Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.
CCCCXIV.
Homme non marié, ou n’ayant Enfans, après l’âge de vingt ans accomplis, peut disposer de ses meubles par Testament à qui bon lui semble.
La particule, oi, est conjonctive en cet Article ; car afin qu’un hommepuisse tester de tous ses meubles, il n’est pas seulement requis qu’il n’ait point d’enfans habiles à lui succéder, il faut de plus qu’il ne soit point marié : car Sil est marié, la moitié des meubles appartient à sa femme, dont il ne peut difposer par Testament, par les Articles CCCCXIX & CCCCXX. Et quand il est dit, qu’il peut disposer à qui bon lui semble in illo staturi generali sermone turpis persona non intelligitur, comme enseignent Louet & son Commentateur, D. 43.1
Plusieurs Coutumes du Royaume ont étendu leur prévoyance au dela de la nôtre : elles ne permettent point de faire une donation universelle de meubles à celui qui n’a point d’autres biens ; Lodunois, Chap. 25, Art. 11 Poitou, aix, 223, 224 3 la Rochelle, da, Bretes., 203. Les réserves, en donation mobiliaire, ont lieu dans ces Coutumes en faveur des héritiers. Rien ne paroit plus juste ; il y a dans les grandes Villes de commerce des gens qui ont tout leur bien en argent & en effets, & qui n’ont pas un pouce de terre, si ce n’est peut-être quelque jardin pour aller se promener, & on leur laissera la disposition libre des trésors immenses qu’ils ont en leur possession. On ne permet pas en Normandie de disposer, par Testament, de la moindre partie de son propre, par même d’un fonds de vingt sols de revenu ; & la Coûtume autonse un legs de 50000 écus, au préjudice des héritiers légitimes qui sont souvent dans l’indigence, d’où vient cette liberté sans bornes ; C’est que les anciens Normands n’ostimoient que les biens fonds, & dédaignoient les meubles.
Quand le Testateur a disposé de tous ses meubles on doit, avant que d’en ordonner la délivrance, examiner serupuleusement la forme du Testament & la qualité du légataire universel ; il faut recourir aux maximes expliquées sur l’Article CCCexxxIx, & dans le doute réduire ou annuller le Testament. On a déclaré par Arrêt du 11 Fevrier 1715 a. rapport de M. Pavyot de S. Aubin, les domestiques incapables de legs universels. Combien de personnes avides également redoutables aux héritiers On comprend sous le nom de meubles l’argent monnoyé, les billets & obligation. pour choses mobiliaires, & toutes les choses que la Coûtume répute meubles ; cependant il y a souvent de la difficulté à distinguer l’étenduë & les limites du legs. Le legs des meubles, déclarés par le Testament être répostés dans une maison particuliere, ne renferme pas les obligations & billets qui peuvent s’y trouver ; parce que, ditCochin , Consult. 30. ce ne sont pas des effets réels & existans, mais de simples actions qui ne sont pas plus dans un lieu que dans l’autre. Bérault avoit dit auparavant quia non continentur toco. Le legs de tous les meubles qui se trouveront dans une maison, de quelque nature qu’ils foient, comprend l’or & l’argent : Journal des Audien. tome premier. Le legs des meubles meublans, servant ordinairement dans la maison, s’étend a la vaisselle d’argent ta-bleaux & tapisseries : Journal des Aud. ibid. Mais le legs de tous les meubles meublans, vaisselle d’argent linges, tapisseries, habits, ne s’étend pas à l’argent monnoyé & aux obligations ; car l’énumération faite par le Testateut, fait présumer qu’il n’a voulu léguer que les objets énumérés. La meilleure regle qu’on puisse donner sur cette matière, est de consulter l’acception des termes dans le pays où le Testament a été fait & l’intentier vraisemblable du Testateur ; en observant que quand il n’y a point d’obscurité, il faut préférer le texte du Testament à tout argument d’équipolence.
Le Testateur ne peut léguer par son Testament ses bois à couper assis sur un héritage propre, par la raison que le bois est réputé faire partie du fonds, s’il n’est coupé : Arrét de l’Echiquier de l’an 1246.
On distingue deux especes de Légataires : les uns sont Légataires universels, les autres Légataires particuliers. On appelle Légataire universel celui à qui le Testateur a légué er termes genéraux tous ses biens disponibles par Testament ou par quotité, c’est-à dire, on Normandie, la moitié ou le quart de ses meubles, le quart ou le sixieme de ses acquêts : les Légataires particuliers sont ceux à qui il a été légué une somme fixe ou un corpe certain.
On a jugé par Arrêt du 14 Juillet 16yy, que quand un legs particulier est nul, il retourne au profit du Légataire universel, à l’exclusion de l’héritier ; dans le fait, une femme avoit légué 15o0 livres à une Communanté de Cordeliers ; le legs s’étant trouve nul, il fut adjugé par l’Arrêt au Légataire universel.
On peut léguer sous toutes sortes de conditions ; mais les conditions impossibles sont regardées comme non écrites dans les Testamens, quoiqu’elles influent sur les donations entre : vifs. quand le Légataire est créancier du Testateur, il conserve sa dette, si ce n’est qu’il ne parut clairement par les termes du Testament, que l’intention du Testateur a été de compenser la dette avec le legs. Journal du Palais.
L’ademption des legs présente quelquefois des questions épineuses : quand elle est expresse, il ne peut y avoir de doute ; mais il n’en est pas de même de l’ademption tacite, les Auteurs citent l’alienation ou l’échange de la chose léguée ; quand même l’échange auroit été déclaré nul, sa destruction par cas fortuit ou par la volonté du Testateur, la donation qu’il en auroit faite depuis le Testament, son changement de forme ou de substance ; ils ajoutent les inimitiés capitales, survenues entre le Testateur & le Légataire. On n’a point d’autre principe sur cette matière que celui qui peut sortir des circonstances.
Les Jurisconsultes ont fait de longues dissertations sur le droit d’aecroissement dans les legs : ils ont opposé les principes des Testamens à ceux des donations entre-vifs ; il faut rechercher la solution des difficultés dans le corps du Testament même : on n’applique pas toujours heureusement les distinctions qui naissent des différentes manieres dont les Légataires sont conjoints. VoyeyRicard , des Donat. Part. 3.
La transmission du legs n’a pas moins partagé les Docteurs : ils ont subtilisé sur la délation & la cession du legs, si le Légataire meurt avant le Testateur, le legs devient caduc : on a excepté, en faveur des enfans du Légataire, le legs fait à lui, & aux siens & ayant-causes, quoique le Légataire eût prédécédé le Testateur : Arrêét du Parlement de Paris du 23 Juin 1671 rapporté dans le Journal du Palais. On a jugé au même Parlement que le legs payabse aprés la mort de l’héritier, est transmissible aux héritiers du Légataire décédé avant Phéritier, & qu’il n’est point conditionnel.
L’héritier du Testateur doit prendre garde de se saisir confusément des meubles lorsqu’il y a un Testament, car il supporteroit alors les legs, ditBérault , à quelque sommes qu’ils pussent monter. Cette décision est rigoureuse si un héritier ignore le Testament, qu’il ait employé à son usage quelques meubles de la succession, & qu’il en ait même disposé ; ce n’est pas une raison de le forcer d’accomplir un Testament qui excédera souvent de beaucoup la valeur de la masse mobiliaire.