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CCCCVIII.

Les remplois de deniers provenus de la vente des propres, ne sont censés conquêts, sinon d’autant qu’il en est accrû au Mari, outre ce qu’il en avoit lors des épousailles ; comme aussi, les acquisitions faites par le Mari, ne sont réputées conquêts, si pendant le mariage il a aliéné de son propre, jusqu’à ce que ledit propre soit remplacé.

Cet Article & les trois suivans sont pour empécher les avantages que le maei & la femme pourroient se faire l’un à l’autre, au préjudice de leurs héri-tlers : c’est pourquoi l’ordre méthodique requeroit, que l’Article CCCCX précédat celui-ci & les deux autres ; parce qu’il contient la regle générale, dont dépendent les particulières, & les exceptions qui sont proposées dans les trois autres Articles. Cette regle est, que les gens mariés ne peuvent faire aucuns contrats ni reconnoissances, par lesquels les biens de l’un viennent à l’autre directement ou indirectement : Or c’est en conséquence de cette maxime, que si le mari pendant le mariage a aliéné les biens qui lui appartenoient lors des épousailles, la femme ne peut prendre aucun droit de conquêt sur les acquisitiont faites depuis le mariage, si elles n’excedent la valeur des biens qu’il a aliénés & engagés : parce que les biens propres du mari ; c’estàdire, qui lui appartenoient lors des épousailles, ( comme il a été dit ailleurs ) doivent être remplacés sur ces acquisitions, qui partant ne sont pas réputées conquêts, aux termes de cet Article. Par la même conséquence, les deniers provenus de la vente des biens propres du mari, ou du racquit des rentes qui lui étoient propres, n’ayant été remployés lors de son déces, ne sont pas réputés meubles, mais immeubles, parce que si le remplacement des propres du mari ne se peut pas prendre sur les conquêts, il doit être pris sur les meubles, comme on ie peut inférer de l’Article CCCCIx, & qu’il a été attesté par l’Article LXV. dudit Réglement Sur quoi il est important de remarquer, que quoique cet Article CCCCVIII semble n’avoir ordonné le remplacement des propres, que pour empecher les avantages indirects que les maris peuvent faire à leurs femmes, il est nécessaire d’en étendre la disposition, & de dire que le remplacement des véritables propres, c’est-à-dire, qu’on a possédés à droit successif, doit être fait sur les acquêts, & au défaut d’acquêt, sur les meubles : de sorte que les héritiers aux acquets & meubles ne peuvent rien prétendre en leur succession, que le propre n’ait été remplacé au profit de ceux qui en sont héritiers, comme il a été expliqué par l’Article CVII dudit Réglement, qui ajoute, que le remploi se doit faire au marc la livre sur tous les acquêts immeubles, & à faute d’acquêts, sur les meubles. Par cette dernière clause on a jugé deux grandes questions : La première, sur quels acquêts ce remplacement devoit être pris, ayant été déclaré qu’il doit être pris sur tous, soit qu’ils soient les premiers ou les derniers en bourgage ou hors bourgage : La seconde, que ce même remploi se fait quelquefois’au préjudice des légataires des meubles, tant universels que singuliers, quand les acquêts ne sont pas suffisans de le porter.

Il ne faut pas omettre que ledit Article CVII ne se doit pas entendre des aliénations faites à titre de donation, ce qui a été donné n’étant point sujet. à remplacement, comme il a été jugé par plusieurs Arrêts.

Mais il faut de plus remarquer, qu’il ne se fait point de remplacement à l’avantage ni au préjudice des héritiers aux propres ; c’est-à-dire, que les heri-tiers paternels ou maternels ne se peuvent pas demander les uns aux autres le remploi de ce qui a été vendu par le défunt, provenant de leur côté & ligne : de sorte qu’ils prennent les biens en l’état qu’ils se trouvent dans la succession, au temps de son échéance, sans récompense ni répétition l’un sur l’autre de ce qui a été aliéné : Que si le défunt a contracté des dettes, qui ne puissent pas être payées, ni sur ses acquêts, ni sur ses meubles ; en ce cas, les héritiers paternels & maternels contribuent au payement de ces dettes par proportion, pro modo emolumentâ, comme il a été remarqué sur l’Article CCeLXIV.

Les Offices aussi-bien que les rentes hypotheques, étant réputés immeubles, la qualité de propre leur peut convenir ; c’est pourquoi le remplacement endoit être repris non-seulement quand ils ont été aliénés par contrats volontai-res, mais quand ils ont été perdus par la faute du défunt ; comme fi pour n’avoir pas payé le Droit annuel, l’Office est tombé dans les Parties casuelles, ou s’il a mal & inconsidérément remplacé les deniers de la vente d’icelui, ou du racquit des rentes qui lui étoient propres : Car en ces cas, comme on a jugé que la veuve pouvoit demander la récompense de son Douaire sur les autres biens de son mari, de même on a jugé, que les héritiers des propres pou-voient demander la récompense de l’Office perdu par la négligence du défunt, sur les acquêts & les meubles, par deux Arrêts, l’un du y de Juillet 166 4 & l’autre du 22 de Juin 1673, rapportés parBasnage .

Les termes donc de vente & d’aliénation employés dans cet Art. CCCCVIII ne s’entendent pas dans leur étroite & propre signification, mais s’étendent à la perte des propres, arrivée par le défaut de bonne conduite du mati ; & à plus forte raison, à l’engagement ou hypotheque des propres, que les héritiers aux acquêts doivent liberer ou décharger ; & partant la confignation de la dot sur les biens du mari, est une espèce d’aliénation de ses propres : mais d’autant que l’effet de cette consignation consiste à pouvoir demander la dot, sans aucune diminution des droits attribués aux femmes sur les conquôts & meubles, par l’Article CCCLXV, la vouve n’est point obligée à fournir le remploi de cêtte consignation, à moins qu’elle ne soit legataire des meubless au-quel cas, si les héritiers présomptifs des acquôts, lui abandonnent lesdits acquêts, elle seroit condamnée de porter ce remplacement, même au-dela de la valeur des meubles qu’elle avoit eus en vortu de son legs, si elle n’en avoit pas fait faire un bon Inventaire, d’où il s’ensuit, qu’elle pourroit perdre sa dot par cette imprudence : car il a été jugé par plusieurs Arrées, que les héritiers aux acquêts sont tenus de payer le remploi, encore qu’il excede la valeur de leur suocession : ce qui a été pareillement jugé contre les légataires universels des meu-bles, quand ils n’en ont pas fait un bon Inventaire.

Il ne faut pas oublier ce qui a été dit, que par le mot de propres, on n’entond pas seulement les immeubles que les mariés possedent par droit d’hérédi-té, mais généralement tous ceux qui leur appartiennent avant le mariage, quocumque tatulo, parce que ces biens, quoiqu’ils soient de véritables acquêts à l’égard des héritiers, sont censés propres à l’égard des conjoints, pour empecher qu’ils ne passent de l’un à l’autre, & partant doivent être remplacés.

On a même jugé, qu’un mari ayant donné ses meubles au fils de sa femme, en cas qu’elle prédécedât, ce fils étant devenu donataire desdits meubles par l’événement de la condition, devoit porter le remplacement des acquisitions fai-tes par le donateur avant le mariage, mais qui avoient été aliénées pendant icelui, en cas que les conquêts ne fussent pas suffisans de fournir ce remploi, par n Arrêt du 4 de Janvier 168s, rapporté parBasnage .

Sed quid : Si le mari avant le mariage avoit vendu ou engagé ses propres, la femme sera-t’elle obligée d’en porter le remploi sur les conquêts & sur les meubles : Videtur quod non, par un argument qu’on peut prendre de l’Article LXV dudit Réglement, qui n’oblige les mariés qu’au remplacement des immeubles qu’ils possédoient lors des épousailles. Or cet argument, que les Au-teurs Latins nomment à contrario sensu, & les Grées iE arridiaconne, pour signifier qu’il procede de différence & de distinction, a une tres-grande force, quand le cas énoncé dans une Loi ou dans un contrat, est tout à fait opposé à un autre cas qui n’y est point exprimé : Car on doit juger que l’intention du Legislateur & des contractans n’a été que de régler la chole qu’ils ont spéciale-ment déclarée, & que partant les choses qui different beaucoup, doivent être réglées autrement : Voyez Cujas in lib. 4. Responsorum Papiniani, sur le S. cûm inter, de la Loi Inter socerum, ff. De pactis dotalibus. Mais on dit u contraire, que cet argument à contrario sensu, n’a sa force que quand le cas exprimé dans la Loi, est une exception au droit commun sous la disposition duquel les cas non exprimés demeurent compris, principalement quand il y a une notable différence entre le cas exprimé & ceux qui ne le sont pas, d’autant que c’est une maxime, que l’exception confirme la regle dans les cas non exceptés. Or le cas exprimé dans ledit Article du Réglement n’est pas une exception ; mais plutôt une confirmation du droit commun, par lequel les acquets sont sujets au remplacement des propres : Dont on peut conclure, que la femme prenant part aux conquêts & meubles comme héritière, doit contribuer aussi-bien que les autres héritiers de son mari aux meubles & acquets audit remplacement, pour conserver à l’héritier des propres ses droits succesfifs. Il semble qu’on doit réfoudre cette question par une distinction qui appor-te un tempérament aux deux opinions ; car si d’une part le propre doit être conservé, quand il se peut reprendre sur les acquêts & sur les meubles, il n’est pas juste d’autre part, que le droit que la Coûtume attribue à la femme sur les conquêts & les meubles, en confidération de la société conjugale, & pour la récompenser de la collaboration qu’elle est présumée avoir faite, soit diminué par le mauvais ménage de son mari, qui a précédé leur mariage. On peut donc répondre en baiançant ces deux raisons, que la femme ne doit pas contribuer au remplacement dont il est question, s’il peut être fait sur la part des conquêts & des meubles appartenante aux héritiers ; mais si cette part n’est pas suffisante pour porter ce remplacement, alors la femme a qui l’autre part des conquêts & meubles est déférée, doit acquitter l’excédent de ce qui n’a pû être porté sur la part des héritiers, ou contribuer à proportion à tout le remplacement, s’il égale ou surpasse la valeur des acquets qui le doivent porter : car par cette résolution, le propre est conservé dans la famille du mari, & d’ailleurs la femme n’est pas privée de ses droits de conquêts & de meubles.

On peut de plus demander, si les héritiers aux acquêts sont obligés de souffrir le remplacement sur les acquisitions qui ont été faites, & s’ils ne sont pas recevables à offrir de payer en deniers la juste valeur des propres aliénés : il semble, suivant les termes de l’Article CCCCVIII, & du Réglement aux Articles LXV & CVII, que le remplacement doit être réputé fait sur les immeu-bles qui ont été acquis ; puisqu’il est déclaré par ledit Article CCCCVIII, qu’il n’y a point de conquêts que le propre ne soit remplacé, & que d’ailleurs par lesdits Articles LXy & CVII du Réglement, il est attesté que le remplacement ne doit être fait sur les meubles, que quand il ne peut être fait sur les acquêts : VoyezLouet , R. 30.1

Mais quoique l’action qu’a l’héritier au propre pour demander le remploi, ne tendit qu’a se faire payer du prix, cette action seroit toujours immobiliaire, parce que sa fin est de conserver un propre, qui ne peut appartenir qu’à un heritier du propre, qui est toujours réputé immeuble ; en quoi l’usage de Normandie. différe de celui de Paris, où l’action aux fins du remploi, est tantôt mobiliaire & tantot immobiliaire, suivant ce qui en peut provenir ; car si on ne demande que le rapport des deniers du prix de l’aliénation, l’action est mobiliaire, & fait partie de la succession mobiliaire, que si on demande un héritage acquis, comme étant un véritable & effectif remplacement l’action est immobiliaire, & est censée une dependance de la suocession immobiliaire. Voyez le Commentaire deLouet , au lieu cité, in fine.

Il faut enfin remarquer que c’est une maxime, qu’il n’y a point de remplacement de Coutume à Coûtume ; c’est-à-dire, que les heritiers des propres situës hors l’etenduë de la Coutume de Normandie, ne peuvent pas demander le remplacement de ces propres aliénés, sur les acquets faits en Nor-mandie.


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Nous avons en Normandie des remplacemens de deux espèces, le premier des propres du mari ou de la femme aliénés pendant le mariage, & il a pour but. de prévenir les avantages indirects entre le mari & la femme, il n’est ici question que des alienations que le mari auroit faites de son bien ; les regles concernant la vente des biens de la femme sont contenues dans le Chapitre du Bref de Mariage encombré.

Le second est le remplacement des propres entre divers héritiers dansune même succession ; les uns aux meubles & acquêts immeubles, les autres aux propres ; ce remplacement. n’est pas fondé sur les termes de la Loi, mais sur l’usage public & notoire, appuyé sur un nombre infini d’Arrêts & sur la grande passion des habitans de la Province de conserver leurs biens, & particulierement leurs propres dans les familles.

La Coûtume réformée de Paris, a bien admis, par l’Article CexXXII le remplacement de la première espèce, il se fait sur les biens de la communauté ipso jure, sans stipulation ni déclaration : disposition qui a été trouvée si juste, qu’elle a été étenduë aux Coûtumes muettes ; mais le remploi de la seconde espèce y est tellement méconnu, que c’ess une maxime à Paris que l’on peut faire de son propre sonacquét.

Tous les biens que le mari possede, au temps de son mariage, sont sujets au remplacement, quand depuis ils ont été aliénes, d’où l’on a conclu que la femme n’est point obli-gée, comme héritière de son mari, de contribuer au remploi des aliénations qui ont précedé le mariage. Ainsi, l’acquet que fera le mari depuis le mariage, ne sera pas dans cecas considéré, ditBérault , comme un remplacement de propre, mais comme un conquêt auquel la femme participera suivant la Coutume ; on cite un Arrét en faveur de cette opinion du 1o Fevtier 17OI : quoique Basnage soit d’un avis conforme à l’Arrêt, il dit qu’il en peut arriver de grands desordres. Un homme à la veille de son mariage vendroit & ameubliroit ses propres pour enrichir safemme qui partageroit les meubles, sans être chargée du remploi des propres vendus. l’avoue qu’il faut excepter le cas de fraude, mais je ne vois pas par quel motif lesnelle veut assujettir la femme à contribuer subsidiairement au remploi des propres alienés auparavant son mariage.

Quand le mari, aprés avoir amorti des rentes passives sur son bien, aliene long-temps. aprés des propres, il semble qu’on n’en peut demander le remplacement sur ses acquets, jusqu’à la concurrence du prix employé à faire les amortissemens ; la question a été décidée en faveur des héritiers aux acquêts, par Arrêt du y Mars 1736. On a cependant depuis fait au Palais une distinction singuliere, on a reconnu que quand le mari avoit amorti des rentes passives, & vendu dans la suite des propres, cela acquiert à la femme héritiere aux meubles une fin de non-recevoir contre la demande en remplacement des propres du mari ; mais on a voulu soutenir que si le mari avoit en outre fait un acquet même en bourgage, la femme n’y pouvoit prendre part auparavant le remplacement : sysstême singulier I il en réfulte que le sort de la femme, dont le mari n’a point fait d’acquêt, est égal à celui de la femme du mari qui a été plus économe, & que des héritiers collatéraux pourront impunément s’enrichir des fruits de la collaboration d’une femme vigilante.

Le remplacement des propres aliénés se fait sur les acquêts entre les héritiers aux propres & les héritiers des acquêts ; & au défaut d’acquêts sur les meubles : nous n’avons point de principe plus certain que celui-ci, il n’y a point d’acquêts que les propres ne soient remplacés ; Phéritier aux acquêts ne peut contraindre l’héritier aux propres de recevoir son remploi en deniers, & l’héritier aux propres peut employer, par exemple, dans les lots des propres, des héritages acquis en Caux, pour lui servir de remplacement des propres alienés en Coûtume genérale : Arrét du Parlement de Bretagne du a Juillet 1o8s sur évocation, & confirmatif d’une Sentence des Requêtes du Palais de Roüen.

Les améliorations faites sur les acquêts qui tiennent lieu du propre vendu, appartiennent à l’heritier du propre même sans aucun remboursement. Cependant il est pos-ssible de faire encore naître des doutes sur cette derniere question : celui dont la succession est ouverte avoit aliéné un propre & cette aliénation avoit été sulvie de l’acquisition d’un autre fonds, de la valeur du propre vendu ; il fait sur ce nou-veau fonds des augmentations qui en triple l’estimation ; apres sa mort ses héritiers aux acquêts offrent aux héritiers du propre de rembourser le prix de l’aliénation : il paroit d’abord injuste de faire profiter les héritiers au propre des sommes employées à augmenter la valeur du nouvel acquet, puisque cessant cet emploi, les sommes qui auroient entré dans la masse de la succession auroient appartenu aux héritiers aux acquets. Queile est l’obligation des héritiers aux acquêts ; c’est de payer le prix du propre vendu : le payement n’est pas plutôt fait, que les héritiers au propre retrouvent, à ce moyen, dans la succession du défunt, tout ce que lui même avoit recu de ses peres. Les Articles LXy & CVII du Réglement de 16b0 favorisent cette interprétation ; les propres, y est il dit, doivent être remplacés sur les acquêts au marc la livre ; ce marc la livre suppose une estimation, & toute estimation un prix à rembourser. Enfin, si les héritiers au propre sont recevables garder le fonds acquis par le défunt, ils doivent du moins desintéresser les hiéritiers aux acquêts de la valeur des augmentations. Mais l’Article CCCCVIII de la Coûtume présente une solution à toutes ces difficultés, les remplois des deniers provenus de la vente des propres ne sont censés conquëts, sinon d’autant qu’il en est accru au mari, ou ce qui signifie la même chose, à celui de la succession dont il s’agit, des l’instant même qu’un propre aliéné est suivi de l’acquisition d’un autre fonds la Loi veut que le fonds acquis de-vienne propre par une fiction qu’elle autorise & qui opere autant que la vérité : ce principe posé, il est d’une conséquence nécessaire que les augmentations qui seront faites sur cet héritage sortissent la nature de propre sans aucun remboursement. Supposez, en effet, un propre de la valeur de cinquante livres, le défunt y a élevé un batiment de cinquante mille livres, le fonds & le batiment viennent à l’héritier au propre sans qu’il soit tenu d’aucune indemnité envers l’héritier des acquets, on doit décider la même chose des que sur la tête du défunt l’acqueét du jour du Contrat a été fait propre par une subrogation simultanée : aussi on a jugé en faveur des héritiers au propre dans une espèce à peu pres sembla-ble, par Arrêt du a8 Juillet 1767.

Bérault rapporte un Arrêt du 22 Mars 158y, par lequel il fut jugé que le mari ayant vendu : de son propre de Couûtume générale, fait d’abord des acquêts en bourgage & ensuite hors bourgage, les propres seroient remplacés sur les acquêts de Coûtume générale comme biens demême nature, &, en cas d’inluffisance, sur les acquêts de bourgage. Il paroit que cet Arrêt a été long-temps suivi, car la question s’étant presentée en 1632 en la Chambre des Enquetes, elle y fut partagée ; elle essuya encore un partage en Grand Chambre, & ne fut de-partagée que les Chambres assemblees, où il passa à dire que les propres seroient pris sur les acquêts, tant en bourgage que hors bourgage.

Les héritiers aux acquets engagent non. seulement à la Sureté du propre, les biens dont ils ont hérité mais leur propre patrimoine : ainsi jugé par l’Arrét de Cherville du 21 Juillet 15ûy, rapporté par Bérault ; on a jugé la même chose au défaut d’acquêts contre les légataires universels & particuliers qui se sont saisis des legs auparavant d’avoir fait un bon & valable inventaire : Arrêt du 7 Mars 1614.Bérault . Basnage ibid.

C’est une regle que le remplacement n’a pas lieu quand les héritiers au propre sont pareillement héritiers aux acquêts ; elle n’est pas cependant toujours équitable. Lai, par exemple, pour héritiers trois petits-neveux, issus du fils d’un frere, & un petit nereu sortl du ffils d’un autre frère ; j’ai vendu presque la totalité de mes propres, mais j’ai fait des acquêts : aprés ma mort, suivant l’Article CCexx de la Coutume, les trois enfans d’un demes neveux auront les trois quarts des acquêts, en outre la moitié de mes propres ; il restera à l’enfant de mon autre neveu, l’autre moitié de mes propres & le quart des acquets. L’équité désavoue un partage fait de la sorte, il faut, dans ce cas, remplacer les propres sur les acquêts, partager par souche les propres ainsi remplacés, & par téte, le surplus des acquêts qui excede le remplacement des propres ; ainsi jugé par Arrét rendu en l’an 1701.

On n’étend point la Loi du remplacement au-delâ de celui qui a fait l’alienation, Basnage rapporte plusieurs Arrêts qui ont formé cette Jurisprudence, & nous en avons encore de plus récens : on a ainsi jugé le 11 Août 1752. Dans le fait de cet Arrêt, les sieurs Paisant demandoient à la Dame Chazot le remplacement d’un propre aliéné par la mère de celle dont la succession étoit ouverte ; la mère avoit fait des acquêts dont la fille avoit hérité comme de ses propres ; les sieurs Paisant prétondoient que ces acquets étoient devonus, dans la personne de la mère, des propres de la ligne Paisant par la force de la subrogation, & qu’ils n’avoient pu changer de nature sur la tête de la fille ; ce qui étoit si vrai, que si la mere fût morte sans enfans, ils leur auroient appartenu au préjudice des héritiers aux acquets ; par l’Arrét il fut jugé que l’on ne remontoit point au-dela de celui qui avoit aliéne. Si on ne bornoit pas ainsi le droit d’exiger le remplacement, il s’étendroit aux aliéna-tions faites par l’aieul, le bisaieul, & à l’infini par une suite de progression, on cite encore un pareil Arrêt du 2i Juillet 17ôt ; exceptez cependant la dot qui ne se confond que par deux degrés de succession & de génération, à la différence des récompenses stipulées par le mari sur le bien de sa femme qui s’éteignent dans la personne du fils, héritier de sa mete : Arrêt du 1s Décembre 1692.

On a cependant étendu le remplacement au delâ du premier degré dans cette espèce ; la mere hérite aux meubles de son fils mineur, lequel avoit hérité de son père ; elle agit contre les hiéritiers des propres pour le remplacement de sa dot consignée, les héritiers répon-dent que le fils étant mort en minorité, les meubles de la succession do pere débiteur de la dot n’ont pas cessé d’y être engagés ; qu’il falloir, en ce cas, considérer la succession du fils, au temps qu’elle lui étoit échue, & non pas au temps de sa mort ; que tel étoit l’esprit des Articles DXII & DXIII de la Coûtume & de nos Maximes qui tendent à conserver les propres ; par Arrêt du 20 Août 1754,. la mere a été déboutée de sa demande. On peut cependant dire que la succession du pere n’est pas celle du fils, & qu’ainsi l’ordre de succé der n’est pas le même dans l’une & l’autre succession ; les Articles DaII & DXIII n’ont été faits que pour empécher les tuteurs d’abuser de leur administration & de changer l’état des biens des pupilles pour en profiter. Quelque penchant que nous avons à favoriser les ficritiers des propres, on ne peut pas étendre arbitrairement la nécessité de les rempla cer ; les héritiers aux meubles & acquêts ont leurs drous marqués par-là Loi, comme les héritiers des propres, aussi on avoit fait droit sur la demande de la mere par Arrêt du é Août 1750 ; cette contrariété d’Arrêéts laisse subsister la difficulté.

Le remplacement des propres se fait ordinairement sur le prix des Contrats d’aliénation, pors le tas de fraude ; Arrêts du a8 Février 163y & de Ma1 1S4d4.