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DX.

Les deniers des fermages sont censés meubles du jour que les fruits sont perçus, encore que le jour du payement ne soit échu, & pour les rentes foncieres & hypothécaires, les arrérages qui sont dûs jusqu’au jour du déces, sont réputés meubles.

Il faut observer qu’il y a des fruits naturels & des fruits civils que les fruits naturels sont ceux que la nature produit, soit qu’elle les produise sans le travail ou l’industrie des hommes, comme les bois, les prés & les fruits des arbres, soit qu’elle ne les produise que moyennant la eulture & la semence que le laboureur y contribue, comme les bleds & les autres grains.

Les fruits civils sont ceux qui ne proviennent pas de la terre ni des productions qui en dépendent, mais qui proviennent uniquement du consentement des homimes, soit que ce consentement soit par une loi qui est commune à tout un peuple, soit qu’il soit par une convention particulière des personnes qui contractent l’une avec l’autre, par une loi, comme sont les lods & ventes, que la Coûtume appelle trerieme, les confiscations, les deshérences, les redevances Seigneuriales qui sont établis par la loi des Fiefs, par convention, comme sont les rentes foncieres, Seigneuriales & hypotheques, les fermages des héritages, les loyers des maisons, & autres choses semblables.1

Quant aux fruits naturels, la Coutume a statué qu’ils étoient réputés meubles, ou quand ils étoient séparés du fonds, comme les bois, ou quand ils étoient proche de leur maturité, soit apres la Saint Iean, soit aprés le premiet jour de Septembre, par l’Article DV.

Mais à l’égard des fruits civils, on a distingué trois espèces, sçavoir, les fermages qui sont dus, à raison des fruits que les fermiers recueillent, en excécution des baux qui leur ont été faits par les propriétaires des héritages. baillés à ferme : c’est pourquoi leur redevance dépendant de la récolté, elle est réputée ameublie des le temps que les fruits ont été recueillis, ou réputés ameublis, encore que le terme donné au fermier pour payer, ne soit pas échu, comme il est défini par cet Article : Dies cessit, sed nondum venit. La seconde espèce des fruits civils, est des redevances qui s’augmentent tous les jours, comme sont les rentes foncieres & les pures hypotheques, dont les arrérages s’acquierent de jour en jour : Quotidie renascuntur, & deberi incipiunt : Car encore qu’ils ayent des termes de payement reglés par les contrats, avant lesquels on ne peut les demander, néanmoins l’accroissement qui s’y fait apres les jours qui sont écoulés depuis le dernier terme, ( c’est ce qu’on appelle le prorala ) est réputé meuble, & appartient aux légataires ou heritiers des meubles : Ce qu’on ne peut pas dire des arrérages des rentes Seigneuriales, qui ne sont réputés meubles que du jour que le terme de payement est échu, comme il a été remarqué sur l’Article précédent. La troisieme espèce est de ces redevances qui s’acquierent tout-à-coup, que momento deberi incipiunt, comme sont les lods & ventes, ( c’est ce que la Coûtume nomine treixieme ) & les reliefs, qui sont exigibles & meubles des le moment que le cas pour lequel ils sont dus, est arrivé.

On a jugé, que les arrérages des rentes dûes par le Roi n’étoient ameublis que lorsque le Bureau du Payeur est ouvert, pour en faire le payement ; c’esta-dire, quand les deniers lui ont été délivrés : parce que, quoique ces rentes ayent un terme de payement réglé par l’Edit de leur création, elles ne se payent pourtant que suivant la volonte du Roi, qui y impose telle loi qu’il lui plait :

L’Arrêt qui est rapporté par Basnage est du 17 Mai 1668, & est conforme à plusieurs rendus au Parlement de Paris. Quant au loyer des maisons, d’autant qu’il dépend d’un usage continuel & de tous les jours, quoiidie renascitur, & deberi incipit ; c’est pourquoi il est ameubli comme le prorata des rentes foncieres ou pures hypotheques.


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Basnage a cru qu’il étoit besoin de beaucoup de raisonnement pour fixer le sens de cet Article par rapport aux fermages ; il n’est cependant point obseur. Les Réformateurs, pour régler la qualité des fermages, ont décidé qu’il falloir consulter le temps ordinaire, & marqué par la Coutume pour la récolte, & ne pas s’arrêter à l’échéance du terme. Il paroit singulier qu’un Fermier, en anticipant ou en différant la récolte, fixât arbitrairement la qualité des biens d’une succession ; aussi la question a été décidée en faveur des héritiers aux meubles, par deux Arrêts des a8 Septembre 163z & 18 Mars 1633 : il s’agissoit dans le fait de ces Arrêts de fermages, & la succession avoit été ouverte quelques jours apres la Saint Iean ; mais la Cour ordonna que sur le prix du fermage, il seroit fait déduction de la valeur des fruits qui sont réputés immeubles jusqu’au premier jour de Septembre. L’ai appris, depuis ma premiere édition, que ces Arrêts n’étoient point approuvés du Barreau : je dois indiquer les moyens dont Basnage se fert pour soutenir l’opinion contraire. Quand un propriétaire, dit-il, jouit d’un héritage par ses mains, & qu’il décede aprés la Saint Iean, les levées qui lui appartenoient sont censées meubles, & c’est l’espèce de l’Article DV ; mais si l’héritage est donné à ferme, les levées appartiennent au fermier, & les fermages au propriétaire ; & c’est le cas de l’Article Dx, qui décide que les fermages sont censés meubles du jour que les fruits sont percus : si les fermages étoient amobiliés apres la Saint Jean, l’Article deviendroit inutile, & il ne seroit pas même véritable. Cet Auteur ajoute, d’apres M. d’Argentré , que la récolte des fruits se fait ordinairement dans les mois d’Roût & de Septembre. Ne pourroit-on pas répondre que la Coutume n’a eu d’autre intention que celle de déclarer les fermages meubles, quoique le terme de paiement ne fût pas encore échu : qu’elle s’est servie de ces termes, du jour que les fruits sont percus, pour éviter la répétition de l’Article DV, & que les fruits que l’on appelle en cette Province fruits percus, sont ceux qui sont réputés l’être, à la différence des autres Coûtumes où les fruits ne sont meubles que quand ils sont séparés du sol ; & qu’à l’égard des héritiers, il doit être indifferent que le propriétaire ait joui par ses mains ou par un fermier qui le représente ; C’étoit, ce semble, l’avis deBérault . Cependant, comme le fermage est le prix des fruits de toute espece que la terre porte ; & que les uns sont amobiliés, aprés la Nativité de Saint Iean-Baptiste, les autres aprés le premier jour de Septembre on peut également soutenir que la Coutume doit être suivie littéralement, & que les fermages ne sont censés meubles que du jour que les fruits sont percus.

L’Article CCVII de la Coutume d’Orléans, Tit. 10, dispose que les arrérages des rentes foncieres ou constituées & loyers de maisons, sont réputés meubles, lors seulement que les-termes de paiement seront échus. De reconnoit que cet Article est contraire au droit commun, & qu’il ne doit être observé qu’entre le mari & la Lande femme : il eroit cependant qu’il est fondé sur cette raison, qu’à Pégard des loyers & arrérages de rentes il n’est rien dû qu’à l’échéance du terme de paiement. Du Moulin a bien établi le contraire, S. 1, Gl. 1, n. 62, in fructibus civilibus attenditur tempus quo incipiunt deberi, hine est quod in pensionibus domuum, vel mercedibus operarum, que tempus successivum habent, & quotidié deberi incipiunt, inspicitur rata ad acquisitionem inter emptorem S ven-ditorem.

Le même Auteur, n. 53, établit que les fruits qui tombent en un seul instant, sont aussi-tût au rang des meubles in fructibus civilibus qui non successivo tenpore sed semel, & in momento deberi incipiunt, debet attendi tempus quo semel coeperunt deberl.,,. S statim quod feudum venditum est debentur jura feudalia, S illico eorum obligatio esi formata 8 cessit.