Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.


CCCCLV.

La lecture se doit faire publiquement & à haute voix, & à jour de Dimanche, issue de la Messe paroissiale du lieu où les héritages sont assis, en la présence de quatre Témoins pour le moins, qui seront à ce appellés, & signeront l’Acte de la publication sur le dos du Contrat, dont le Curé ou Vicaire, Sergent ou Tabellion du lieu qui aura fait ladite lecture, est tenu faire registre ; & n’est reçu aucun à faire preuve de ladite lecture par Témoins : Pourront néan-

moins les Contractans, pour leur sûreté, faire enrégistrer ladite leeture au Greffe de la Jurisdiction ordinaire.

La preuve des solemnités prescrites par cet Article CCCCLV doit résulter de ce qui est écrit sur le dos des contrats ( c’est l’expression de la Coûtume dont la lecture a été faite, & ne se peut suppléer par la preuve qu’on offriroit de faire par témoins : par la même raison, que la forme des Exploits & les solemnités des Testamens, ne peuvent être prouvées autrement, que par ce qui est écrit aux Exploits & Teftamens ;Louet , F. 3. & T. 12. Il faut donc qu’il soit énoncé dans l’endos mis sur le contrat, que la lecture en a été faite publiquement, à haute voix, à l’issue de la Grand Messe paroissiale, par le Curé, Vicaire, Tabellion ou Sergent du lieu, en présence de quatre Témoins, qui soient nommés, & qui ayent signé : cet endos est réputé l’original de la lecture, de sorte que s’il y a quelque défaut dans cet endos, il ne seroit point sup-pléé par le registre de la personne publique, qui aura fait la lecture avec toutes les circonstances ordonnées par la Coutume, comme il a été jugé par un Arrêt du 18 d’Avril 1654, rapporté parBasnage . Ce régistre néanmoins feroit preuve suffisante, si le contrat avoit été perdu. Il faut dire la même chose de l’enregistrement fait de la lecture en la Jurisdiction ordinaire.

Ce n’est pas une nullité, que le Curé, Vicaire, Tabellion ou Sergent soient parens de l’acquereur, dont ont peut inférer que ce ne seroit pas une nullité que quelqu’un des témoins eût cette même qualité : ce qui a été jugé par un Arrét de 1622, cité parBasnage .

Par le Sergent du lieu, on doit entendre celui qu’on appelle Sergent de la Querelle, & il ne suffiroit pas qu’il eût son domicile dans la Paroisse, ni qu’il y git faire des Exploits : jugé par un Arrêt du 3 de lanvier 16t8, rapporté parBasnage .

Les Vicaires & Curés ne sont pas responsables des défauts des lectures qu’ils ont faites comme le sont les Sergens ou Tabellions, qui doivent sçavoir ce qui est prescrit par la Coûtume. Sed quid ; Si le contrat a été perdu, & le registre de celui qui a fait la lecture, l’acquereur sera-t il admis à faire preuve par témoins, que le contrat a été vu, tenu, lu & endossé de ladite lecture, suivant la forme prescrite par cet Article ; Videtur quod sic, par argument des Articles DXXVII & DXXVIII ; mais. il seroit nécessaire que les témoins de l’enquête certifiassent avoir bien connu les signatures mises sur l’endos du contrat.

a présent il n’y a plus que les Notaires qui puissent faire les lectures, suivant l’Edit de 1694, & la Déclaration du 20 Septembre 172o, insérés dans le Recueil à la fin de ce Livre.1


1

Il n’y a pas un mot d’inutile ou d’indifférent dans cet Article, & on doit lui appliquer la maxime de duMoulin , sur Paris, S. 1, n. 9. Particulare est in consuetudinibus b slatutis, quod corum verbis tenaciter est inharendum, nec licet eis detrahere, nec alias interpretari quam loquuntur. Ainsi la Coutume veut que la lecture soit faite à jeur de Di-manche, si elle étoit faite à un jour de Fête, elle seroit nulle, Basnage : il faut que la lecture soit faite à l’issuc de la Messe paroissiale, si elle avoit été faite au Prone de la Messe paroissiale, ou à l’issuc des Vépres, elle seroit inutile : Arrêts des 12 levrier 1été, 11 Décembre 161y, dernier Février 1Sro : Arrét de Réglement du 20 Mars 1020, rapportés par nos Commentateurs. Quatre témoins à ce appellés doivent signer l’acte de lecture, sur ce principe, une lecture lignée de plus de quatre témoins a été déclarce défectueuse, par Arrêts de l’an 16t4, & du 19 Décembre 164s, parce que dans le corps de l’acte on s’étoit contenté de nommer trois témoins, en ajoutant, & autres. Auparavant l’Edit du mois d’Avril 169a, confirmé par la Déclaration du là Septembre 172o, le Curé, le Vicaire, le Sergent ou Tabellion du lieu étoient les ministres de la lecture, & cette diposition a fait naître bien des difficultés, décidées par les Arrêts rapportés parBasnage . Les lectures, suivant l’Edit & la Déclaration, doivent maintenant être faites par les Notaires-Gar-des-Notes de la Province de Normandie chacun dans leur district, a peine de nullité. Les témoins doivent signer l’acte de lecture sur le dos du Contrat, une lecture sur une feuille volante n’exclut donc point le retrait. Le Notaire qui fait la lecture doit signer aprés le le nombre des témoins prescrits, pour obvier à la facilité des signatures frauduleuses : Arrêts des 1s Janvier 1613 & 22 Août 175y ; quand les Contrats étoient passés hors la Généralité de la situation des fonds, on a long temps tolété des lectures sur des copies collationnées du timbre de la Genéralité du lieu dont on gardoit minute : Arrêt du 28 Mars 1721. Mais par Arrêt du 20 Mars ; 760, on a jugé que nonobstant le changement de formule, les dispositions de l’Ordonnance de 1Gpo & les Certificats des Notaires du canton, un acte de lecture étoit nul pour n’avoir pas été mis sur le dos du Contrat : enfin nofficier qui instrumente la lecture, est tenu par la Coutume, de tenir Registre ; ces termes étant impératifs, la disposition paroit de necessité, & la Cour a prescrit une forme à ces Registres, par un Réglement du ro Avril 1610, rapporté par Bérault ; mais la lecture ayant été faite solemnellement, elle ne peut, suivant le même Auteur, être attaquée que par la voie de l’inscription de faux.

Bérault fait une bonne dissertation sur ce qui peut résulter de la parenté de l’acquereur avec un des témoins qui ont signé l’acte de lecture ; il rejette le témoignage des héritiers présomptifs de l’acquereur ou de ses proches parens, qui ont intérét que l’hiéritage demeure dans la famille de celui qui l’a acquis. Basnage flotte sur cette question il ne voit point dans la Coutume qu’elle ait prescrit que les témoins appellés à la lecture seront idoines ; mais des que la Coûtume exige qu’un acte soit certifié de témoins, elle suppose des témoins dont la foi ne puisse être valablement récusée. Si l’Ordonnance, dans les matieres les plus légeres, reproche les parens des parties jusqu’à un certain degré, & dans des cas où le hazard fournit les témoins, pourquoi dans une matière aussi interessante que celles des Retraits, lorsqu’il dépend de l’acquereur de choisir ses témoins, adniettre des personnes que les noeuds de la parenté rendent au moins suspectes

C’est une question célèbre, si l’acquereur est recevable à prouver par témoins que le Contrat d’acquisition a été vu, tenu & lu, dossé de la lecture, signé du Notaire & des témoins requis par la Coûtume ; Bérault avoue que la preuve de ces faits n’est pas recevable, parce qu’elle ne suffit pas : il faudroit encore, selon cet Auteur, que les témoins décla-rassent connoître les faits & la signature des témoins pour prévenir la fraude.Basnage . rapporte un Arrét du 23 lanvier 1623, qui rejette absolument la preuve vocale, sur ce principe, que ce qui consiste en solemnité ne se peut prouver que par les moyens introduits par le droit ; pour moi j’estime que la question est assujettie aux circonstances. Si le retrait n’a été intenté qu’aprés quinze ou vingt ans de possession paisible de la part de l’acquereur, s’il est vraisemblable que le retrayant n’a agi que parce qu’il scavoir que l’acquereur avoit perdu son Contrat, si cet acquereur représente un extrait du Régistre du Notaire, quoique ce Registre ne soit pas signé par les témoins ou enfin un extrait du Contrôle de la lecture on peut alors recevoir la preuve par témoins ; & c’est à peu pres l’espece d’un autre Arrêt rapporté parBasnage . Il y en a qui pensent que le Registre du Notaire fait pleine foi : c’est une crreur : dés qu’il n’est point souscrit des témoins qui ont signé l’original, il ne peut pas avoir la même force.

Le style de procéder de cette Province fait connoître que dans la Vicomté de Roüen, la lecture solemnelle du Contrat de vente avoit l’effet de purger les hypothéques, si les charges sur le fonds vendu n’avoient point été publiées en même-temps que le Contrat, ou que les Créanciers n’eussent pas formé leur opposition dans l’an, & assigné le possesseur de l’héritage pour être payés : cette Jurisprudence qui étoit particulière à la Vicomté de Rouen, a fait penser à M. d’Argentré , qu’en Normandie la lecture du Contrat avoit la même force que l’appropriement de Bretagne, qui est une espèce de décret volontaire ; il est évident que ce grand homme s’est trompe.