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CCCLXXV.
Les Douairieres doivent tenir en état les Maisons & Héritages, comme elles leur ont été baillées, sans couper les Bois autres que ceux qui sont en coupes ordinaires, si ce n’est pour réparer les Maisons & Manoirs, appellé le Propriétaire, & par Ordonnance de Justice.
Le devoir qui est prescrit par cet Article, est commun à tous les Usufruitiers, qui sont tenus d’user de la chose dont ils ont droit de jouir comme un bon père de famille en useroit : Omnem enim curam rei suscipère debent, C cussodiam pressare, l. 13. ff. De usufructu, l. 2 ff. Usufruduarius quemadmodum caveat. C’est pourquoi si la Douairiere voit que les batimens qui sont com-pris dans son partage, sont en mauvais état, elle doit poursuivre les héritiers, pour leur faire faire les réparations ou récdifications convenables, & cependant obtenir permission de faite visiter par Experts, & de faire dresser des descriptions ou procés-verbeaux de l’état des choses, afin qu’elle ne puisse être inquiè-tée pour les ruines qui sont déja arrivées, ou qui peuvent arriver en consequence Mais la Douairiere n’est régulierement obligée qu’aux réparations qu’on appelle viageres, qui sont pour conserver, & non pour rétablir ou réédifier ce qui est ruiné, si donc les maisons tombent par vétusté, sont consumées par un incendie fortuit, ou renversées par les violences de la guerre, la Douairière n’en est pas responsable. Mais d’ailleurs elle perd sont usufruit dans ces ren-contres, parce qu’il finit par l’extinction de la chose qui y est sujette : quand donc l’héritier fait réédifier les batimens tout-à-fait ruinés, la Douaitière n’en peut pas prétendre la jouissance.1
Au resto, la Doüairiere percevant tous les fruits en vertu de son usufruit, est obligée d’acquiter toutes les charges qui sont dues à raison de la perception des fruits, comme les rentes seigneuriales & foncières, les répatations des chemins ; mais quant aux autres charges auxquelles on est tenu pour pouvoir percevoir les fruits à l’avenir, comme la taxe pour les biens domaniaux, le Franc-aleu, oxtinction du Tiers & danger, & autres semblables, la Douaiciere y doit contribuer avec le Propriétaire à proportion, laquelle se regle or-dinairement à la sixieme partie.
La veuve, suivant l’opinion commune, doit agir dans l’an de la jouissance contre les hérit. ers du mari, pour les obliger a faire les réparations sur les batimens dépendans de son Douaire ; fa négligence fait présumer qu’elle les a trouvés en bon état, & aprés son déces ses héritiers pourroient être assujettis à toutes les réparations indistinctement : Arrét du 19 Août 1SGI, cité par Basnage Cependant la présomption pourra-t-elle l’emporter sur des preuves de faits bien circonstanciés La veuve, avant d’entrer en jouissance, doit, pour se mettre à couvert, faire dresser un Proces-verbal & description de l’état des lieux en présence des héritiers du mari, & il y faut faire mention non seulement des réparations qui sont nécessaires, mais même de l’état & de la durée des matériaux qui peuvent encore subsister, d’autant que c’est une regle générale que les héritiers de la veuve doivent rendre les Edifices de la même maniere qu’ils étoientur temps que la veuve a commencé de jouir.
Mais les héritiers du mari ne sont point tenus de relever les Edifices tombés par vieillesse & casucité, ou péris par le feu, ou un tremblement de terre, soit avant ou depuis l’ouverture du Douaire, d’autint que si la décadence survient pendant le mariage la femme n’a aucu lieu de s’en plaindre, & qu’elle ne peut reprocher aucune faute aux heritiers du man leBrun , des Successions, Liv. 2, Chap. 5, Dist. 2, n. 37 ;Duplessis , du Douaire ;Terrien , ibiI. Cepen lant si le Douaire consiste dans un Corps de ferme, la veuve jouira des batimens en contribuant aux impenses de la réédification, d’autant que ces batimens font partie de la ferme : elle auroit méme, dans cette circonstance action contre les héritiers du mari.
Les réparations qui sont à la charge de la douairiere, consistent dans l’entretien des clûtures, couvertures, portes, planchers, fenêtres & autres réparitions de cette espèce ; le pro-priétaire doit soutenir les fondemens, les murs, les poutres ou fommiers, chevrons, & autres choses qui excedent la durée de la vie ordinaire des hommes.
Les héritiers du mari & la Douairiere ont chacun en droit soi une action pour faire faire les réparations qui sont à leur charge, d’autant que le défaut des réparations viageres, de même que celles de rétablissement, peuvent entrainer la perte totale de l’Edifice. De-là il arrive fouvent que la veuve est tenue des grosses réparations, pour avoir négligé les répara-tions viageres, & que l’héritier du mari est susceptible des réparations d’entretenement, pour n’avoir pas fait à propos celles de rétablissement.
La femme peut faire servir le bois déraciné par les vents sur les fonds du Douaire, en justifiant de l’emoloi ; le bois mort lui appartient, à la charge de substituer de nouvelles plantations. Bérault ; Loix civiles, Liv. 1, Tit. 11, Section rreLa question, si le propriétaire peut faire couper le bois de haute-fûtaie compris au lot de la Doüairiere, est bien déci lée parBasnage , dans la liberté indéfinie que Bérault donne aux propriétaires d’abattre en dedommageant la Douairière ; il n’y a pas lieu de comprendre les bois de décoration qui font un des agrémens d’une terre, ni ceux qui mettent les batiniens à couvert de la tourmente & de l’impétuosité des vents : Arrêt du 13 Décembre 1656.
Basnage reconnoit en cet endroit qu’il y a des cas où les héritiers du mari peuvent forcer la Douairière de leur donner caution. Par l’Arrêt du 12 Février 1837 qu’il cite, une veuve fut condamnée de donner caution à son fils de l’exercice d’une Sergenterie pour la part qu’elle y avoit en Douaire.
La Douairière doit être privée, dans la rigneur des principes, de son Douaire, si elle en abuise & commet des dégradations & malversations, & elle est condamnable aux intérêts du propriétaire ; c’est encore le cas d’exiger d’elle caution, si on ne la dépossede point. L’Article CCCCLXVIII de la Coutume de Bretagne dispose que si la veuve mésuse de son Douaire, elle en jouira par les mains de l’héritier en payant les intérets ; c’est aussi le sentiment deBasnage .
Les héritiers du mari sont obligés d’entretenir les baux faits par la Douairiere, comme des actes d’administration, ainsi disposent plusieurs Coûtumes du Roy ume. L’incertitude de la durée d’un bail mettroit la Douairière dans l’impossibilité de se procurer des Fermiers ; cependant quand il y a une lezion evidente dans le prix des baux, & S’il est just fic que la veuve-ait requ un pot de vin considérable, ces circonstances, qui déccient la fraude, portent quelquefois à prononcer aprés son déces la resolution du bail : Arrêt, au rappoit de M. l’Abbé de Gravigny, du 4 Seprembre 1226.
Les héritiers du mari peuvent, aprés la mort de la Douairiere, poursaière directement son Fermier en dégradation, & le faire condamner en des dommages & int érêts ; ils ne sont point-tenus d’attaquer les héritiers de la Dou-itière, & le Fermier leur opposeroit envain qu’il n’a point contracté avec eux. Le bien public defire qu’un Fermier soit comptable envers les maîtres du fonds, de la manière dont il s’est conduit par rapport à la propriété : Arrêt du 27 lanvier 1758.