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CCCCLXIV.

Tout Contrat d’échange où il y a solde de deniers, quelque petite qu’elle soit, est clamable pour le regard de la terre contre laquellea été baillé argent.

Il est contraire à l’Article CXLV de la Coutume de Paris, par lequel si la soulte ( c’est la même chose que la solde ) est moindre que la valeur de la moitié de l’héritage baillé en contr’échange, il n’y a point d’ouverture audroit de retrait, & si la solde est plus grande que la valeur de cette moitié, le retrait a licu, mais seulement par rapport à la quantité de la solde : Ce qui paroit beaucoup plus raisonnable, que ce qui est ordonné en cet Article CCCCLXIV, qui detruit la nature du contrat, vû qu’un des contractans setrouve dépouillé de la chose qu’il avoit voulu acquérir, en la substituant en la place de celle dont il s’étoit dessaisi, la baillant pour contr’échange : de sorte que son intention qui n’étoit pas de vendre ni d’avoir un prix, se trouve frustrée, & le contrat d’échange transformé en vente, contre la volonté des contractans.1

Il faut remarquer que le retrayant au cas de cet Article CCCCLXIV doit payer la valeur de l’héritage avec lequel la solde a été baillée, suivant l’estimation qui en sera faite par experts ; & il ne suffit pas d’offrir de payer l’estimation. de l’autre héritage contre lequel la solde a été baillée, en déduisant la solde : ce qui a été jugé par un Arrêt du 14 de Mai 1661.


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Grimaudet , du Retrait Liv. 5, Chap. 11, dit qu’il est souvent difficile de disringuer le Contrat d’échange du Contrat de vente : il estime qu’il faut d’abord consulter l’intention des Contractans, ensuite l’énonciation de l’acte ; & au défaut d’éclaircissemons, se déterminer par sa substance même : de sorte que si la soute excede la valeur de l’héritage, ce sera un Contrat de vente ; mais si la soute est de moindre valeur, le Contrat doit être présumé un Contrat d’échange.

Les Coutumes du Royaume conviennent dans un point, c’est que dans le cas d’un échange, fait but à but & sans foute, il n’y a point lieu au Retrait. Le plus grand nombre des Coutumes admettent le Retrait en échange, s’il y a soute excédante la valeur de la moitié de l’héritage ; d’autres désirent seulement que la soute revienne à la juste valeur de la moitié du fonds. La Coûtume de Bretagne, Art. CCCXVI, dit que si les deniers excedent le tiers de la valeur, il y aura lieu au Retrait : mais il s’éleve ensuite dans cette di-versité du droit municipal un autre conflit. La plupart des Coûtumes ne recoivent le Re trait que jusqu’à la concurrence de la portion de la soute ; mais Pérone, Berry, Perche la Marche, Poitou, Xaintonge, Bordeaux, Acs, disent que le Retrait a lieu pour le tout, en remboursant les deniers de la soute, & en payant la valeur & estimation de la chose donnée en contr’échange. Il est clair que de ces Coûtumes les unes considerent le Contrat d’échange avec soute, comme participant à la nature du Contrat de vente & d’échange, les autres le considerent comme un pur Contrat de vente-

La Coutume de Normandie n’exige que la plus petite foute de deniers pour rendre clamable l’héritage contre qui la foute a été donnée, mais elle n’assujettit pas à la clameur Phéritage donné avec soute, d’autant qu’il est réputé le prix de l’autre héritage ; & l’Article CeCLXXXIV d’Orléans nous paroit bien singulier, lorsqu’il décide que tous les héritages donnés de part & d’autre sont sujets à Retrait.

Nous observons au surplus tres-littéralement la disposition de notre Coûtume ; & Bérault dit que si un particulier qui cede à titre d’échange un fonds de moindre valeur que celui qu’il recoit à contr’échange, donne en retour une rente fonciere dont il étoit créancier sur l’autre échangiste, avec les arrérages échus, cet abandon des arrérages donne lieu à la clameur il ajoute qu’il a été jugé par Arrét qu’il y avoit clameur dans un échange, parce que l’un des Contractans avoit eu contemplation du marché, promis à l’autre un septier de froment & deux journées de harnois. Quoique cette clause n’eut point été employée dans le Contrat, elle fût prouvée par le Tabellion & les Témoins instrumentaires.