C l’enclos, quoique manifesiement destinésa un autre usuge que le domestique, comme les moulins à bled, hui-le oi papier, faisoient partie de ce préciput, pour éviter apparemment qu’il ne fut incommodé par les servitudes qu’il y faudroit établir, si des étrangers étoient propriétaires, de ces moulins. La regle, générale qu’on doit suivre pour juger quelles doivent être les appartenances de ce préciput, est la destination & l’usage qu’en a fait le pere de famille, pour rendre son habitation plus utile, plus commode & plus agréable.18

La seconde partie de l’Article, laquelle défigne les causes qui excluent l’ainé de ce préciput, s’examine par trois considérations : s’il y a un lieu propre pour l’habitation d’un pere de famille ; S’il n’y en a qu’un dans la succession, & s’il est véritablement roturier & aux champs. Pour les deux premieres considérations, elles dépendent d’un même principe, qui est, qu’il est nécessaire que le Manoir ou Chef-d’héritage qui est prétendu tel par l’ainé pour le pouvoir choisir, ou par les puinés pour empecher que l’ainé n’ait un préciput ro-turier, puisse servir d’habitation & de logement à un pere de famille. Ce prinEcipe a été éclairci par plusieurs Arrêts, qui ont jugé qu’il suffisoit pour exclu-re l’ainé de ce préciput, qu’il y eût quelque logement propre & suffifant pour l’habitation de ceux qui cultivent les terres.

Et quant à la troisieme considération non-seulement les maisons qui sont dans les Villes ne peuvent pas être un préciput ; mais on a même jugé, que les logemens qui sont dans l’etenduë des bourgages, encore qu’éloignés des Bourgs, & placés au milieu des terres de la Campagne, ne peuvent être prétendus par l’ainé comme un préciput, par un Arrêt du 22 de Juin 1622 ; rapû porté parBasnage . Les raisons sur lesquelles on a fondé cet Arrêt, sont que le partage des biens qui sont en bourgage, se fait par d’autres regles que celles qui s’observent au partage des biens des champs ; ceux-ci se partageant inégalement entre les freres & les seurs, & entre ies frères mêmes, au moyen des préciputs & de la situation en Caux ; mais les biens de bourgage se partagent également, même entre les frères & les seurs, ce qui exclut le préciput roturier, comme il paroit par l’Article CCLXXI, qui exclut les filles du précipat roturier, & les reserve néannioins à prendé part dux niaisons assises aux Villes & Bourgages.

Reste à expliquer là ttoisieme partie de cet Artiele CCCt-VI, touchant la récompense que doit l’ainé à les frer-s : elie dui ître Saiilée en héritage dépen-dant de la même succession, sinoa, en rents tenantes nature de fonds, ause quelles le préciput & la part de l’ainé deinc irent specialement affectés : Miiy pour esti, ner cett : récompense, on a égard seulemeeit au revenu que peut produire le préciput, tant par les fruits naturels que par les civil, comme sont l’usage ou le louaae des batimens, en quoi l’avantâge de l’ainé est important parce que dans l’eitimation qui se fait de la valeur du préciput, pour liquider la récompense qui en est due, on n’a point d’égard’à la valeur, qu’on appelle intrinseque ; c’est à-dire, qu’on n’estimé puint ce que les batimens & les bois de haute fût aie peuvent valoir par leur propre substance, Il ne faut pas ome-tre que l’ainé, pour avoir ce préciput, doit l’opter devant le partage fait ; c’est à-dire, devant la choisie des luts, suivant cet Articee CCCLVI, & que même il ne le peut vendre ni-eéder-avant que de lavoit opté : ce qui a été jugé par un Arrêt du mois de Juin 16z5, rapporté parBasnage , pir lequel Arrêt, un ainé ayant cédé à un de ses freres son droit suo-cessif, nommément avec celui de pouvoir prendre le préciput roturier ; le cessio naire fut déelaré non recevable à prendre ce préciput, & fut conda nné à le mettre dans les partages. Il faut voir ce qui a été remirqué sur l’Ar-ticle CCLXXI, touchant les ivlisures & Manoirs logés aux champs, que la Coûtume attribue aux freres à l’exclusion des seurs.


CCCLII.

Les Lettres, Titres & Enseignemens de la Succession, doivent être mis par l’aîné entre les mains du dernier des Freres, pour en faire lors & partages.


CCCLIII.

Le Puîné faisant les lots, doit avoir égard à la commodité de chacun desdits lots, sans démembrer ne diviser les Pieces d’Héritage, sil n’est nécessaire, & qu’autrement les partages ne puissent être également faits, sans séparer aussi les Rentes seigneuriales & foncieres, & autres charges réelles, d’avec le fonds qui y est sujet, & faire enforte que le fonds de chacun lot porte sa charge.


CCCLIV.

Aprés les lots faits & présentés par le Puîné, chacun des Freres en son rang, est reçu a les blâmer avant qu’être contraint de choisir.

Apres avoir discouru des avantages des ainés, il faut passer à déclarer. ce qu’ii faut observer dans les lots & partages : ce qui est la seconde partie de la division proposée des maticres de ce Chapitre, & qui est comprise dans ées trois Articles. Premièreinent, le frère ainé qui doit avoir été laisi des lettres, titres & enseignemens de la succession, par l’Article CCCLI, les doit remettre entre les mains du dernier des freres, que la Coûtume appelle le puiné, afin qu’il puisse prendre connoissance des biens qui composent la succession parce que c’est lui qui les doit distinguer en portions, suiyant le nombre de ses cohcritiers & la qualité & situation des immeubles : c’est cé qu’on appelle lots. En les faisant, le puiné doit avoif égard à la commodité de chacun d’iceux ; c’est-à-dire, qu’il ne doit point démembrer ni diviser les pièces d’héri-tages, s’il n’est nécessaire, pour rendre les partages égaux : il ne doit pas non plus séparer les rentes seigneuriales & foncieres d’avec les héritages qui y sont ujets, de-manière que le fonds de chaque lot porte sa charge ; c’est ce qui est prescrit par l’Article CCCLIil ; & faute d’avoir observé ce qui y. est ordonné les lots faits & présentés par le puiné, peuvent être blamés, & lui condamné à les réformer.19

Il y a plusieurs remarques à faire sur cet Article CCCIII. Bremièrement, l’égalité doit être gardée dans les lots : car ce n’est pas bienraisonner, que de comparer les héritiers partageans leur succession, aux vendeurs & aux acheteurs, sous prêtexte qu’il est dit dans quelque Loi, que le partage tient lieu de vente & d’échange : car il est requis une bonne foi-beaucoup plus exadte entre les cohcritiers, de maniere qu’une inégalité modique suffit, pour faire juger la rescision des partages : & d’ailleurs, celui qui a un lot trop avantageux, ne peut pas se défendre en offrant un supplément de prix, parce que chaque cohcritier doit avoir sa part en essence. Ce qu’on ne peut pas appliquer au vendeur, qui n’a pas droit de demander, à raison de la déception d’outre-moitié du juste prix dont il se plaint, la chose qu’il a vonduë, parce qu’il a voulu & choisi d’avoir le prix au lieu de cette-même chose qu’il aalienées Quand le demandeur en restitution contre les partages a mis hors de ses mains une partie de son lot, il semble qu’il en doit être évincé par une fin de non-recevoir, qui provient de son fait, les choses n’étant plus éntieres, & ne pouvant être remises au premier état, à cause des alienations qu’il afaites : ce qui est néanmoins requis dans les restitutions, l. quod si minor, 8. restitutio, ff. De minoribus, & I. unica, C. De reputationibus que fiunt, &c.

Mais il faut distinguer si les aliénations qu’il a faites, sont de la meilleureou d’une plus grande partie de son lot, auquel cas il seroit non-recevable ; mâis si les aliénations étoient peu importantes, il devroit être admis à les suppléer des autres biens de son partage.20

L’inégalité qui suffit pour donner ouverture à la rescision. des partages, est du quart au quint ; ( c’est-à-dire, un peu aurdesious de la cinquième partie ) par l’usage de Normandie. La bonne foi qu’on-rcquiert, eftre les cohéritiers est telle, que l’erreur en drois,, qui, régulièrement n’est pas. excusable, peut sorvir. de fondement auvrelevement pris, contre iles, partaggeé. ; comme si celui qui n’étoit héritier qu’aibapropre, avoit été, admis au partage des, meubles & acquêts avec les véritables héritiers de cette. sorte de biens : & qui a été jugé par un Arrêt du 18 de Juillet, 16i8, rapporté parBasnage . En second lieu cette, restitution contre les partages à raison de leur inégalité, se doit poursuivre dans les dix tans, ecomme, toutes les autres rescisions des Contrats. En troisieme liou, les partageans sont obligés à une garantie les, uns envers les autres, à l’égard des biens qu’ils ont partagés, & cette garantie ne se prescrit que par quarante ans.21 Il ne faut pas omettre, que quand les lots ont été faits & présentés par le puiné, chacun des freres peut les blamer en son rang, par l’Article CCCLIV, ce qui doit faire juger qu’un chacun des freres peut demander la communication des lettres & écritures mises par l’ainé aux mains du puiné. De plus, cet ordre établi par les l’Articles CCCLI & CCCLII, de mettre les titres & enseignemens de la succession aux mains de l’ainé, & consécutivement en celles du puiné, peut n’être pas exécuté, si cet ainé ou puiné étoient d’une mauvaise conduite, dissipateurs ou insolvables, comme étant séparés de biens d’avec leurs femmes, ou ayant été décretés ; ce qui dépend de l’arbitration & prudence du Juge, comme il a été jugé par plusieurs Arrêts rapportés parBasnage . sur ledit Artiele CCCLII.

Quand les lots ont été communiqués à tous les cohéritiers, ils doivent être rebaillés au puiné qui les a faits, afin de les réformer en cas qu’ils ayent été blamés ; même pour y ajouter ou diminuer, en cas qu’il le juge convenable : à sesrintérets : ce qu’il peut faire ; mais il faut que ce soit avant qu’on fait procédé à la choisie : pour faire laquelle, le Juge ordonne un delai compétent : Que si Peiné ou quelqu’un des cohéritiers font trop de refuites, il peut ordonner que dles freres poursuivant la choisie, jouiront provisoirement un chacun d’un lots Or bien qu’il y ait des freres absens ou mineurs, cela n’empechera pas, qu’on ne fasse & qu’on ne choisisse des lots, par l’avis desparens de-l’absent ou du mineur, qui pourront faire les lors & les choisir sauf la restitutionen cas de lésion.


CCCLVII.

Les Soeurs ne peuvent demander partage ès successions du Pere ou de la Mere, ains seulement demander mariage : & pourront les Freres les marier de meuble sans terre, ou de terre sans meuble, pourvu que ce soit sans les déparager.

Cet Article & les sept suivans, font la troisieme partie de la division proposée, & sont une répétition de la plupart des Articles. mis fous le Chapitre de la Suecession au propre, touchant les droits qu’ont les fiiles sur les successions, prineipalement sur celles duepere ou de la mère : : c’est pourquoi n repasseras sur un hacun de ces huit Articles, pour y faire les observations qui nont pointi été faites sur ledit Chapitre de la Succession au propre. En commençant par le CCCLVII, on peut dire d’abord qu’il n’est qu’une répétition de ce qui a été déclaré par les Articles CexI. IX, CCLI & CCLII ; mais on peut ajouter & tout ce quija été dit sur tous ces Articles, deux maximes attestées par l’Article XIVII du Réglement de 1666. Par la première desquelles, les freres ne peuvent ebliger leurs seurs à prendre partage au lieu de-manage avenants. par la seconde, les freres peuvent s’acquitter de tout ce qui a été arbitré. pour le mari-ge avenant, en baillant des héritages ou rentes des lasuccession, sans qu’on puisse faire distinction entre la dot & le don mobil accordé lors du mariage, car-se don mobil peut être acquitté en baillant des héritages ; auffi-bien que, la dot, comme il a été jugé par un Arrêt du-8. de Mars 167s, rapporté parBasnage .22 Mais on a demandé de quel temps se doit faire l’estimation des biensuique les freres baillent pour s’acquitter du mariave avenant à’Sçavoir si om ddoit s’arrêter au temps de l’échéance de la succession, ou au temps éé là démande ou action des seurs. On jugea par ce meme Arrêt. s. que puisque dans l’arbitration du mariage avenant on considéroit le-temps. de : l’échéance poursesti-mer les biens herédlitaires, on devoit considérer ce même temps pour estimer oeux qui étoient baillés pour le payement du mariage avenant, Or cette seconde maxime n’a lieu que quand le mariage avenant a été ar-

bitré, soit par les pa ens, soit par le pere : car si la soeur a été mariée par le pere, là mere ou le fèré, & qu’il luj ait été promis de l’argent, où une constitution de rente au lieu de sa legitme ou mariage avenant, ou même si le frère s’est arcomnodé avec la soeur avant que deila marier, & qu’il ait promisdiela gent ou de lui payer une rentel, en tous ces cas, le Réglement n’a point licu, & les frères ne sont pas recevables à bailler des Héritages ; mâis ils doivent payer en a gent où en rente, conformément aux promesses ; ce qui a été jugé par plusieurs Arréts. Voyez ce qui a été remarqué à cet égard sur les Arucles CCL & CCEI.23


CCCLVIII.

La Fille réservée à partage, ne peut prétendre part qu’en la succession de celui qui l’a réservée.

IT renferme dans sa conception une exception de l’Article précédent, d’autant que la fille réservée à part ige peut deinander sa pirt en la succession du pere ou de la mre, aù partige de ja Juelle elle a été réservée ; mais comme le-titre qui contient cette réservation, est singuiier & contraire au Droit commun, il ne peut pas étendre son effe sur toutes sortes de successions mais il doit être limité sur les biens de la successiou de celui qui en est l’augeur ; ce qu’il ne faut pas néanmoins entendre précisément : car il est indu-bitalle, qu’un pere ayant réservé ses filles à partage, tant sur ses propres biens que sur ceux de sa femme ( comie il le peut par l’Article CCLVIII cet acte de derniere volonté du pere sera exécuté sur le, biens de la mere, quoiqu’elle n’ait point eu de part à cette réservation. Voyez ce qui a été romarqué sur ledit Article CCLVI. I.24


CCCLIX.

Fille mariée revenant à partage de succession de ses Pere ou Mere, doit rapporter ce qu’elle a eu de meuble & héritage de celui qui l’a réservée.

Il répete ce qui est dit par l’Article CCIx, on y peut rapporter l’Article LXVIII dudit Réglement, par lequel on voit que la question, sçavoir, si les seurs venant à succéder à leur frere, étoient obligées de rapporter ce qui leur aroit été donné pour leur mariage, a été décidée. Le Réglement a déclaré une distinction qui avoit été faite par les Arrêts ; c’est-à-sçavoir, si toutes les filles ont été mariées par les pere ou mere, & leur mariage acquitté ; en ce cas elles succedent à leur frère, sans être obligées de rapporter ce qui leur a été donné pour leur mariage, parce que la succession du frère en ce même cas est une succession collatérale, dans laquelle le rapport n’a point lieu. Mais quand il este quelqu’une des filles à marier aprés la mort du frere, ou dont le mariage n’a point été réglé, alors le rapport a lieu ; parce que la succession du frère en ce cas, est réputée être la même que la succession du pere. Cette décision n’est qu’à légard de-lal suécession d’un frère sentre les Durs : car dans un degré plus éloigné, comme s’il s’agissoit de la fuccession des enfans d’un frère, qui fût à partager entre les tantes du défunt, il est vrai sans distinction, que le rapport n’y peut avoir lieu : ce qui a été jugé par un Arrêt du premier Août 16y6, rappontéspar Hasnages éro


CCCLX.

Les Soeurs, quand elles sont héritieres, peuvent partager tous Fiefs de Haubert jusqu’à huit parties, si autrement les partages ne peuvent être faits.

Il est semblable aux Articles CeLXXII & CCexxXVI, & il ne differe que par la fin, qui semble signifier, que les Fiefs ne doivent être partagés entre filles, sinon lorsque les partages ne peuvent pas être faits autrement ; c’est-àdires, utilement & commodément pour les partageans.25


CCCLXI.

La Fille réservée à partage, aura sa part sur la Roture & autres biens, s’il y en a, sinon sur le Fief, lequel pour le regard de ladite Fille, est évalué en deniers pour ce qui lui peut appartenir, pour en avoir rente au denier vingt.

La réservation des filles à partage ne leur pouvant donner d’autre avantage, que de les rétablir dans le droit naturel, qui est de succéder également avec leurs freres ; il s’enfuit que pour sçavoir quel doit être le partage des seurs réservées, il faut considérer quel doit être le partage des freres qui n’ont point le droit d’ainesse ; c’est-à-dire, de ceux qui partagent également les biens héréditaires : car la condition des filles ne doit pas être meilleure que celle de ses puinés, suivant les Articles CCLXIX & & CCXCVIII, & partant si la succession consiste en des Fiefs & des Rotures, ou autres biens partables, si les Fiefs sont pris pour préciput par les ainés, les filles réservées n’y peuvent rien demander, mais partagent avec les puinés les Rotures & les autres biens partables ; ce qui a été jugé par un Arrêt du 29 d’Avril 1623, rapporté parBasnage . Ce qui fait connoître évidemment que la réservation à partage est queiquefois ordonnée contre l’intérét des filles, vu qu’elles ont moius d’avantage par la qualité d’héritieres, qu’elles n’en auroient par le mariage avenant, d’autant que le partage dans le cas proposé, se fait précisément sur une partie des biens, laquelle est divisée également entr’elles & leurs freres puinés, & que le mariage avenant au contraire, est arbitré suivant l’estimation de tous les biens de la succession ; c’est-à-dire, tant des Fiefs pris par préciput, que des autres immeubles délaissés par les ainés. Car quoique le mariage de chaque fille ne puisse être arbitré qu’à une valeur égale au partage du puiné, qui a la plus petite portion de l’hérédité, néanmoins étant pris proportionnément sur les préciputs des ainés, il est beaucoup plus ample, & conséquemment plus avantageux aux filles, que ne seroit le partage qui leur appartiendroit en vertu de leur réservation, qui diminueroit celui de leurs freres puinés. C’est pourquoi le Parlement a jugé ( comme il est attesté par l’Article XLVII dudit Re-glement, ) que les freres ne pouvoient pas obliger leurs soeurs de prendre partage au lieu de mariuge avenani, lorsqu’elles n’ont pas été réservées par le pgere où la mère : ce qui a ête remarqué sur l’Article CCCXI.

Il est vrai que si ces biens délaisses aux freres & aux seurs, par les ainés qui ont pris des préciputs, consistent en partie en quelques Fiefs qui ayent été mis en partage, suivant qu’il est proposé par l’Article CCCXIII ; en ce cas les soeurs ne pourront pas ob’iger les frères de partager avec elles ces Fiefs non pris par préciput ; mais en ce cas il faudroit qu’elles prissent pour leurs partages, des Rotures ou d’autres biens, s’il y en avoit ; sinon, une rente au denier vingt au lieu du Fief qui seroit évalué en deniers, suivant qu’il est déclaré par ledit Article CCLXIx, & par celui-ci encore plus expressément.

Mais en ces deux espèces ci-dessus représentées, les seurs ne peuvent pas faire une autre option, que celle que font les freres puinés ; c’est-à-dire, si les puinés ont accepté les Rotures & autres biens partables, au lieu de demander une provision à vie aux ainés, les soeurs ne peuvent pas renoncer à ces Rotures & autres biens abandonnés par les ainés, pour demander une rente sur l’évaluation des Fiefs pris par préciput, comme il a été jugé par l’Arrct du Vieux-pont, du 28 de Mars 164z, rapporté par Basnage sur l’Art. CCLXII, encore que les seurs allégassent, que l’option faite par les puinés n’avoit été faite que par collusion, pour favoriser l’ainé.

Reste le cas auquel il n’y à dans la succession que des Fiefs qui sont pris par préciput, sans d’autres biens, ou qui sont de si petite valeur, qu’il est plus avantageux aux puinés de demander une provision à vie. Sur cette espèce on a proposé deux opinions : la première, que les filles réservées à partage ont le tiers du Fief en propriété, mais qu’elles demeurent chargées de payer toute la provision à vie due à leurs freres puinés ; ce qui est conforme à l’ancienne Couûtume de Caux, par laquelle les filles réservées avoient le tiers en proprieté, mais étoient chargées de payer la provision des puinés, comme il a été remarqué sur les Articles CCXCVII, CCXCVIII & CCXCIN. L’autre opin’on est, que le tiers du Fier demeure en propriété aux siiles réservées, mais qu’elles ne sont obligées de payer que le tiers de la provilion, de sorte que les deux autres tiers doivent être payés par les ainés ayant pris préciput. Mais il peut y avoir une troisieme opinion plus convenable à l’esprit de la Coutume, qui ne souffre point ni que les Fiers soient divisés, sinon entre filles, ni que les seurs ayent plus d’avantage que les frères : suivant cette troisieme opinion, les a-nés ayant pris préciput, seroient quittes envers leurs freres & soeurs, en leur baillant une provision à vie du tiers de leurs Fiefs ; avec cette distinction toutefois, que la part qu’auroient les filles à cette provision, seroit évaluée en deniers, qui seroient constitués en rente au denier vingt, suivant les termes de cet Article.26

Au reste, quand on estime les Fiefs, soit pour régler le mariage avenant, soit pour donner partage aux filles, ils ne sont estimés que sur le pied du revenu, & non suivant leur valeur intrinseque, dans laquelle on considere les batimens & les bois de haute fûtaie & les autres ornemens, & d’ailleurs ce revenu n’est estimé qu’au denier vingt, comme il est attesté par l’Article du dit Réglement.


CCCLXII.

Filles mariées, encore qu’elles ne reviennent à partage, si elles n’y ont été expressément réservées, si est-ce qu’elles font part d’autant qu’il leur en appartiendroit au profit des héritiers, telle comme s’ils avoient eu partage au lieu de mariage.

Il répete, mais sous une autre figure de paroles, ce qui a été dit par l’Article COLVII, & le terme d’heritiers, qui y est employé, ne se doit entendre que des freres & leurs représentans, qui sont héritiers par un droit commun & public, & non des filles qui ne sont héritieres que par accident, & par un titre particulier de la réservation à partage.27


CCCLXIII.

Les Filles mariées par le pere ou la Mere, ne peuvent rien demander en leur succession ; & si elles ne font part au profit de l’Aîné, au préjudice du tiers que les Puînés ont par provision, ou en propriété en Caux.

Il est semblable en son commencement au commencement de l’Article CCIII, dont l’exception doit suppléer ce qui manque à celui-ci ; mais la fin est differente, en tant qu’il y est déclaré, que les filles mariées par le pere ou la mère, ne sont point de part au profit de l’ainé, au préjudice du tiers que les puinés ont par provision ou en propriété en Caux. Il est difficile de confeturer quelle est la raison de douter, qui a donné lieu 2 cette addition, vu que par la Coutume de Caux aussi bien que par la générale, les frerés doivent contribuer à la nourriture & au mariage des soeeurs, au prorata de ce qui leur vient de la totale succession, par l’Article CCLXXIx, & par le CCCLXIV. Mais néanmoins on peut découvrir cette raison de douter, dans le cas que le pere ou la mere auroient marié une ou plusieurs de leurs filles, en leur donnant pour leur mariage quelques héritages faisant partie de leurs biens de Caux : car il pouvoit sembler en ce cas, que le fils ainé auroit pu prétendre que le mariage des siurs ayant été acquitté au moyen des héritages de Caux, lesquels lui auroient appartenu, ou entierement, ou au moins pour les deux tiers, devroit diminuer la part que les puinés auroient pu demander ou en propriété ou par provision. Ce qui ne pourroit avoir effet, qu’en jugeant que les seurs ainsi mariées devroient faire part au profit de l’ainé, au préjudice & à la diminution du droit des puinés sur les biens de Caux : mais la Coûtume a rejetté ce prétexte, d’autant que les héritages donnés ne font plus partie des biens de la succession du donateur.28


CCCLXIV.

Les Freres contribuent à la nourriture, entretiennement & mariage de leurs soeurs, selon qu’ils prennent plus ou moins en la suc-cession de leur Pere & Mere, Aïeul ou Aïeule, en ligne directe, & pareillement aux autres charges & dettes de la succession.

Ce que cet Article ordonne, touchant la contribution que doivent les freres à l’entretien & mariage de leurs seurs, aussi-bien qu’à toutes les charges & dettes de la succession, s’observe à l’égard de toutes sortes d’héritiers, qui contribuent à l’acquit des dettes & charges à proportion de ce qu’ils amendent de la succession, pro modo emolumenti.29 Mais comme il y a des héritiers au propre, & des héritiers aux meubles & aux acquets, on distingue aussi les dettes immobiliaires d’avec les mobiliaires : celles-ci doivent être acquittées sur les meubles & acquêts, à proportion de la part qu’on y prend, & les immobiliaires se prennent sur les immeubles sçavoir, les anciennes dettes, sur les propres ; & les dettes contractées par le défunt, sur les acquêts ; & les héritiers contribuent au payement d’icelles à proportion du profit qu’ils ont fait de la succession immobiliaire, de telle maniere toutefois, que si les dettes mobiliaires excédoient la valeur des meubles, l’excédant de ces dettes seroit payé sur les immeubles, & les héritiers y contribueroient à proportion de leur émolument : cela a été jugé par un Arré du 12 d’Avril 1628, rapporté parBasnage . Ce qu’il faut entendre, quand il n’y a qu’une sorte d’héritiers, qui succedent aux meubles & aux immeubles d’une succession ; car quand il y a diversité d’héritiers, les uns aux meubles & acquêts, les autres aux propres, où les uns au paternel & les autres au maternel, chaque sorte d’héritiers sont obligés d’acquitter les dettes qui sont pro-pres de l’espece de leur succession, encore qu’elles excedent ce qu’ils en auroient amendé, sans en pouvoir prétendre aucune récompense ou recours sur les héritiers d’une différente espèce. Ce qui est contraire à ce qui se pratique dans la plûpart des autres Coûtumes, dans lesquelles la succession d’un défunt

est bien réputée composée comme de plusieurs hérédités, à l’égard des diverses sortes d’héritiers qui la partagent, mais est simple, & véritablement une à l’égard de l’obligation de payer les dettes : Unum est pairimonium, G una successio, parce que les dettes affectent généralement tous les biens d’une succession : Omnia bona deffunvi imminuunt non loci certi facultates, l. fideicom-missum, S. tradtatum, ff. De judiciis. C’est sur ce fondement que la Coûtume de Paris, en l’Article CCCXXxIV, à ordonné que les dettes d’un défunt doivent être payées, tant par ses héritiers, soit aux propres, soit aux acquêts & conquêts, que par les donataires ou légataires universels, par contribution qui se doit faire entr’eux proportionnément à ce qu’un chacun amende de la commune succession : ce qui a été étendu par les Arrêts du Parlement de Paris, à toutes les Coûtumes qui n’ont point de disposition contraire. VoyezLoüet , D. 13, 14 & 15, & P. 13, ou sont référés plusieurs cas ausquels la urisprudence déclarée dans ledit Article CCCXXXIV a été appliquée.30


CCCLXV.

Femme prenant part aux conquêts faits par son Mari, constant le mariage, demeure néanmoins entière à demander son dot sur les autres biens de son Mari, au cas qu’il y ait consignation actuelle du dot fait sur les biens du Mari ; & où il n’y aura point de consignation, le dot sera pris sur les meubles de la succession, & s’ils ne sont sussisans, sur les conquêts.


CCCLXVI.

Si le Mari reçoit, constant le mariage, le racquit des rentes qui lui ont été baillées pour le dot de sa Femme, le dot est tenu pour consigné, encore que par le Traité de Mariage, ladite consignation n’eût été stipulée.

Ces deux Articles font la quatrieme partie de la division proposée, & enseignent comment les dots doivent être reprises sur les biens des maris, pro-pres, acquêts & meubles. La Coutume fait cette distinction, ou il y a eu coniignation de la dot, ou il n’y en a point eu : Le terme de consignation est particulier en Normandie, quant à la signification qu’on lui donne à l’égard de la dot ; car on entend par la consignation de la dot, un remplacement d’icelle fait sur les biens du mari, qui par ce moyen demeurent engagés non-seulement à la restitution de la dot, mais au payement des intérêts ; comme si le mari, par la réception de la dot, avoit constitué une rente à laqueile ses biens fussent specialement & privilégiément hypothéqués, de sorte que l’effet de cette consignation est, que la femme doit être payée de sa dot en principal & intérets, sur les biens propres, c’est-à-dire, appartenans au mari lors du mariage, sans aucune dimmution des droits qui lui sont attribués sur les conquêts & meubles du mari.

Cêtte consignation que la Coutume appelle actuelle dans l’Article CCCLXV se fait, ou par une clause du contrat de mariage, par laquelle il est stipulé que la dot promise est dessors consignée, ou constituée, ou remplacée, ( ces trois termes sont équivalens ) sur les biens du futur époux, ou par la quittance que baille le mari des deniers dotaux, par laquelle il déclarc les consigner, ou remplacer, ou constituer sur ses biens.31 Il y a une consignation tacite, qui s’établit, quand le mari reçoit le racquit des rentes qui lui ont été baillées pour la dot : car par cette réception, la consignation est réputée faite de droit, & sans aucune convention stipulée lors du contrat de mariage, ou du racquit, par l’Article CCCLXVI, auquel il faut ajouter, que les biens échus à la femme pendant le mariage, par succession directe de ses ascendans, sont censés dotaux, & ont le même privilége que la dot, & sont partant tacitement consignés, au même cas que la dot est réputée consignée. Cela supposé, & reprenant la distinction faite par la Coutume en l’Article CCOLXV, quand il y a consignation actuelle, la reprise de la dot se fait sans aucune diminution des droits qui sont attribués à la femme sur les meubles & les conquêts : de sorte que la restitution de la dot se fait entièrement sur ce qui revient aux héritiers du mari, tant desdits mcubles & con-quets, que des autres biens propres du mari, même au-delâ de la valeur Mais quand il n’y a point de consignation de la dot, alors la reprise en doit être faite sur lesdits meubles & conquêts, dont partant la part qu’y auroit

eu la femme, est à proportion diminuée, que si lesdits meubles & conquêts ne sont suffisans pour porter le remplacement de la dot, l’excédent est repris sur les biens propres du mari, au préjudice de ses héritiers Il y a une clause qui a les effets semblables à ceux de la consignation actuelle, qui est, quand il est stipulé par le contrat de mariage, qu’en cas que la dot n’ait pas eté remplacée par le mari, elle sera reprise lans aucune diminution des droits que la Coutume attribue à la femme ;32 car en vertu de cet-te clause, la part seule des héritiers sur les meubles & conquêts, sera chargée de la restitution de la dot, qui n’aura pas été remplacée. Mais on peut dire que les effets de cette consignation & de cette clause, répugnent à l’intention de la Coutume, & à la raison : la Coûtume a privé les femmes des avantages qui viennent en conséquence de la communauté, & d’ailleurs elle a voulu conserver les propres dans les familles, ne voulant point qu’on puisse succéder aux meubles & acquets, que les propres ne soient remplacés, ou libérés des dettes nouvellement contractées. Ces deux principes sont renversés par les offets de la consignation : car en conséquence d’icelle, la femme a plus d’avantages qu’elle n’en pourroit avoir par la communauté, vû qu’elle reprend sa dot sur les biens propres de son mari, & que ce nonobstant elle la reprend une seconde fois, où si elle trouve les deniers de sa dot dans les coffres de son mari, quand il ne les a point consumés, ou en prenant part aux acquisitions que son mari aura faites de ces mêmes deniers : D’ailleurs, la consigna-tion qui se fait sur les biens propres du mari, les engageant & obligeant à larestitution de la dot, est une espèce d’alienation de ces mêmes biens, nonobs-tant laquelle, la femme prend part aux acquisitions & aux meubles, comme si les biens de son mari n’avoient point été chargés ni hypothéqués. Toutes ces conséquences sont contraires à la raison, qui ne veut pas que les femmes s’enrichis-sent des dépouilles de leurs maris, en se faisant payer deux fois d’une même. chose ; & d’ailleurs, n’ont pour fondement que le mot de consignation ; pluepropre à fournir la matière d’une vaine imagination, que celle d’aucun railon-nement solide. La regle qui s’observe dans les Coûtumes qui reconnoissent la communauté entre les mariés, est beaucoup plus équitable : car si le mari n’a point fait de remploi des deniers dotaux, ils sont repris sur les effets de la communanté, s’ils sont suffisans ; sinon, sur les biens propres du mari, c’est-àdire, qui lui appartenoient avant le mariage.

Or la consignation renferme comme une constitution de rente, à l’égard des deniers reçus par le mari comme il a été remarqué : c’est pourquoi incontinent aprés la dissolution du mariage, les arrérages commencent à courir, sans qu’il soit besoin de faire aucune interpellation au mari ou à ses héritiers ; méme quelque changement qui arrive aux constitutions de rente, par l’augmen-tation ou diminution du prix, il ne peut apporter aueun changement aux garrérages de la dot qui a été consignée : De maniere qu’on a jugé, que les antérêts d’une dot consignée, dans, le temps que les constitutions de rente se faisoient au denier dix, seroient toujours continués à raison dudit denier, nonobstant la réduction depuis faite du prix des constitutions au denier quatorte, par un Arrêt du 17 de Decembre 168s, rapporté parBasnage .

Ce n’est pas qu’on ne puisse stipuler utilement, qu’il sera en la liberté de la femme ou de ses héritiers, de pouvoir répêter la dot dans un certain temps. aprés la dissolution du mariage, ou de laisser continuer la rente, comme il a été jugé par un Arrêt du mois de Décembre 16z3, rapporté par Banasge.

Mais comme cette consignation ou constitution de la dot emporte l’enoagement des biens du mari, il a été jugé, qu’un homme qui étoit en curatelle, n’avoit pu sans l’avis de son Curateur faire cette consignation par son Contrat de mariage, par un Arrêt du 1s de Mai 167t, rapporté parBasnage .

On demande, si le mari s’étant obligé par la consignation au payement de la dot, ne pourra pas acquitter cette obligation, & décharger son bien, en faisant un remplacement des deniers dotaux en quelqu’acquisition, & en déclarant lors d’icelle, que le prix provient desdits deniers par lui recus Il, semble qu’il ne le peut, parce que ce remplacement étant fait par le contrat de mariage, ne peut être changé par le mari, qui ne peut pas faire un contrat, qui diminue les droits & les avantages de sa femme, établis par le contrat de mariage, la femme étant comme sous la tutelle du mari. On foutient le contraire, parce qu’il n’y a rien de si naturel ni de si équitable, qu’un obligé se puisse libérer ; & parce que de plus la consignation de la dot ne doit être réputée faite, qu’au cas qu’il ne s’en fasse point un remplacement suffisant, pour lequel il faudroit qu’il apparût que le prix de cette acquisition fût en effet provenu desdits deniers : Il est vrai que ce remplacement pourroit être refusé par la femme, si elle n’étoit pas intervenue dans le contrat d’acquisition ; mais tout au moins, cela l’exclueroit de prendre part à cet-te acquisition, comme ayant été faite des deniers de sa dot, qui par conséquent ne sera pas réputée un conquêt.33

Il est à propos de remarquer, que l’Article LXV, dudit Réglement paroit contraire à l’effet de la cons gnation tacite, qu’on croit égas à celui de l’actuelle par l’Article CCCLXVI, vù qu’il est déclaré par ledit Article LXV, que le remploi des immeubles que le mari ou la femme possédoient lors de leur mariage, doit être fait sur les immcubles qu’ils ont acquis depuis ; & que faute d’acquêts immeubles, il sera fait sur les meubles : & que de plus, la femme n’aura part ausdits meubles & acquets, qu’aprés que ledit remploi aura été fait. De sorte qu’il sembleroit, que par ce Réglement on auroit voulu faire entendre, que la consignation tacite, autorisée par l’Article CCCLXVI de la Coûtume, n’a pas l’effer qui paroit par l’Article précédent CCCLXV avoir été attribuée spécialement & uniqu-ment à la consignation actuelle ; sçavoir, de reprendre par la femme sa dut, sans diminution de ses droits, sur les meubles & sur les conquêts : D’autant qu’on peut conclure des termes de ce Réglement, que puisque les rentes dotales, c’est-à-dire, baillées pour la dot, sont évidemment partie des immeubles qui appartiennent à la femme lors de son mariage, elles doivent être rempiacées & reprises sur les conquêts & sur les meubles, auparavant q’e la femme y puisse prendre aucune part lorsqu’elles ont été acquittées aux mains du mari, ce qui paroit être foit équitable. Et partant l’effet de la consignation réputée faite, au cas & par la dis-position de l’Article CCCLXVI se trouveroit limité précisément au remplaces ment sur les biens du meri qui au moyen de cette consignation tacite, demeureroient engagés & obligés au payement des rentes dotales racquittées do-puis le mariage aux mains du mari. Mais Basnage rapporte sur ledit Article CCCLXVI, un Arrêt du 2 de Juillet 16yo, qui est contraire à cette interprétation, dont il conclut que par cet Article LXV du Réglement on ne doit point entendre la dot, ni les rentes ausquelles elle consiste, mais qu’on doit entendre seulement les ventes volontaires faites par le mari, des biens appartenans à sa femme : Cependant cette interprétation répugne aux termes du Ré-glement, & à l’équité qui y sert de fondement, & paroit n’avoir été proposée que pour colorer l’Arrét. On peut de plus remarquer, que cet Article LXV, sembie contraire à l’Article CCCLXV de la Coûtume, en ce qu’il déclare que le remploi des biens aliènés doit être fait sur les immeubles, & qu’il n’estpris sur les meubles, que lorsque les immeubles ne sont pas suffisans ; quoique par ledit Article CCCLXV, la reprise de la dot non remplacée, doive être faite sur les meubles, auparavant que d’être faite sur les conquets.34 Il faut en outre remarquer, que les rentes qui sont dues par le mari pour la dot, en vertu de la consignation ou autrement, sont de la même condition que les rentes constituées à prix d’argent, en tant qu’on n’en peut da-mander que cinq années d’arrérages, à moins qu’on n’ait fait des diligences valables, pour iterrompre la prescription, & en tant que la faculté de les racquitter est perpétuelle, & ne se peut preserire par aucun temps.


Fin du premier Tome.
1

Il y a des Coutumes qui reglent le partage par la consideration de la qualité des personnes & celle des biens réunies, cette manière de partager a de grands inconveniers. Loyc d’Argentré , du Partage des Nobles ;Hévin , surFrain ,du Pineau , sur Aniou, Art. CCl-Ii e CCLIII, les Commentateurs, sur la Coutume du Maine, Art. CCLXX, CCLXXI & CCLXXII.

Parmi nous les biens se divisent suivant leur qualité, sans distinction entre les Nobles & les Roturiers. Nous regardons les successions comme des choses réelles, & il nous paroit, per exemple bien singulier qu’en Bretagne deux enfans d’un premier lit partagent roturièrement la succession de leur mere, & que deux autres enfans sortis d’un second mariage partagent entr’eux la même succession noblement, selon la qualité des mariés M. le Président de Montesquieu se rapproche de la Coûtume de Bretagne ; il soutient comme elle, que l’usage des préciputs n’est pas bon dans toutes les conditions ; qu’il tend, par exemple, à détruire le commerce en introduisant l’inégalité parmi les enfans d’un mêrie pere. M. le Président Hainault s’explique encore plus clairement ; voici ses propres termes : y Un Gentilhomme veut perpétuer son nom, & doit, suivant le préjugé transmettre sans partage tous ses biens à son ainé ; un Commerçant, dont la passion est l’etenduë du comn merce & l’accroissement des biens dans sa famille, doit, au contraire, partager entre ses n enfans les richesses qu’il a acquises, pour que chacun soit en état de le représenter & pour D pouvoir, par eux, multiplier ses talens & son crédit. La Coûtume de Normandie est nén cessaire dans les vues du premier, & la Loi & la Coutume doivent faire un partage égal m dans la famille du second n. Abregé chronologique ; Remarques particulieres sur la troisieme Race.


2

Tant que les honneurs, les bénéfices ou les Fiefs demeurerent amovibles ou à vie, dit le célèbre M. de Sozzi ils furent réglés par les seules Loix politiques ; mais, suivant l’observation de l’Auteur de l’Esprit des Loix, Liv. 31, Chap. 33, dés qu’ils devinrent une espèce de biens que l’on put mettre dans le commerce, que l’on eut la liberté de donner ou de vendre, ils furent réglés par les Loix politiques & les Loix civil & féodales ; par cellesla en ce qui concerne le droit public, les obligations envers l’Etat, lesquelles appartiennent uniquement à la Souveraineté : par celles-ci, qui prirent alors naissance, en ce qui concerne le droit privé, le droit respectif du Seigneur au Vassal, les conventions, les usages, &c M.Renaudon , Traité hist. & prat. des Droits Seign. Liv. 2, Chap. 1, rapproche encore cette idée d’une manière plus analogue à nos usages : nLorsque les Fiefs furent devenus hén réditaires & patrimoniaux, la Couronne, qui étoit le Fief principal, le devint également, n il fut donc nécessaire d’imaginer des Loix pour régler la succession des Fiefs & de la Couy ronne : alors la Loi féodale, dit M. le President deMontesquieu , forca la loi politique & n la loi civil, il fallut, dans le partage des Fiefs, assurer le Service militaire, qui en déD pendoit ; on en chargea l’ainé de la famille : de-là les grands avantages que donnent les n différentes Coutumes a l’ainé sur cette sorte de biens n. Pajoute à la réflexion de l’Auteur, sans vouloir discuter les Loix qui concernent la succession à la Couronne, que de-là s’est établie parmi nous l’indivisibilité des Fiefs.

La division des Fiefs, dit l’Auteur du Journal du Palais, tome 1, diminue & affoiblit lesfamilles nobles, & les fait tomber dans l’indigence ; sans le secours des richesses il est im-possible que la Noblesse se soutienne dans cet eclat qui la rend si recommandable, ni qu’ellepuisse servir utilement dans la profession des Armes, qui la fait considérer comme une des plus fermes colonnes de l’Etat, & comme un rempart contre les entreprises & violences des ennemis : or, pour prévenir cet inconvénient, les droits des ainés & des mâles qui conservent les familles ont été établies dans toutes les Coûtumes de France yi & comme il n’y a point de Province où la Noblesse se soit acquis plus de consideration qu’en celle de Normandie, c’est aussi pour cela qu’on y a pris un soin particulier d’y étendre les droits d’ainesse sur les Terres nobles & de dignité.

D’Argentré , sur l’Article DXI III de sa Coutume, dit que l’indivisibilité des Fiefs des Chevaliers fut établie en Bretagne par une Assise tenue sous le Duc Gcoffroi, quo nomine intelligebant, les Fiefs des Chevaliers, ut hodiè quoque Normanni vocant, quibuseum multa de-Jure patrio conveniunt, les Fiefs de Haubert, un plein Fief de Chevatier, un tiers, un quart, un septieme additum ut solidum dominium talium in primogenitos veniret, neve in portionent ullunt secundo geniti vocarentur, nani feminei serûs prolem visum satis esse matrimonio elocari, de secundo genitis id tantum cautum ut primogeniti consulerent, quod quantumque illis fatis esset, pro facultatibus modus arbitrio primogeniti relictus.

La plupart des Coûtumes admettent la divisibilité des Fiefe avec une part avantagense pour Painé, on ne sçauroit croire combien il en résulte d’inconvéniens. Dans le second degré de succession la part du cadet se subdivisera, & dans trois ou quatre générations un Fief de peud’étenduë formera une multitude de petits Fiefs indépendans les uns des autres : car tous re-leveront du Seigneur dont relevoit le Fief étant en son intégrité ; les tenures seront également divisées, de sorte qu’il ne sera pas rare qu’une censire de quelque considération soit dans la mouvance de trois ou quatre Seigneurs : ce qui en rend la possession tres désagréable.

Ces principes s’écartent de la constitution des Fiefs ; on tache d’y remédier par des substitutions.

Il y a des biens indivisibles par convention. On peut fieffer un fondsà condition qu’il passera au fils ainé du fieffataire sans division & on ne peut regarder cette disposition comme un avantage indirect du preneur à fieffe en faveur de son ciné, d’autant que la convention dégend de la volonté d’un tiers ; on peut aussi donner sous la même condition.


3

Les Auteurs de Paris ne se concilient pas facilement sur l’effet que l’on doit donner à la renonciation faite par l’ainé à son droit d’ainesse pendant la vie de son pere. LeBrun , des Successions, Liv. 2, Chap. 2, sect. 1, n. 39, dit que l’on a toujours jugé que le consentement de l’ainé n’autorise pas la translation du droit d’ainesse, à moins qu’il ne soit en pleine majorité, auquel cas il peut céder l’espérance de son droit d’ainesse, ou plutôt prêter son consentement à la disposition du pere, comme il pourroit renoncer à la succession entière de son pere, pourvu que son pere y donnât encore son consentement suivant la Loi dern. Cod. de Pad. si ce n’est que le pere ne dispose du droit d’ainesse, & ne le transfere par un testament & sur le point de sa mort : car en ce cas, le consentement de l’héritier majeur paroit extorqué comme en matières de donations faites à personnes prohibées.

Sur ce fondement, le Brun ajoute, n. 4i, qu’il faut dire que le fils ainé majeur peut valablement transférer son droit d’ainesse du consentement de son pere, non : seulement u frere qui le fuit immédiatement, mais au dernier de tous, au préjudice des autres qui sont les ainés.Brodeau , sur M.Louet , E. Som. 7, n. 13, ne s’éloigne pas de le Brun ; mais il soutient, n. 14. que quand l’ainé auroit prété son consentement expres, & renoncé volontairement à son droit d’ainesse non échu, & sans crainte & impression, même moyennant récompense, le pere ne peut y toucher ni faire un partage par lequel il diminue le droit de l’ainé dans les Fiefs. Comme la Loi imite la nature les particuliers ne peuvent changer l’ordre établi par les Loix publiques & politiques, non plus que celui des causes naturelles, les droits naturels, politiques & publies se reglent par les mêmes principes, & leurs mouvemens se conduisent par les mêmes ressorts. L’enfant qui le premier a imposé le titre auguste de la nature, c’est-à dire, le nom de pere à celui qui lui a donné l’être, reçoit en mê ne-temps celui de fils ainé, qui est fixe & immuable dans les familles & dans la maison paternelle. Je n’examine pas, avec scrupule, les motifs de l’opinion deBrodeau , mais elle est au fonds conforme à notre Jurisprudence.

e ne crois pas qu’un pere, en acquérant un Fief, puisse faire promettre valablement son fils ainé qu’il le partagera avec ses puinés. Comment un pere peut-il établir un démembrement de fief que la Coutume défend par une disposition qui, quoique conque affirma-tivement, a toute la force d’une disposition négative I La question se réduiroit donc à sçavoir si le pere pourroit obliger son fils, en vertu de son consentement à établir entre lui & ses puinés une égalité dans le partave en détachant, au défaut des rotures, des droits utiles du fief. Ie suis d’avis que nonobstant ce consentement qui n’a pas même la force d’un partage provisionnel l’ainé seroit en état, après avoir pris des Lettres de rescision, de reclamer ses droits sur le Fief acquis par son pere : il est vrai que le pere ayant éprouvé le refus de son fils ainé, auroit pu renoncer à l’acquisition du Fief pour acquerir des rotures, mais il ne l’a pas fait. Voyer Basnage ;la Lande , sur Orléans, Art. XCl,Boullenois , quest. 21.

CependantAuzanet , sur Paris Art. XV rapporte un Arrêt de son Parlement du 11 Décembre 16zt, qui décide en faveur de la vaudité de la renonciation. Les conventions contraires au droit public, dit cet Auteur ne peuvent subsister ni être exécutées : & néanmoins un pere étant sur le point d’acquérir un Fief prend un acte de tous ses enfans tant ainés que puinés, par lequel ils demeurent d’accord de partager également le Fief en cas qu’il soit acquis ; sur la difficulté de la validité ou’invalidité de l’acte, il a été déclaré valable. Auparavant de donner à cet Arrét la force du préjugé en cette Province, il faut bien faire attention à nos Loix féodales & à l’impuissance où est le pere de déroger directement à la Coûtume, qui est une portion du droit public sous lequel nous vivons.


4

L’Article CCex de la nouvelle Coutume de Paris est absolument contraire à la nôtre ; il porte que la part du renoncant accroit aux autres enfans héritiers, sans aucune prérogative d’ainesse de la portion qui accroit. Cette disposition n’est pas claire : du Moulin sur P’ancienne Coutume, S. 13, Gl. 1, n. 30, & Gl. 3, n. 27, dit que l’ainé peut, aprés la mort du pere, renoncer à son droit d’ainesse ; le droit d’ainesse passe-s il alors au premier puiné : Non, répond duMoulin , sed deficit omnino & est locus juri communi. Mais, S. 15 n. 1, 2 & 3, il décide que si, de plusieurs puinés, l’un renonce, l’ainé prend son droit d’ainesse comme si le puiné renoncant n’eût jamais existé. Pone tres esse silios, secundo vel tertio genitus renuncint, primogenitus pretendit Bessem reliquorun feuduliunt concludendun est pro primogenito, nam portiu repudiantis magis accrescit portioni quum persone. Ainsi, dans le premier cas, l’accroissement se fait aux personnes, & dans le second cas à la masse de la succession. Le Brun accuse duMoulin , écrivant sur l’ancienne Coutume, de n’avoir pas été consé-quent. Basnage rapporte l’opinion de Brodeau qui a suivi la Coutume de Mantes. Brodeau distingue la renonciation gratuite, & celle faite al quo dato Auxanet tranche la diffi-culté, en disant qu’il est croyable que l’ainé qui renonce a recu d’ailleurs d’autres avantages pour le récompenser du droit d’ainesse. Ces questions ne peuvent naître dans notre Coûtume, mais elles ne laissent pas d’y répandre, par comparaison, de certains traits de lumieres.


5

Si un Fief qui eût appartenu au frere ainé est racheté aprés la mort du pere en vertu d’une clause du contrat de vente les deniers du rachat se partagent : ils également entre les enfans du pere commun à Berault répond, qu’on doit examiner quel est le propriétaire du Tiefau-temps du rachat : or, par la regle le mort suisit le vif. s le Fief a été-déféré à Painé sous la condition du contrat d’acquet ; l’ainé revend donc le Fief à celui qui exerce la faculté de reméré ; il doit conséquemment en avoir seul le prix. Il est vrai que, commele.

Fief étoit chargé d’une provision en faveur des puines, il est juste qu’ils ayent la même pron vision sur les deniers du remboursement.

LeBrun , des Success. Liv. 2, Chap. 2, sect. 1, n. 5 & & suiv. pose comme principe, que si le rachat se fait depuis la mort, mais avant le partage, & à plus forte raison s’il se fait depuis le partage, l’ainé conserve son droit d’ainesse sur le prix, parce qu’il a été une fois saisi, & que l’exécution du reméré doit être considérée comme une revente. Il en doit être de même-du Domaine engagé ; il expose que l’Arrêt du 15 Juillet 158y est rapporté d’une manière différente dansLouet , D. Somm. 30 ; & dans lePrêtre , Cent. 1, Chap. 37 ; il déplore le malheur de l’arrétographie, qui devroit être une fource de lumière, & il conclut qu’il faut s’attacher au témoignage de M. lePrêtre , comme étant plus conforme aux principes. Le même le Brun remarque qu’il faut excepter de la décision le contrat pignoratif, & celui où il v a lézion d’outre moitié du juste prix ; au premier cas la vente n’est que simulée, & elle dégénere dans une simple obligation : au second cas, la rescision du contrat provient du vice même qui l’a infecté des le commencement ; & j’ajoute, en termes généraux, que l’exception proposée par le Brun a lieu toutes les fois que le contrat est nul, comme une vente faite par un mineur, par un tuteur, par un benéficier, sans nécessité & solemnité, par un mari des biens de sa femme sans son consentement, ou faite par un homme ayant pouvoir, mais annullée à cause du dol, de la fraude ou violence de l’acheteur.

Quoique nous ayons adopté l’opinon de leBrun , je crois devoir avertir qu’Auzanet , sur l’Art. XIII de Paris, rapporte un Arrêt du ro Mai 16oy, conforme au sens que Louet donne à l’Arrét de 1589.

Mais quand le pere a vendu un Fief dont le prix est dû, ce prix se partagera également entre les freres

Quoique le prix du Fief ait la force de le représenter, lorsqu’il s’agit du remplacement entre les héritiers aux propres & les héritiers aux acquêts, il seroit cependant absur-de de donner à de simples deniers la qualité extrinseque ide la nobilité ou de la roture.


6

Le frere ainé qui a opté un préciput, & qui, par cet acte, a consommé son droit, peut, ce semble, changer de volonté quand il a des motifs raisonnables, comme si le puiné avoit fait juger roturieres des terres que l’ainé croyoit nobles & composer une partie de son préciput : Arrêt du 1a Mai 16o1, en faveur de l’ainé : on ne doit cependant pas avoir égard à unerlezion peu considérable ; car-le préciput est un avantage d’affection, d’honneur & de dignité.

Basnage , sous cet Article, propose plusieurs questions sur l’effet de la légitimation par le mariage subséquent relarives au préciput : la question qui mérite le plus d’atrention est de soavoir si le legitimé, aprés un mariage intermédiaire, préférera dans le préciput le fils niné issu de ce premier mariage. Le légitimé oppose que la succession du pere commun n’est ouverte que par son déces, & qu’alors on doit regarder comme ainé celui qui l’est effective-ment par sa naissance, puisque la légitimation fait cesser toute différence entre les enfans du même père ; l’enfant sorti du premier mariage se défend sur la bonne foi dans laquelle ilest né, avec lespérance de jouir des prérogatives attachées à une union legitime. Ne fait. on pas une grace à celui qui est le fruit du concubinage en effacant la tache de son origine ; Cette derniere opinion paroit bien fondée ; mais il ne faut pas en argumenter au profit des filles dupremier mariage, car le légirimé les exclura sans aucun doute, duMoulin , sur Paris ; S13, Gl. 1 ;Auzanet , ibid, Art. XIII


7

Godefroy , sous cet Article, traite de la liquidation des Rotures entre le frère niné & les puinés. Si le frereainé, dit-il, a fait un Inventaire des Titres de la succession dont il Slagit, la liquidation se fera à communs frais sur la représentation des Titres ; & si ce moyen ne suffit pas pour éclaircir la vérité, il décide, conformément à la disposition de l’Article DXLI & de la Coutume de Bretagne, que les héritages possédés noblement pendant quarante ans, avant l’échéance de la succession, sont présumés nobles. L’Article CIV du Réglement de r6bb ; paroit d’un grand poids en cette matière : les héritages relevans d’un Fief y estil placité, sont censés réunis audit Fief, si le contraire n’est justifié ; mais si la qualité de la terre que l’ainé prétend par préciput est contestée, il faut recourir aux maximes exposées sous l’Art. C de la Coutume.


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Cet Article prouve que le préciput noble n’est, en Normandie, que le droit de choifir un Fief qui tient lieu de partage, à Paris, le préciput est un avant-part sur la succession cotnmune qui n’entre point dans la cotte héréditaire. Le frère ainé a, suivant la Jurisprudence de Paris, en outre le préciput qui a quelque rapport avec celui de Caux, les deux tiers ou la moitie de tous les Fiefs en succession directe, selon la diversité du nombre des enfans. Notre usage est encore différent ; de sorte que quand nos Commentateurs citent ceux de Paris il faut toujours être en garde contre les conséquences qu’ils en tirent : Coutune de Paris, Articles XV & XVI ;Duplessis , corps & compilation des Commentateurs sur Paris, par deFerriere , tome 1.


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Il est de Jurisprudence que li substitution introduite par la Loi en faveur des puinés cesse lorsque le frère ainé & les freres puinés sont morts, & que les drots de la succession d’un cousin germain sont à disecuter entre les descendans de l’ainé & des puinés Arrêt du 18 Avril 1732 Si le fils d’un puiné décede & ne laisse, dans sa succession, que les Rotures héritées de son pere, le frère ainé, qui a pris préciput, pourra-t’il reelamer, contre un autre puiné survivant, le partage dans cette succession : On peut dire que l’exclusion prononcée par la Coûtume n’affecte que la succession du puiné, qu’il s’agit ici de celle de son fils, & que l’on ne peut, sans blesser l’équité, étendre une exception contraire au Droit commun ; mais le puiné oppose que l’option du préciput exelut l’ainé, sans retour, du reste de la succession sur laquelle il l’a exercé, il est constant que la Coutume ne dispose que sur la succession d’un puiné ; cependant, tant que l’ainé vit, tant qu’il se présente des puinés pour succeder, il semble que l’ex-clusion doit avoir lieu-


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Si de trois frères les deux premiers ont opté chacun un Fief en leur rang, & qu’il soit resté au troisieme un Fief de tres modique valeur & des Rotures considérables, l’ainé dans la succession du puiné, pourra deman der partige avec le second frère, d’autant qu’ils n’ont partagé ni l’un ni l’autre avec le puiné.Godefroy .

Qnand un des puinés a aliéné les Rotures qui lui étoient échues en ligne directe, & qu’il les a remplacées dans une Terre noble, le frère ainé ou ses descendans, à l’exclusion des autres puinés ou de leurs descendans, sont en droit de reclamer la propriété du Fief acquis par le puiné, dont la succession est ouverte jusqu’à la concurrence du prix du propre vendus à la charge seulement, en cas que ce Fief se trouvàt surpasser la valeur du propre, de rapporter l’excédent au profit des puinés : Arrêt du 28 Juin 1090.

Quoique la Coûtume habilite l’ainé à succéder au noble dans la succession du puiné, son intention n’est pas d’étendre cette facualté au-dela du droit commun, ainsi, si dans la succession du puiné il se trouve deux Fiefs du bien propre, Painé n’en pourra prétendre qu’un entre mêmes héritiers, soit que ces deux Fiefs procedent de la même ligne, soit que l’un foit venu du côté paternel, & l’autre du côté maternel.Godefroy ,Basnage .


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D’Argentré , sur l’Article DIIx de Bretagne, qui a quelque rapport en cet endroit avec nôtre Coûtume, dit, qu’anciennement la part des enfans qui mouroient aprés la délation de l’hérédité, accroissoit à la succession : Ponaneur sex liberi, ponantur item duo mior-tui ante acceptationem, dicisio fiebat inter quatuor nullu respectu, vel nientione factâ mortuon, per regalam, qui non adinittitur ad partem, non fac. t partem. Basnage est bien plus elair. Il n’est pas nécessaire que le frère ait, avant son déces, fait une option dans la suecession paternelle dés l’instant de la mort du pere ipsu jure fuit leres, & suisitus, ( portin-tionem suum vel ignorans transuisit ad quoscunque heredes Ainsi raisonne Basnage en faveur du puiné : Si le premier puiné décede avant aucune option, l’ainé a droit de reclanier la même regle.

Terrien , Liv. 6, Chap. 3, rapporte un Arrêt du as Juillet 1e1o, entre les Sieurs de Drovai frères, par lequel il fut jugé que les puinés qui étoient au nonibre de trois, n’ay-nt point provonué de partaze à cause de leur minorité, & l’un d’eux étant de-édé duns l’us-ervalle, le frcre ainé auroit un Fief à cause de la succession de son pere, & un autre à Auses de la succession de son frere.Terrien , en explication de cet Arrêt, dit que quoique le puiné dé-éde ne se fut point porté héritier de son pere, toutefois la possession de sa part lui auroit été transmise par la mort de son pere, par la regle générale le mort faisit le vif, de sorte que si ce puiné eût eu des créanciers, elle leur eut été valablement hvpothéquée.

Lorsque dans une même succession il y a un Fief situé en Gaux, un autre Fief & des Rotures en Coûtume générale, & que le frere ainé vient à décéder avant le partage, le pre-mier puiné peut prendre le Fief litué en Gaux, chargé de la provision à vie des puinés, dont il confond sa part dans lui même, & le Fief situé sous la Coûtume générale comme héririer de son frère ainé ; & il peut en outre demander partage dans les Rotures comme héritier de son pere ; quand il y auroit quelque équivoque dans sa déclaration, il pourra la rectifier : la question a été ainsi jugée par Arrêt de Rapport, cité parBasnage .


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LeBrun , des Success. Liv. 2. Ch. 2, sect. 2, n. 4, dit qu’il y a une Coutume, qui est celle de Normandie, laquelle dispose, Article CCCXLV, que le fise & autre créancier subrogéu droit du fils ainé, ne peut pas prétendre de droit d’ainesse, mais un partage égal seulement, quoique par l’Article CCLXXVIII, elle subroge le créancier au droit du débiteur pour une succession qu’il refuse d’accepter. Cette disposition, continue leBrun , à bien examiner la chose, est singulière : car quoiqu’un créancier ne puisse pas se faire subroger aux prérogatives d’honneur qui sont artachées à la personne de l’ainé, cependant je ne vois rien qui empèche qu’il ne puisse avoir tout l’émolument du droit d’ainesse. Le Brun n’a pas bien pénêtré l’esprit de nôtre Coûtume, elle se propose de maintenir le lustre & la dignité des familles, de-sa les avantages qu’elle donne à l’ainé : lorsqu’un étranger vient le représenter en vertu de l’Article CCLXXVIII, le motif de la Loi cessant, il y auroit de l’inhumanité, & ce seroit contrarier l’intention de la Loi, quand il ne se trouve qu’un Fief dans la succession, de réduire les puinés au simple viage.

Bérault , qui a si bien développé le sens de notre Droit municipal, a décidé que le partage devoit être pleinement consommé pour que le Fise ou leCréancier subrogé put user du privilége de l’ainé.

Basnage a dit, aprés duMoulin , que si l’ainé vend son droit avec pouvoir d’opter le préciput, le titre validera en exécution d’un choix présumé, mais il rapporte, sur l’Article CCCLVI, un Arrét du mois de Iuin 1625, qui paroit contraire à cette opinion. Dans le fait de cet Arrêt il s’agissoit du préciput roturier : le frère ainé avoit vendu tout & tel droit de partage qui lui pour-roit appartenir, ensemble son préciput, & lieu chevel, que l’acquereur déclara bien connoître : par l’Arrét l’acquereur fut déclaré non-recevable à exercer le préciput au droit de son vendeurs Concluez de cet Article avecGodefroy , argumentu à contrariis, que quand les partages sont consommés par la choisie, ou quand l’ainé a fait une fois sa déclaration d’option d’un Pief par préciput, les Droits de l’ainé passent au créancier subrogé & même au fisc, s’il se rend ensuite coupable d’un crime dont la punition emporte la mort civil Quoique la Coûtume dife que le fife ou le créancier subrogé au droit de l’ainé n’aura que part égale avec les autres freres, il ne faut pas conclure de la que le titre du Fief sera divisé, car rien n’est mieux établi par notre ancien Coutumier, comme par la Coûtume réformée, que l’indivisibilité des Fiefs. Voici les termes de l’ancien Coutumier :, Tout héritage est pary table ou non partable ; l’en dit que l’héritage n’est pas partable, en quoi nulle partie ne N peut être foufferte entre les freres par la Coûtume du pays, si comme le Fief de haubert, &c.

Il y aura donc alors lieu à la licitation, ou du moins au jeu de Fief de l’Article CCIV, jeu qu’il faut encore éviter le plus qu’il est possible, à cause que les objets détachés perdent beaucoup de leur prix.


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Quand il y a eu plusieurs Fiefs pris en préciput successivement par les frères la provision des puinés est portée au tiers de chaque Fief.Basnage . Bérault étoit d’avis qu’il n’y avoit que le Fief opté en dernier rang qui fût susceptible de la provision des puinés Si une soeur mariée par le frère ainé décéde sans enfans, les puinée qui n’ont eu, dans la saccession directe, qu’une provision à vie, partagent également sa dot comme une succession collatérale : Arrêt du mois de Mars 1622. Il est vrai que si la seur n’eût point marié les puinés n’eussent rien eu à prétendre dans sa legitime ; mais en se mariant elle en a acquis lapropriété.Basnage .

Godefroy , sous cet Article, prétend que le partage des biens situés hors la Province, exelut les puinés de la provision sur les Fiefs de Normandie, sous prêtexte qu’apres ce partage. d’une même succession, il ne leur est pas dû d’alimens ; cette opinion n’est pas conforme à nos principes.

Les puinés, en obtenant la provision de cet Article, sont réputés héritiers, & ils en contractent les engagemens ; car ils ne peuvent rononcer aux meubles & prendre une provision.Bérault .


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On lit dans l’ancien Cout. Chap. 26, n que se tout l’éritaige descent aux frères de pere 9 & de mere ensemble, les parties doivent être faites de tout ensemble, d’où la Glose conclut que si le pere & la mere ont chacun un Fief, & meurent en même-temps, & qu’ils laissent deux enfans, chacun aura un Fief, comme si les deux Fiefs venoient d’un seul côté, soit de pere. ou de mère ; mais s’il s’écoule un intervalle entre la mort du pere & celle de la mère, l’ainé aura les deux Fiefs s’il a doané une provision à son puiné sur le Fief premierement échuGlos. sur le Chap. 26.

Bérault insiste sur le texte de la Coutume réformée, & il estime que la déclaration judiciaire de l’opt on du préciput est de forme substantielle, & que, pour empécher l’effet de la confusion, il ne suffit pas que l’ainé fasse signifier extrajudiciairement sa déclaration par le ministere d’un Sergent ou d’un Huissier Le même Auteur pense que la confusion, expliquée dans cet Article & le suivant, a lieu dans les successions roturieres, que Painé n’y peut prendre deux préciputs de cette espèce, s’il n’a pas satisfait aux termes de l’Article CCexIVIII ; & que quand les successions sont réputées confuses, il n’a point la liberté de prendre préciput dans l’une & renoncer à l’autre, pour y exercer un second préciput sous le nom de son fils : Arrét du 24 Juillet 1597.

Mais quand il n’y a des Fiefs que dins la succession du pere, l’ainé, sans craindre la confusion, y auta-t’il en tout temps un préciput & u’partage dans les Rotures du côté de la mere ; L’Atrêt du mois de Janvier 194y, rapporté parBasnage , ne paroit pas idécider la question : car le pere, dans cette espèce, étant tuteur de son fils ainé, sa succession étoit susceptible du’dédommagement que le mineur auroit pu souffrir par sa négligence. On ne peut dissimuler qu’il est question de biens dont la qualité & le partage different.

Terrien , Liv. 6, Chap. 3, dit que l’effet de la confasion est tel, que si, dins la succession dupere, il y avoit un Fief noble, & en celle de la mere un autre Fief noble le frere ainé n’auroit qu’un Fief, & le second frere auroit l’autre ; ce sentiment est, en quel que sorte, un préjugéecontre la confusion, quand il n’y a qu’un Fief dans une succession & des Rotures dans l’autre.

Dans les circonstances où la confusion est recevable, il faut avoir égard au temps de l’échéance des successions ; car si elles tombent dans un court intervalle, comme dans le delai pour délibèrer & faire inventaire, il ne seroit pas juste d’admettre la confusion, d’autant qu’on ne peut accuser l’ainé de négligence.Bérault .


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J’ai déja remarqué, sur l’Article précédent que si le pere étoit tuteur de ses enfans, on ne pourroit, en ce cos, opposer la confusion à l’ainé, il faut porter le même jugement, si la mére. commune étoit tutrice : car le dédommagement de l’ainé doit être comme la valeur du Fief qu’il auroit cu par préciput, cessant la négligence à faire option.


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Les Auteurs étrangers pensent sur une matière, assez semblable, que comme on ne peut opposer la prescrintion à celui qui ne peut agir, on ne doit pas in puter à l’ainé l’effet d’une absence indispensable, comme si l’ainé étoit prisonnier de l’cnnemi, ou dans tout auge cas de nécessaire & invincible empéchement.Ricard , sur Picardie, LXXV. De Heu, ibid--


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La Coutume de Bretagne n’accorde qu’entre nobles la faisine à l’ainé, & le motif est de prévenir les différents, periculunt ne vi aut armis transigi contingeret ; elle n’y a point lieu parmi les gens du tiers état, nam paganorum non idem jus, illi enim jure communi utuntur és omnes dicunt se faisitos, cum nihil commune sit quou non cujusque sit pro eû purtione qua fundatus est in hareditate. Bretagne, Art. DlXIIl ; & d’Argentré , sur l’Art. Dxil de l’anc.

Cout.

La Contume de Normandie donne, sans distinction de naissance, la saisine à l’ainé ; mais il doit, incontinent apres le déces de ses pere & mière, faire un bon & loyal inventaire des titres, meubles & écritures en présence de ses freres ou eux appellés, & s’ils sont mineurs ou absens, en présence de deux parens ou voisins, & par le Tabeilion ou Notaire du lieule crois que l’on doit conclure, de la disposition de l’Art. CCCLt, que quand, au temps. de P’ouverture de la succession tous les freres sont majeurs & présens, & que l’un d’eux demande un inventaire des lettres, meubles & écritures cet inventaire doit être fait à l’amia-ble & par forme de mémoire ; cependant s’il veut étendre plus loin la précaution & désire un Officier public, il en doit seul porter les frais : car il seroit contre l’équité que la defiance d’un copartageant grévât la succession de frais sans aucune utilité : Arrêt d’audience du 9. Mars 1751.

On ne confie cependant pas toujours à l’ainé les titres de la succession ; quand il est dans un dérangement notoire de ses affaires, sa dissipation & son inconduite ne permettent pes de laisser à sa discrétion un dépût aussi important ; & il a été, dans cette esnèce, ordonné par Arrët du’à Août 1650, qu’il seroit fait une assemblée de créanciers pour convenir, au lieu da l’ainé, d’un dépositaire soivable, qui seroit saisi des titres de la succession.

Si l’ainé est d’une humeur violente, & qu’il y ait peu de Sureté d’aller à sa maison il est encore de la prudence du Juge d’ordonner que l’ainé déposera les titres de la succession à partager au Greffe de la Jurisdiction : Arrét des 1o Janvier & 24 Février 1652.Basnage , Loix civil, deuxieme part. Liv. 1, des Success. à partager.

Quand le frere n’a que des soeurs, il semble qu’il n’est pas dispensé de faire un inventaire des meubles & titres d’une succession directe, car, sans cette précaution, il se rendra facilement maître des effets les plus précieux. L’usage est néanmoins contraire ; mais les seurs sur la déclaration des biens fournie par leur frere, & aprés la communication des titres, sont admises à prouver les soustractions & recellés qu’il auroit pu faire à leur préju-dice.


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Le préciput roturier de cet Article est d’un usage trés-ancien : la Loi Regiam majestotem, Liv. 2, de Success. silior. Chap. 27, n. 3 & 4. ne permet pas d’en douter. Si fuerit li-ber Soeco-mannus dividieur hareditas inter onines filios.,. Saluo tamen Capitali Messuagio primogenito suo pro dignitate primugeniture suc, ita quod in aliis rebus fatis faeint fratribus suis ud ralentiam. n. Le chief de l’éritaige remaindra à l’aisné si comme le hebergement, le clos py & le jardin, pourtant qu’il en face à ses freres loyal échange à la value. Anc. Cont. b’Argentré , sur l’Article DLXVI de la Coutume de Bretagne, qui est le DExXXVIIIde. la nouvelle, prétend que le préciput ne devroit avoir lieu que sur les maisons fituées dans les Villes cu gros Gourge. Quod hie de domibus in Grbibus intellign aut vicis, nam in agradriis vix est ut sit sepairanda illa tdomusy S apotièce qua fructuurs caufa habentur alioquin portiones multo infructunsiures siurt cum fundus villui desiderat aut è contrâ, sed Roeillis tribuitur qui in Urhibus habitant u’t a potheces ( tabersas ad merces disurahendus puter comniunis Rabuit. Nous suivons une luriseru-ience contraire ; & par Arrêt de ce Parlement du 20 Juin 1622, il fut ordonné, en cassee : les Sentences du Bailli & du Vicomte, que les freres partageroient également, & suns précipit, un fonds situé en bout gage ; mais d’Argentré a raison de dire que la récompense doit se faire par héritage, tec quisquam suum vendere cogitur.

Terrien , Liv. 6, Chap. 3, a pense que si le manoir fe trouve dans un autre lot que celui que l’ainé a choisi, il peut, aprés la choifie, reclumer le manoir à droit de preémmence, en récompensant sur son lor celui auquel il seroit échu, & il appuie cette opinion d’un Arrét seans date. Lfais la Coutute réformée dispofe que l’ainé doit, avant le partage, déclarer judiciairement qu’il le rerient.

L’Articie IV, des Usages Locaux de la Vicomté de Eayeux, répand beancoup de jour Ee l’étenduë & les bornes du préciput roturier, eu reste, ces questions étant toutes de fait, le principe est de ne point morceler des batimens qui se tiennent & qui ont une mutuelle dépendance.Brodeau , sur Paris, XV, Bretagne, DLXXXVIII.

On a adjugé, sur le même fondement, à l’ainé, par Arrét du 2 Août 1602, comme faisant partie du préciput roturier, un grand enclos attenant à la masure oû étoient situës les bâtimens, quoique cet enclos servit à labourage, & fût entouré de haies ; mais il y avoit une porte de communication entre l’enclos & la masure. On a encore jugé de même par Arrét du 2o Août 1697 : il sagissoit d’un herbage planté en pommiers, fermé de murs, & qui régnoit autour de la maison paternelle ; mais parce qu’il y avoit, comme dans la première espece, une porte de communication dans la cour, on déclara que l’herbage devoit faire partie du préciput. Ie ne trouve rien de plus intéressant en cette matière, que ce que dit du Moulin sur l’Art. XIII de Paris : Destinatione pat-is familias ce sont ses termes, fundi constituuntur, dilatantur, S lintitantur, S utra res cedat alteri & ejus sit accessio judicurdum ex visu atque usu rei é consuetudine patris familias, etiant si aliter non expresserit.

Cependant quand l’ainé reclame des fonds qui ne sont pas dans la dépendance naturelle de son préciput, mais qui en forment l’ornement & la commodité on les lui accorde en remboursant à ses puines leur véritable valeur. Voyez Paris, Art. XIII ; Angoumois, Art. LXVIII

Remarquez que, dans l’espèce de l’Arrêt du 13 Avril 1S12, rapporté par Bérault & dont il est fait mention dans Pesnelle, les deux moulins qui furent declarés faire partie du préciput roturier n’avoient ni droiture, ni bannalité

La Glose. sur l’ancien Coutumier donne à entendre que ce préciput n’a lieu que dans le cas où il n’y a qu’un manoir en la succession, c’est aussi notre Iurispeudence ; mais s’il se trouve dans l’enceinte du manoir quelques bâtimens où il seroit absolunent possible de résider, sans cependant aucune des commodités or dinaires ; cette circonstance ne suffi : pas pour exclure de frère ainé du droit d’exercer le précipat de cet Article. On dit que la question a été aiusi gugée par Arrét en l’Audience de Grand Chambre du 19 Mai 17dd.


19

C’est une regle certaine, que nul n’est tenu de rester en eommunauté contre son gré, & que l’engagement réciproque de ne jamais demander partage est inutile, quoiqu’il ait eu long-temps son ex écution.

Il est encorelune autre regle également sure, que l’on ne doit point ordonner la licitation quand un des cohéritiers s’yoppose & insiste à demander partage, à moins qu’il ne résulte une fres, grande incommodité, pour ne pas dire une impossibilité de la division des corps héréditaires : car les Loix & l’équité défendent de contraindre un cohéritier de recevoir sa part afférante en argent, quand elle peut sui être livrée en essence.

Il y a des Provinces où le cohétitier, avant que de faire les lors, est en droit d’exiger qu’il sera fait estimation des terres, des maisons, enfin des objets qui n’ont pas de prix déterminé, & où il ne peut être contrait de faire un partage conventionnel sans une estimation précésente ; cette précaution peut être utile, mais elle est dispendicuse depuis la création des Experts en titres : ainsi cette formalité préalable est parmi nous de conseil plûtût que de nécessité ; cependant-si Tomine pouvoit autrement procéder-au partape, l’estimationese fera, suivantGodefroy , à frais communs. L’ancien Coûtumier, Chap. 28, dit, n que si dans n les lots on apperçoit malice ou tricherie, les parties-doivent être faites également par le y serment de douze hommes loyaux & éréables. L’Ordonnance de 1560, Art. Iil ; celle de de 1567, Art. LXXXIII ; & la Coutume de Bretagne, Art. DlXVI, prescrivent de renvoyes les quostions, de partuge entre frères à des parens arbitres pour amiablement les ac-eorder si faire fe peut, sans forme de proces : il y en a cependant qui pensent que le proces est plutût fini de, ant le Juge que devant les arbitres.

Le pumne estchargé-de ln confection des lots sur la représentation des Titres & Enseignemens de la sucoession. L’ancien Coûtumier lui prescrit de tres-bonnes maximes : il ne doit point, en faisant les partages départir les Fiefs de haubert ni les-antres Fiefs où il y a garde yi nepeut pas confondre les héritages & revenus d’une Ville avec ceux d’une autre Ville, ni tétaillaer & corrompre les pièces de terre quand, sans les retailler les partages peuvent être faits également ; il doit joindre les pieces les plus proches ; il ne peut morcelen ni rétailler les moindres ; mais il a cette liberté sur les grandes, s’il est absolument nécessaire pour égaliser les partages entr’euxLes lors doivent être communiqués aux copartageans qui ont la liberté, ditBérault , de les garder pendant quinze jours, ou une Assise suivant le Tribunal où ils plaident.. V’uyer le Chap. 28 de l’ancienne Coûtume.

Quand’in des éohéritiers pratique des délais pour éloigner la choisie, le Juge peut accorder à ceux qui ne sont point en retardement une possession provisoire de certains corps de sa fuccession, avec défenses de les-alidner & de les dégrader ; il peut encons, quand les chogeses : sont disposées, ordonner que le choix. des partages sera fait par le Proturcir du Roi ficause de-la contumace de l’ainé des cohéritiers : Iugement de l’Echiquier de Piques, tenu a Faluise l’an 12143.Terrien , Liv. 6, Chap. 3. Mais ce choix n’est pas définitif, si ce n’est apres un laps de temps qui en puisse faire présumer l’approbation : car le cohéritier negligent peut purger sa contumace, & alors il est rétabli dans les droits que lui donne la Cou-tume :Godefroy . Le meilleur parti est, en ce cas, d’accorder de fortes provisions en argent contre l’héritier qui occasionne le retard des lots par entétement. C’est ce que dif d’ Argentré : Soepè compertum est maligne hoc pretextu à primogeniuis spoliationes obtendi, & summo jure summas fieri injurias, sed tunc à judice celeriter occurri debet, & provisiones decerni.

Lorsque les partages sont consommés par la notification de l’acte de choisie signé, un cohéritier ne peut changer de volonté au préjudice de l’autre, quand le changement se seroit le même jour ; il n’y a d’autre voie pour se rétracter que celle de la rescision quand les moyens sont décisifs. La Justice a cependant quelquefois égard aux offres considérables de celui qui propose le changement ; & réfere au cohcritier, à qui elles sont faites, l’alternative d’abandonner son partage en acceptant les offres, on de le conserver en en remboursant le prix : Cette pratique a des inconveniens, car un cohéritier peut se ruiner par caprice, Les blames ordinaires des lots s’induisent de l’inégalité de leur valeur, de la distraction des charges d’avec les héritages assujettis du démembrement incommode & sans nécessité des pièces de la succession, & de l’omission de certaines stipulations nécessaires au bien des lots.


20

On ne peut appliquer avec succes à des cohéritiers, qui traitent ensemble, les maximes qui reglent la cession des Droits universels faite à un étranger ; tous actes faits entr’eux pour éviter un partage sont des actes équivalens au partage, suscepribles de rescision pour lézion du quart au quint ; la transaction même passée sur un Proces pour parvenir au partage est sujette à restitution : etiant si per modum transactionis facta sit divisio, quia resiringieur ad causant, qualitatem, & titulum controversum super quibus transactum fuit : duMoulin , sur Paris, 9. 25, n. 15. On opposeroit même, sans fucces, au puiné demandeur en restitution contre les lors, que lui-même il les auroit faits apres une communication des titres & ensei-gnemens de la succession. Il suffit qu’il se rencontre, dans les partages, la lézion désignée par notre Jurisprudence, pour faire décider que la rescision a un fondement legitime. On cite vulgairement en preuve l’Arrét rendu entre les sieurs de Theville & de SainteCroix.

Quand al y a lieu à la rescision, on ne doit procéder à de nouveaux partages que lorsqu’il n’est pas possible de prendre une autre voie pour établir l’éqalité entre cohéritiers ; il est bien plus simple de suppléer de son partage en essence ; la Cour, dans certains cas, à admis des foutes en deniers.Bérault .

On ne peut pas contester la rescision d’un partage dans les dix ans, fondée sur une erreur de droit qui ait fait admettre à une succession une personne sans qualité, quelques uns pensent môme que ce défaut ne se couvre point par le laps de dix ans. Basnage rapporte, sous l’Article 31a, un Arrêt qui, apres dix-neuf ans, déclara non recevable le Demandeur en rescision sur un pareil fondement : c’étoit dans l’espèce des enfants d’un frere utérin qui avoient été admis à succeder aux meubles & acquêts avec un frère de pere & de mere du défunt.


21

L’Hvpotheque tacite, pour la garantie respective des lots, a sieu sur tous les immeubles de la succession, quand les lots seroient sous signature privée, pourvu que les dettes acquittées soient constantes ; elle a même lieu sur les biens particul, ers de chaque héritier du jour de l’addition de l’hérédité : Arrêt du 25. Iuin 1686 : Journal du Palais,Basnage , Traité des Hypoth. Chap. 6.


22

Lorsque les freres prennent le parti de céder des fonds ou des rentes de la succession à leurs seurs, il nait assez souve-t des contestations : les freres cherci’ent à se libérer en se détachant de ce qui leur conviert le noins, des n’oulins a vent, des moulins à cau, des pièces de terres éloignées les unes des autres, mal aisées à faire valoir, sans bâtimens, des rentes sur des personnes insolvables, ou d’uve discussion difficile : l’usage du Parlement est de renvoyer les parties devant leurs parens ; ou devart blM. les Conseillers-Commissaines pour ex : miner la nature, la qualité, la sitiratior. & li commodité ou incommodité des biens que les freres veulent dor ner à leur soeur & faire en sorte : comme ditEverard , qu’en Sccommodant l’un, l’autre ne souffre pas de dommageni de préjudice.


23

Là fille, pour le payement de son mariage, & ses héritiers ont, par l’article exxil du Réglement de 1688, le droit de demander que partie des héritages de ses pere & uière ou autres ascendans, leur soient baillés à due estimation, encore que les Feritages ayeiit été alienés : ainsi s’ils sont saisis réelleme it pour les dettes du frère, la fille & ses héritiers en peuvent requérir la distraction ; mais cette Jurisprudence ne leur ôte pas la faculté de décre ter, qu’ils tiennent du droit général, quand même ils auroiet conclu a un envoi en poisession, & que l’estimation des héritages auroit été faite : la question a été aisi jugée par Ar-ret du 1o Juillet 178s ; il en résulte que la fille peut varier, & qu’aprés avoir demande l’envoi en possession & fait estimer les biens, les créanciers ne la peuvent forcer de continuer sa demande en envoi en possession ; qu’elle peut abandonner cette voie en payant les dépens qu’elle a occasionnés, & ensuite décreter ou se pré enter à l’état, si les biens sont décrétés à la requête d’un tiers. Cette Jurisprudence est équitable & il doit être libre a la fi le de renoncer à un droit introduit en sa aveur. luyes les Arrêts des 1Fevrier 167s, & 13 Mars 1682, rapportés par Basnage : l’Ariét de 176s est rendu dans le même esprit, & en est une véritable application.


24

On a traité en droit la question de sçavoir, si le pere remarié peut réserver sa fille à partage sur la succession de sa femme p. édécédée, incidemment à une question appointée au mois de Juin 1758, pour faire régleniert.

On fait valoir, en faveur de la réserve, l’ancien pouvoir marital & le paternel, si exactement observé parmi nous, une soite de retour dans la réserve à ce qu’on est convenu d’ap-peller le droit commun ; Pobligation indispensable des frères de doter leurs soeurs, la piété paternelle qui n’use de ses droits que pour le bien de sa famille, & en grande connoissance de cause ; l’Article CCLVIII de la Coutume, qui permet au pere de réserver sa fille à la succession de sa mère, sans distinguer si la mere est vivante au temps de la réserve, ou si elle est alors décédée, l’Article CCLIX qui, apres avoir accordé indistinctement cette facultéu pere, défend, sous les termes les plus prohibitifs, & à la mere & au tuteur, qu’il place dans la même classe, de réserver la fille à la succession du pere prédécédé, & enfin la Jurisprudence des Arrêts & le sentiment unanime de nos Commentateurs. On oppose contre la réserve que la puissance maritale, de même que la puissance paternelle, doivent avoir des bornes, qu’on n’appercoit aucune trace de retour au droit commun dans la réserve, si on con-sulte l’ancien droit Romain & l’ancien droit des Francs, que la propriété des biens de la mere est acquise aux enfans mâles des l’instant de fon déces, le mari n’étant que le simple Usufruitier des biens de sa femme apres sa mort ; qu’il est contre toute équité que l’Usufruitier ait le droit de dépouiller le propriétaire ; que l’injustioe éclate de plus en plus lorsque le pere, par un second mariage, a perdu les deux tiers du droit de viduité : que si la reserve avoit dieu dans cette espèce, le pere pourroit priver son fils, qui auroit plusieurs sours, de presCue toute sa fortune en bourgage, & tromper même la bonne foi d’une famille, en établis-sant son fils auparavant la réserve, que la qualité de pere n’est point à l’abri des effets de la prédilection ou des ressentimens injustes, & que l’on ne doit s’attacher à la Jurisprudence & aux fentimens des Auteurs, qu’autant qu’ils sont conformes aux véritables principes : maxime qui a son fondement dans la constitution même de l’homme. On peut repliquer qu’il n’y a point d’usage dont on ne puisse prétexter des abus, & qu’il est souvent périlleux de les examiner avec trop de curiosité ; que si les freres sont saisis, par la mort de leur mere, de sa succession, la réserve faisant cesser l’inhabilité coutumière de la fille, elle revient sur ses pas pour dire, comme eux, le mort faisit le vif, proprietas masculorum avoouri poterat, les biens de bourgage, qui se reglent comme les meubles dans le partage, ne peuvent déterminer une décision dans la Coûtume genérale, jura constitui in his que ut plurimum accidunt. Le pare ne dispose point en Usufruitier, il dispose en vertu d’un droit acquis par le mariage, droit dont il a une possession immémoriale ; la Coutume le fait sentir en faisant deux dispositions. différentes, pour le distinguer & de la mère & du tuteur de ses enfans : au reste, jusqu’au temps d’une décision en droit sur cette question, cette maxime est d’un grand poids, non anbigitur jus sencium facere posse.


25

La soeur réservée doit rapporter non-seulement ce que son pere lui a donné en dot, mais encore le don mobil, quand mêmela soeur n’auroit point de récompense de sa dot sur les biens de son mari : Arrêts des 8Février 160y, & 2 Juillet 1Sgo La petite-fille doit rapporter à la succession de son aieul le don mobil fait à son pere, quand elle-vient à partage, quoiqu’elle-nen ait point profité : Arrêt du 2o Fevrier 1ô1..

Mais les sommes prétées au mari ne se rapportent point quand la femme a renoncé à sa succession.

Toutes les fois que le rapport a licu, les filles rapportent l’intérét des capitaux depuis la succession ouverte : Arrêt du a Mars 1857Basnage , sous l’Art. CCl. X ; maiselles ont l’alodrnative de rapporterou moins prendre, si les copartageans trouvent dans la succession les moyens de s’égaliser, quand elles rapportent des fonds en essence, le bon sens dicte qu’on leur doit. compre des améliorations, de même qu’elles doivent faire raison des dégrademens & détériorations : Coutume de Paris, Art. CCCV : ; Arrêtés de Lamoignon, des Rapports.

On fait des mêmes attentions dans les cas d’estimation.

Le rapport doit se faire en essence ; toutes les fois qu’il y a de la fraude dans l’acte de donation quidans son exécution, c’est la décision de trois Loix : Romaines, sur ce Titre ; & de duMoulin sur la Coutume du Maine, Art. CCLXXVIII. Voyer les Arrêtés de Lamoignon, ibid.

La fille issuc’d’umpremier mariage, ayant succédé à son frère avancé en succession par le pere commun, doit rapporter au profit de ses soeurs nées d’un second mariage : Arrêt du 29 Novembre 160b.Bérault .

La soeun réservée à partage par son pere, & qui, pendant la vie de son frère, a joui de l’effet de la réservation, n’est point obligée de rapporter à la succession de ce frère au hé-efice de ses soeurs, qui ont été puyées de leur mariage avenant : Arrét rendu en Grand Cham-bre, au rapport de Mi de Villequier, le a7 Juillet 172z ; le même Arret autorise la soeur réservée à prondre une part égale dans cette succession ; toutes les seurs ayant été satiefaites pendant la vie du freres on ne pouvoit regarder sa succession que comme une succession collatérale.

UIV Rien ne semble mieux prouvé que cette maxime : les Fiefs de dignité, comme les Marqu’isats, Comtés, Baronies, sont indivisibles : Assises du Comte Geffroy II8s. Etablissemens de S. Louis ; Chap-24. Enquête de 13d0, rapportée au premier volume des Char-tes.Loysel , Tit. des Fiefs, Regl. 87. Loiseau, des Seigneuries, Chap. 6. Iournal des AudToine1, Liv. 8.

Mais les nouvelles érections devenues fréquentes en France, ne soutiennent guere le parallele avoc les ancienness il y a peu de Marquifats qui fussent capables de figurer contre une Baronnie des teups reculés, de la les Auteurs Bretons sur l’Art. DXI-ll de-leur Coutume, qui exceptent de la Loi générale du partage des Nobles les anciens Comtes & Barons, qui se traiteront comme ils ont fait par le passé, ajoutent que cet Article ne s’applique qu’aux Baronnies qui donnent le nom de Baron, & la présidence de la Noblesse sans election à l’assemblée des Etats & aux anciens Comtés, du nombre desquels d’Argentré ne reconnoit que la Seigneurie de Penthievre.

Basnage est de même avis ; il est surpris que l’on déroge aux dispositions des Coutumes en faveur de certains Fiefs qui n’ont d’autres préeminences réelles sur les autres, que des lettres de sceau, Bérault atteste que, de son temps, les Baronnies tomboient en parage entre filles, que la Jurisdiction & la dignité du Fief demeuroit cependant à l’ainée, ensorte qu’elle recevoit la foi & hommage des arrieres-Fiefs, & partageoit avec ses puinées les droits utiles.Basnage . répete ce qu’avoit ditBérault , que les Baronnies ont toujours été divisibles entre filles ; que le titre feul ne se divisoit point, & qu’on attachoit la dignité à une portion du FiefOn ne distingue, pas en cette Province les nouvelles érections des anciennes, contre l’opinion deBasnage , & les Terres titrées sont indivisibles entre filles & leurs représentans ; les Arrêts des 27 Août 1677, & 13 Août 18yy, rapportés par le même Auteur, établissent ces deux points de droit. Il s’agissoit du Marquifat de Pyrou ; ce Marquisat étoit de nouvelle érection : le sieur de Vassy & la Comtesse de Créance l’avoient partagé ; le sieur de Vassy prit des Lettres de rescision contre le partage, & soutint que ce Marquisat étoit indivisible ; les Lettres de rescision furent entérinées par le premier Arrét ; la Comtesse de Créance se pourvut en Requête civil, &, par le second Arrêt, elle y fut déclarée non-recevable.

Il faut avouer que l’on trouve dans cet article le germe & le principe de cette décision car il n’admet les seurs héritières à partager les Fiefs de haubert entr’elles que dans le cas où les partages ne peuvent être autrement faits. D’où il fuit que s’il y a des Rotures suffisamment pour faire des lots sans diviser le Fief, l’intention de la Coutume n’est pas qu’il soit partagé.

Mais si la Terre titrée appartient à l’ainée feule ses seurs seront-elles tenues de se contenter en les successions directes d’un simple viage Non : il en sera de même comme dans le cas du Fief de haubert, que l’ainée ne peut avoir sans former le partage des autres soeurs ; & il seroit ridicule d’admettre, en ce cas, une double dérogation à la Coutume. Je suivroisChopin , sur Anjou, Liv. 3, Chap. 1, Tit. 2, n. 8 ; il rapporte un Arrét du Parlement de Paris. du y Septembre 1571, pour la Baronnie de Montboissier, par lequel il a été jugé qu’au lieu des portions que les puinés auroient par la Coutume dans la Baronnie, il leur seroit baillé récompense en autres Terres féodales de moindre qualité.

Mais si l’ainée consent la divisibilité, les differens Fiefs réunis qui composoient la Baronnie relevante du Roi, tomberont-ils en parage ou continueront-ils de relever du Roi Il faut répondre qu’avant le partage entre filles, la Baronnie ne formant qu’un seul tout, chaque partie qui en sera détachée relevera par parage de l’ainée, à moins que les puinées, de son consentement, n’obtiennent des Lettres de démembrement de Fief, avec réserve de la mouvance au Roi : ce qui, étant contraire à notre Coutume, exige une clause dérogatoire.


26

Cet Article est obseur la premiere partie a été interprétée par des Arrêts récens que j’ai cités sous l’Artic’e CCLXIz ; ces Arrêts, dans le cas de l’option de l’ainé par préciput, ont réduit le partage des filles au tiers des Rotures, quand les freres puinés ont déclaré s’en contenter. Comme ces Arrêts ne sont point rendus en forme de Réglement, la question n’est pas encore sans difficulté : car l’Article CCLxx suppose écidemment l’option d’un préciput ; il semule donc que le partage égal entre les freres puinés & les suurs n’y-soit prescrit que par forme d’accommodement, & pour dedommager les suurs de ce qu’elles n’ont rien sur le Fief opté par l’ainé, pourvu cependant que le partage de toutes les filles n’excede pus le tiers de la tot lité de la succession. Prenez une succession composée d’un Fief de 3000y liv. opté par l’ainé, & de 12777 liv. de Rotures. Supposez un puiné & trois filles : sera-t’il juste de donner, sur une succession de 420yy livres, 400y liv. seulement aux trois filles, tandis. qu’en pertageant les Rotures avec leurs freres, elles n’auront pas, à beaucoup pres, le tiers de la fuccession à Il ne faut pas, dans le vrai, considéter, par rapport aux filles, une successio, composé : d’un Fief & de Rotures, comme deux successions différentes : elles ont un d’oit sur le Fief com ie sur là Roture, pourvû que la part de chacune des filles ne soit pas plus forte que cel’e d’un puiné, ou que les filles n’emportent pas plus du tiers de la succession : ainsi si l’ainé a, par préciput, un Fief de 20000 liv. & qu’il y ait pour aoooo liv. de Rotures à partager entre un puiné & quatre filles, vous ne donnerez pas aux filles 16o0liv., vous les réduirez au tiers de la totalité de la succession : au surplus les Arrêts contrai-res forment un préjugé important, Mais lorsqu’il n’y a, dans la succession, qu’un seul Fief opté par préciput, quel sera le droit des seurs ; C’est iei l’objet de la seconde question. Terrien croyoit qu’il falloit donner aux siurs un tiers à fin d’héritage, & un autre tiers aux puinés à vie : que l’ainé devoit supporter les deux tiers de la provision à vie, & les seurs l’autre tiers. Bérault charge les suurs de la totalité de la provision des puinés. Basnage estime que cette seconde opinion est encore trop favorable aux seurs ; il croit que le tiers se divise en autant de portions qu’il y a de freres puinés & de suurs ; il donne aux soeurs la propriété de leurs portions, & celles des puinés retournent à l’ainé.

Terrien paroit suivre le Droit commun ; des que le frere ainé & les seurs, en vertu de la réserve, ont un droit de propriété, il est juste que la provision des puinés, qui en est une charge, soit supportée par les frères & les suurs, pro modo enolumenti.

Le sentiment de Bérault est plus avantageux à l’ainé, mais il n’est appuyé que sur un Article de l’ancienne Coûtume de Caux, totalement abrogé par la réformation de 1586.

Basnage auroit pour lui l’Arrét de 16o2, rendu sur une queston de liquidation de mariage. avenant ; mais, sans examiner la différence qui peut être entre la réserve & le mariage avenant, tout le monde sçait que les Juges flottoient dans la plus grande incertitude, & qu’ils ne se déterminerent qu’avec peine. Si l’intention des Réformateurs avoit été de faire partager par tête le tiers du Fief entre les painés & les soeurs, & d’accorder aux uns l’usufruit, & aux autres la propriété de leur part dans ce tiers la Coutume en auroit fait une disposition précise. L’ancienne Coutume de Bretagne, Art. DXL. VII, a bien exprimé cet usage : n En n succession noble, qui anciennement a été gouvernée comme dessus, dit elle, tous les jun veigneurs ( c’est-à dire tous les puinés ) auront seulement la tierce-partie des héritayes n nobles de ladite succession ; c’est-à. sçavoir, les mâles a viage, & les filles par héritage n Ce conflit d’opinions fait de plus en plus désirer un Régienient. Basnage se plaint de ce que les Réformateurs ont laisse la question indécise ; il faut espèrer que les progrés que nous avons faits dans la connoissance de nos Loix, procureront bieritôt a la Province l’avantage de la voir terminée d’une maniere juste & irrévocable. Ie me suis rapproché de l’opinion deBasnage , dans la liquidation du mariage avenant.


27

Il a été jugé par Arrêt du 25 Iuin 1730 au rapport de M. Desmarets de S. Aubin, que si une des suars réservées renonce à l’effet de la réservation pour se réduire au droit commun, la renonciation de la soeur tourne au profit du frere contre les autres soeurs qui veulent user du druit de réserve.

Tai omis de traiter sur l’Article CCLx, la manière dont se fait le rapport que le frere doit à la succession, à cause de la suur qui fait part à son profit. Lorsque la succession consiste en meubles & en biens de bourgage, & qu’il y a d’autres siurs réservées à partage, on considere les soeurs mariées comme autant de partageantes ; on divise la succession par tête, & si la somme donnée par le pere n’excede pas la part que la soeur mariée auroit eu dans la succession avant le rapport, le frère doit la rapporter : ainsi dans l’exemple que j’ai cité sur l’Art. CClx, d’une succession de 45 mille livres, d’un frère & de cinq siurs, dont trois avoient été mariées & avoient recu ; 5 mille livres, il est clair que dans l’espece proposée, le frère doit rapporter la somme à la masse de la succession totale, parce qu’il bénéficie encore dans cette espèce, sur les deux seurs à marier, d’une somme de ro mille livres, puisque si les soeurs mariées ne faisoient pas profit au frere, il appartiendroit 3o mille livres aux leurs à marier, qui n’en ont que chacune ro mille.


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Cet Article signifie que l’ainé de Caux ne peut demander à ses freres puinés des récompenses de la dot de ses soeurs mariées par le pere ou la mère, sur les meubles qui sont passibles du mariage des filles, ni sur ce qui leur revient dans les immeubles de ligne directe ; mais il ne change rien dans les regles de la contribution, à la dot des seurs qui restent à marier au temps de l’échéance des successions


29

La premiere observation sur cet Article, concerne l’état du préciput de l’ainé, relativement aux dettes de la succession. Notre Jurisprudence est différente de celle de Paris : com-me la Coutume de Paris donne à l’ainé un principal manoir, & un droit d’ainesse dans le reste des Fiefs par forme de préciput, l’ainé ne paye que sa portion héréditaire des dettes personnelles & hyporhécaires ; il ne paye pas plus que les autres enfans, parce qu’il ne s’agit pas d’une plus grande portion dans tous les biens d’une succession, mais qu’il n’est question que d’une plus grande portion dans les biens particuliers que la Coûtume donne à l’ainé. LeBrun , des Success. Liv. 4. Chap. 2, sect. 3, n. 3 & suiv. Mais en Normandie le préciput de l’ainé étant sa part héréditaire, il est assujetti, à raison de ce préciput, de contribuer aux dettes en proportion de l’émolument.

Cela a fait naître une question. Un pere contracte une dette pour l’acquisition d’un Fief que l’ainé a pris par préciput : il semble que cette dette soit en quelque maniere réelle & qu’elle tombe a la charge de l’ainé seul ; cependant on décide, dans l’usage, que les puinés y contribuent. Il en est de même d’une rente à laquelle le pere auroit obligé spécialement le Fief & ipsum jus obligationis debet attendi cum sit principale non autent liypothece que est tantum accessorium, unde etiam si solum feudum fuisset hypothecatum, S reliqua bona nec specialiter, nec generaliter fuissent hvpothecata adhue idem dicendum. DuMoulin , S. 18, Gl. 1. n. 12 & 13.Basnage . Mais les charges purement réelles, suivent le fonds, onera vero realia ratione ret sive fundi fundum sequuntur, 8 à fandi possessoribus exolvenda sunt pro modo detentionis. Loi Cum possessor. D. de centib. Loi Imperatores D. de publican. 8 vedigal.

Mais les puinés ne peuvent forcer leur frere ainé, qui a opté un préciput, à contribuer au rachat d’une roture que le pere a cédée à sa fille en la mariant sous cette faculté : Arrét du 27 Mai 1625.Basnage .

La contribution des freres à la pension, provision & mariage de leurs seurs se regle par proportion de la valeur des biens de chaque des copartageans ; de sorte que rien n’est plus ordinaire que les freres puinés contribuent au capital d’une portion de la dot de leurs soeurs & à l’intéret seulement d’une autre portion, si on excepte le mariage des filles, dont lé pere est mort domicilié en Caux, qui épuise préalablement les meubles, ainsi que nos Auteurs l’ont observé d’apres le texte, & rentre ensuite dans la regle générale ; des calculs raisonnés rendroient la vérité plus sensible, mais cette partie n’est pas du ressort de mes observations.


30

Si la succession est composée de biens situés dans cette Province, & sous d’autres Coutumes : par exemple, fous la Coutume de Paris, il est d’usage, même en Normandie, quand la succession y est onverte, de répartir la masse des dertes immobiliaires passives sur les biens des différentes Coutumes au marc la livre. La portion payable per les biens de Normandie sera acquittée, suivant l’usage qui s’y observe, & la portion payable par les biens de Paris, suivant l’usage de Paris. Acte de notoriété des Avocats du Parlement de Normandie du mois de Juin 1729, qui a dû régler ainsi cette question importaute.


31

Basnage ne pardonne pas aux Réformateurs d’avoir laissé subsister, dans la Coûtume réformée, les effets étranges de la consignation de dot ; ils avoient retranché d’autres abus, pourquoi n’ont ils pas détruit celui la ) Beaucoup de per sonnes cependant, nême instruites, parlent de la consignation Normande, sans en sçavoir ni le fondenient, ni la valeur. la consignation est une constitution actuelle que le futur époux fait sur ses biens de la dot de la future épouse, qu’il reçoit ou qu’il recevra. Elle a cette force, que la femme prend pert aux acquêts faits pendant le mariage & aux meubles, & demande sa dor sur les autres biens du mari. Ainsi la femme héritière de son mari ne confond en sa personne aucure portion de sa dot consignée. D’où provient cette erreur ; be ce que la constitution en dot, ditBérault , est antérieure au mariage, & de ce que la fen me ne doit contribuer qu’au remplace-ment des aliénations que le mari aura faites depuis & pendant le mariage. Mais cela n’est qu’un mauvais sophisme : car la dot est une dépendance du mariage, & ce qui forme la dot n’en acquiert le nom que quand le mariage a été contracté. Peut-on consi lérer comme un acquét le fonds que le mari achete des deniers dotaux : ce fonds provient-il de son industrie, de la collaboration des énoux ou de la libéralité d’un tiers à Il provient au contraire, de deniers qui n’appartienner : pas au mari, & qu’il sera obligé lui ou ses l’éritiers, de rerdre Ecoutons encore Iaf age : la doi non consignée se prend sur les meubles de la succession du mari, ou s’ils ne sont pis suffisans, sur les conquêts ; mais le mari n’uyporheque pas n’oins ses biens à la Sûreté de l dot, soit qu’el le soit consignée, soit qu’el e ne le soit pas ; la censignation est donc ein terme imaginaire. Pourquoi lui avoir donné le pouvoir de renversen les principes les cisconstans de notre Jurisprudence, & d’enlever quelquefois les trois quarts de la succession de son mari ; Ce qui surprend, c’est que la consiitution de dot ou consignation n’erunêche pas la femme de stipulor que la dot seraramuoursés aprés la diss, lution du niuriage.


32

La clause par laquelle la femme stipule qu’elle répêtera sa dot, sans diminution de ses antres droits coutumiers, n’a pas tant d’étenduë que la consignation actuellement faite ; car si la femme, légataire universelle de son mari, emporte la totalité de ses meubles, dans le cas de la première clause, elle confondra sa dût ; & s’il y a consignation, les héritiers du mari ne sont exempts du payement de la dot, à l’égard de la femme légataire universelle, qu’en Iûi abandonnant les acquêts de la succession.Bérault Basnage : Arrét du 11 Mars 1677.


33

Quand le mari déclare, dans un contrat d’acquisition de fonds, que le prix est provenu de la dot consignée, & qu’il l’emploie en son nom & aux fins de subrogation, il semble que la femme devroit se contenter de cet héritage, pourvu qu’il n’y ait point eu de fraude commise par le mari. C’est cependant l’opinion commune, que non seulement la femme n’est point tenue de l’accepter au lieu de sa dot mais qu’elle peut y prendre part com-me à un conquét. On a cru faire un retour vers l’équité, en décidant que la femme, qui est intervenue au contrat de remplacement de ses deniers, & qui l’a agréé, ne pouvoit pas varier apres la dissolution du mariage. Pai dit qu’on a cru faire un retour vers l’équité ; car les sectateurs de la lettre de la Loi estimoient que la fêmme en puissance de mari ne pouvoit, par son consentement, déroger à un droit fondé sur la Coutume & sur les conven-tions de son mariage. Je conseillerois au mari qui consigne la dot, de stipuler qu’il pourra SIacquitter en faisant des acquêts en fonds ou en rente de pareille valeur. Mais il y a bien des maris qui se servent de cette consignation, non seulement pour avantager leur femme, mais pour tromper leurs créanciers postérieurs au mariage, moyennant une séparation civile concertée.

Puisque la femme ne peut être contrainte de prendre, au lieu de sa dot consignée, les acquisi-ions faites, sans sa participation, par le mari, avec déclaration d’emploi, la loi doit être réciproque ; les héritiers & les créanciers du mari sont recevables à sourenir que ces acquisitions n’appartiennent paint à la femme, & à lui rembourser sa dos. La question a été jugée en faveur des créanciers par Arrêt du ar Mars 1731, contre la Dame de Parmetot.


34

N’étendez pas la consignation tacit. au teansport fait par le mari à un tiers de la rente dotale de sa femme ; le droit de la femme se regle, en ce cas, par les articles du titre du Bref de Mariage encombré.

Des que l’Articie CCCLXVI ne renferme que les rentes données au mari pour dot, il ne faut pes l’appliquer à l’amortissement d’une rente qui, constin. le mariage, auroit échu à la femme en ligne collatérale.