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Premiere Partie du Douaire.

Il faut donc commencer par le Douaire, & donner d’abord une connoissance générale de toutes ses appartenances & dépendances, afin qu’on puisse mieux comprendre la liaison & la suite métodique des Articles qui en ont traité qui sont les quinze premiers de ce Chapitre outre les CCCLXXXVI, CCCXCVI CCCXCVII, CCCCVI & CCCCVII, lesquels il faudra ensuite reprendre divisément, & chacun en particulier, pour y ajouter les observations nécessaires pour leur interprétation, ou pour l’éclaircissement des questions qu’on a coutume d’y rapporter.

Le Douaire est un droit particulier aux Coûtumes, & qui a néanmoins quelque convenance avec le Droit Romain : car on le peut comparcr à la do-nation que le mari faisoit à la femme, pour la récompenser de la dot, Donationé propter nuptias, quam maritus in uxorem conferebai vice dotis, d’où vient que les Grécs l’appelloient dvrigigun, comme qui diroit Contre-Dos. On le compare encore à l’uxodezor des Grecs, introduit dans la Jurisprudence des Romains, sous le nom d’augmentum dotis, que la femme survivante demandoit aux héritiers de son mari, comme une récompense de la jouissance de sa dot, qui avoit appartenu au mari tant que le mariage avoit duré. Cet augment étoit de la moitié, ou du tiers, ou du quart de la valeur de la dot, & est encore en usage dans les Provinces de France où le Droit Romain est pratiqué, Louet & son commentateur, I. 1O

Mais le Douaire ne se regle pas par rapport aux biens de la femme, mais par rapport à ceux du mari ; & est ordinairement un usufruit de la moitié ou du tiers des biens appartenans au mari lors des épousailles, attribué à la veuve pour en quelque façon l’indemniser de la perte qu’elle fouffre, étant privée de l’assistance & de l’industrie de son mari.

On le distingue en coûtumier, & en conventionnel ou préfix : Le coutumier est celui qui est donné à la femme par une disposition genérale de la Coûtume, qui est la Loi municipale ; c’est-à-dire, particulière à une Province ou Contrée : Le conventionnel est celui qui appartient à la femme, on vertu d’une stipulation ou clause de son contrat de Mariage.

Il est à propos de considérer les convenances qui sont entre ces deux especes de Douairc, auparavant que d’en remarquer les differences.

Premierement, il se fait ouverture à l’un & à l’autre, par la mort naturelle ou civile du mari, ou quand le mari par sa mauvaise conduite ou autrement, est dépouillé de ses biens, ou quand la femme a recours au remede de la separation, soit civile, pour pouvoir vivre du revenu de son bion, sans être in-quiétée pour les dettes de son mari, soit d’habitation & de corps, pour éviter la continuation des mauvais traitemens & violences de son mani : le Douaire n été accordé en tous ces cas, par une raison semblabe ; car le Douaire ayant été favorablement introduit, pour soulager la femme dans la perte qu’elle a faite par la mort de son mari, qui la prive du secours & des avantages qu’elle trouvoit dans sa conduite & dans son économie, il y a eu de l’équité de lui donner étenduë dans toutes ces autres rencontres, qui causent à la femme une perte semblable. En la plûpart de ces cas, le Parlement de Paris n’a pas aceordé le Douaire, mais une pension sur les biens du mari, par rapport à la valeur de ses biens, & à la qualité de la femme : de sorte qu’il a jugé, que la femme, quand le mari est dissipareur, tombe en pauvreté ou en démence, peut bien demander sa dot & les autres conventions de son contrat de mariage, suivant la Loi 24. ff. Soluto matrimonio, quando, Gc. & la Loi ubi adhuc, Ce De jure dotium, mais non le Doüaire, parce que slaiutum loquens de morte non intelligitur de civili, sed tantum de naiurali, nec ad civilem extendiuur, nist in casibus in jure expressis, suivant le raisonnement de duMoulin ,Louet , Ca 26 & D. 36. Secondement, l’un & l’autre Douaire n’est acquis à la femme, que quand on doit présumer que le mariage a été consommé ; c’està dire, par le coucher, suivant l’expression de l’Art. CCCLXVII. Troisiemement, parce que le Douairc, tant coutumier que conventionnel, semble être destiné principalement pour les alimens, qu’on est réputé donner quand on ne les deman-de point : l’un & l’autre Douaire n’est dû que du jour qu’il est demandé, s’il n’est autrement convenu par le contrat de mariage, suivant l’Art. CCCLXVIII, mais quand il a été une fois demandé, on en peut demander vingt-neuf années d’arrérages. Quatriemement, quoique la dot soit toujours réputée antérieure en hypotheque au Douaire, elle ne le diminue point, soit qu’il soit coutumier ou conventionnel, d’autant que la dot n’est prife qu’apres la distraction du Douaire, comme il est attesté par les Articles LXIX & Lxx du Réglement de 1686 : ce qui mérite une plus longue explication, qui sera faite dans les remarques sur les Articles CCCLXIx & CCCLXx. Cinquiemement, les alié-nations que fait le mari des biens qui lui appartenoient lors de la célebration du mariage, ne peuvent diminuer ni l’un ni l’autre Douaire. Sixiemement, l’usufruit qu’a la Douairiere, comprend ordinairement toutes sortes de fruits, tant naturels que civils, comme reliefs, treiziemes, nomination & présentation aux offices & hénéfices, dépendans du fonds dont elle jouit à titre de son Douaire.

Septiemement, l’un & l’autre Douaire, quand le conventionnel consiste en usufruit, oblige ordinairement aux charges qu’on appelle de droit, qui sont de payer les rentes seigneuriales & foncières, la contribution au payement des dettes antérieures du mariage, & l’entretien & conservation des bâtimens & héritages en bon état. Huitiemement, la mauvaise conduite de la femme, lui peut faire perdre son Douaire, de quelqu’espece qu’il soit, par les Articles CCCLXXVI & CCCLXXVII. Et neuviemement, ils finissent & s’éteignene par la mort naturelle ou civile de la Douairière.

Aprés avoir représenté sommairement toutes les appartenances & dépendances du Douaire, qui peuvent être communes entre le coutumier & le conven-tionnel, il en faut remarquer les différences ; ce qui fera connoître plus parfaitement le Douaire en général. La plus importante est que le Douaire cou-tumier est toujours semblable, comme étant établi par un principe général, certain & immuable, qui est l’autorité de la Loi municipale ; & que le conventionnel, au contraire, dépend de la convention des contractans, qui peut recevoir toutes les diversités qui dépeudent de leur volonté. Et partant, si le Douaire coutumier est toujours un usufruit, le conventionnel peut confister en deniers payables en une seule fois, ou payables par une forme de pension annuelle : si le coutumier est toujours l’usufruit de la tierce partie des immeubles appartenans au mari lors du mariage, le conventionnel peut être limité à l’usufruit de la quatrieme ou de toute autre moindre partie de ces immeubles : si le coutumier s’étend sur tous les biens qui échéent au mari par succession directe de ses ascendans, le conventionnel peut être conclu des biens de ces successions, ou assigné uniquement sur iceux. Enfin, le conventionnel peut recevoir toutes sortes de limitations & d’exceptions au droit commun du Doüaire coûtumier pourvu qu’elles ne donnent point un Douaire plus avantageux & plus profitable à la Doüairiere, que n’auroit été le Douaire coutumier, parce que le Douaire ne se peut étendre au-dela des bornes que la Coûtume lui a données, que les contractans ne peuvent outrepasser, qui sont l’usufruit du tiers des biens appartenans au mari lors du mariage, & de ce qui lui est échu depuis par succession directe de ses ascendans, par les Articles CCCLXVII & CCCLXXI, mais il peut être moindre par la convention des contractans, par l’Article CeCLXXIV.

Une autre différence de ces deux Douaires est que le coutumier est établi par la Loi, sans aucun contrat ni convention des mariés : mais le conventionnel ne peut être établi que par une paction, ou écrite, quand il y a un contrat de mariage en forme probante, ou verbale, quand il n’y a point de contrat de mariage rédigé par écrit.

D’où provient une troisieme différence, qui est que le conventionnel peut avoir une hypotheque antérieure à la célebration du mariage, quand le contrat de mariage a été reconnu avant le jour des noces ; mais l’hypotheque du pur coutumier, c’est-à-dire, qui n’est point stipulé par le Contrat de mariage, n’est que du jour de cette célébration.

Ce qui a été dit, que la femme ne peut avoir un Douaire plus avantageux que celui qui est prescrit par la Coutume, se doit entendre à l’égard des biens du mari, & non à l’égard des pléges, qui se sont obligés au Douaire conventionnel ; car à l’égard des cautions, la femme les peut contraindre d’exé-cuter leurs promesses, encore qu’elles excedent beaucoup ce qui lui appartiens droit pour le Douaire coutumier, sans que ces cautions toutefois puissent avoir recours sur les biens du mari, quelque contre-lettre ou promesse de garantie qu’ils ayent prise du mari par l’Article CCCLXXII, il le faut joindre au CCCLXXIII, parce que celui-ci contient l’exception du précédent, qui est que lorsque les pléges du Doüaire sont le pere ou l’ayeul du mari, leur obligation au Douaire excessif n’a point d’effet que de leur vivant, pour les arré-rages qui échéent pendant ce temps, mais ne peut être exécutée aprés leur mort sur les biens de leurs successions. La regle & l’exception sont fondées sur le même principe, qui est que le Douaire ne peut outrepasser les limites que la Coutume lui a données sur les biens du marl. Or si les pléges avoient un recours sur le mari en vertu de leurs contre-lettres, ou si la caution du pere ou de l’aieul engageoit leurs biens aprés leur mort ; il arriveroit, par ces voies indirectes, que les biens du mari se trouveroient chargés du payement du Douaire encore qu’il fût excessif : ce que la Coutume a voulu absolument empécher, par l’Article CeCLXXI.

Et quant à ce qui a été dit, que le Douaire s’étend sur les biens qui échéent au mari, par succession directe de ses ascendans, il se doit entendre indistinetement, soit que ces ascendans ayent été présens & consenti au mariage, soit qu’ils n’y ayent point consenti, quoique cette présence ou consentement des ascendans produisent deux autres effets fort importans pour l’avantage du Douaire : car quand le pere & l’aicul sil faut dire la même chose de la mere ont été présens, ou ont consenti au mariage ; non seulement la Douairière prend Douaire sur les biens de leur succession, quand elle échet du vivant de son mari, mais elle le prend même au cas que leur succession échée aprés le décés de son mari, pour telle part & portion qui eût appartenu à son mari en cette succession, si elle fût échue de son vivant ;, ce qui signifie que-la Douairière a Douaire sur les biens qui appartenoient auxdits ascendans lors du déces de son mari ; mais non sur les biens que lesdits ascendans auroient acquis depuis ce déces, comme il est porté par l’Article CCCLXIX.

Le second effet de la présence & du consentement de ces ascendans, est que les biens qu’ils possédoient lors du mariage, sont tellement engagés au Douaire, que les aliénations qu’ils font depuis ce mariage qu’ils ont agréé, ne peuvent diminuer le Douaire qu’auroit eu la Douairière, si ces alienations n’avoient pas été faites, suivant qu’il a été jugé par un Arrêt du Conseil d’Etat, donné sur le partage de toutes les Chambres du Parlement de Normandie, touchant l’interprétation dudit Article CCCLXIX, lequel, Arrêt se trouve dans un Recueil, à la fin de ce Livre.

Au reste, le droit qu’a la femme de prendre Douaire sur les successions des ascendans, lui est tellement acquis, que la renonciation faite par son mati auxdites successions, n’y peut apporter aucun préjudice, par l’Article CCCLXXXI.

Il faut enfin remarquer que le Douaire ne peut être prétendu ni sur aucune succession collatérale, qui soit échue au mari pendant le mariage, ni sur les donations qui auront été faites à sondit mari pendant ce même temps, par les Art. CCCLXXx & CCexCVIII, où cela sera plus amplement expliqué.1


CCCLXVII.

La Femme gagne son Douaire au coucher ; & consiste le Douaire en l’usufruit du tiers des choses immeubles, dont le Mari est saisi lors de leurs épousailles, & de ce qui lui est depuis échu, constant le mariage en ligne directe, encore que lesdits biens fussent échus à ses Pere & Mere, ou autre Ascendant, par succession collatérale, donation, acquêt ou autrement.

Par choses immeubles cet Article comprend les Offices & les rentes constituées à prix d’argent, sur lesquelles le Douaire s’étend aussi-bien que sur les he-ritages. Quelques questions qu’on propose touchant le Douaire qui se prend sur ces deux espèces d’immeubles, sont différées sur les Articles CCCCVI & CCCCVIII. Par la ligne directe, la Coutume n’entend que celle des ascendans, de sorte qu’on a jugé, qu’une veuve ne pouvoit avoir Douaire sur les biens de la succession du fils de son mari, échue à son mari pendant leur mariage, par un Arrêt du 18 de Juillet 16s 3, rapporté parBasnage .2 Il faut remarquer que la Douarière doit faire les lots à ses frais ; même quand il y plusieurs sortes d’héritiers du mari, elle est obligée de faire plusieurs sortes de lots, pour ne confondre point le propre paternel avec le maternel, ni le propre avec les acquêts : ce qui a été jugé par un Arrêt donné en l’Audience de la Grand Chambre le 27 de Mai 1637.3

Mais quoiqu’elle soit obligée de payer les charges foncieres, & même les

Bypothécaires créées avant son mariage, elle n’en doit pas les arrérages échus avant sa jouissance, car ces arrérages étant au nombre des dettes mobiliaires, doivent être acquittés par les héritiers : Quand donc la veuve n’est point héritière, elle a son recours contre lesdits héritiers, quand elle a payé ces anciens arrérages : que si elle est héritière, elle doit payer sa contribution à proportion de la part qu’elle a cue en la succession mobiliaire de son mari, & si elle a été obligée de payer plus que sa part, elle a pareillement son recours contre lesdits héritiers.45 Entre les dettes immobiliaires, ausquelles la Douairiere est tenue de contribuer, sont les mariages des soeurs de son mari ; encore que ces seurs étant devenues héritières du Mari, ayent confondu l’action qu’elles avoient pour demander leur mariage avenant : ce qui a été jugé par un Arrêt du 13 de Mars 168s, rapporté parBasnage , quod potesi videri male judicatum, par un argument qui se tire de l’Article CCCXCVI, puisque la dette ne subsistoit plus lorsque le Doüaire avoit commencé, & ayant de plus été acquittée sans diminution des biens du mari6. Il faut dire la même chose du mariage des filles du mari, nées d’un précédent mariage, c’est-à-dire, que le Douaire y doit contribuer, quoique ces filles ayent été mariées depuis le mariage de la Douai-rière ; c’est-à-dire, postérieurement à l’hypotheque qu’elle a pour son Douaire, parce que les promesses faites par le pere pour le mariage de ses filles, ont leur rapport à l’obligation naturelle qu’avoit le pere de les marier, & qui partant precede le second mariage du pere : ce qui a été jugé par un Arrêt du 23e jour d’Août 1656, qui paroit contraire à l’Article CCCC, par lequel le Douaire n’est point diminué pour la légitime ou tiers coutumier des enfans nés des précédens mariages.7 On a demandé, si le mari retirant en vertu de la faculté de rachat qu’il avoit retenue, un héritage qu’il avoit vendu avant le mariage, la femme pourra prétendre Douaire sur cet héritage I On a jugé que cette faculté de rachat faisant partie des biens du mari, lors de la célébration du mariage, la femme & les enfans pouvoient en demander le tiers, la femme pour l’usufruit, les enfans pour la propriété, en payant le tiers des deniers payés par le mari pour faire le rachat, par une Arrêt du 23 de Décembre 1658. Cependant il peu-

paroître qu’une veuve ne doit pas avoir de Douaire sur les héritages que son mari a retirés, ou en vertu de la faculté de rachat stipulée par un contrat anterieur à leur mariage, ou en conséquence d’une rescision, parce que le Douaire ne se prend que sur les biuns don : le mati est saisi lors du mariage, & non sur ceux dont il acquiert la possession depuis, sur lesquels si la veuve a quelque droit, ce ne peut être que comme de conquet, dont on pourroit conclure que l’Arrêt du 23 Décembre 1658, a été donné contre les regles. Cet Arret suppose un cas, dans lequel la succession du mari étoit chargée de dettes puisque les enfans demandoient le tiers coutumier : si donc le mari avoit acquitté ce qu’il devoit payer pour faire le rachat, il semble que la femme devroit avoir son Douaire sur l’héritave rétiré, suivant qu’il est déclaré par les Articles CCCXCVI CCCXCVII.8 Il peut être dit qu’il faut juger la même chose à l’égard de l’action, en exécution de laquelle le mari s’est remis en possession d’un héritage qu’il avoit vendu avant le mariage, parce que cette action étoit in bonis lors uu mariage : ce qu’il ne faut pas tirer à conséquence pour les héritages que le mari a retirés comme parent ou Seigneur de Fief, sur lesquels la femme ni les enfans ne peuvent prétendre aucun Douaire, parce que lors du mariage il n’y avoit aucune action ni droit formé dans les biens du mari, pour faire ces retraits ; en quoi il y a différence entre l’accroissement qui arriveroit à un Fief par commise, confiscation, bâtardise ou deshérence, d’autant que ces droits appartiennent au mari sans débourser aucuns deniers, & précisément à cause du Fief dont on suppose qu’il étoit propriétaire avant le mariage, de forte que ce sont des accroissemens & des accessoires, dont il semble que la femme & les enfans doivent profiter, quand le mafi ou le pere ne les ont point mis hors de leurs mains.

On a jugé par les derniers Arrêts des premier Avril 1683, & 27 de 1S70, rapportés par Basnage sur cet Article : Que les femmes doivent prendre leur Douaire sur les biens bailles en contr échange à leurs maris, & ne peuvent inquiéier les possesseurs des biens que les maris ont aliénés par un contrat d’échange, d moins qu’il n’y eût une inégalité considérable.


CCCLXVIII.

Douaire n’est dû sinon du jour qu’il est demandé, s’il n’est autrement convenu par le Traité de Mariage.

La demande que la veuve doit faire de son Douaire, est fait valablement par une simple sommation. Quand cette demande a été faite, elle a son effet contre toutes sortes de personnes à qui la veuve a droit de demander son Douaire ; c’est-à-dire, tant contre les héritiers soit de son mari, soit des ascendans de son mari, que contre les possesseurs & détentateurs des biens sujets. au Douaire.9 Cette demande peut être faite aussi-bien au cas de la mort civile du mari qu’au cas de la naturelle, comme il a été dit, même quand la femme est reputée séparée de biens ; c’est-à-dire, lorsque tous les biens du mari, ou la plus grande partie sont saisis en décret : ce qui est ordonné par plusieurs Coûtumes, d’Anjou, Article CCeXIz, du Maine, Article XXXIII, de Nevers au Titre de Douaire, Art. VI.10

On demande en ce cas de décret, quand la femme peut s’opposer en distraction, pour avoir délivrance de son Douaire en essence 1 Pour la résolu-tion de cette question, on a distingué au Parlement de Paris, si le décret est poursuivi par des créanciers anterieurs ou postérieurs au Douaire. Au premier cas, la femme n’a point de Douaire en essence, mais elle l’a évalue en-deniers, suivant l’ordre hypothécaire. Au second cas, l’adjudication ne se doit faire qu’à la charge de fouffrir le Douaire,Louet , F. 24. Mais en Normandie l’usage est, que la femme ne peut obtenir la distraction de son Douaire, lorsqu’eue lui est contestée par des créanciers antérieurs, qu’en payant le tiers des dettes anciennes, & en baillant caution que les deux autres tiers de ces mêmes dettes, seront payés du prix qui proviendra de l’adjudication des autres biens non distraits, en exenption des fraits du décret & du treizieme ce qui a été jugé par plulieurs Arrêts. Néanmoins dans le cas qu’il y ait des. héritiers du mari, la veuve peut avoir son Douaire en essence, sans être obligée de payer le tiers des dettes antérieures, ni de bailler caution aux créan-ciers, d’autant que les héritiers sont tenus de lui faire bailler la délivrance de son Douaire, aux charges de droit ; mais en exemption de celles du décret.Louet , F. 24, &Brodeau .11

Le fise ne pourroit empécher la dictrastion du Douaire, sous prétexte du privilége qui lui est attribué par la Loi unique, C. De venditione rerum fiscalium, cum privato communium ; parce que ce privilége, par lequel le fisc peut contraindre le copropriétaire de vendre sa part conjointement avec lui, ut majori pretio fundus communis vendatur, ne s’entend que quand le fisc a un droit primitif de propriété, & non quand il n’a ce droit que par l’ordre hvpothécaire comme il a éte jugé par l’Arrêt rapporté parLoüet , au lieu susdit ; outre que les droits du fise ne peuvent préjudicier aux droits de la femme, par l’Article CCCXXXIII.12 On ne fuit point en Normandie la maxime du Droit Romain, que les fruits sont réputés faire partie du fonds, tant qu’ils sont attachés par les racines : Frudtus pendentes pars fundi videntur, l. 44. ff. De rei vindicatione ; en consequence de laquelle maxime l’usufruitier n’acquéroit point les fruits, qu’il ne les eût recueillis lui ou son Fermier : Car par la Coutume, les fruits, dans le temps. de leur maturité, sont réputés meubles, par l’Article DV ; c’est pourquoi la Douairiere qui décede aprés le jour de la S. Jean-Baptiste, transmet à ses héritiers les grains, quoi que non coupés ni séparés du fonds. Il faut dire la même chose du mari qui a joui par le droit de viduité : car s’il meurt apres la S. Jean, les grains qui sont sur les héritages dont il avoit l’usufruit, appartiennent à ses héritiers ou créanciers. Le contraire s’observe en la Coûtume de Paris : car les fruits pendans par les racines, quoi que mûrs, font partie du fonds, & appartiennent à celui à qui le fonds appartient, de sorte que l’héritier de l’usufruitier ne peut demander que les frais faits pour la culture ; c’est-à-dire, les labours, engrais & semence,Louet , F. 10.

Sed quid ; Si la Douairiere meurt avant la S. Jean, dira-ton que ses héritiers n’auront aucune part aux fruits ; parce que lors du déces, ils font indu-bitablement partie du fonds, auquel l’usufruitier ne peut rien prétendre, parce que la propriété est un droit distinct de l’usufruit ; Ce qui a fait décider aux Jurisconsultes, que les fruits mûrs, mais non séparés, faisant partie du fonds, ne pouvoient appartenir ni en tout ni en partie à l’usufruitier décédé avant la récolte, comme il a été remarqué. Cela paroit équitable, d’autant que tous des fruits d’une année étant acquis à la Douairiere au préjudice des héritiers du mari, des le moment qu’ils sont ameublis ; il sembleroit que pour garder quelqu’égalité. entre le droit de l’usufruitier & celui du propriétaire, tous les fruits devroient appartenir au proprétaire quand l’usufruit finit lorsque les fruits sont immeubles, & sont réputés faire partie du fonds.13

L’Arrêt du 17 de Juillet 166z, rapporté par Basnage sur l’Article CCCLXXXII. n’est point contraire à cette décifion, parce que cet Arrêt a été rendu pour régler le droit qu’ont les héritiers ou créanciers du mari, aux fruits pendans sur les héritages propres de la femme lorsque le mari est décédé avant la S.

Jean, sa femme survivante : car la jouissance qu’à le mari des biens de la semme constant le mariage, est comparée à la jouissance qu’a le Bénéficier des biens Ecclesiastiques, le Mari & le Bénéficier n’étant pas comme de simples usufruitiers, mais étant réputés jouir pour soutenir les charges, soit du mariage, soit de l’Eglise, propter officia legitime administrationis, comme a dit Barthole sur la Loi Divortio, § é contrario, ff. Soluto mairimonio : C’est pourquoi la jouissance que le mari a des biens de la femme, doit être plus ample que celle de la Doüairiere, dont le droit aussi-bien que le droit de viduité du mari, est borné par les regles de l’usufruit : VoyezLouet , F. 10 & 12. Par cet Arrêt de 1664, on a jugé, que les héritiers du mari devoient partager les fruits avec la veuve propriétaire, pro rata temporis ; & que pour régler cette proportion du temps, on commençoir la supputation du temps de l’année par le premier jour de Tanvier : ce qu’il faut pratiquer dans tous les cas où il faut partager les fruits entre les héritiers d’un défunt, & le propriétaire ou le succeseur ; ce qui avoit été jugé par l’Arrêt rapporté parLouet , dicto numero 12.

On a de plus remarqué sur cet Article, que les intérêts de la dot sont dus à la femme & à ses héritiers, inso jure, sans stipulation, & même sans qu’elle en fasse aucune demande ou interpellation. Il y avoit plus lieu de douter à l’égard du mari demandeur desdits intérêts ; mais enfin on les lui a adjugés du jour du terme donné pour le payement de la dot, encore qu’ils n’ayent point été slipulés.14


CCCLXIX.

Si le Pere ou Aïeul du Mari ont consenti le Mariage, ou s’ils y ont été présens, la Femme aura Douaire sur leur succession, combien qu’elle échée depuis le déces de son Mari, pour telle part & portion qui lui en eût pû appartenir, si elle fût avenue de son vivant ; & ne pourra avoir Douaire sur les biens que le Pere, la Mere ou Aïeul auroient acquis, ou qui leur seroient échus depuis le décès du Mari.


CCCLXX.

Si le Pere ou Aïeul n’ont consenti le Mariage, la Femme n’emporte après la mort de son Mari Douaire, fors de ce dont son Mari étoit saisi lorsqu’il l’épousa, ou de ce qui lui seroit depuis échu en droite ligne, constant le Mariage.

La présence du pere ou de l’aieul du mari, peut être valablement attestée par le certificat du Curé qui a célébré le Mariage, comme il a été jugé par un Arrêt du ro d’Août 1639. On a même admis la preuve par témoins, que le pere ou l’aieul avoient approuvé le mariage, aux fins d’établir le Douaire sur leur succession, par un Arrêt du 21 de Janvier 1681. Mais ce n’étoit qu’à l’égard des enfans contestans le Douaire sur cette succession ; ce qui ne pourroit être tiré à conséquence contre les acquereurs. Ces deux Arrêts sont rappor-tés parBasnage .15

Si le mari a survécu à ses pere, mere ou aicul, la femme ne peut prendre Douaire sur les biens de ces ascendans, qu’à la charge de contribuer aux dettes créées par son mari avant le mariage, parce que ces dettes sont charges de droit, tant à l’égard des biens que lemari possédoit lors du mariage, que de ceux qui lui sont depuis échus par succession directe, dont les descendans sont en quelque façon réputés propriétaires, viventibus patribus aut avis : Ce qui paroit être la cause pour laquelle le droit de Douaire a été étendu sur les biens des ascendans du mari, qui ont consenti au mariage de la Douairière. Mais si le mari est prédécédé, il semble que la femme pourra prétendre son Douaire sur les biens des ascendans qui ont consenti à son mariage, sans contribuer aux dettes du mari, quoi qu’antérieures à son Douaire ; parce que ces dettes n’ont point engagé les biens de ces ascendans : Mais cette raison ne paroit pas suffisante, d’autant que le Douaire sur les successions des ascendans, n’appartient à la femme qu’en conséquence de son mariage, & que comme une dépendance du Douaire qu’elie doit avoir sur les biens appartenans à son mari lors du mariage, & il ne semble pas raisonnable qu’elle eût plus d’avantage sur les biens desdit tes successions, que sur les biens possédés par son mari, dont elle ne peut jouir à titre de Douaire, qu’aux charges de droit, dont les dettes antérieures au mariage funt indubit ablement partie.

Il paroit par le texte de l’ancienne Coutume, au Titre du Bref de Douaire, que la femme n’avoit Douaire sur les biens des ascendans qui avoient consenti a son mariage, que quand le mari n’avoit point eu d’avancement de succession auquel cas la femme avoit Douaire sur les biens que possédoient lesdits ascendans lors de ce mariage, au prorata de la part héréditaire que son mari y eût pû avoir s’il avoit survécu : De sorte que la veuve étoit admise à faire enquête des biens dont lesdits ascendans étoient possesseurs lors de son maria-ge, pour demander Douaire aux possesseurs desdits biens. Ce qui prouve incontestablement, que les ascendans qui avoient consenti au mariage de leur fils ou petit-fils, n’avoient pas pû depuis ledit mariage, diminuer leurs biens par ventes ou hypotheques, au préjudice du Douaire acquis des-lors à la femme : Mais par cette ancienne Coutume, le Douaire n’étoit qu’un pur usufruit, & n’emportoit aucun droit de propriété pour les enfans nés du mariage ; ce qui ayant été innové par la Coûtume réformée, fait d’autant plus connoître que l’Article CCCLXI & est introductif d’un droit nouveau, en tant qu’il attribue à la femme Douaire sur la succession des ascendans, en l’état qu’elle se trouve lors du déces du mari : de sorte que la femme peut avoir Douaire sur les biens acquis par les ascendans depuis son mariage, poureû qu’ils ayent été acquis du vivant du mari : quoique d’ailleurs elle ne puisse avoir de Doüaire sur ces mêmes biens, quand ils ont été acquis depuis la mort du mari : ce qui est contraire à l’ancienne Coûtume, par laquelle la femme n’avoit Douaire que sur les biens dont les ascendans étoient posiesseurs lors du mariage, & nullement sur ceux qu’ils avoient acquis depuis.16 Quand un pere est caution solidaire de la dot baillée à un de ses enfans, ce cautionnement n’est pas réputé un avancement de succession ni un avantage indirect, pour empécher que la femme ou ses enfans ne puissent se faire payer de la dot entierement sur les biens du pere qui a cautionné, parce que la femme & ses enfans ne sont en ce cas que comme un étranger envers lequel il est certain qu’un pere peut valablement cautionner un de ses enfans : néanmoins si ces enfans, en renonçant à la succession de leur pere, se portent héritiers de leur aieul qui a cautionné, ils sont obligés de rapporter ce que l’aieul aura été obligé de payer en exécution de ce cautionnement, par l’Article LXXXVIII dudit Régiement. Mais il a été jugé, que la femme ni ses enfans ne pouvoient décrêter le bien du pere, qu’aprés avoir discuté les biens du fils cautionné, par Arrêt du 20 d’Août 1644, rapporté parBasnage .17 En ce même cas, les biens du fils qui a été cautionné par son pere pour la dot, étant décrétés, la femme ne peut pas prétendre lever son Douaire avant sa dot, sur le prix du décret ; mais au contraire la dot est payée la première, comme une dette antérieure : Car quoiqu’il soit vrai que le.

Douaire doit être pris sur l’entière succession, & la dot sur ce qui vient à l’héritier aprés la délivrance faite du Douaire, suivant qu’il est attesté par l’Article LXIX dudit Réglement ; néanmoins l’hypotheque de la dot étant préférée à celle du Douaire, quand le Contrat de mariage a été reconnu avant la célébration du mariage, la femme lors du décret fait des biens de son mari, doit être colloquée pour sa dot avant que pour son Douaire, quand les biens décrétés ne sont pas suffisans pour acquitrer l’un & l’autre. a l’égard done des héritiers du mari, la femme a touiours son Douaire sur tous les biens ap artenans au mairi, aus termes de l’Article CCCLXVII, soit qu’il y ait eu conaignation actuelle de la dot, soit qu’il n’y en ait pas eu : parce qu’il y auroit de l’absurdité, que l’avantage que la femme apuorte au m-ri par sa dot, dimi-nuût le avouaire, que la Coûtume donne généralement, absolument & indépendamment de la dot, à toutes les femmes, en conséquence de la consommation du mariage. Ces termes donc mis à la fin dudit Article LXI & du Réglement pourvû qu’il y ait consignation, ne se rapportent pas au Doüaire, qui se prend toujours & indistinctement sur tous les biens qui y sont déclarés sujets par la Coûtume, mais ont leur rapporr à la dot, qui ne doit être reprise entièrement sur ce qui revient à Phéritier, que lorsqu’il y a eu consignation ; car quand la dot n’a point été consignée, elle se reprend sur les meubles, & s’ils ne sont suffisans, sur les conquêts, aux termes de l’Article CCCLXV, & par conséquent diminue la part que la femme peut avoir sur lesdits meubles & conquets, en qualité d’héritière de son mari. Il n’y a donc qu’un seul cas auquel le Douaire se trouve diminué par la reprise de la dot, qui est, quand les biens du mari, dont la succession est abandonnée, étant décrétés, le prix de l’adjudication ne suffit pas pour acquitter la dot & le Douaire ; car en ce cas la dot étant colloquée avant le Douaire, le diminue nécessairement : Voyez ce qui a été remarqué sur l’Article CCCLXVI, ledit Article LXIx, & le suivant dudit Réglement, & l’Arréêt du Conseil d’Etat, dont il a été fait mention dans le Discours général touchant le Douaire.18


CCCLXXI.

La Femme ne peut avoir en Douaire plus que le tiers de l’Héritage, quelque convenant qui soit fait au Traité de Mariage, & si le Mari donne plus que le tiers, ses Hétitiers le peuvent révoquer après son décès.

On a juge au Parlement de Paris, que les conventions des contrats de mariage étoient personnelles, comme n’étans faites que pour établir les condi-tions d’une société, & partant, qu’elles se devoient régler par la volonté des contractans, quand elle n’est pas contraire à la Coûtume du lieu où le contrat a été passé, & à laquelle les contractans ont bies voulu se soumettre : C’est pourquoi il paroit que les Arrêts rapportés par Louet & son Commentateur, ont été mal eités pour confirmer la disposition de cet Article, & pour prouver que le Douaire eit purement réel, & ne peut être valablement stipule au-dela de ce qui est permis par la Coutume du lieu où les héritages du mari sont situés.19


CCCLXXII.

Celui qui est plége du Douaire, le doit fournir & faire valoir, encore que la promesse excede le tiers des biens du Mari, sans qu’il en puisse demander recours sur les biens dudit Mari ou de ses Hoirs, quelque contre-lettre ou promesse de garantie qu’il ait de lui.

Par le Droit coutumier, on fe peut valablement obliger pour les personnes incapables de contracter, tels que sont les mineurs, les furieux, les prodigues & les femmes mariées : C’est pourquoi, quand ce qui est prohibé par la Coutume, n’est point contre les bonnes moeurs, ni contre un bien publie, les personnes à qui la prohibition est faite peuvent donner des pleges qui s’obligent efficacement à ce qu’elles ne pouvoient pas valablement promettre. Tel est le Douaire excessif, qui n’a rien de deshonnête & ne peut être préjudiciable au public, mais uniquement à la famille du mari ; c’est pourquoi ies pléges qui s’obligent de le faire valoir jusqu’à une certaine quantité, ne peuvent être dispensés d’accomplir leur promesse, sous prétexte que cette quan-tité excede l’usufruit du tiers des biens du mari : car leur oblixgation n’est point contre l’intention de la Loi, qui n’a été que de préserver les biens du mari du Douaire excessif, laquelle est pleinement accomplie, au moyen que ces pléges ne peuvent avoir aucun recours sur les biens du mari, quelques contre-lettres ou promesses de garantie qu’ils ayent pris de lui, comme il est expliqué par cet Article.

Par le Droit Romain, les obligations des fidéjusseurs ou pleges, étoient considérées comme accessoites des obligations principales, dont elles étoient cen-sées dépendre absolument ; c’est pourquoi si les obligations principales ne subsistoient point, à raison de l’incapacité des personnes qui les avoient contractees, les fidéjussoires étoient réputées nulles, l. 6, ff. De verborum obligutionibus, l. 28, 8. 2, ff. Ad Velleianum, l. 9, 8. 3, ff. Ad Macedonianum. La Loi Marcellus 25. ff. De fidejussoribus, qui paroit être contraire à ces Loix, ne l’est pas en effet, parce qu’elle suppose, suivant l’explication des interpretes, que l’obligation principale du furieux ou du prodigue dont il s’agissoit, étoit valabls, comme elle le peut être en quelque cas, tel qu’est celui de la Loi furio-sus, ff. De obligutionibus & actionibus. C’est pourquoi les fidejusseurs en ce cas, ne sont point secourus du bénéfice de la restitution, qui n’a lieu que quand l’obligation principale ne peut subsister.20 Mais quoique par le Droit Romain, les obligations des pleges dépendent absolument de celle du principal obligé, il y a néanmoins des exceptions ou défenses qui servent au principal obligé, qui ne servent point aux pleges ; comme celle du principal obligé qui a fait cession, celle d’un pere, d’un mari d’un patron ou d’un associé, par lesquelles ces personnes ne peuvent être con-

traintes de payer, nisi in quanium fucere possunt ; c’est-à-dire, en tant qu’elles peuvent payer, sans tomber dans la misere d’une extrême pauvreté, luivant la Loi 7. ff. De exceptionibus, qui fait la division des exceptions en personnelles, que personis coharent, & en réelles, que rebus coharent, & que fidejusso-tibus & reis aeque prosunt.21


CCCLXXIII.

Ce qui se doit entendre de toutes personnes, autres que le Pere ou Aïeul du Mari, lesquels en ce cas ne sont tenus que des arrérages qui écherront leur vie durant, & n’y sont obligés leurs Hoirs après leur mort.

Les dernieres paroles de cet Article étoient ambigués ; c’est pourquoi elles ont été expliquées par les Arrêts, desquels a été formé l’Article LXXV dudit Réglement, qui atreste, que les héritiers du pere ou d’un autre ascendant, qui est intervenu plége du Douaire excessif, ne sont pas tenus d’en payer les arrérages, encore que ces arrérages-soient échus du vivant des pleges ; ce qui fait entendre que ce qui n’a point été payé par eux, ne peut être exigé de leurs heritiers : il n’y a donc que ces aseendans qui puissent être contraints de payer le Douaire excessif ; encore en peuvent-ils être déchargés, en faisant apparoir de leur impuissance, & en abandonnant leurs biens ; auquel cas on leur donne de quoi vivre, hubetur ratio ne egeant.22


CCCLXXIV.

Moins que le tiers peut avoir la Femme en Douaire, s’il est convenu par le Traité de mariage.

Comme la femme peut avoir moins que le tiers pour son Douaire, elle peut n’en avoir point du tout, parce qu’il n’y a que l’exces du Douaire qui soit prohibé par la Coûtume : mais ces conventions doivent être faites avant le mariage ; car constant le mariage, la femme ne peut valablement se départir du Douaire qu’elle auroit stipulé par le contrat de mariage : tout de même que le mari ne peut augnienter le Douaire, s’il ne s’étoit expressément réfervé cette faculté, par une clause expresse du contrat de mariage, suivant l’espece d’un Arrêt du ré de Juillet 1647, rapporté parBasnage . Ces décisions sont fondées sur ce que les contrats de mariage etablissent des loix dans la famille du mari, c’est pourquoi il n’est point permis d’y rien innover apres la célebration du mariage, quand même le changement qu’on y voudroit apporter seroit pour réduire les pactions au Droit commun & de la Coutume, dont Louet apporte les raisons, & des exemples fort remarquables, M. 4.23


CCCLXXV.

Les Douairieres doivent tenir en état les Maisons & Héritages, comme elles leur ont été baillées, sans couper les Bois autres que ceux qui sont en coupes ordinaires, si ce n’est pour réparer les Maisons & Manoirs, appellé le Propriétaire, & par Ordonnance de Justice.

Le devoir qui est prescrit par cet Article, est commun à tous les Usufruitiers, qui sont tenus d’user de la chose dont ils ont droit de jouir comme un bon père de famille en useroit : Omnem enim curam rei suscipère debent, C cussodiam pressare, l. 13. ff. De usufructu, l. 2 ff. Usufruduarius quemadmodum caveat. C’est pourquoi si la Douairiere voit que les batimens qui sont com-pris dans son partage, sont en mauvais état, elle doit poursuivre les héritiers, pour leur faire faire les réparations ou récdifications convenables, & cependant obtenir permission de faite visiter par Experts, & de faire dresser des descriptions ou procés-verbeaux de l’état des choses, afin qu’elle ne puisse être inquiè-tée pour les ruines qui sont déja arrivées, ou qui peuvent arriver en consequence Mais la Douairiere n’est régulierement obligée qu’aux réparations qu’on appelle viageres, qui sont pour conserver, & non pour rétablir ou réédifier ce qui est ruiné, si donc les maisons tombent par vétusté, sont consumées par un incendie fortuit, ou renversées par les violences de la guerre, la Douairière n’en est pas responsable. Mais d’ailleurs elle perd sont usufruit dans ces ren-contres, parce qu’il finit par l’extinction de la chose qui y est sujette : quand donc l’héritier fait réédifier les batimens tout-à-fait ruinés, la Douaitière n’en peut pas prétendre la jouissance.24

Au resto, la Doüairiere percevant tous les fruits en vertu de son usufruit, est obligée d’acquiter toutes les charges qui sont dues à raison de la perception des fruits, comme les rentes seigneuriales & foncières, les répatations des chemins ; mais quant aux autres charges auxquelles on est tenu pour pouvoir percevoir les fruits à l’avenir, comme la taxe pour les biens domaniaux, le Franc-aleu, oxtinction du Tiers & danger, & autres semblables, la Douaiciere y doit contribuer avec le Propriétaire à proportion, laquelle se regle or-dinairement à la sixieme partie.


CCCLXXVI.

Femme n’a Douaire sur les biens de son Mari, si elle n’étoit avec lui lors de son décès.


CCCLXXVII.

Ce qui se doit entendre, quand elle a abandonné son Mari sans cause raisonnable, ou que le divorce est advenu par la faute de la Femme ; mais s’il advient par la faute du Mari ou de tous deux, elle aura son Douaire.

Quoique l’héritier du mari ne puisse pas accuser la veuve d’adultere, quand le mari ne s’en est pas plaint, néanmoins dans le cas de ces deux Articles, il peut, pour prouver que l’absence de la femme d’avec son mari procede d’une cause injuste & punissable, incidemment & par forme d’exception, proposer l’accusation d’adultere, comme étant une cireonstance, qui aggrave la faute de l’a-bandonnement du mari, pour laquelle la Coûtume prive la femme de son Doüaire.

On a jugé, qu’une femme pouvoit valablement renoncer à son Douaire, par une Transaction faite avec lon mari, en conséquence de l’accusation d’adultére qu’il avoit formée contr’elle, nonobssant la Loi, transigere, C. De tran-sadionibus, qui semble rejetter la Fransaction touchant le crime d’adultere, parce que cette Loi ne se doit entendre, qu’au cas que le mari soit complice de l’impudicité de sa femme, ob lenocinium, suivant l’explication qu’y donnleBret , lib. 1. Dec. 13.25

Les Loix Romaines punissoient les veuves qui se remarioient intra annum luctus, en les privant de tous les avantages qu’elles avoient recus de leurs maris, soit par testament, soit par disposition entre-vifs, outre l’infamie, l. 2. & 2. C. De secundis nupiiis. Mais quoique toutes ces peines ayent été abolies dans le l’aïs coy umier, en conséquence des décrétales, par lesquelles pena feslinationis nuntiarum sublate sunt ; & pourvu que les veuves ne soient pas grosses, comme dit du Moulin sur le Titre des Fiefs S. 30. num. 247. JNéanmoins quar d’cette précipitation des veuves à se remarier, est accompagnée de quelques circontances qui la rendent odieuse & suspecte, comme quand la veuve s’est en, agée par accords & promesses au second mariage, peu de jours aprés le décés de son mari, on la prive non seulement de ce que lon mari lui avoit donné par testament, mais de son Douaire, par deux Arrêts, l’un du 5 de Mars 1649, & l’autre du mois de Février 1678, rapportés parBasnage . Idem.

Judicandum, quand elles ont vécu avec incontinence dans l’année de leur deuil, Vide Anneum Robertum rerum judicalarum, lib. 1. cap. 13. Du Fresne, au Journal des Audiences, lib. 6. can. 265.26


CCCLXXVIII.

L’Héritier n’est tenu de douer la Femme de son Prédécesseur, fors de ce qu’il a eu de la succession.


CCCLXXIX.

Si le Mari, durant son Mariage, a vendu de son Héritage, la Femme en peut demander Douaire à celui qui le possede.

Ces deux Articles ne doivent pas servir à s’expliquer l’un l’autre, car quand il est dit, que l’héritier n’est pas obligé de fournir le Douaire que sur ce qu’il a eu de la succession, cela ne se doit pas entendre quand son predécesseur a aliéné l’immeuble sujet au Douaire, car en ce cas, il est certain que l’héritier est obligé de récompenser la veuve, & de lui donner un usufruit sur les. biens non alienés, qui l’indemnise de celui qui lui pouvoit appartenir sur les biens aliénés, de sorte que l’Article CCCLXXVIII. fait entendre que le Douaire est un droit reel & foncier, qui s’anéantit par le dépérissement du fonds arrivé par une cause naturelle, sans la faute du mari ; auquel cas, il ne seroit pas juste que la reuve en pût demander garantie & récompense aux héritiers du mari, parce qu’en ce même cas, la chose périt pour le propriétaire, & conséquemment, Pour tous ceux qui ont droit d’en jouir. Quand donc. il est déclaré par l’Artiele.

CCCLXXIN, que la veuve peut demander Douaire à l’acquéreur & possesseur de l’héritage vendu par son mari ; cela ne se doit entendre, que quand il ne reste pas assez de biens non aliénés pour lui fournir son Douaire : car quand il en reste assez, elle ne peut déposséder les acquéreurs, & ce sont les héritiers qui lui doivent fournir son Douaire. Que si la veuve est héritière de son mari, elle ne peut troubler les acquéreurs, parce qu’elle est obligée à leur garantie, & ainsi sa demande seroit rejettée par leur exception. Cet Article CCCLXXI & ne. parle que d’héritage, & ne se peut appliquer ni aux rentes ni aux Offices ; car à leur égard, la femme n’a point d’action, ni contre les débiteurs ayant fait l’amortissement des rentes, ni contre le nouveau titulaire de l’Officc ; mais elle a seule-ment sa récompense sur les autres biens, où personnellement contre les héritiers du mari. Voyez l’Article LXXVI dudit Réglement, & ce qui sera remarqué. à l’Article CCCCVI.27


CCCLXXX.

Femme ne peut avoir Douaire de ce qui est échu à son Mari depuis les épousailles, par donation, succession collatérale ou autre-ment, qu’en ligne directe.

Par donation en cet Article, on n’entend pas celle qui est faite par un ascendant, qui est réputée un avancement de sucecession, & partant, étant une partie de cette succession en ligne directe, est sujette au Douaire. On n’entend pas aussi la donation qui a été faite au mari par le contrat de mariage, comme il sera expliqué sur l’Article CCexCVIII.

a l’égard de ce qui est dit de la succession collatérale, il faut remarquer, que quoiqu’il soit disposé par l’Article CCXXXVII, que l’ainé demeure faisi de la succession de ses pere & mere, pour en faire part à ses puinés, on ne doit pas juger qu’un des puinés étant décédé, sans avoir demandé partage sur la succession de son pere ou de sa mère, les biens qu’il avoit droit d’avoir pour sa portion héreditaire, soient estimés procéder immédiatement de la ligne directe, pour en attiibuer Douaire à la femme de l’ainé, quoiqu’il en ait toujours joui parce que ce droit de jouissance n’est que pour les fruits, & n’empêche point que la propriété n’en fût acquise au puiné des le jour du déces du pere ou de la mere.28


CCCLXXXI.

Si le Mari renonce à la succession qui lui est échue en ligne directe, néanmoins la Femme peut prendre Douaire sur icelle, aux charges de droit.

La femme pour son Douaire est aussi favorable qu’un créancier l’est par l’Article CCLXVIII, c’est la raison de la décision de cet Article. C3


CCCLXXXVI.

Au record de mariage qui se fait pour la connoissance du Douaire, les Parens & Amis qui ont été présens audit Mariage, y sont reçus, & ne peuvent être reprochés.

Cet Article & les CCCXCVI, CCCXVCII, CCCXCVIII, CCCCVI & CCCCVII sont mis hors leur rans, parce qu’ils font la continuation de ce qui concerne le Doüaire, quoiqu’il semble par les termes de cet Article CCCLXXXVI, que ce record, c’est-à-dire, cette attestation des parens qui ont assisté au mariage, soit uniquement pour certifier & rendre le Doüaire constant : Il est néanmoins certain qu’il peut avoir son usage pour toutes les autres conventions ordinaires aux contrats de mariage, comme il est atrestépar l’Article LXXVIII dudit Reglement. Or ce record n’est pas nécessaire pour le Douaire coûtumier, parce qu’il est acquis à la femme par la Loi, sans aucune convention : il ne se pratique donc que lorsque le Douaire est limité, c’est-à-dire, lorsqu’on prétend établir un Douaire préfix & conventionnel, en diminution de celui qui appartiendroit par le droit commun. Ce qu’on doit remarquer en plus outre sur le record de mariage, est différé sur les deux Arti-cles CCCLXXXVII & CCCLXXXVIII.29


CCCXCVI.

Si le Mari, constant le Mariage, décharge les Héritages à lui appartenans lors de ses épousailles, ou bien à lui échus en ligne directe constant son Mariage, de rentes hypotheques & foncieres, ou autres charges réelles, la Femme a le tiers entier pour son Douaire, déchargé desdites rentes racquittées, comme s’ils n’eussent point été chargés lors & avant les épousailles ; & ne sont lesdits racquits & décharges réputés conquêts, pour y prendre droit par la Femme ou ses Héritiers.

Cet Article est contraire aux Coutumes où la communauté est reçue, dans lesquelles le racquit des rentes ou charges dûes à cause des héritages appartenans à un des mariés, est réputé un acquet de la communauté, & aiusi la moitié de la rente amortie est faite acquet à un des conjoints, Coutume de Paris, Article CCXLIV & CCXLV. Idem dicendum, à l’égard des augmentations faites sur les héritages appartenans à un des mariés, qui dans ces Cou-tumes sont consées conquêts de la communauté ; mais en Normandie elles sont un accroissement du fonds, solo cedunt.30

Sed quid : Si le mari qui aiconsigné la dot sur ses biens, racquitte les rentes qu’il devoit des deniers dotaux, avec une clause, que sa femme soit subrogée à l’hypotheque des rentes amorties ; cette femme pourra-telle repêter sa dot sur les biens de son mari, & de plus, demander son Douaire sur les héritages déchargés desdites rentes : Il a été jugé, que la femme par l’effet de la subrogation stipulée lors du racquit, succedoit aux droits des créanciers, & que par conséquont les rentes n’étoient point éteintes, & partant diminuoient le Douaire, par un Arrét du 5 de Juillet 1662, rapporté parBasnage .

Au reste, il semble que cet Article ne se doit entendre, qu’au cas que la Douairière accepte la succession de son mari : ce qu’on peut inférer de la fin dudit Article, qui évidement renferme ce cas, outre qu’il ne paroit pas juste qu’une femme qui renonce à la succession de son mari : profite de son aménagement, & augmente son Douaire par un extinction des charges de droit, qui seroit préjudiciable ou aux héritiers ou aux créanciers de son mari. Cette opinion est contraire à l’Arrêt du 18 de Mars 1655, qui est expliqué sur l’Article suivant CCCXCVII.


CCCXCVII.

Si le Mari a vendu de son propre pour faire ledit racquit, la Femme prenant Douaire sur les Héritages déchargés, ne pourra prétendre Douaire sur ledit Héritage vendu.

Il sembleroit que quand le mari s’est constitué en rente, pour avoir les deniers nécessaires pour faire les racquits & amortissemens, dont il est parlé en cet Article & au précédent, la femme ne pourroit pas prendre son Douaire sur les héritages déchargés, qu’en contribuant au payement ou des anciennes rentes, ou des nouvelles constituées pour parvenir au racquit, vu que ce n’est pas se libérer quand on s’engage d’ailleurs, non plus que quand on vend ses autres héritages. Néanmoins on a jugé, qu’une femme qui avoit renoncé à la succession de son mari, jouiroit de son Douaire en exemption des rentes acquittées par son mari constant le mariage, en vertu de l’Article CCCXCVI, & qu’elle ne contribueroit point aux dettes contractées pour faire ledit racquit, parce que ces dettes étoient depuis le mariage, & qu’il n’y avoit point eu de déclaration lors du racquit, que les deniers d’icelui fussent provenus de la nouvelle constitution du mari, par un Arrét du 18 de Mars 1655, donné par Rapport, & cité parBasnage . Ce qui semble répugnant à l’intention de la Coûtume, qui s’oppose aux avantages des femmes, quoique fondée en bonne raison, & qui partant n’a pas eu intention d’approuver des avantages indirects, & qui ne leroient pas tolérés dans le Pays même où la communauté égale. les droits des femmes à ceux des maris.31


CCCXCVIII.

La Femme ne peut avoir Douaire ne Conquêts sur les biens donnés à son Mari.

Cet Article, à l’égard. du Douaire, se doit expliquer comme le CCCLXXX, car la femme a Douaire sur les biens donnés à son mari par le contrat de mariage, soit qu’ils soient donnés pour dun mobil, soit qu’ils soient donnés pour être propres au donataire, par un étranger ; c’est-à-dire, qui ne soit point un des ascendans du mari : parce qu’en ces cas, les donations sont plus anciennes que la célébration ou confommation du mariage, vû qu’elles font partie du contrat qui a précédé, & dont toutes les clauses, quoi que dépendantes de ladite célébration, comme d’une condition nécessaire, ont un effet rétroactif à la date dudit contrat, suivant la Loi si silius familias 7S. De verborum obligationibus, & le raisonnementdeCoquille , sur l’Article I. du Titre de Douaire : ce qu’il faut entendre à l’égard des donations faites pour don mobil, suivant la limitation attestée par l’Article LXXI dudit Réglement, qui est, pourvû que la chose donnée soit encore en essence ; c’est-à-dire, soit encore aux mains du mari, ou n’ait point été hypothéquée par lui : car si le mari a contracté des dettes depuis le mariage, la femme ne peut avoir Douaire sur le don mobil, qu’en payant ces dettes. Ce qui a été jugé par un Arrêt du 26 de Mars 168y, rapporté par Basnage sur l’Article CCCLXVII.32 Quant à ce qui est disposé par cet Artiele CCCXCVIII, à l’égard des conquêts, il est contraire à l’Article CCXLVI de la Coutume de Paris, par le-quel les donations faites simplement à l’un des mariés ; c’est-à-dire, sans avoit exprimé qu’elles seroient propre à l’un d’eux, font partie des biens de la communauté, excepté celles qui sont faites en ligne directe, lesquelles ne tombent point en communauté. Les Arrêts du Parlement de Paris ont encore excepté les donations faites en la ligne collatérale à un présomptif héritier, lesquelles sont censées propres du parent, encore que la donation n’ait point été faite avec cette expression, qu’elle lui sera propre : mais en Normandie, indistinetement toutes donations faites pendant le mariage, par autres que les ascen-dans, soit qu’elles soient réputees propres ou acquêts du mari, n’attribuent à la femme aucun droit de doüaire ni de conquêt, à moins que ces donations. ne soient faites nommément à la femme, auquel cas elles lui appartiendront propriétairement : donnés en cet endroit, s’entend, tant des donations entrevifs que testamentaires, tant en la Coûtume de Paris qu’en celle de Norman-die.33


CCCCVI.

Si le Mari a reçu constant le Mariage, le racquit des rentes hypotheques qui lui appartenoient lors des épousailles, la Femme aura récompense de son Douaire entier sur les autres biens de son Mari, jusqu’à la concurrence de la valeur desdites rentes, si elles n’ont été remplacées.

IIy faut joindre l’Article LXXVI dudit Reglement, qui a plus d’étenduë, & qui sert à expliquer celui de la Coûtume ; car ce Réglement atteste, que non-seulement les rentes hypotheques, mais même les foncières & seigneuriales étant racquittées au mari, le débiteur qui a fait le racquit, ne peut être poursuivi, ni par les créanciers de celui à qui ces rentes appartenoient, ni par la femme pour son Douaire, ni par les enfans pour leur tiers coutumier, à moins qu’il n’y ait eu saisie ou défenses faites de racquitter avant le rachat : mais que néanmoins, la femme & les enfans ont récompense sur les autres biens affectés au Douaire & audit tiers. En conséquence de ce principe, on a jugé, que la rente dotale, en laquelle consistoit uniquement tout le bien maternel, avoit pû être valablement racquittée à la mere, & que les débiteurs qui en avoient fait le racquit n’en pouvoient être inquiétés par les en-sans, encore que leur mere n’eût fait aucun remplacement, ni n’eût d’ailleurs laissé aucuns biens, par un Arrêt du 24 de Novembre 16z4, rapporté parBasnage .34 On a demandé si le mari possesseur d’une fieffe, en est dépossédé faute d’avoir payé la rente fonciere, à laquelle le preneur s’étoit obligé, par la clau-se commissoire ordinaire dans de tels contrats ; cette négligence ou omission

du mari peut préjudicier au Douaire de la femme ; On a jugé au Parlement de Paris. pour l’affirmative, par la raison qu’en ce même cas, la négligence du mari peut faire perdre à la femme la fieffe à elle appartenante, & qui feroit partie de ses biens dotaux ; le privilége de la dot ne pouvant priver le bailleur a fieffe d’un droit qui lui est acquis par son contrat, ex pacto impresso in ipsâ rei traditione ainsi le mari est comme le Bénéficier, qui peut faire préjudice à l’Eglise, omittendo sive non solvendo canonem, sed non commitrendo vel delinquindo.Louet , F. 15, C. 35 & 52.

En Normandie, quoi que la femme ne pût avoir de Douaire sur l’héritage qui seroit passé en la possession du bailleur à fieffe ou de son représentant, elle n’en seroit pas absolument privée ; car elle en auroit récompense sur les autres biens de son mari, aux termes de cet Article CCCCVI, dont on a étendu la décision aux Offices, ayant été jugé, que comme le Douaire sur les rentes appartenantes au mari lors du mariage, & racquittées depuis, se devoit reprendre sur les autres biens : ainsi le Douaire sur l’Office vendu par le mari, se remplaçoit sur les autres biens, par un Arrêt du 14 de Juin 1667, rapporté parBasnage , sur l’Article CCCLXVII.

Que si l’Office dont le mari étoit titulaire lors de la célébration du mariage, est perduë faute d’avoir payé le Droit annuel ; il a été semblablement jugé que la veuve pouvoit demander le Douaire qu’elle eût pû avoir sur cet Office, eu égard à ce qu’il auroit pû valoir lors du déces de son mari, par un autre Arrêt du 12 de Mars 16yi rapporté par le même Auteur, sur ledit Article CCCLXVII, sur lequel il a de plus rapporté un Arrêt de l’11 de Juillet 1674, par lequel on a jugé, qu’une veuve n’ayant pû être payée d’une rente constituée, qui lui étoit échue dans son lot à Douaire n’étoit point obligée de dé-crêter le débiteur, mais qu’elle pouvoit en demander récompense aux héritiers de son mari, qui furent condamnés de lui bailler une autre rente.


CCCCVII.

Et si les deniers desdites rentes ont été remployés en autres rentes ou héritages, elle y aura Douaire jusqu’à la concurrence de ce qui avoit été racquitté, combien que l’acquisition soit faite depuis les épousailles.

La concurrence de ce qui a été racquitté au mari, se doit entendre non par rapport au revenu, mais à la quantité des deniers racquittés, de esorte que la femme peut avoir en conséquence du remplacement fait par son mari, un plus grand ou un moindre usufruit pour son Douaire, si ce remplacement produit un plus grand ou un moindre revenu ; que ne produisoit larente racquittée, à laquelle il est Iubrogé. Si donc ce mari a employé d’autres deniers pour faire une acquisition, que ceux qui procédoient du racquit qui lui a été fait la femme n’aura Douaire sur ladite acquisition, sinon jusqu’à la concurrence des deniers dont son mari a été remboursé.35



1

Les Loix, ch & les peuples policés, ont toujours accordé aux femmes une part dans la fortune de leurs maris aprés leur déces, pour les consoler de cette perte & soutenir leur condition. Les Juifs avoient sagement pourvu aux incommodités du veuvage, en obligeant les maris de doter leurs épouses : les sirecs en usoient ainsi, suivant le témoignage de Plutarque : les Romains nous ont laissé beaucoup de Réglemens avantageux aux femmes : les Gaulois, avec ce fier Despotisme emprunté de leur Religion & de leurs moeurs, étoient, si on en croit César, Liv. 6, n. 4, &Tacite , dans la peinture qu’ils nous ont tracé de leurs usages, plus équitables que nous envers leurs femmes. Parmi les peuples qui s’éleverent sur les débris de l’Empire Romain, le mari faisoit à sa femme une donation le matin de la célébration du mariage, c’étoit le Morghangeba des Loix des Lombards, Liv. 2, Titre 4 du Titre 3o des Loix Ripuaires, & dont il est fait mention dans le Traité d’Andelo en 591, entre le Roi Gonthran & Childebert, rapporté parGrégoire de Tours , Liv. 9, Chap. 20, le Morghangeba s’appeila dans la suite dos, & on nomma la dot apportée par la femme u mari, Maritagium.

Le Concile d’Arles de l’an 524, & le 17ome Capitulaire, Liv. 7, prouve encore que nos Rois, avant la troisieme Race, ont accordé des droits aux femmes sur les biens de leurs maris.Marculfe , qui vivoit dans le seprieme siecle, suivant stenusson, a donné, Liv. 2, Chap. 1s, des Formules des avantages ordinaires que le mari faisoit à sa femme en l’épousant. Les Loix d’Ecosse sont pleines de décisions sur le Douaire ; Loi Regium mijestatem, Liv. 2, Ch. 16, n. 2.Littleton , Liv. 1, Chap. of Doiver, nous représente le Douaire comme un usufruit du tiers des terres & tenemens qui appartenoient au mari lors de son mériage, & com-me de constitution générale. Philippes-Auguste, en l’an 1214, rendit le Douaire un droit municipal, qui n’étoit dû auparavant, chez les François, qu’en vertu d’une convention qui se faisoit en préfence du Prêtre qui célébroit le mariage, dit Philippes deBeaumanoir , Tit. 13 de ses Coutumes publiées en 1283.Coquille , dans ses Institutions, Titre du Douaire, cite, pour prouver qu’il est d’un usage encien, un Traité de Mariage du mois de lanvier 1285, entre Iean, fils de S. Louis, & Tolande, Comtesse de Nevers, qu’il avoit vn. Les Etablissemens de S. Louis en l’an 1270, contiennent, en plusieurs endroits, des Réglemens sur le Douaire, qui ont été expliqués par Laurière dans le premier Volume des Ordonnances de la troisieme Race de nos Rois.

Le Douaire est, sans doute, tres-favorable : il est le prix du sacrifice ordinaire des agrémens de la jeunesse, de la santé, du repos, & presque toujours de la liberté : c’est donc un tribut de la reconnoissanoe bien plus qu’un présent de la générosité, & qui doit être icquitré fidelement, en le renfermant cependant dans les bornes des Coû-umes. loignez, sur cette matière, à la lecture de nos Auteurs, celle de l’excellent Traité deRenusson , des Gu-res d’Auzanet & deDuplessis .


2

Le Douaire est artaché à un mariage valide & capable de produire les effets civils ainsi le mariage étant nul par le vice de clandestinité, la femme n’a pas de Douaire. Ferriere, Art. CCXLVII, S. 2, n. 1. Lorsqu’il y a eu un commerce illicite avant le mariage in extremis il ne produit à la femme aucun Douaire ; mais en ce dernier cas, par un motif d’humanité, on adjuge à la femme une pension alimentaire sur les biens du mari.Bou -cheul, Art. CCLIII, n. 9 & 11. Le même Rub. du Tit. 3, n. Ad.

Le Douaire ne dépend point du payement de la dot ; il peut cependant être stipulé que la femme n’aura point de Douaire si la dot n’a point été payée au temps de la dissolution du mariage.Renusson , du Douaire.

Selon plusieurs Coûtumes, la femme gagne son Douaire par la bénédiction nuptiale : en Normandie elle le gagne par le coucher ; de sorte que si le mari décede auparavant, la femme n’aura point de Douaire.

On adjugea, par Arrêt du ro Mars 1688 Douaire à la femme sur une somme de deniers, à laquelle avoit été évaluée la moitié d’un Office dont le frère de son mari avoit été pourvu en vertu de la Procuration ad resignandum du pere, & sur une somme d’argent jugée au profit de son mari depuis son mariage, pour dommage & intéret d’éviction contre la caution d’un Contrat de Fief fait au pere du mari avant le mariage de son fils, & qui ne fut annulle que depuis le déces du pere.

Le motif de l’Arrêt est que chaque des enfans, par le déces du pere commun, étoit saisi de droit de la moitié des corps héréditaires malgré l’avancement fait à l’un d’eux, & qu’on ne peut considérer au préjudice de la femme, comme un effet mobiliaire, la Fieffe d’héritage dont le pere étoit saisi lors de sa mort.

La femme ayant épousé un mineur, a Douaire sur les deniers des rentes rachetées pendant sa minorité & dont le tuteur n’a point fait d’emploi : Arrêt du premier d’Avril 1S97.

Il paroit même assez indifferent que le mari décede étant devenu majeur ; car la majorité survenue depuis le mariage ne privera pas la femme d’un droit qui lui étoit acquis. On a même adjugé, par Arrét du s’Août 1690, Douaire à la femme sur les deniers du rachat d’une rente du propre de son mari fait en sa minorité, quoique le mariage eût été célébré aprés sa majorité, mais avant la reddition de son compte.

La femme a Douaire sur des fonds que le mari a pris par emphytéose, & à plusieurs générations quand le bail emphytéotique a pré-édé le marage : Arrét du Parlement de Paris du 2o Juillet 1527, rapporté par Pithou sur Troyes, Art. LXXXVI. Cet Auteur observe qu’on ne peut pas opposer à la veuve que les héritiers du mari continuent le bail en vertu du contrat, & qu’ils n’y entrent pas en qualité de ses héritiers. On n’eut point d’égard, au temps de l’Arrêt, à cette objection.


3

Depuis que le controle est devenu une charge tres-onéreuse, & qu’il exerce son empire sur les conventions les plus facrées dans l’ordre de la société, le payement de ce droit a excité des contestations entre la douairière & les héritiers du mari. Il est certain que la veuve doit les frais des lots à douaire, & quoique le douaire soit dû en vertu de la loi, & qu’il soit même limité à une certaine quotité des biens du mari, la femme n’en peut pouir qu’en vertu d’un partage auquel elle donne lieu, & qui est inutile aux héritiers.

La question a été appointée pour être fait reglement par Arrét du 18 Mars 1743 ; elle a été préjugée contre la veuve, par Arrêt du 3 Mars 1753, en refusant au tuteur de lui allouer les deux tiers du controle des lots à douaire.


4

La veuve n’est point chargée de la collocation des capitaux des rentes amorties, ce soin concerne les héritiers du mari ; si ce n’est que la veuve ne veuille accepter les deniers en donnant caution.Basnage .



6

( 4 ) il me semble que l’Arrêt du 13 Mars 168s est exact, on ne doit appliquer l’Article CCCXCVI qu’aux décharges de propres faites pendant le mariage, d’autant que l’on présume que le prix provient de l’économie mutuelle du mari & de la femme ; dans l’espèce de l’Arrét il ne se trouve du fait ni du mari, ni de la femme ; & jusqu’au moment de la mort du pere, la fille a été créancière de la dot sur ses biens.


7

La seconde femme ne doit, dans aucun cas, être obligée de contribuer, à raison de son douaire, au mariage des filles du premier lit, si ces filles demandent leur légitime comme du jour du déces du pere, le douaire de la seconde femme sera préférable, puisqu’il a une hypotheque antérieure, si elles l’exigent comme du jour du premier mériage, cette légitire, suivant l’Article CCCC de la Coutume, ne pourra pas diminuer le douaire de la secondfemme. Il ne faut pas, comme le ditBasnage , argumenter contre la seconde femme en faveur des filles de ce que leur droit étoit acquis avant le second mariage : car ciles n’ont pas un droit différent de celui des mâles, qui s’arrêtent à leur tiers coûtumier.


8

L’espèce de l’Arrét du 23 Décembre 1658, mérite d’être examinée : on convient que la femme n’a aucun droit de conquét sur un héritage retiré en vertu d’une faculté de rachat stipulée par un contrat antérieur au mariage ; le point de difficulté consiste à sçavoir si elle y aura douaire. Ie ne vois aucun motif de l’en priver : la faculté de rachat fait partie du fonds, elle produit une action immobiliaire qui ne se prescrit que par 40 ans. Le fonds étoit, il est vrai, aliéné avant le mariage, mais il ne l’étoit pas tellement, qu’en vertu de l’acte méme d’alienation le mari n’en pût recouvrer la propriété, si le mari étoit mort pendant la durée de la faculté de rachat, la femme auroit pu demander aux héritiers du mari de concourir au rachat, en remboursant sur le pied du douaire qu’elle y auroit pris ; elle doit donc y avoir le douaire à plus forte raison quand le mari l’a exercé pendant le mariage. Dans le pays de comiunauté le mari ou ses héritiers doivent, en ce cas, rembourser à la femme ou a ses héritiers, le mi-denier. Pourquoi lui enléverions, nous le douaire, lorsque notre Coûtume n’a aucune disposition précisément contraire ; Le remboursement auquel la femme & les enfans furent assujettis par l’Arrêt de 1658, n’a été ordonné que sur des circonstances particu-lieres du proces ; il paroissoit, sans doute, que le mari n’avoit fait ce rachat qu’aux dépens des créanciers de sa succession.


9

Plusieurs Coutumes disposent que la femme est saisie de plein droit de son douaire par. le décés de son mari, & que de ce jour les fruits lui en sont dus : Paris, CCLVI ; Poitou, CCLIV, Bourbonnois, CCXLVII ; Auvergne, Tit. 14. Art. X. D’autres Coûtumes distinguent le douaire préfix du douaire coutumier : elles veulent que le douaire coûtumier coure au profit de la femme du jour du déces du mari, mais que le douaire préfix n’ait lieu que du jour de la demande : Vitry, LXXXIX, Meaux, IX, Saint-Mihiel, Tit. 7, Article VIII, Sedan, CCVI, &c. En Normandie, le douaire coutumier & le douaire préfix ne commencent de courir que du jour que la veuve l’a demandé, si elle n’est dispensée de cette formalité par le contrat de mariage. Voyel Anjou, CCCXII ; Maine, CCCXXV. Renusson, au Douaire, Chap. 2, n. 4 & suiv.


10

L’Auteur du Traité de la Mort civile, Chap. 7, distinct. 2, traite cette question fameuse dans nos Livres : Si la mort civile du mari donne ouverture au doüaire. Il cite cette regle de Loysel : Iamais mari ne paya douaire ; & il entre ensuite dans la discussion des Arrêts qui ne sont pas favorables à son fystême ; il cite l’Arrét du 14 Août 1567, rapporté par Coquille dans ses Institutions au Droit François, & deux Arrêts extraits deBro -deau surLouet , C. Som. 28, n. 14 & 15. Ces décisions s’écartent de la regle de Loisel, l’Auteur veut qu’ils ayent eu lieu autrefois, mais que la Jurisprudence ait changé, & il se replie sur l’Annotateur d’Argou, qui n’accorde, pas même dans ce cas à la femme, aucune pension, ni aucune jouissance provisionnelle pour en tenir lieu. Quelques raisonnemens que M. Ii-cher emploie pour étayer cette opinion, il persuadera difficilement que la cause du fisc doive l’emporter sur le sort d’une femme innocente, déja assez malheureuse d’avoir eu un mari coupable.Renusson , Chap. 5, n. 42, dit que l’opinion du Palais la plus commune, est qu’une femme ne peut demander son douaire du vivant de son mari, & avant sa mort naturelle, mais seulement une pension ; il ajoute qu’il n’y auroit pas grand inconvenient de donner pouverture au douaire par la mort civile du mari, aussi-bien que par la mort naturelie, par la raison que le mari quitte tous ses biens par la mort civile comme par la mort naturelle, Notre Jurisprudence est conforme à la réflexion de M. de Renusson & à l’Article CCxxxV de la Coutume de Melun, qui porte, que le Douaire peut être demandé aprés la mort naturelle ou civile du mari.

Le douaire est au rang des dettes alimentaires : ainsi, dans le cas de contestation, la veuve peut demander une provision qu’elle obtiendra sans donner caution, quand le fonds du douaire n’est pas contredit : d’Argentré , sur Bretagne, Article CCCexXXIII, Gl. 2.

Si les immeubles du mari sont laisis réellement, la veuve peut même obtenir une provision sur les deniers de la régie, quand il est certain que, pour son douaire, elle sera colloquée a l’état utilement.

La veuve peut demander vingt-neuf années de son douaire préfix, de même que du coutumier, à moins qu’elle n’ait composé de son douaire avoc les héritiers du mari pour une somme de deniers constituée en rente hypotheque.


11

, du Douaire, Chap 10, pose plusieurs cas sur cette question : Si les immeubles du mari sont décrétés de Renusson vivant par des créanciers postérieurs au mariage, l’adjudication ne peut préjudicier au douaire de la femme & des enfans ; c’est le sentiment de du Moulin sur la Coûtume du Grand-Perche, Art. CXIx : Nonobstante quocumque lapsu temporis S nonobstunte decreto & subhassationibus interdum interpositis dummodo matrimonium sit publicum nec clandestirum. Ce qui fait dire àAuzanet , que le décret, qui est le seul remede donné par la Coûtume pour assurer les tiers-acquereurs ne purge point le doüaire pendant la vie du pere, d’autant que le poursuivant criées & l’adjudicataire n’ont pu ignorer la condition de celui dont les biens étoient décrétés, & que le douaire n’étoit ouvert que par la mort naturelle du mari ; mais quand le décret est entrepris par des créan-ciers antérieurs la femme ni les enfans n’ont pas droit d’en interjetter appel, mais ils peuvent demander aux créanciers postérieurs au douaire le rapport des sommes qu’ils ont touchées, jusqu’à la concurrence du douaire, & c’est la commune opinion. Il en est autrement du décret fait aprés la mort du mari, lorsque les créanciers ont une hypotheque posté-rieure au douaire, la veuve & les enfans peuvent s’opposer en distraction, ou demander que l’adjudication soit faite à la charge du douaire ; c’est l’Arrêt de Vernaucour du a2 Décembre 1601. Mais si la femme ni les enfans ne s’opposent point au décret, comme le douaire est ouvert par la mort du mari, quand même les enfans seroient mineurs, le douaire est purgé par le décret. Il me semble que Basnage n’a pas expliqué aussi clairement la Jurisprudence du Parlement de Paris. Nos principes sont différens ; il y a parmi nous ouverture au douaire & au tiers coutumier des enfans par le décret des biens du mari, comme par sa mort naturelle ; l’opposition en distraction est recue même contre les créanciers antérieurs au douaire, en payant, par la veuve, le tiers des dertes, & en donnant caution que les deux autres tiers seront payés en exemption de tous frais : la femme, jusqu’au moment oû elle n’a point rempli ces deux conditions, est susceptible des frais du décret ; mais si les créanciers sont postérieurs, les frais ne sont pas à la charge de la donaitiere : on a même jugé, par Arrêt du 1a Juillet 1688, que la veuve ne devoit aucuns frais d’un décret entrepris par des créanciers de cette especc, quoiqu’il y eût un créancier antérieur opposant. Cet Arrêt ne passa pas tout d’une voix ; & comme tout opposant est décrétant, il paroissoit juste que la veuve eût du moins contribué aux frais occasionnés par l’opposition.


12

Un tiers-détenteur déguerpissant le fonds sujet au douaire, ne restitue les fruits percus que depuis que la sommation en douaire de la veuve lui a été notifié :, il possédoit auparavant de bonne foi. Renusson


13

Dans la plupart des Coutumes, les fruits excrus sur les fonds du donaire n’appartiennent aux héritiers de la douairière que quand ils sont séparés du sol au temps de sa mort : en Normandie ces héritiers gagnent les fruits en proportion de la jouissance de l’année, quand même la douairiere viendroit à décé der avant qu’ils fussent amobilies. Le douaire ne doit pas être considéré comme tout autre usufruit ; il est accordé à la femme pour soutenir de rang de son mari, pour ses alimens & son entretien : or les alimens étant dus chaque jour, elle doit avoir les fruits de l’année où elle décede, en proportion du temps qu’elle a vécu, elle les transmet donc à ses héritiers.


14

Berault compare le mari jouissant à droit de viduité, à l’acquereur pendant l’an du retrait, c’est le comparer à un propriétaire : quelques Coûtumes admettent le partage des fruits industriés la dernière année sur les fonds de la femme entre le mari & les héritiers de la femme, en contribuant entr’eux aux frais nécessaires pour la récolte.


15

L’usage atiesté par l’Article CCCLXIx, est fort ancien, on le trouve dansMarculphe , Liv. 2, Formule 15. Donat igitur ille hunestaee puelle nurui sue illi, sponsa filii sui illus ante diem nuptiarum, donationisque animo transfert, & transcribit hoc est in tanto dono villam nuneupatum illum, Sc. Le scavantBignon , surMarculphe , ajoute : Libellus dotis est quo pater sponsi sponse dotent constituit.Littleton , Liv. 1, Chap. s, of Douer, sect. 47, page 3s, édition de 1833, cum notis EdouardiCook , établit la même Jurisprudence, à l’exception néanmoins que la femme avoit des lors cessé de jouir de son Douaire en propriété comme elle faisoit sous la première race de nos Rois, & qu’il n’étoit pas nécesiaire que le pere constituât lui-même le Douaire. On jugera mieux deLittleton , par la traduction qui en n été faite par l’Auteur des anciennes Loix des François : n Le Doüaire ea assonsu patris est n celui qu’un fils accorde à sa femme sur les biens de son pere auquel il doit succéder : le n fils en ayant déterminé la valeur du consentement de son pere, sa femme jouit aprés sa n mort de la portion de bien qui lui a été assignée sans aucune formalité judiciaire ; mais il n faut observer que la femme doit à cet effet avoir un acte en bonne forme, qui constate le n consentement du pere, suivant l’Edit d’Edouard III, fol. 45. L’Auteur remarque fort judicieusement que l’usage de l’écriture étoit autrefois fort rare, ce qui occasionnoit des con-testations qu’EdouardIII, dans un siecle moins reculé, fit cesser par l’Ordonnance dont parle Littleton on étoit auparavant obligé de constater la promesse du Douaire ex assensu putris aparle record, & Cook assure avoir vu plusieurs formules de ce record : nouvelle preuve de l’antiquité de l’usage, vous trouvez à peu pres la même décision dans la Loi regiam majestutent, Lib. 2. Ch. 16. Art. 73. 75 & 76. Enfin l’ancien Coutumier, Chap. 1o1, contient, de la maniere la plus précise, les Art. CCOLXIx & CCCIXx de la Coûtume réformée : n Et se le mari n n’étoit de rien faisi quand il épousa, & que son pere & son ael tenoit encore le Fief ; s’ils n furent présens au mariage, ou le pourchasserent ou confentirent, la femme aura aprés la n mort de son mari le tiers du Fief que le pere ou ael de son mari tenoit au temps que le n mariage fut fait, s’ils n’avoient autres hoirs, & s’ils avoient autres, elle aura son Douaire n de la partie qui succederoit à son mari s’il vivoit, si le pere ou ael ne s’accorderent pas n au mariage, ains le blasmerent, elle n’emportera aprés la mort de son mari point de n Douaire, &c. Les Réformateurs ont ajouté que nonobstant le consentement du pere, la femme n’aura point de Douaire sur les acquêts que le pere auroit faits, ni sur les successions qui lui seroient échues apres la mort de son fils.

La signature du pere au Contrat de mariage de son fils assujettit les biens de la mere, quoique civilement separée, au Douaire de sa belle-fille, lorsque la mere même n’y a pas signé, sur le fondement que la séparation de la femme ne la tire pas de la tutelle de son mari ; que la signature du mari suffit pour toute la famille, & engage les biens de la femiie dans les cade droit, comme la signature du tuteur engage les biens du pupille : Arrêt du 17 Novembre 169y, sur les Conclusions de M. le Guerchois. Anjou, Art. CCLXIIl ; Poitou, CCLx ; duPineau -

Quelques Coutumes accordent à la femme du fils une provision comme de mi-Douaire sur les biens des ascendans qui survivent son mari & de leur vivant ; mais comme notre Coutume n’en parle point, cette clause est l’objet de la prudence des contractans.


16

La Coûtume réformée, en étendant le douaire sur les acquêts que le pere auroit faits depuis le mariage, mais pendant la vie de son fils, a donné matière a une discussion si difficile, que le Parlement de Rouen erut devoir en renvoyer le jugement au Roi. Godefroy avoit apperçu l’embarras qui devoit naître ; cet Auteur ne comprenoit point que la femme, pût avoir douaire sur les acquêts de son beau-pere, & que ce même beau-pere ne pût aliéner ses fonds au préjudice du douaire de sa bru. De-là, sans doute, est née la difficuité de sçavoir, si la femme pouvoit demander son douaire, dans le cas ou son mari avoit hétité de son pere, sur les biens du pere, qui auroit assisté ou consenti au mariage, cu égard à leur état lors du mariage, & par hypotheque de ce jour, au préjudice des créanciers posterieurs au contrat de mariage, ou si elle aura seulement son douaire réduit au tiers de la part héréditaire de son beau pere, considérée en l’état qu’elle est quand sa succession échet. Le Roi, par Arrêt du Conseil du 30 Août 168y7, muni de Lettres-Patentes enrégistrées, a décidé en faveur de la premiere opinion : & on ne doute pas maintenant que la veuve ne puisse, dans le cas de l’Article CCCLxiz, demander son douaire sur les biens de son beau-pere, à l’hypotheque de son contrat de mariage.


17

Comme le cautionnement de la dot, fait par le pere au bénéfice de sa belle-fille, affecte la part de ses autres enfans, de même que celle du cautionné aprés la discussion de ses biens, il faut que le cautionnement soit exprimé en termes formels ; mais le beau-pere, par la réception des deniers dotaux de sa bru, engage également à leur restitution toute sa succession au préjudice de ses autres enfans. Bien des Auteurs étrangers n’étendent pas aussi loin que nous l’effet du cautionnement du pere, le cautionnement du pere, en mariant son fils, n’a point d’autre cause que son mariage : une grace personnelle ne doit point s’étendre audela de la portion héréditaire du fils : on oppose en vain que la femme doit être considérée comme une étrangere par rapport à la famille du cautionné. On répond qu’elle n’a point été la première dane l’intention de la caution, & que le pere envisageoit principalement son fils.


18

Quand il s’agit de déterminer le rang que la dot & le douaire doivent tenir sur les biens du mari, le premier principe est, que le douaire marche avant la dot, si la dot n’est pas reconnuë. On convient encore que quand la femme demande sa dot & son douaire aux héritiers du mari, la dot est préférable au douaire ; mais lorsque la discussion est entre les créanciers du mari, la femme peut lever son douaire avant sa dot, ou sa dot avant son douaire, l’alternative est à son choix ; il y a cependant un cas où la faculté de choisir n’a point lieu, c’est lorsqu’un étranger a cautionré la dot de la femme : car alors le créancier peut forcer la femme de faire colloquer sa dot avant son douaire.Basnage , Traité des Hyporheques, Chap. 13.

Basnage traite, sous cet Article, des intérets pour le refus d’accomplir les promesses de mariage. Le changement de volonté dans un garcon fait toujours quelque tort à une fille, sa vertu est ine tendre fleur dont le moindre souffle ternit l’éclat ; ainsi quand elle a contracté des promesses solemnelles avec une personne capable, tous les présens qui lui ont été faits cedent à son profit, & on lui adjuge des intérêts qui sont arbitraires ; mais la légereté de l’Affidée n’est punie que de la restitution des arthes, si ce n’est qu’elle ne soit accompagnée de circonstances qui blessent la réputation de l’Affidé : Arrét du 11 Juillet 1737.

Les circonstances déterminent donc la décision : il ne seroit pas juste qu’un jeune homme allicié par les caresses de toute une famille, se vit, apres de longues assiduités, toujours dispendieuses, impunément le jouet du caprice & de la bizatrerie de cette même famille ; aussi nous avons des Arrêts récens qui ont adjugé, selon les circonstances des intéréts au garcon plus ou moins confidérables. Par Arret du 25 Juillet 1vos, le sieur de Boctey, la Demoiselle la Reille son épouse, & le sieur Magloire de la Reille, ont été condamnés en ao0co liv. d’intérets au profit de M. Hennebert, Avocat. Cet Avocat & la Demoiselle de la Reille avoient, du consentement du sieur Magloire de la Reille, fait nne promesse réciproque de contracter mariage aprés que le sieur Hennebert se seroit fait pourvoir d’un Office de Judicature à Bayeux. Le pere & la fille changerent de volonté. sans aueun motif raisonnable ; & la Demoiselle de la Reille au mépris de son engagement, épousa le sieur de Bectey. Le premier Juge avoit accordé 2coo liv, d’intéréts au sieur Hennebert ; la Cour, par l’Arrét, confirma la Senterce. Dans le fait, avant cette promesse, cet Avocat avoit, à Paris, une position avartageuse, & il avoit déboursé une somme assez considérable pour le prix d’un Office qui Peloignoit du siége de ses affaires, ou plutût qui le forçoit de les abandonner.

La condamnation en des intérées prononcée pour le non accon plissement du mariage, n’est point purgée quand celui qui a épousé une autre femme, devenu veuf, offre d’épouser celle qui a éé le premier objet de ses recherches : Arrét du 12 Décembre 1o86. On ne présune pas qu’un homme, aprés avoir trahi la foi promise, soit dans la suite susceprible d’une véritable tendresse : on doit penser qu’il ne se présente que dans la vue de se soustraire à une condamnation d’intére s

Si les Affidés ont négligé, pendant plusieurs années l’effet de leur promesse, il n’y a pas lieu d’accorder à l’un d’eux des intéréts, ou l’on doit les borner à l’indemnité des dépenses : Arrét du ro Mai 1726.

Les promesses de mariage, avec stipulation d’intéret, ne font point fortune, on ne parvient pas à un Sacrement par des vues mercénaires. sn ne peut exiger le prix du dédit per le défaut de célébration de mariage : Arrét du ad Juillet 1673. Duval, de reb. dub Fraci. Louet 13sBacquet , des Droits de Justice, Chap. 21, n. 229 ; Loüet, M. 24. On a suivi en purs termes l’opinion de Bacquet en déclarant un dédit stipulé dans une promesse de rariage, nul, comme une paction qui combat les bonnes moetrs, dans un Arrét du : I Ianvier 1704. Il est réservé a la prudence du Juge de convertir une portion du prix du dédit en dommages & intérêts, ou de l’adjuger en entier s’il n’est pas excestif.

Quoique l’obligation concue pour desintéressement de promesse de mariage non accemplie, puisse être valable, si elle ne contient pas une somme excessive, quand elle a été faite par un majeur libusssde contracter mariage il n’en est cas de même de celle qui auroit, en pareil cas, été consentie par un fils de famille étant sous la puissance paternelle, parce que ce fils de famille qui n’a pas la faculté de se marier sans le consentement de son pere, ne doit pas d’intérét par le défaut d’accomplissement d’une promesse qu’il ne lui étoit pas possible de remplir au temps qu’il l’a faite : Arrét du Parlement de Roüen du ad Avril 1673, rapporté dans le Journal du Palais ; dans le fait, celui qui avoit consenti l’obligation étoit alors âgé de plus de 20 ans, mais son pere vivoit ; il étoit demandeur en restitution de l’obligation 16 ans aprés sa dare, &Basnage , son Avocat, soutenoit que l’obligation étoit eontraire aux Loix & aux Ordonnances.


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Le mari, ditRenusson , du Douaire, Chap. 4, peut, par la Coutume de Paris, constituer Douaire préfix à sa femme plus grand que le coutumier ; le Douaire préfix, dit-il, dépend des personnes qui se matient, les Contrats de mariage étant susceptibles de toutes conventions qui ne sont point contraires aux bonnes moeurs & au droit public. Pour nous, qui défendons au mari de faire aucune donation d’immeubles à sa femme, nous suivons littéralement la constitution de Iean, Roi d’Angleterre, adsignetur vidaeae pro dote sua tertia pars totius terre nariti sui que sua fuit in vitâ nisi de minori dotata sit ad ustium Ecclesia, ainsi le Douaire préfix peut bien être au-dessous du coûtumier, mais il ne peut jamais l’excéder, les Loix de Maleolin Il, décident positivement que le Douaire conventionnel, au dela du tiers, ne peut subsister ; mais qu’il doit être réduit au tiers, sed mensurabitur ad tertiam partem, tulle est la Jurisprudence proposée dans cet Article.

On a été tellement convaincu au Parlement de Paris que le Statut concernant le Douaire, est en Normandie un Statut réel, que l’on a jugé que le Douaire sur les biens de Normandie étoit réductible au tiers, quoique les conjoints demeurassent à Paris, par l’Arrêt de Glachant du 3o Décembre 169s ; Mémoire deFroland , concernant la nature & la qualité des Statuts, tome 1 ; parcil Arrêt du même Parlement du 23 lanvier 17oy, cinquieme Volume du Journal des Audiences M.Bouhier , Chap. 5. n. 136 & suiv. combat le principe de la réalité du Statut sur le Douaire coûtumier ou prefix : il prend pour exemple nôtre Coutume comme la plus prohibitive de toutes, & il dit que le Statut concernant le Douaire n’est pas plus prohibitif que ceux qui excluent la Communauté entre conjoints, & qui n’empéchent pas que des personnes mariées, suirant la Coutume de Paris, ayent, dans les conquêts faits en Normandie, la même part que s’ils avoient été faits dans la Coutume de Paris : M. Bouhier se trompe certainement ; mais quand son raisonnement seroit vrai, le Statut concernant le Douaire ne seroit pas moins réel : car suivant M.Bouhier , Chap. 30, le Statut, sur le partage des Succestions réelles, est une Loi inviolable pour les Etrangers comme pour les Habitans de la Province. Pourquoi la Loi n’auroit-elle pas un empire aussi grand sur le Douaire que sur les Successions ; Une délibération faite le 10 Mai 1714, dans l’assemblée. tenue à la Bibliotheque des Avocats du Parlement de Paris, établit la réalité du Statut pour le Douaire préfix ; car aprés avoir dit que le Douaire préfix d’une somme ou d’une rente à prendre sur tous les biens, se leve & s’exéeute per voic d’hypotheque, comme toute autre créance sur toës les biens du mari, on ajoute n à la réserve de ceux qui étoient situés sous n des Coûtumes qui ne vouloient pas que le Douaire préfix excédat le coutumier, n comme celles de Normandie, Anjou, Poitou, Touraine, Auxerre, Bretagne, Nivern nois, &c. dans lesquelles on ne pouvoit se pourvoir que jusqu’à la concurrence de la por-n tion des biens qu’elles avoient déterminée pour le couûtumier.Froland , Part. première, Chap. 9.

Bérault est d’avis que les héritiers du mari doivent intenter, dans les dix ans de son déees, l’action en teduction du Douaire excessif : car il est question d’un usufruit réputé immeuble.

Basnage décide que le temps de dix ans, pour se pourvoir en Lettres de rescision, ne court que du jour de la demande de la veuve ; parce qu’on ne peut reprocher aux héritiers du mari leur filence, si ce n’est qu’elle n’eût pris possession de ses lériteges. La Glose sur le Chap. io1 de l’ancienne Coûtume, dit aussi qu’il suffit de contredire le Doüaire en tantail est excessif, quand la veuve le prétend.


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Cette disposition coutumiere, qui décharge le mari de l’action récursoire du plege, est contraire au droit commun, & avoit conséquemment besoin d’une expression speciale, haberet fidejussor contra maritum mandati adtionem, & ita maritus per indiredum teneretur ultra modum à lege prescriptum.Bérault .


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La distinction entre les exceptions personnelles & réelles qui concernent le prineipal obligé, n’est pas toujours facile à saisir. Consulter le Traité des Hypotheques deBasnage , & le Traité des Obligations de M.Potier .


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Bérault allégue un Arré : du 13 Mai 1551, par lequel le pere du mari a été condamné à faire valoir pendant sa vie le Douaire de sa bru, quoiqu’excessif ; fauf, aprés ledé-ces du mari, à ses l. éritiers à intenter contre la veuve l’action en réduction du Douaire : le pere alléguoit qu’il n’avoit qu’un modique revenu nécessaire pour vivre & faire subsister ses autres enfans. L’Auteir cite dans la mênre cspiere un autre Arrêt, suns dête, contre la mert du mari. Il faut donc que les pere & mere justifient de leur impuissance, car souvent ils m l’allégueroient qu’à la sollicitation de leurs autres enfans, par caprice ou par esprit de cupidius.


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Rien n’est plus précis sur notre Article que la Loi Regiam majestatem. Quia minus ternâ parte y’est-il disposé, tenementi sui potest quis dare in dotem plus autent non, & pour prouver qu’il est question du Douaire, il est ajonté plus bas : Notundum est etium quod proprietas hereditatis non remanebit mulieri in assignatione dotis.

Godefroy pense que la veuve ne peut se pourvoir contre les lors en Douaire, que quand 1Iy a lezion d’outre moitié, on peut dire que si la veuve, sans faire de lots, à composé sur sun Douaire avec ses enfans, la composition passe facilement pour une remise, si d’ailleurs la mere est riche ; mais il seroit bien rigoureux d’exclure la femme de la restitution dans le cas d’une lezion énorme contre des héritiers collatéraux, de quelque manière qu’elle ait pris son Douaire.

La femme peut renoncer à son Douaire en faveur de ses enfans, au préjudice de ses Créanciers, par argument de l’Article LXXVII du Réalement de 16b8, mais lorique, par amitié. pour son fils une mère a fait remise de la jouissance de son douaire, & qu’il l’a prédécedée, il est équitable qu’elle en jouisse comme auparavant la remise, autre chose seroit si elle avoit cédé simplement droit d’usufruit à fils ;Renusson , du Douaire, Chap. 12, n. 25.

Quelques inviolables que soient les conventions matrimoniales, si dans un Contrat de mnriage il y a quelques clauses obseures, qui ont besoin d’être reduites à leur sens naturel, tien n’empéche de faire cette interprétation pendant le mariage, loin d’affoiblir ainsi les conventions, on les corrobore ; c’est ainsi qu’il faut entendreLouet , cité par l’Auteur.


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La veuve, suivant l’opinion commune, doit agir dans l’an de la jouissance contre les hérit. ers du mari, pour les obliger a faire les réparations sur les batimens dépendans de son Douaire ; fa négligence fait présumer qu’elle les a trouvés en bon état, & aprés son déces ses héritiers pourroient être assujettis à toutes les réparations indistinctement : Arrét du 19 Août 1SGI, cité par Basnage Cependant la présomption pourra-t-elle l’emporter sur des preuves de faits bien circonstanciés La veuve, avant d’entrer en jouissance, doit, pour se mettre à couvert, faire dresser un Proces-verbal & description de l’état des lieux en présence des héritiers du mari, & il y faut faire mention non seulement des réparations qui sont nécessaires, mais même de l’état & de la durée des matériaux qui peuvent encore subsister, d’autant que c’est une regle générale que les héritiers de la veuve doivent rendre les Edifices de la même maniere qu’ils étoientur temps que la veuve a commencé de jouir.

Mais les héritiers du mari ne sont point tenus de relever les Edifices tombés par vieillesse & casucité, ou péris par le feu, ou un tremblement de terre, soit avant ou depuis l’ouverture du Douaire, d’autint que si la décadence survient pendant le mariage la femme n’a aucu lieu de s’en plaindre, & qu’elle ne peut reprocher aucune faute aux heritiers du man leBrun , des Successions, Liv. 2, Chap. 5, Dist. 2, n. 37 ;Duplessis , du Douaire ;Terrien , ibiI. Cepen lant si le Douaire consiste dans un Corps de ferme, la veuve jouira des batimens en contribuant aux impenses de la réédification, d’autant que ces batimens font partie de la ferme : elle auroit méme, dans cette circonstance action contre les héritiers du mari.

Les réparations qui sont à la charge de la douairiere, consistent dans l’entretien des clûtures, couvertures, portes, planchers, fenêtres & autres réparitions de cette espèce ; le pro-priétaire doit soutenir les fondemens, les murs, les poutres ou fommiers, chevrons, & autres choses qui excedent la durée de la vie ordinaire des hommes.

Les héritiers du mari & la Douairiere ont chacun en droit soi une action pour faire faire les réparations qui sont à leur charge, d’autant que le défaut des réparations viageres, de même que celles de rétablissement, peuvent entrainer la perte totale de l’Edifice. De-là il arrive fouvent que la veuve est tenue des grosses réparations, pour avoir négligé les répara-tions viageres, & que l’héritier du mari est susceptible des réparations d’entretenement, pour n’avoir pas fait à propos celles de rétablissement.

La femme peut faire servir le bois déraciné par les vents sur les fonds du Douaire, en justifiant de l’emoloi ; le bois mort lui appartient, à la charge de substituer de nouvelles plantations. Bérault ; Loix civiles, Liv. 1, Tit. 11, Section rreLa question, si le propriétaire peut faire couper le bois de haute-fûtaie compris au lot de la Doüairiere, est bien déci lée parBasnage , dans la liberté indéfinie que Bérault donne aux propriétaires d’abattre en dedommageant la Douairière ; il n’y a pas lieu de comprendre les bois de décoration qui font un des agrémens d’une terre, ni ceux qui mettent les batiniens à couvert de la tourmente & de l’impétuosité des vents : Arrêt du 13 Décembre 1656.

Basnage reconnoit en cet endroit qu’il y a des cas où les héritiers du mari peuvent forcer la Douairière de leur donner caution. Par l’Arrêt du 12 Février 1837 qu’il cite, une veuve fut condamnée de donner caution à son fils de l’exercice d’une Sergenterie pour la part qu’elle y avoit en Douaire.

La Douairière doit être privée, dans la rigneur des principes, de son Douaire, si elle en abuise & commet des dégradations & malversations, & elle est condamnable aux intérêts du propriétaire ; c’est encore le cas d’exiger d’elle caution, si on ne la dépossede point. L’Article CCCCLXVIII de la Coutume de Bretagne dispose que si la veuve mésuse de son Douaire, elle en jouira par les mains de l’héritier en payant les intérets ; c’est aussi le sentiment deBasnage .

Les héritiers du mari sont obligés d’entretenir les baux faits par la Douairiere, comme des actes d’administration, ainsi disposent plusieurs Coûtumes du Roy ume. L’incertitude de la durée d’un bail mettroit la Douairière dans l’impossibilité de se procurer des Fermiers ; cependant quand il y a une lezion evidente dans le prix des baux, & S’il est just fic que la veuve-ait requ un pot de vin considérable, ces circonstances, qui déccient la fraude, portent quelquefois à prononcer aprés son déces la resolution du bail : Arrêt, au rappoit de M. l’Abbé de Gravigny, du 4 Seprembre 1226.

Les héritiers du mari peuvent, aprés la mort de la Douairiere, poursaière directement son Fermier en dégradation, & le faire condamner en des dommages & int érêts ; ils ne sont point-tenus d’attaquer les héritiers de la Dou-itière, & le Fermier leur opposeroit envain qu’il n’a point contracté avec eux. Le bien public defire qu’un Fermier soit comptable envers les maîtres du fonds, de la manière dont il s’est conduit par rapport à la propriété : Arrêt du 27 lanvier 1758.


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L’ordre desmatiores place sous ces Articles les questions d’adulteres : ce crime derc : : femme est tres énorme, outre la perfidie insigne dont la femme adultère se rend coupable, étant d’un rang élevé elle s’expose à altérer la pureté d’un sang illustre, en insérant dans une famille des fruits étrangers d’une tige ignoble. Plaidoyers de Patru.

Le mari seul est le vengeur du lit nuptial : Arrét du mois d’Octobre 16zo ; mais dans le cas de complicité, le ministere publie peut s’émouvoir pour le maintien des moeurs :Brodeau , surLouet , l. 4.Basnage .

Le mari doit prendre garde de diffamer sa femme en publiant des monitoires : Arrêt du 21 Fevrier1’7o, cité par Basnage ; Arrét du Parlement de Paris, du 17 Décembre 17os, rendu sur les Conclusions de M. l’Avocat-Général Portail. La précaution est difficile, puisqu’il faut circonstancier un commerce illicite.

Les Fribanaux dans les Jugemens ne doivent aux indices que le crédit qu’ils méritent dans l’ordre des preuves ; des démarches qui tiennent plus à la galanterie qu’au désordre ne suffisent pas pour faire prononcer la condamnation d’une femme aimable, parce qu’un vieux mari la demande dans les acces de sa jalousie ; mais il y a un fait contre lequel on ne recoit point la justification quand il est avéré, testes firmiter asserentes solum cum sula nudum cum nuda in eudem lecto jucentem..... viderunt extra de presumpt. Cap. Litt.

Tout le monde sçait la peine que la Loi inflige à la femme convaincue d’adultere, la privation le son douaire, la déchéance de ses conventions, la confiscation de sa dot au profit de ses eifans ou de son mari, la retrusion dans un Monastere ou dans un Hopital suivant sa fortune ; ces peines sont prononcées par l’autentique sed hodiè Cod. ad legem luliam de adulter.

Ce crime peut cependant être efface par une transaction dont on n’induit point la complicité du mari, la transaction fait la Loi des Parties : Arrêt du 8 de Mars 1678, cité par Bainage.

Si le mari remet entièrement l’outrage, son indulgence impose silence aux héritiers, lorsque la femme demande son Doüaire : Arrêt du s’Avril 1660.

Si le mari ne s’est pas plaint pendant sa vie de l’inconduite de sa femme, s’il n’a point formé contre elle l’accusation d’adultere, comme lui seul est le vengeur des outrages faits au lit nuprial, on impose silence à ses héritiers, & on ne leur permet pas même de proposer l’adultere par exception ; ce seroit compromettre & exposer l’honneur & les biens d’une femme aux caprices des héritiers du mari ; l’espérance du gain, la vengeance & l’animosité, sur-tout contre une belle-mere, éclateroient par des scenes scandaleuses plus propres à corrompre les moeurs publiques, qu’à appaiser les manes d’un mari. On lit cependant dans les Arrêtés de Lamoignon, Art. XLVIII que l’accusation d’adultere com-mencée & non abandonnée par le mari, peut être continuée par ses héritiers aprés sa mort, pour faire priver la veuve de son Douaire & de ses conventions matrimoniales, encore que le crime soit demeuré éteint par le déces du mari. Il me semble qu’alors les héritiers du mari ne sont pas en droit de couclure à la perte de la dot.


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Autrefois les peines, prononcées contre les secondes noces, subsistoient dans toute la France, nous en avons des preuves dans les Dispenses accordées, par nos Rois, à quel ques veuves pour se remarier avant la fin de l’année du deuil ; il y en a une de l’an 131. dans le Trésor des Chartes Régistre 53, piece 223. Maintenant on ne fuit point dans le pays coutumier la rigueur des Loix s’il n’y a des circonstances qui y déterminent : Arret du ro Juillet 188a, sur les Conclusions de M. Talon.

Quoique l’on ne prive point de son Douaire la femme qui se remarie dans l’an di deuil, quand ce second engagement n’a aucuus caracteres répréhensibles, elle n’est pas recevable a demander des habits de deuil, apres avoir formé de nouveaux neuds, ni leur estimation.

L’Article CLXxxIl de l’Ordonnance de Henri III, aux Etats de Biois de l’an 1579, déclare nuls les dons & avantages que les veuves, qui se remarient follement à des personnes indignes de leur condition, ou à leurs valets, pourroient faire à des seconds maris de cette espèce, sous prétexte de donation, vente ou communauté ; les Arrêtés de Lamoignon, Art.

XXII, des Donations, sont concus sur la nullité des avantages dans les termes de l’Ordonnance de Blois, la Coutume de Bretagne : joute aux dispositions de l’Ordonnance la privation du Doüaire, en haine d’une pareille conjonction qui déshonore la mémoire du mari & sa famille ; l’Ordonnance de 1829, Art. CXLV, prive aussi en pareil cas les femmes du Douaire acquis par leur premier mariage. On excepte de cette rigueur les veuves des Artisans, des Paysans, & même des Marchands qui se remarient avec leurs valets & domestiques, autrement cela empécheroit des mariages convenables & avantageux aux enfans du premier lit.

La supposition de part est un grand crime : la femme en ce cas a été déclarée déchue du Douaire, par Arrêt du S Juin 1636, cité parAuzanet . On doit la punir plus sévérement.

La retraite de la femme du domicile de son mari, sans un juste motif, devroit attirer les mêmes condamnations que l’adultere, quand, sur les poursuites de son mari, elle persévere dans ce divorce de fait ; c’est la décision textuelle des Novelles 22 & 117, & de Cujas sur l’une de ces Novelles. Le principe de la décision est simple : si le dereglement ne fait pas une preuve complette de la débauche contre une femme, il forme un soupeon tres-violent ; il est de l’intérét du mari qu’elle ne donne pas sujet de la croire criminelle. Le Chapître Flerumque, aux Décrétales de donat. int. vir. & uxor. est conforme au droit de Justinien ; c’est en effet un crime contre la Religion de se soustraire à des devoirs qui sont les suites d’un Sacrement la raison concerte avec les Loix : car comment une femme peut-elle invoquer un Contrat dont elle a méprise les engagemens àLa Jurisprudence étend sa rigueur jusques sur les femmes sparées ; Arrét du Parlement de Paris, au profit du Sieur de Clermont, contre la Dame sa femme ; Arrét au profit de Torinon Notaire, rapporté parErard , Plaidoyer Te, Coutume de Bretagne, Art. CCCCII, d’ Argentré ; Arrêtés de Lamoignon, Art. XVII, du Douaire :Basnage .

D’Argentré sur Bretagne, Art. CCCexxz, dit que pour accorder Donaire au lieudu temps du déceeil falloit substituer celui de la maladie, quin potius, au temps de la maladie, Aoc enim solum Ipectat consuetudo ut conquireret medicos, adhiberet remedia, assideret decumbenti, solaretur S ; necessaria minisiraret. La reflection de d’Argentré est tres-juste, & Basnage compare ces fem-mes, qui se présentent à l’instant du déces au lit du mari, à ces oiseaux affamés ; qui attendent leur proie.

L’Auteur du lournal du Palais rapporte un Arrêt du ao lanvier 16yz, rendu sur les conclusions de M. L’avocat : Général Talon, par lequel une femme ayant quitté son mari par legereté, sans l’avoir méine assisté à la mort a été privée de prendre part aprés son déeës en la communauté. L’Auteur remarque que si la femme doit en ce cas perdre son Douaire, elle doit a plus forte raison perdre sa part en la communauté. Le Doüaire est une libéralite qui passe à la femme à titre lucratif ; mais le droit de la communauté né s’acquiert qu’à titre onéreux, c’est le prix de la mutuelie collaboration : illa quidim sucietas, dit Papon, titulus lucrativus non est, sed maxis onerosas nam etsi uxaris proprium non sit que stus aut aliuquin lucrum facere, teni n adejes industriam pertinet quesita conservare, idque. plerumque plus sucietati confert quant ipra pecunta, que enim corpôres vite consortin renunciaverit hunesi ori, ditChopin , ea malto magis accedentem huic fortunarum societatent. creditur repudiasse.


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Le consentement que la femme auroit p donner à l’aliénation des, fonds sujets à son Douaire, ne peut la préjudicier ; en renoneent à la siccession de son mari, & en prenant des Lettres de restitution contre son consentemeit elle pourra poursuivre les acquereurs : Arrêts des 21 Mai 1519, 24 lanvier 155. S Juillet 15y, cité parBérault , si elle ne peut avoir de remplacement sur les autres biens de son mari.

Suivant l’Article CLXVI, des Etabl’sse nens de S. Louis, la femme, qui avoit consenti à l’aliénation d’un fonds assigné pour son Doutire aver serment d’entretenir le marché, & qui avoit accepté des fonds de son muri en échange, ne nouoit inquiêter les acquereurs ; quelques Coûtumes ont abusé de cette décisio pour dén-uiler, sur ce consentement, la veuve de son Douaire, en lui ôtant la récompense sur les autres biens de son mari, ou le recours sutles tiers-détenteurs en cas d’insolvabilité. ; ore3l Article CeCelxx de la Coûtume de Bretagne doctement combattu par M. d’Argentré &DuPineau , & le l’évre, sur l’Art. CCCVI d’Anjou.

Ces deux derniers Auteuts, cités par Lauriere sur l’Article CLXVI des Etablissemens de S.

Louis, décident que la femme, qui a renoncé dans le Cotrat de vente a son Douaire sur les biens aliénés par son mari, conserve son recours sur ses autres biens, parce que par sa renonciation elle travaille seulement à la Sûreté de l’Acquereur, elle ne promet rien à son mari, elle n’abandonne pas son recours ; mais si elle renonce en faveur des mari expressément, elle ne pourra, suivant eux, prétendre aucune récompense pour son Douaire, il n’y ; pas plus de sens commun dans l’opinion de DuPineau & de leFevre , que dans l’Article CCCCLXx de Bretagne qui a passé contre l’avis de d’Argentré .

Par Arrêt du ay Juillet 158s, on adjugea Douaire à la veuve sur des maisons venduës par le mari suivant le prix qu’elles auroient valu lors de l’Arrét, si elles eussent été au ménne ét at qu’elles étoient lors du Contrat d’aliénation,Bérault . Il ne seroit pas juste en estet que la veuve profitât gratuitement des améliorations de l’acquercur.

Le frère ainé ne peut, au préjudice du Douaire de sa femme, céder un fonds à ses puinés au lieu de la provision à vie : Arrét du S Mars 1003.Bérault .


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Il peut n’aître sur l’interprétation de cet Article une question assez sérieuse, occasionnée par l’absence d’un frère du mari : une espèce la rendra ples sensible. Supposes trois fre-res, le plus jeune s’absente en 173o, en 1735 décede le frère ainé, lequel laisse une maison de conquet en Bourgage, le second frère lui succede ; en 1745 il se marie du consentement de sa mere : en 17a9 il transige avec la veuve de son frère ainé, au moyen d’une rente de la totalité de la maison : la transaction est faite tant en son nom, qu’en celui de son frere absent, le pere commun étoit mort en 173s comme le frère ainé : le second frère qui étoit saisi de la succession du pere & du freère meurt en 1752, & laisse deux filles mineures. Sa mere vit jusqu’en 1758, sa veuve demande Douaire sur les biens de son mari, comme s’il n’eût jamais eu de frères ; le tuteur lui offre Douaire sur la moitié, la veuve répond que l’incertitude de l’existance de l’absent, n’avoit eu d’autre effet, que d’empécher son mari d’aliéner sa portion héréditaire, qu’en 1vAs, date de son mariâ ge, la préfomption de sa mort avoit acquis un nouveau degré de force, que la Clause employée en 17ay, n’étoit qu’une clause de précaution en faveur de la veuve du frère décédé en 1735. & qu’elle ne levoit pas le doute sur la non existance de l’absent, & qu’a pres plus de 28 ans qu’on n’avoit recu de ses nouvelles, on ne pouvoit réputer ce frere vivant, sans l’exposer à perdre son Douaire sans retour, il me semble que la demande de Ii veuve est juste, & on a décidé à peu prés dans cette espèce par Arrêt du 13. Août XIS, en faveur du tiers coutumier.

Par la reale qu’il y a droit d’accroissement dans le Douaire, la provision à vie des pusnés éteinte augniente le Douaire de la veuve de l’ainé : Arrét du 13 lanvier 1540.Bérault .

Il en est de même, lorsque l’aicule on la mère du mari exercent un Douaire sur sa succession, aprés leur mort, le Douaire de sa femme reçoit un accroissement en proportion de l’extinction des Douaires qui la préferoient Loven duPineau , sur Anjou, ArtCCCVIII ; Louis & Bodre, u sur Maine, Art. CCexxI..

Si le frère du mari avance de se succession, son ftère par le Contrat de mariage, seretenant l’usufruit néanmoins de la portion afférente, cette retention d’usufruit ne dépouil-le pas moins de la propriété celui qui a feit l’avancement, ainsi en ce cas la veuve aprés son déces aura Douaire sur son partage.Godefroy . ( IV Godefroy a ceu, sur cet Article que la femme peut exercer son Douaire sur la succession renoncéepar son mari des le lemps de la renonciation, suns atrendre celui de son déces, même sans separation civile : cet Auteur argumente du cas de décret des biens du mari la femme peut alors exercer son Doüaire : pourquoi ne le pourra-t-elle pas surune succession à laquelle son mari renoneint n’a aucun intétét ; C’est la jouissance du mari qui suspend le Douaire de la femme Basnage n’approuve pas ce raisonnement.

Quand la reuve prend Douaire sur les biens de son beau pere, comme du jour de son déces, elle contribue aux dettes du beau pere contractées denuis qu’il a consenti à son mariage : Arret du 2 Juit 1607.Bérault . Mais la femme peut demar der son Bouaire, comme du jour des Contrit de mariage de son mari, sur les biens de son heau-pere : Arrét du Conseil d’Etat du 3e. Août 1687. Voyer la note sous les Articles CceLXix & CCeLaX,


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La disposition de cet Article nous rappelle ces siecles derusticité & d’ignorance, où les actes les plus importans de la société subsistoient sur la bonne foi de quelques témoint les pactions de mariage se régloient dans ces mauvais temps à la porte des Eglises.

On entend par le record de mariage le témoignage des proches parens qui avoient été presens au mariage, & qui certifioient les conventions matrimoniales. VoyesBracton , Fleta, la Loi Regiam majestatem.

Bérault dit, sur cet Article, que la femme, pour obtenir ses droits coutumiers, n’est pas toujours obligée de justifier de son Contrat de mariage, ni d’un Extrait de célébration, il suffit qu’elle justifie de la possession de son état :Chopin , Liv. 3 de sacrâ Policiâ, Tit. 7, n. 14.

Souefve rapporte un Arrêt du S Juin 1676, par lequel la femme de Dohin, Procureur, fut maintenue dans son état, quoique l’on ne trouvat point d’acte de célébration de mariage sur les Régistres de sa Paroisse qui étoient en bonne forme ; la possession publique de son état, jointe à la probité des époux, fut le motif de l’Arrét.

L’Article I & de la Déclaration du sAvril 1736 concernant la forme de tenir les Registres des Baptêmes, &c. défend d’écrire & signer les actes de célébration de mariage sur des feuille, volantes, à peine de procéder extraordinairement contre le Curé ou autre Prêtre qui aura f-1 lesdits actes & contre les contractans, à peine de déchéance de tous les avantages & conventions portées par le Contrat de mariage, même de privation d’effets civils, s’il y échoit.

Depuis l’Ordonnance de 1987, c’est une question de sçavoir si le record peut avoir lies l’Article LXXVIII du Réglement de 168s l’adimet positivement, & on ne peut douter que l’Article LIV de l’Ordonnance de Moulins, dont l’Article Il du Titre CXX de l’Ordonnance de 1o87 a été tiré, ne fut connu à la Cour lorsqu’elle placita l’Art. LXXVIII du Réglemee : : cependant c’est une négligence des conjoints de ne pas rédiger leurs conventions par écrit.

Il faut avouer que quand on n’a pas sous les yeux l’Art. LXXVIII du Réglement, on est fort embarrassé. Comment être recu à prouver par témoins une donation faite par la femme de partie de ses immeubles à son mari, en contractant mariage I C’est cependant ce qui a été jugé par Arrét du y Mai 1S55 ; il est vrai que le Créancier offroit de prouver que le Contrat avoit été tenu, vu & lu. Comment, dans le cas où il y a eu un Contrat de mariage par écrit, & qu’on ne représente point, admettre la preuve vocale ; N’est-ce pas donner un libre passage aux fraudes, il semble que cet Article du Réglement a besoin d’interprétation. On a jugé, par Ariét du a Décembec. 1723, que le record ne peut être demandé, quand il n’y a point eu de Contrat de mariage.


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Godefroy pense que la femme aura Douaire sur les fonds du mari, déchargés depuis le mariage des rentes antérieures par la seule libéralité du Créancier ; cette opinion n’est pas juste, car on n’accorde le Douaire à la veuve, en exemption de pareilles rentes acquittées qu’en considération de ce que le prix des amortissemens, a diminué la part qu’elle auroit eue dans les meubles & conquêts ; mais ici, c’est le cas d’une donation où la femme n’a ni Douaire ni conquêts ; ainsi les rentes ne cessent pas de subsister à son égard.


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La Coutume requiert en cet endroit trois conditions ; un propre du mari aliéné, une rente racquittée, & des héritages sur lesquels la veuve puisse prendre son Douaire exempt de la rente dont elle payeroit le tiers, si son mari ne s’étoit pas affranchi dans le concours de ses conditions ; la veuve ne peut prétendre douaire sur l’héritage vendu, car elle auroit un double avantage : Arrét du 8 Août 1643, rapporté parBérault .

Mais si le mari a contracté des rentes pendant son mariage, & s’il a acquitté les rentes antérieures, la femme, à cause de Douaire, est-elle tenue d’acquitter les nouvelles rentes quand elles n’excedent point les rentes constituées avant le mariageRenusson , du Douai-re, chap. 7, n. 14 & suivant, fait cette question ; & il décide que si les rentes antérieures ont été rachetées de deniers empruntés avec subrogation, la femme contribue aux nouvelles rentes, parce que le rachat ne peut passer pour une extinction : mais si l’amortissement a été fait sans subrogation, dit qu’Renusson peut opposer à la femme que le mari ayant pendant son mariage emprunté des deniers, les deniers empruntés ont servi au rachat des rentes antérieures ; qu’un mari pourroit amsi avantager sa femme indirectement pendant le mariage, en acquittant les rentes antérieures, & en constituant sur lui de nouvelles rentes il estime cependant, qu’au défaut de la subrogation la femme renoncant à la communauté n’est point, à cause de son Douaire, assujettie aux rentes antérieures à son mariage, parce que, au temps de l’ouverture du Douaire elles sont éteintes & qu’elle ne doit pas plus les rentes créées depuis le mariage, parce que son Douaire est plus ancien, & que la femme ne prend point de Douaire sur les rentes constituées au profit de son mari pendant le mariage.

L’Arrêt du8 Mars 1655, cité par Pesnelle, a été rendu dans les principes de Renusson mais nous avons compris que de semblables décisions donnoient au mari la liberté d’avantager indirectement sa femme, en acquittant des rentes antérieures au mariage, & constituant sur lui de nouve les rentes.

Ainsi lorsque le mari a acqu’té des dettes antérieures au mariage, & qu’il a créé de nouvelles rentes, la veuve est obligée : y contribuer jusqu’a la concurrence des rentes rachetées, quoique dans les Contrats des rouvelles rentes il ne soi-fait aucure mention des anciennes.Bas -nage, sous l’Art. CCOxCVI, rapporte un Arrêt du 4 Mai 1682, qui a ainsi jugé la question contre les demandeurs en tiers coutumier ; cet Auteur pense mêtre que lorsque le mari a contracté des dettes, la femme eit passible du remplacement des rentes qu’elle devoit, & que son mari a amorties, quoiqu’il n’y ait dans les actes aucunes traces de subrogation : Ariét du 1e Mars 1685.


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L’Arrêt du a8 Mars 1667, a été suivi d’un Arrét célèbre du 14Avril 168a, rapporté par Basnage ; par Arrét du 4 Avril 1o8o on avoit déclaré le don mobil exempt de la contribution aux dettes contractées pendant le mariage, sur ce raisonnement que le don mobil doit être considéré comme toute autre donation faite par un étranger, dans le traité de mariage, laquelle ne seroit pas susceprible, au préjudice du Douaire de la veuve, des dettes con-tractées depuis ; mais la question ayant été représentée, on nomma des Commissaires pour la diseuter : tous convinrent, que l’Arrét de iono avoit été surpris ; intervint l’Arrét de 1682. Comment en effet accorder au mari la liberté d’aliener le don mobil, con-tre les intérêts du Douaire, & lui refuser celle de l’hypothéquer


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Il semble que la femme devoit avoir un droit de conquêt, sur la donation faite à son mari, depuis le mariage par un étranger ou un parent, dont le donataire n’attendoit pas la succession, car il n’y a si bel acquet que le don ; cependant le contraire est décidé par cet Article, & je n’en suis pas surpris, puisque l’ancienne Coûtume permet à la femme de retenir le don qui lui a été fait pendant le mariage.

La donation rémunératoire sera-t’elle exceptée de cet Article ) elle a les caracteres d’une vente plutôt que d’une donation, elle est le salaire des services, cependant la distinction de Basnape paroit de décision ; si le donataire a une action civile contre le donateur le fonde donné pendant le mariage dans une pareille circonstance, est un conquêt ; de quelque clause que le Contrat soit revétu, il est le payement d’une dette exigible ; mais la donation ne presente que l’idée d’un titre gratuit, quand la récompense des services ne peut être poursuivie judiciairement ; l’Arrét de 1592, cité parBérault , semble être dans la premiere espèce. DuMoulin , sur l’Art. CX de Paris, n. 2, cité par leBrun , est de même avis ; car les services rendus par l’un des conjoints, sont, dit-il, réputés conquêts ; par conséquent, le bienfait qu’on en recoit est réputé de même nature ; & si les services avoient été rendus avant le mariage, & que la donation eût été faite depuis le mariage, l’obligation de la récompe : se devroit être mise au rang des dettes mobiliaires.

La femme peut demander Douaire sur une donation faite au mari par son traité de natiage soit qu’il soit héritier du donateur en ligne directe ou collatérale, soit qu’il ne soit poirt habile à lui succéder, parce que cette donation est considérée comme atérieure au mariage.


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Renusson , du Douaire, Chap. 3, n. 7s soutient l’opinion contraire : le prencer à rente foncière non rachétable n’a pas, dit-il, la faculté de racheter & amortir la rente, si ce n’est du consentement du bailleur de l’héritage ; ainsi si la Douairiere ne trouve dans les biens de son mari de quoi s’indemniser de son Douaire, elle pourra forcer le détenteur du fonds chargé de la rente foncière sujette à son Douaire, à lui continuer la moitié de la rente, tant que le Douaire aura lieu ; la raison est que le rachat d’une pareille rente foncière est unc aliénation volontaire du mari ; & qu’un preneur à fieffe regardé pour ainsi dire, comme un Fermier, quand il amortit la rente, acquiert la propriété de l’héritage ; ces raisonnemens sont pressans ; mais notre Jurisprudence est contraire. Le rachat d’une rente fonciere & irracquitrable quand il n’a point été précédé de défenses de payer éteint parmi nous sur cette rente le Douaire & le tiers des enfans. L’Article LXXVI du Réglement a été suivi de plusieurs Arrêts, & notamment d’un Arrêt du 2r lanvier 168y, rapporté par Basnage ; dans le fait de cet Arret il s’agissoit du rachat d’une rente en bled qui avoit été fait au mari pendant le mariage, la femme avoit inquiété le debiteur pour son Douaire, par l’Arrét il fut déchargé de sa demande.


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On a prétencu qu’un mari, dont toute la fortune consistoit dans une rente, n’avoit pu préjudicier au Dcuaire de sa femme, en colloquant cette rente dans un fonds acheté à trop haut prix, cette prétention a été accueillie ; & par Arrêt du a8 Novembre 1699, il fut ordonné que la femme auroit son Douaire en proportion du capital de la rente au denier vingt : il falloit, sans doute, que la disproportion fût énorme ; car comme la femme peut profiter du bon marché fait par son mari quand il ne débourse rien au-dela des rentes dont il recoit l’amortissement, elle doit supporter la perte, si la collocation ne produit pas le même revenu que les rentes amorties.