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CCCCXC.

Et quant aux Prés, Bois, Pommes & autres Fruits naturels, l’Acheteur en sera payé au prorata du temps qu’il aura possédé avant l’ajournement, sur l’estimation qui en sera faite, si mieux le Clamant ne lui veut payer l’intérêt des deniers du Contrat au denier quinze.

Ces deux Articles pourvoient à l’indemnité de l’acquereur, qui ne doit pas être privé de la récompense qui lui est dûe, pour les impenses qu’il a faites pour la culture de l’héritage, ni de l’intérét des deniers qu’il a déboursés pour le prix de son contrat. Quand il a perçu tous les fruits, il est réputé indemnisé, c’est pourquoi il ne peut rien prétendre pour les engrais, airures & se-mences : ce qui se doit néanmoins entendre, quand il a recueilli les fruits qui sont provenus aprés ces engrais, airures & semences. Mais quand il n’a recueilli aucuns fruits depuis, il le faut indemniser par les moyens proposés en ces deux Articles, qui se doivent expliquer par une distinction, qui est que l’héritage retiré est baillé à ferme, ou il ne l’est pas : s’il est baillé à ferme, I’acquereur doit être payé par le retrayant du prix du fermage, par rapportESPERLUETTE par proportion au temps de sa possession : que si l’héritage n’est point af-fermé, alors il faut faire estimer ce qu’il pourroit être baillé à ferme, & donner à l’acquereur la part qu’il pourroit avoir, suivant cette estimation & le temps de sa possession, à moins que le retrayant n’aimât mieux payer l’intérét des deniers du prix du contrat : car quoique cette option semble n’être qu’au cas de l’Article CCCCXC ; c’est-à-dire, quand les fruits naturels, comme les foins, les bois, les pommes & les poires n’ont pas été perçus par l’ac-quereur ; il paroit qu’il est raisonnable de l’admettre dans l’autre cas des fruits andustriels ; c’est-à-dire, qui proviennent de semence, lorsqu’il est nécessaire de faire faire des estimations par experts, quand il n’y a point de prix réglé par aucun bail fait à un fermier : c’est pourquoi on peut dire, qu’il est fort difficile de donner une bonne explication à cet Article CCCexC, la distinetion qui y est faite des fruits naturels, ne paroissant pas fondée en aucune rai-son valable, pour faire un Réglement différent de celui qui avoit été fait à l’égard des fruits industriels, en l’Article précédent, d’autant que l’estimation de ces deux genres de fruits peut être faite semblablement, ou par experts, ou par rapport à ce que les héritages seroient ou pourroient être baillés à ferme ; & qu’il est d’ailleurs équitable, que pour éviter la difficulté des estima-tions, les retrayans ayent la faculté de payer à l’acquereur l’intéret de ses deniers. Il ne faut pas omettre, que cet intéret que la Coutume avoit fixé u denier quinze, est réglé maintenant au denier vingt, suivant qu’il est artesté par l’Article C dudit Réglement.1

Au reste, outre les airures, semence & engrais, dont l’acquereur doit être remboursé, il y a encore les impenses nécessaires, faites pour la conservation des héritages, comme sont les réparations des bâtimens, lorsqu’il a stipulé avec le vendeur, qu’il les pourroit faire jusqu’à une certaine somme, ou quand, s’y est fait autoriser par le Juge, qui a nommé des Experts pour dresser des proces-verbaux ; car pour les autres impenses, quoiqu’utiles, l’acquereur n’en peut demander remboursement, ne pouvant aggraver les charges du retrayant in alieno Cdificavit, aut sevit.

On a jugé par deux Arrêts, l’un du 24 de Fevrier 1656, & l’autre du 19 de Juillet 168s, que l’acquereur n’avoit pû stipuler valablement avec le vendeur, qu’au cas du Retrait, le retrayant seroit obligé de lui payer l’intérét du prix déboursé, suivant l’Ordonnance. Mais cette stipulation seroit valable contre le vendeur, si elle étoit faite pour l’assujettir à payer ledit interet en cas de Retrait, comme il a été jugé par un autre Arrêt du 14 de Décembre 1621, rapporté par Bérault sur l’Article CCCCLXXX, qui semble autoriser cette stipulation : ce qui n’est pas contraire aux deux Arrêts ci-dessus datés, rapportés par Basnage sur l’Articles CCCCLXXXIX, d’autant que dans l’espèce de ces deux Arrêts, le vendeur avoit expressément stipulé qu’il ne payeroit point d’intérêt, mais que le clamant seroit obligé d’en payer.


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Il paroit dur, malgré les précautions de notre Coûtume, de priver, sur un ajournement donné, si vous voulez le 1s de Juin, un acquereur des fruits d’une terre, qui semble inviter le propriétaire à jouir du terme de ses espérances ; il y auroit bien plus de justice à diviser, comme ditGrimaudet , les fruits entre l’acquereur & le retrayant, suivant la durée de leur jouissance, en se faisant raison au prorata du temps, des airures & semences, puisque la date du Contrat d’acquet & celle de l’action en retrait sont les bornes de leur propriété respective.

Quand l’acquereur n’a pas les fruits du fonds le clamant doit en outre le remboursement des frais d’airure & semence, lui payer le prix du terrage en proportion de ce que cet acquereur a possédé, ainsi, supposez un fonds de six cens livres de revenu, & qui auroit pu être affermé à ce prix, mais que l’acquereur faisoit lui-même valoir, si cet acquereur a possédé sept mois, le retrayant lui remboursera pour le terrage sept parts des six cens livres, douze parts faisant le tout.

L’option que l’Article CCCexe donne au retrayant de payer l’intétét du prix du Contrat prorata du temps de la jouissance de l’acquereur, paroit supposer le retrait d’un fonds qui ne porte que des fruits naturels ; car il semble difficile de présumer que les Réformateurs ayent eu l’intention de déférer cette alternative au retrayant, dans le cas où l’acquereur a percu la principale récolte de l’héritage retiré. Aussi Bérault dit que l’émolument des fruits industriels, recueillis par l’acquereur, doit être déduit sur l’interet du prix de la rente.