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CCCCVI.

Si le Mari a reçu constant le Mariage, le racquit des rentes hypotheques qui lui appartenoient lors des épousailles, la Femme aura récompense de son Douaire entier sur les autres biens de son Mari, jusqu’à la concurrence de la valeur desdites rentes, si elles n’ont été remplacées.

IIy faut joindre l’Article LXXVI dudit Reglement, qui a plus d’étenduë, & qui sert à expliquer celui de la Coûtume ; car ce Réglement atteste, que non-seulement les rentes hypotheques, mais même les foncières & seigneuriales étant racquittées au mari, le débiteur qui a fait le racquit, ne peut être poursuivi, ni par les créanciers de celui à qui ces rentes appartenoient, ni par la femme pour son Douaire, ni par les enfans pour leur tiers coutumier, à moins qu’il n’y ait eu saisie ou défenses faites de racquitter avant le rachat : mais que néanmoins, la femme & les enfans ont récompense sur les autres biens affectés au Douaire & audit tiers. En conséquence de ce principe, on a jugé, que la rente dotale, en laquelle consistoit uniquement tout le bien maternel, avoit pû être valablement racquittée à la mere, & que les débiteurs qui en avoient fait le racquit n’en pouvoient être inquiétés par les en-sans, encore que leur mere n’eût fait aucun remplacement, ni n’eût d’ailleurs laissé aucuns biens, par un Arrêt du 24 de Novembre 16z4, rapporté parBasnage .1 On a demandé si le mari possesseur d’une fieffe, en est dépossédé faute d’avoir payé la rente fonciere, à laquelle le preneur s’étoit obligé, par la clau-se commissoire ordinaire dans de tels contrats ; cette négligence ou omission

du mari peut préjudicier au Douaire de la femme ; On a jugé au Parlement de Paris. pour l’affirmative, par la raison qu’en ce même cas, la négligence du mari peut faire perdre à la femme la fieffe à elle appartenante, & qui feroit partie de ses biens dotaux ; le privilége de la dot ne pouvant priver le bailleur a fieffe d’un droit qui lui est acquis par son contrat, ex pacto impresso in ipsâ rei traditione ainsi le mari est comme le Bénéficier, qui peut faire préjudice à l’Eglise, omittendo sive non solvendo canonem, sed non commitrendo vel delinquindo.Louet , F. 15, C. 35 & 52.

En Normandie, quoi que la femme ne pût avoir de Douaire sur l’héritage qui seroit passé en la possession du bailleur à fieffe ou de son représentant, elle n’en seroit pas absolument privée ; car elle en auroit récompense sur les autres biens de son mari, aux termes de cet Article CCCCVI, dont on a étendu la décision aux Offices, ayant été jugé, que comme le Douaire sur les rentes appartenantes au mari lors du mariage, & racquittées depuis, se devoit reprendre sur les autres biens : ainsi le Douaire sur l’Office vendu par le mari, se remplaçoit sur les autres biens, par un Arrêt du 14 de Juin 1667, rapporté parBasnage , sur l’Article CCCLXVII.

Que si l’Office dont le mari étoit titulaire lors de la célébration du mariage, est perduë faute d’avoir payé le Droit annuel ; il a été semblablement jugé que la veuve pouvoit demander le Douaire qu’elle eût pû avoir sur cet Office, eu égard à ce qu’il auroit pû valoir lors du déces de son mari, par un autre Arrêt du 12 de Mars 16yi rapporté par le même Auteur, sur ledit Article CCCLXVII, sur lequel il a de plus rapporté un Arrêt de l’11 de Juillet 1674, par lequel on a jugé, qu’une veuve n’ayant pû être payée d’une rente constituée, qui lui étoit échue dans son lot à Douaire n’étoit point obligée de dé-crêter le débiteur, mais qu’elle pouvoit en demander récompense aux héritiers de son mari, qui furent condamnés de lui bailler une autre rente.


1

Renusson , du Douaire, Chap. 3, n. 7s soutient l’opinion contraire : le prencer à rente foncière non rachétable n’a pas, dit-il, la faculté de racheter & amortir la rente, si ce n’est du consentement du bailleur de l’héritage ; ainsi si la Douairiere ne trouve dans les biens de son mari de quoi s’indemniser de son Douaire, elle pourra forcer le détenteur du fonds chargé de la rente foncière sujette à son Douaire, à lui continuer la moitié de la rente, tant que le Douaire aura lieu ; la raison est que le rachat d’une pareille rente foncière est unc aliénation volontaire du mari ; & qu’un preneur à fieffe regardé pour ainsi dire, comme un Fermier, quand il amortit la rente, acquiert la propriété de l’héritage ; ces raisonnemens sont pressans ; mais notre Jurisprudence est contraire. Le rachat d’une rente fonciere & irracquitrable quand il n’a point été précédé de défenses de payer éteint parmi nous sur cette rente le Douaire & le tiers des enfans. L’Article LXXVI du Réglement a été suivi de plusieurs Arrêts, & notamment d’un Arrêt du 2r lanvier 168y, rapporté par Basnage ; dans le fait de cet Arret il s’agissoit du rachat d’une rente en bled qui avoit été fait au mari pendant le mariage, la femme avoit inquiété le debiteur pour son Douaire, par l’Arrét il fut déchargé de sa demande.