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CHAPITRE DIX-NEUVIEME. QUELLES CHOSES SONT CENSÉES MEUBLES, QUELLES CHOSES IMMEUBLES.

C E Chapitre est intitulé, non des choses meubles & immeubles, mais des choses censées ielles, & avec raison : car comme il y a des choses meubles de leur nature, qui sont réputées immeubles : à l’opposite, il y a des choses immeubles, qui sont réputées meubles : de plus, quelques choses sont cen-sées meubles à l’égard du partage qui s’en fait dans les successions, mais qui se vendent comme immeubles, comme il paroit par quelques Articles de ce Chapitre.

La division en meubles & en immeubles dans laquelle toutes les choses qui peuvent être l’objet de la Jurisprudence sont comprises, est plus resserrée que celle du Droit Romain, qui reconnoit un autre genre, sçavoir, les choses incorpo-relles, comme sont les servitudes & ies obligations, jura & nomina, qui à proprement parler ne sont ni meubles ni immeubles, d’autant qu’il n’y a que les choses corporelles, que videri & langi possuni, qui puissent avoir ces qualités & dénominations : mais la Coûtume, sans s’arrêter à cette subtilité, a com-pris toutes sortes de biens dans ces deux genres de meubles & d’immeubles ; parce que les choses incorporelles, en tant qu’elles sont la matière du Droit, sont réputées meubles ou immeubles, par rapport au sujet & au corps, avec qui elles ont une liaison & connexité naturelle.1 Or il est trés-nécessaire de sçavoir bien discerner ces conditions de meubles ou d’immeubles, tant pour la diversité des héritiers, qui font admis ou exelus de succeder aux biens, suivant cette difference, que pour ce qui est spécial dans la Pratique judiciaire, à ces deux fortes de biens : car les meubles se reglent par la Coutume du domicile de celui à qui ils appartiennent, les immeubles par la Coutume du lieu où ils sont situés : les meubles ne sont su-

jets, ni à la suite par hypotheque, ni aux retraits, soit lignagers ou féodaux ni à la clameur révocatoire, ni à l’insinuation, quand ils sont donnés, toutes lesquelles choses ont lieu pour les immeubles. Tous les Articles de ce Titre, déclarent les maximes ou les exemples de ce qui doit être réputé meuble ou immeuble.


DIV.

Obligations & Cédules faites pour choses mobiliaires, sont réputées meubles ; comme en pareil les obligations qui sont faites pour choses immeubles, sont reputées immeubles.

La Coûtume commence ce sujet par les obligations, dont le discernement est plus difficile & plus important, parce qu’étant incorporelles, ce n’est point par le sentiment, c’est-à-dire, par le toucher ni par la vue, mais uniquement par la raison, qu’on en peut connoître la différence, iniellectu non sensit percipiuntur. La regle qui est proposée par cet Article pour faire ce jugement, est qu’il faut considerer si les obligations sont pour choses mobiliaires ou pour des immobiliaires : de sorte que les obligations qui sont pour meubles, doivent être réputées mobiliaires, & au contraire, celles qui sont pour immeubles, sont censées immobiliaires : mais pour juger si les obligations sont pour meubles ou pour immeubles, il faut regarder la fin à quoi tendent les actions qui naissent des obligations ; car si par les actions on demande une chose mobiliaire, les obligations sont pour un meuble, si on conclut à avoir un immeuble, les obliga-tions aussi-bien que les actions qui en dépendent, sont immobiliaires, de maniere que la qualité des obligations & des actions se distingue par le même principe.2


DV.

Les Fruits, Grains & Foins étant sur la terre aprés le jour de la Nativité de Saint Jean-Baptiste, encore qu’ils tiennent par les racines, & ne soient coupés ni sciés, sont néanmoins censés & réputés meubles, fors & réservé les Pommes & les Raisins, qui sont réputés immeubles jusqu’au premier jour de Septembre : & quant au Bois il n’est réputé meuble, s’il n’est coupé.

Cet Article est une répétition du CCCCLXXXVIII, mais a plus d’étendue, car il ne traite pas seulement des grains, mais de tous les autres fruits que la terre produit, comme foins, pommes, poires, raisins & bois taillis ; & partant il renferme plusieurs exemples de choses immeubles, qui sont réputées meubles aprés un certain temps de chaque année ; car les grains, les foins, les fruits des arbres & des vignes, tant qu’ils ne sont point séparés de la terre, qui est comme leur mère & leur nourrice, sont véritablement immeubles faisant partie du fonds : Fruclus pendentes antequam separentur à solo, non proprié frudtus sunt, sed pars fundi, l. 24. ff. De rei vindicatione. Mais la Coutume les répute meubles, ou aprés le vingt-quatrieme jour de Juin ; sçavoit, les grains & les foins ; ou aprés le premier de Septembre ; sçavoir, les pommes, poires & raisins ; parce qu’en ces temps les fruits étant parvenus ou prêts de parvenir à leur maturité, sont en état où de se corrompre, ou de se séparer d’eux-mêmes du fonds qui les a produits. Il n’en est pas ainsi du bois taillis, qui tant qu’il est adhérent à la terre, se nourrit & s’accroit : c’est pourquoi la Coûtume ne le déclare meuble qu’aprés qu’il est coupé.3

On a remarqué sur cet Article, que les Dixmes de toutes sortes de fruits, sont acquises aux Curés aprés la Fête de Paques, ou apres le Dimanche qu’on appelle Lelare : ce qui peut faire inférer, que ces Dixmes sont réputées meubles, même avant la Saint Jean ou le mois de Septembre, vu que si elles étoient censées immeubles avant ces temps, elles devroient appartenir au successeur du Bénéfice. C’est par cette raison qu’on a jugé par un Arrêt du 5 de Juin 1652, rapporté parBasnage , qu’un Curé avoit pû disposer de ses Dixmes par Testament, quoiqu’il fût décédé avant la Saint Iean ;, car on ne pourroit pas dire, que le legs qu’avoit fait ce Curé étant pour causes pieuses, il avoit pû disposer d’une année de son revenu, dont les Dixmes faisoient partie, vu que le droit de jouir du revenu des Benéfices, finit par la mort des Titulaires, & appartient au successeur.4


DVI.

Utensiles d’Hôtel, soit aux Champs ou à la Ville, sont réputés meubles ; mais s’ils tiennent à fer, clou, ou sont scellés à plâtre & mis pour perpétuelle demeure, ou ne peuvent être enlevés sans fraction ou détérioration, sont réputés immeubles.


DXV.

Un Moulin & un Pressoir, Cuves & Tonnes sont réputés immeubles, quand ils ne peuvent être enlevés sans désassembler.


DXVIII.

Les Chaudieres & Cuves des Teinturiers & Brasseurs, étant bâties aux Maisons des Propriétaires, & à eux appartenans, sont censées immeubles, pour demeurer à celui qui aura pour son partage la Maison où sont lesdites Cuves & Chaudieres.

On joint ces trois Articles, à cause de la connexité qu’ils ont ensemble, par la convenance qui est entre les sujets dont ils traitent, & par les maximes par lesquelles ils sont réglés ; car ce sont utensiles qui par leur nature sont véritablement meubles, & sont néanmoins réputés quelquefois immeubles, & par la destination du propriétaire, & par la manière avec laquelle ils sont appliqués aux batimens où ils sont placés. Il ne faut pas prendre ces circonstances separément ; car pour réputer ces utensiles immeubles, il ne suffit pas qu’ils soient atrachés avec du fer ou platre, ou qu’ils ne puissent être enlevés sans fraction ou desassemblement ; il est requis de plus, qu’ils ayent été mis pour une perpétuelle demeure, suivant l’expression de l’Article DVI ; c’est-à-dire, que l’intention de celui qui les a fait placer ait été, qu’ils demeurent toujours au même lieu : c’est pourquoi comme cette intention n’est pas vraisemblable à l’égard de ceux qui n’ont qu’une demeure passagere dans les bâtimens, comme sont les fermiers & les locataires ; les utensiles qu’ils ont mis dans les lieux de leur habitation & aménagement, quoiqu’attachés avec du fer ou du platre, ne doivent pas être réputés immeubles, & faire partie du batiment à l’usage duquel ils ont servi : mais sont censés, meubles, de sorte qu’ils appartiennent ausdits fermiers & locataires, qui ont droit de les enlever, encore que desassemblés & rompus, comme ils enlevent leurs autres meubles, aprés que le temps de leur jouissance est fini. C’est ce que l’Article DXVIII a fort bien distinqué, en déclarant que les cuves & chaudières des Teinturiers & Brasseurs, qui ordinairement ne peuvent être enlevées sans desassembler, ne sont néanmoins réputées immeubles, que quand elles ont été mises par les propriétaires des maisons ; auquel cas seulement, elles doivent appartenir à ceux qui ont les maisons pour leur partage. Ce qu’il faut dire par une raison semblable, des utensiles, tant des pressoirs & des moulins, que des maisons à de-meurer que la Coutume a désignés par le nom d’hôtels audit Article DVI. Il faut voir sur ces Articles la Lo1 17. De actionibus empti, & la Loi dolia, ffDe insiructo vel insirumento legato, qui en établissent les maximes.

On a jugé que les fumiers & les pailles appartenoient à l’adjudicataire par décret, conformément à la Loi 17. 8. fundo, par un Arrêt du 17 de Juin 1649, rapporté parBasnage . On a de plus jugé par un Arrêt du 17 de Janvier 163, rape porté parBerault , que les matériaux préparés pour l’achevement d’un bâtiment, appartenoient à l’héritier, comme une dépendance de l’héritage. Il faudroit juger autrement à l’égard de l’acheteur, lequel ne peut pas prétendre que les matériaux destinés pour achever un bâtiment, lui appartiennent, s’ils ne sont appliqués ou qu’ils ne soient provenus de la démolition d’un ancien bâtiment qu’on fasse réédifier, suivant ce qui est décidé par la Loi 18. S. Tegules, ff. De adtionibus empii.5


DVII.

Les rentes constituées à prix d’argent, encore qu’elles soient racquittables, sont réputées immeubles, & néanmoins, si elles sont baillées en échange contre un héritage, ledit Contrat est sujet à Clameur lignagere.


DXIII.

Rentes constituées à prix d’argent, sont réputées immeubles, jusqu’à ce qu’elles soient rachetées ; & où elles appartiendroient à des Mineurs, si elles sont rachetées durant leur minorité, les deniers du rachat ou le remploi, sont censés & réputés immeubles, & de même nature & qualité qu’étoit la rente rachetée, pour tourner aux Parens du côté & ligne dont lesdites rentes étoient procédées ; ce qui a lieu pareillement pour les deniers provenus du rachat ou racquit des héritages qui leur ont été retirés.

Ces deux Articles doivent être expliqués l’un avec l’autre, d’autant qu’il y est déclaré, que les rentes constituées à prix d’argent, sont réputées immeubles quoiqu’elles soient perpétuellement racquittables : la raison est, la continuation successive, & perpetuelle des arrérages, qui semblent renaître comme les fruits des héritages ; outre que l’hypotheque, par laquelle la Coutume semble plutôt considerer ces rentes, que par l’obligation personnelle est réelle & dépendante du fonds qui y est engagé. Ces rentes reçoivent les dénominations de pro-pres & d’acquêts, de manière qu’il n’y a que les parens du côté & ligne dont elles sont provenues, qui y puissent succéder : de plus, elles se partagent suivant la situation des biens de l’obligé : de sorte que S’il y a des biens en Caux & hors de Caux, la rente se partage entre les héritiers du éréancier, en partie comme si elle étoit un bien de Caux, & en partie comme si elle étoit un immeuble situé hors de Caux, par rapport & proportions à la valeur des biens que l’obligé possede en l’un & l’autre lieu, comme il a été remarqué sur l’Article CCCXXIXx.

En la Coutume de Paris, les rentes constituées sont plutôt estimées par l’obligation personnelle, parce qu’elle est la principale que par l’hypothécaire qui n’est qu’accessoire ; c’est pourquoi on les appelle volantes, parce qu’elles n’ont point de situation fixe & certaine : par la même raison, elles se partagent entre les héritiers, suivant la Coutume du domicile du créancier, en la personne duquel l’obligation est censée réfider, puisque c’est lui qui peut exercer les actions qui en naissent, en cette même Coûtume.

Quand ces rentes sont décrétées, les criées se doivent faire devant la principale porte de l’Eglise paroissiale du saifi, Propriétaire de la rente ; & il faut mettre les affiches & pannonceaux, tant contre la maison de celui qu’on décrete, qu’en la principale porte de ladite Eglise sa Paroisse, par l’Article COCXLVIII. En Normandie au contraire, la saisie & les criées de ces rentes, doivent être faites en la Paroisse en laquelle l’obligé est domicilié, suivant qu’il est artesté par l’Article CexxXIx dudit Réglement. VoyezLouet , R. 31.

Il y a un cas dans lequel les rentes hypotheques sont réputées meubles, qui est, quand elles sont baillées en échange contre un héritage, car elles sont lors considérées comme le prix du contrat d’aliénation, de sorte que les parens du bailleur de l’héritage le peuvent retirer, & les parens au contraire, de celui qui lui cede la rente, ne la peuvent pas retirer : Nec vero quantilatis cum specie fit permuiatio, cûm non possit reditus ipse fungi vice fundi, in cujus locum nihil aliud remaner penes datorem ipsius fundi redempro reditu, quûm nummi, comme en-seigne duMoulin . Ces paroles de l’Article DVII, ledit contrat est sujes à le elameur lignagere, ne se doivent pas attendre précisément pour exelure en ce cas le Retrait féodal, mais comme démonstratives du Retrait le plus ordinaire. Ce qui est dit en la seconde partie de l’Article DXIII, est une suite de l’Article DXII, & sera expliqué en ce lieu.6


DVIII.

L’usufruit des choses immeubles, est réputé immeuble.

Quoique l’usufruit soit une servitude personnelle, qui est due à cause d’un immeuble, il est réputé un immeuble ; c’est pourquoi il est sujet aux Retraits, com-me il a été dit dans le Chapitre des Retraits, & on n’en peut disposer que comme des autres immeubles, soit par donation entre vifs, soit par Testament, suivant l’Article CCCCXXVIII.7


DIX.

Les arrérages des Rentes Seigneuriales ne sont réputées meubles que du jour que le payement est échu.

Toutes les rentes Seigneuriales sont foncieres, irracquittables de leur nature, parce qu’elles ont été créées lors de la tradition du fonds qui y est sujet, & comme une marque de la dépendance & sujétion de l’héritage séparé du Fief : Mais néanmoins les arrérages des rentes Seigneuriales different des arrérages des rentes purement foncieres, par deux conditions : La première est, qu’ils sont prescriptibles par trois ans, lorsqu’ils sont dus à un Fief, qui n’a qu’une Justice fonciere, basse ou moyenne, par l’Article XXXI. L’autre condition est marquée par cet Article ; c’est-à-sçavoir, qu’ils ne sont ameublis que du jour que le payement en est échu : Mais les arrérages des rentes foncieres ne se prescrivent que par trente ans ; c’est pourquoi on en peut demander vingt-neuf années ; & de plus, ils sont toujours meubles, c’est-à-dire, ce qui en est dû jusqu’au jour du déces, suivant l’expression de l’Article DX.8


DX.

Les deniers des fermages sont censés meubles du jour que les fruits sont perçus, encore que le jour du payement ne soit échu, & pour les rentes foncieres & hypothécaires, les arrérages qui sont dûs jusqu’au jour du déces, sont réputés meubles.

Il faut observer qu’il y a des fruits naturels & des fruits civils que les fruits naturels sont ceux que la nature produit, soit qu’elle les produise sans le travail ou l’industrie des hommes, comme les bois, les prés & les fruits des arbres, soit qu’elle ne les produise que moyennant la eulture & la semence que le laboureur y contribue, comme les bleds & les autres grains.

Les fruits civils sont ceux qui ne proviennent pas de la terre ni des productions qui en dépendent, mais qui proviennent uniquement du consentement des homimes, soit que ce consentement soit par une loi qui est commune à tout un peuple, soit qu’il soit par une convention particulière des personnes qui contractent l’une avec l’autre, par une loi, comme sont les lods & ventes, que la Coûtume appelle trerieme, les confiscations, les deshérences, les redevances Seigneuriales qui sont établis par la loi des Fiefs, par convention, comme sont les rentes foncieres, Seigneuriales & hypotheques, les fermages des héritages, les loyers des maisons, & autres choses semblables.9

Quant aux fruits naturels, la Coutume a statué qu’ils étoient réputés meubles, ou quand ils étoient séparés du fonds, comme les bois, ou quand ils étoient proche de leur maturité, soit apres la Saint Iean, soit aprés le premiet jour de Septembre, par l’Article DV.

Mais à l’égard des fruits civils, on a distingué trois espèces, sçavoir, les fermages qui sont dus, à raison des fruits que les fermiers recueillent, en excécution des baux qui leur ont été faits par les propriétaires des héritages. baillés à ferme : c’est pourquoi leur redevance dépendant de la récolté, elle est réputée ameublie des le temps que les fruits ont été recueillis, ou réputés ameublis, encore que le terme donné au fermier pour payer, ne soit pas échu, comme il est défini par cet Article : Dies cessit, sed nondum venit. La seconde espèce des fruits civils, est des redevances qui s’augmentent tous les jours, comme sont les rentes foncieres & les pures hypotheques, dont les arrérages s’acquierent de jour en jour : Quotidie renascuntur, & deberi incipiunt : Car encore qu’ils ayent des termes de payement reglés par les contrats, avant lesquels on ne peut les demander, néanmoins l’accroissement qui s’y fait apres les jours qui sont écoulés depuis le dernier terme, ( c’est ce qu’on appelle le prorala ) est réputé meuble, & appartient aux légataires ou heritiers des meubles : Ce qu’on ne peut pas dire des arrérages des rentes Seigneuriales, qui ne sont réputés meubles que du jour que le terme de payement est échu, comme il a été remarqué sur l’Article précédent. La troisieme espèce est de ces redevances qui s’acquierent tout-à-coup, que momento deberi incipiunt, comme sont les lods & ventes, ( c’est ce que la Coûtume nomine treixieme ) & les reliefs, qui sont exigibles & meubles des le moment que le cas pour lequel ils sont dus, est arrivé.

On a jugé, que les arrérages des rentes dûes par le Roi n’étoient ameublis que lorsque le Bureau du Payeur est ouvert, pour en faire le payement ; c’esta-dire, quand les deniers lui ont été délivrés : parce que, quoique ces rentes ayent un terme de payement réglé par l’Edit de leur création, elles ne se payent pourtant que suivant la volonte du Roi, qui y impose telle loi qu’il lui plait :

L’Arrêt qui est rapporté par Basnage est du 17 Mai 1668, & est conforme à plusieurs rendus au Parlement de Paris. Quant au loyer des maisons, d’autant qu’il dépend d’un usage continuel & de tous les jours, quoiidie renascitur, & deberi incipit ; c’est pourquoi il est ameubli comme le prorata des rentes foncieres ou pures hypotheques.


DXI.

Deniers donnés pour Mariage des Filles, par Pere, Mere, Aïeul ou autre Ascendant, ou par les Freres, & destinés pour être leur dot, sont réputés immeubles & propres à la Fille, encore qu’ils ne soient employés ne consignés ; & où autres personnes auroient donné deniers en faveur de Mariage, pour être convertis en héritage ou rente au nom de ladite Fille, sont pareillement réputés immeubles, & tiennent nature d’acquêt en la personne de la Fille.

Dans cet Article & les deux suivans, on propose plusieurs cas ausquels des deniers sont réputés immeubles. Un de ces cas est déclaré par cet Article ; sçavoir, quand des deniers sont donnés à une femme, en considération de son mariage, & pour être sa dot : En quoi la Coûtume use de distinction ; car si ces deniers ont été donnés par le pere, la mere ou les autres ascendans, ou par les freres, ils sont réputés non-seulement immeubles, mais propres de la femme, pour-appartenir à ses parens de son côté & ligne, quand il y a ouverture à y succéder, encore que ces deniers n’ayent été employés, c’est-à-dite, remplacés en héritages ou en immeubles, ni consignés sur les biens de son mari : Que si ces deniers ont été donnés à la femme par toutes autres personnes, pour être employés en achat d’héritages, ou pour être constitués en rente en son nom, ils sont pareillement réputés immeubles, encore que la destination n’ait point été executée ; mais ils sont censés acquêts de la donataire. Or les deniers qui sont réputés propres par cet Article, conservent toujours cette qualité, & s’ils ont été consumes par la femme, ses héritiers au propre en peuvent demander le remplacement aux héritiers aux acquêts : Ce qui a lieu, non-seulement pour les deniers pronis par les ascendans ou par les freres, pour la dot 3 mais même à l’égard des deniers provenans des successions de ces personnes, quand ils sont réputés dotaux, comme il a été jugé par plusieurs Ar-réts.

La Coutume de Paris en l’Article XCIII, contient une disposition quasi semblable à celle de cet Article ; mais elle differe, en ce qu’il est requis, afin que les deniers soient réputés immobiliers, qu’il ait été stipulé qu’ils soient employés en achat d’héritages, & en ce cas, on a fait distinction du mart & de la femme : Car à l’égard du mari à qui ces deniers ont été donnés par ses ascendans en faveur de mariage, lorsqu’il ne les a pas effectivement remplacés en achat d’héritages, ils ne sont pas réputés propres, sinon pour l’ef-fet d’empécher qu’ils n’entrent dans la communauté : Mais à l’égard des héritiers du mari, ils sont toujours censés meubles. Ce n’est pas la même chose quand les deniers ont été donnés à la femme par ses ascendans en faveur de mariage, & pour être employés en achat d’héritages ; car encore que l’emplos n’en ait pas été fait par le mari, ils sont réputés immobiliers, & propres de la femme, afin que ceux de son côté & ligne y puissent succéder, à l’exclusion des héritiers aux meubles. Ainsi en ce cas, si la femme décede sans enfans, le mari ne peut pas prétendre part à ces deniers, comme faisant partie des biens de la communauté, & si elle laisse des enfans qui meurent sans enfans, le pere ni les freres nés du second mariage du pere, ne peuvent pas succéder à ces deniers, comme s’ils étoient des meubles, mais ils appartiendront aux héritiers qui seront du côté de la femme, à qui ils avoient appartenu. On a jugé en la Coutume de Paris, que les deniers promis au cas dudit Article CXCIII, n’ayant point été payés par les donateurs, la destination qui avoit été faite desdits deniers, pour être employés en achat d’héritages, n’en changeoit point la nature, & n’avoit pas d’au-tre effet que d’empécher qu’ils n’appartiennent aux mariés, comme des effets & des meubles de leur communauté, car à l’égard de toutes autres personnes, ces deniers sont des meubles, à moins que le donateur, au lieu de les payer ne se fût obligé à en faire la rente, auquel cas ils seroient immobiliers. VoyezLouet , D. 66. P. 40 & R. 44.

En Normandie, afin que les deniers donnés pour dot, par les ascendans ou par les freres, soient réputés immeubles & propres, il suffit qu’ils ayent été promis pour la dot, & il n’est point requis qu’il ait été stipulé, qu’ils soient employés en achar d’héritages, ni qu’ils ayent été payés par l’obligé, ou qu’il se soit obligé d’en faire l’interet.10


DXII.

Deniers donnés à Enfans mineurs d’ans, pour être employés en achat de rente ou héritage, sont réputés immeubles pendant la minorité des Donataires, & tiennent lesdits deniers donnés & héritages qui en sont acquis, nature d’acquêt.

Cet Article & la seconde partie du DXIII, contiennent des cas différens, ausquels des deniers appartenans à des mineurs sont réputés immeubles. Celui qui est proposé en cet Article, est quand des deniers ont été donnés à des mineurs, pour être employés en achat d’héritage ou de rente ; c’est-à-dire, à une constitution d’une nouvelle rente, ou à l’acquisition d’une ancienne, par le moyen d’un transport, qu’on peut appeller achat : car les deniers ainsi donnés, encore que la destination du donateur n’ait point été effectuée, sont réputés immeubles & acquêts pen-dant la minorité des donataires.

Mais dans la seconde partie de l’Article DXIII, il est déclaré, que si des rentes appartenantés à des mineurs ( il faut entendre, par droit successif ) leur sont racquittées, les deniers du racquit sont non-seulement réputés immeubles, mais propres, pour retourner en cas de mort des mineurs, à leurs parens du côté & ligne dont les rentes étoient procédées : il est ajouté ensuite, que cela a pareillement lieu pour les deniers provenans du rachat ou racquit des héritages qui auront été retirés des mineurs ; ce qui signifie, que les deniers qui proviennent de la fuccession que peuvent souffrir les mineurs, des héritages qui leur sont échus par succession non-seulement au cas des Retraits, qui peuvent être faits, aux droits, ou de lignage, ou de fief, ou de Lettre lue, ou de convention ; mais même au cas des rescisions des contrats, comme par clameur révocatoire, ou par relevemens pour causes de dol, de violence, ou de l’incapacité des vendeurs, sont réputés immeubles & propres.

Ces fictions de la Coutume, sont en faveur des mineurs & de leurs héritiers, mais ne s’interprétont pas au desavantage des mineurs : car ces mêmes deniers ne sont pas réputés immeubles, pour rendre leur remplacement difficile ; puisque les Tuteurs les peuvent employer à l’acquit des dettes des mi-neurs, en achat d’héritage ou en constitution de rente, suivant qu’eux & les parens le jugent plus utile pour le bien des mineurs, sans qu’il soit besoin ni que le décret du Juge intervienne, ni qu’on y observe aucune des formalités qui sont nécessaires dans l’aliénation des autres immeubles appartenans aux mineurs.11 On peut remarquer, que la faveur donnée aux mineurs, est cause que les deniers qui leur appartiennent, peuvent être bailles à intéret, à la charge de les restituer

dans un certain temps de la tutelle, oa incontinent aprés la majorité, aprés laquelle cet intérêt cesse : c’est pourquoi on l’appelle pupillaire. Mais les Communautés & les Eglises, quoique réputées avoir les priviléges de minorité, n’ont pas ce privilége, de pouvoir bailler leurs deniers à interêt, sans aliéner le prix principal : comme il a été jugé contre les Trésoriers d’une Eglise Paroissiale, par n Arrêt du 17 de Juin 1687, rapporté par Basnage ; l’obligé fut déchargé de la deman-de du capital, à moins que les Tréforiers ne voulussent consentir, que les arrérages qu’ils avoient recus, seroient imputés en diminution du principal qu’ils avoient demandé.12


DXIV.

Office vénal est réputé immeuble, & a suite par hypotheque, quand il est saisi sur le Débiteur par autorité de Justice, avant réfignation admise, & provision faite au profit d’un tiers, & peut être adjugé par décret.

Il est devenu plus général qu’il n’étoit dans l’intention des Réformateurs de la Coutume, parce que tous les Offices sont devenus publiquement vénaux : il faut voir ce qui a été remarqué sur l’Article CCCXXIx touchant les Offices Antiquo Jure, les Offices sembloient avoir quelque suite par hypotheque, encore qu’ils n’eussent pas été saisis sur le débiteur, parce que les créanciers du vendeur ou résignant, avoient droit de s’opposer à la réception de l’acheteur nouveau titulaire, pour le faire condamner à représenter le prix de son contrat, afin qu’il fût distribué suivant l’ordre de leur créances : mais Jure noyo, depuis que les Provisions d’un Office ont été scellées, sans que les créanciers du résignant ayent mis leur opposition au Sceau, lesdits créanciers peuvent bien user de saisie & arrêt sur le prix, mais ne peuvent plus empécher la réception du résignataire, parce que le nouveau Sceau fait cesser toutes les hypotheques ausquelles l’Office étoit engagé, pendant que le résignant en étoit titulaire. Par les oppositions mises au Sceau, les droits des opposans sont conservés sur l’Office, parce que les provisions n’en sont délivrées qu’à la charge des oppositions, qui ne profitent qu’à ceux qui les ont mises, & non aux autres créanciers, quelque privilége qu’ils ayent sur l’Office, qui ne peuvent rien prétendre au prix, au préjudice des opposans.13


DXVI.

Pépinieres, Chênotieres, Haîtrieres, Oulmieres & autres jeunes Arbres, provenus de plant ou de semence, & tenus en réservoir pour être transplantés, suivent le fonds ; néanmoins les Veuves, Usufruitiers & autres Héritiers, prennent part aux Pépinieres, comme au Meuble, avenant la dissolution du mariage en l’année qu’elles doivent être levées.


DXVII.

Pareillement les Fermiers ayant planté lesdites Pépinieres, Chênotieres, Oulmieres, & autres nourritures de semblable qualité, les peuvent enlever après le Bail expiré, en laissant la moitié aux Propriétaires, pourvu qu’elles ayent été faites du consentement du Pro-priétaire, ou six ans avant la fin du Bail.

Ces deux Articles font connoître, que quoique les pépinieres, chénotieres & tous autres jeunes arbres, provenus de semence ou de plant, & qui sont en réservoir ; c’est-à-dire, qui sont destinés pour être transplantés, suivent le fonds : ce qui fignifie, que non-seulement ils sont immeubles, & partant qu’ils ne peuvent être compris dans une saisie mobiliaire, mais qu’ils appartiennent à celui à qui le fonds appartient soit par titre de vente, soit par partage. à moins qu’ils n’ayent été expressément réservés : néanmoins, quand le propriétaire décede dans l’année que ces pépinieres doivent être levées, c’est-à-dire, transplantées ; en ce cas, les veuves qui sont héritieres, les usufruitiers comme le mari jouissant à droit de viduité & ses autres héritiers, ( c’est-àdire, les héritiers aux acquêts & meubles ) prennent part à toutes ces pépinieres, comme si elles étoient des meubles : & c’est là le cas décidé en l’Article DXVI dont la décision ne s’étend pas aux légataires universels des meubles, qui ne sont pas proprement héritiers, parce que leur droit ne provient pas de la Loi, qui seule peut donner le nom & le droit d’héritier, mais de la volonté d’un particulier, qui est le testateur, qui n’a pas le pouvoir de faire une institution d’héritiers : car il a été jugé par un Arrêt du s de Juin 16o9, rapporté parBérault , que ces légataires ne pouvoient prendre part aux pépinieres, au cas dudit Article DXVI.

L’Article DXVII propose un autre cas, qui est des Fermiers qui ont semé ou planté les pepinieres : car il est statué, que si ces pépinieres ont été faites du consentement des propriétaires, ou six ans avant la fin des baux, que les Fermiers les pourront enlever, en laissant la moitié aux propriétaires ; ce qui fait connoître que les pépinières, en ce cas, sont réputées meubles. Mais pourquoi les Fermiers en ces cas ne pourront-ils pas enlever tous les arbres de ces pé-pinieres, comme provenus de leur industrie, de leur culture & de leurs impenses, & pourquoi sont-ils obligés d’en laisser la moitié aux propriétaires ) Ne doit-on point dire, par une raison d’équité, que cette condition de laisser la moitié aux propriétaires, se doit restreindre au cas que les pépinieres n’ont pû être transplantées avant la fin du bail ; auquel cas, devant encore rester sur le fonds pour y acquerir leur accroissement, il est juste que le propriétaire soit indemnisé par une partie des arbres qui seront crûs sur son héritage, aprés le bail de son Fermier expiré.14


DXIX.

Les Bateaux ou Navires sont censés meubles ; & néanmoins après qu’ils sont saisis par autorité de Justice pour être décrétés, sont réputés immeubles.

Il n’étoit pas nécessaire de déclarer que les Bateaux & les Navires sont censés meubles, puisqu’ils le sont évidemment : mais il étoit plus convenable de déclarer le cas auquel ils sont réputés immeubles, qui est quand ils sont vendus par décret, suivant les formalités prescrites par l’Article DLXXXI. On a jugé que les Bateaux qui n’avoient point encore été mis à l’eau, & qui étoient demeurés sur les chou-quets ou étançons sur lesquels ils avoient été bâtis, ne pouvoient être saisis ni vendus. autrement que par décret, par un Arrêt d’Audience, du 1s de Iuillet 165o, rapporté parBasnage .15


DXX.

Les Poissons qui sont en Etang ou Fosse, sont réputés immeubles, mais quand ils sont en Réservoir, sont réputés meubles.

Il devroit paroître étrange que des choses qui non-seulement peuvent être facilement transportées d’un lieu à un autre, mais qui ont un mouvement continuel, au moyen de la vie animale, soient réputés immeubles : néanmoins il ne faut pas restreindre cette fiction aux poissons, elle s’étend aux pigeons des colombiers, aux lapins de garenne ; & même suivant l’opinion de quelques Auteurs, aux mouches à miel, parce que tous ces animaux sont repu-tés une dépendance du fonds sur lequel ils sont nourris, & dont ils augmentent le revenu, ayant une succession perpétuelle, tanquam alii fructus renascen-tes.16



1

Les anciennes Loix d’Angleterre & d’Ecosse font souvent mention du terme Chatel ou Catel employé dans notre vieux Coûtumier ; il sianifie suivantSkinner , les richesses que l’on a en troupeaux ; mais dans les Loix de Guillaume le Conquérant, Chap. 4, il désigne des meubles de toute espèce ; les Praticiens Anglois entendoient encore par le chatel certains. immeubles qui n’étoient tenus ni en Franc-Aleu, ni en Fief. l’uyes Edouard,Cook , surLittleton , Sect. 177.


2

Notre Coûtume ne s’exprime pas comme celle de Paris, Art. LXXXVIII, qui dit qu’il n’y a que deux sortes & espèces de biens seulement, les meubles & immeubles ; mais elle fait assez entendre par l’Article DIV, en distribuant les obligations dans l’une de ces deux classes, qu’elle ne connoit point de biens d’une troisieme nature, nihil est tertium.

Admirez la singularité du droit Coutumier, il se plait à faire perdre à nos biens leurs qualités primitives ; il immobilise les meubles, & il mobilise les héritages. Je n’entrerai point dans les regles de la mobilisation des fonds, ni dans le détail de ses effets ; elle est d’usage dans les Pays de communauté, & elle y cause bien des embarras. Voyer Renusson leBrun , Duplessis de la commun. Vuoyer aussi le Traité des Propres.

La fiction, qui d’un meuble constitue un immeuble, a aussi sa bizarrerie ; ce qu’une Coutume vous fait considérer comme immeuble l’autre vous le fera envisager comme un sim-ple mobilier : notre Coutume va quelquefois plus loin : car de simples deniers elle compose non-seulement un immeuble, mais un propre de disposition & de succession. Bérault part de l’idée que font naître ces métamorphoses, pour faire sentir avec sa précision ordinaire tout l’intérét des principes contenus en ce Chapitre. Si vous ne connoissez la qua-lité que la Coûtume imprime à nos biens vous ne parviendrez jamais à régler les droits des heritiers des meubles & acquêts, ni ceux des légataires universels ou particuliers, vous ne pourrez pas séparer les cas où le retrait est admis de ceux où il est rejetté ; & quand il faudra vendre les biens des mineurs, comment déciderez-vous que telle aliénation ne peut se faire qu’en vertu du décret du Juge & aprés les solemnités prescrites par les Réglemens Etudiez donc ce Chapitre, ditBérault , mais portez plus loin votre application ; consultez les Auteurs & la Jurisprudence des Arrêts.

Nous avons une maxime générale qu’il ne faut pas oublier, elle est écrite dans l’Article LXVI du Reglement de 1666 ; ne donnez pas aux choses une qualité qu’elles n’ont point, si la Coutume ou la Jurisprudence ne vous y autorise ; n’étendez pas la fiction au-dela de ses bornes, aussi-tôt que vous aurez satisfait à toute la Loi ; hatez-vous de rentrer dans le droit général.

La qualité des actions ne se discerne pas facilement ; on croit avoir dit quelque chose quand on a affirmé que les actions sont comme les obligations, cette théorie n’apprend rien. Du Moulin dit que les obligations sortissent la natute des objets qu’elles contiennent, tune nomina judicantur mobilia vel immobilia, inspecto co ad quod competunt, & prout alterutris magis aequiparantur. Bérault explique la pensée de duMoulin , suivant notre Droit municipal, si votre action tend principalement à vous procurer la délivrance d’un immeuble, l’obligation, dit ce Commentateur, sera immobiliaire ; mais si vous n’étes fondé qu’à reclamer des deniers ou des meubles d’une autre espece, votre obligation sera purement mobiliaire ; ainsi l’obligation qui appartient à l’acquereur pour se faire délivrer Phéritage vendu est immobiliaire ; & lorsqu’une fois il a formé la demande en délivrance, elle ne change pas de nature, quand même elle seroit dans la suite resolue en intéréts, ainsi, si vos héritiers fouffrent l’éviction d’un fonds que vous aviez acquis, les intérets d’éviction seront non-seulement immeubles, mais propres ; ainsi une action en remplacement des propres aliénés est immobiliaire & propre, quoiqu’au défaut d’acquêts l’effer de l’obligation de remplacer tombe sur les donataires ou légataires des meubles ; mais si j’ai vendu un fonds, & que le prix en soit du, ce prix, hors le seul cas du remplacement, n’est qu’un mobilier ; & l’action étant mobiliaire dans son principe, elle auroit cette qualité, quand en événement l’acquereur seroit obligé d’abandonner le fonds par le défaut de payement. Nos livres sont remplis de pareils exemples

Nos Auteurs traitent en cet endroit de la validite des obligations. Toute obligation contraire aux bonnes moeurs, consentie par force, par crainte, ou par ignorance de fait qui ne peut être imputée, n’est point valide en droit ; mais l’obligation d’un prisonnier de guerre pour sa rançon ou celle que la Justice forme, ne peut être attaquée, sous pré : exte du défaut de liberté. On a toujours rejetté dans la bonne police les billets faits pour jeu, quoique déguises pour valeur recue. Par Arrêt du 13 Juillet 16yy rapporté dans le Journal des Audiences, il fut juge que la preuve par témoins étoit recevable qu’une obligation, causée pour valeur recue, étoit pour jeu, quoique la somme excedit 1oy livres & on a, par Arrét du Parlement de Normandie du 23 Février 1vzs, condamné ce palliatif : on a encore, par Arrét du premier Juillet 1783, déchargé, sur le vù des preuves, un Avocat âgé de plus de quarante ans, de la demande formée par un Gentilhomme d’un billet de 20yy liv. fait pour jeu, quoique concu pour prét ; plusieurs de MVI. pensoient que l’on devoit ordonner la confiscation de cette somme, en tout ou partie, au profit de l’Hopital, parce que l’Avocat, homme de Loi, n’étoit pas exempt de faute. Des Joueurs ont été condamnés solidairement par autre Arrêt du 22 Juillet 1760, à rapporter ce qu’ils avoient gagné à un mineur, & en 3000 liv. d’intérêts envers le pere plaintif. Voyer le Recueil des Edits,Denizart , Guvres de M. d’Aguesseau . Les gageures, telles que nous les pratiquons, devroient être mises au rang des jeux de hazard, sice n’est qu’entre Commercans elles n’ayent du rapport avec le cautionnement ou la police d’assurance : raffinement assez éloigné de la simplicite du commerce. VoyezGillet , de la ire Edition, Plaidoyer ret.

L’obligation à payer quand on sera Prêtre, mort ou marié, est encore du nombre de ces obligations que la Loi réprouve, on a ordonné par Arrét qu’il seroit fait estimation d’un cheval vendu par un prix exorbitant, mais qui n’étoit exigible que par l’événe-ment d’un de ces trois cas ; & on a condamné par le même Arrét l’acheteur à payer le prix de l’estimation, & l’intérét du jour de la livraison du cheval : la plupart des marchés de cette forte, ou ceux qui en approchent, sont usuraires & illicites, on doit punir sévérement ceux qui les font & les provoquent. VoyezBérault ,Basnage , Traité des Obligations de M.Potier .

Le créancier n’est point obligé de justifier de la cause de l’obligation, & elle n’est point annullée par une fausse énonciation : Arrêts des 2S Février 1é4d, & la du même mois I7la ; mais on peut, selon les circonstances, obliger ce même créancier d’affirmer que la somme qu’il demande lui est légitimement due. Poyer le Journal du Palais.

Quand les obligations forment un engagement respectif, elles sont nulles, si l’une des parties peut indépendamment de l’autre en détruire l’effet. Sur ce principe, on a déclaré nuls au Parlement de Paris, par Arrêt du 30 Mai 1736, deux Ecrits produits au proces, faute d’y avoir exprimé qu’ils étoient faits doubles.


3

La plupart des Coutumes ne réputent les grains meubles que quand ils sont coupés quia nondum collecii pars fundi videntur, nous avons cru devoir nous écatter de cette Loi pour avoir une regle certaine ; mais Bérault a bien remarqué que les fruits dont il est parlé. dans cet Article, sont immeubles jusqu’au jour de la Nativité de Saint Iean Baptiste, & tout ledit jour.

On fuit la Coutume du lieu où les fruits sont excrûs pour régler leur qualité au temps. de l’échéance de la succession, quoiqu’on les partage suivant la Coutume du domicile du défunt.

Des le temps deBérault , les débiteurs pratiquoient des fraudes pour priver leurs créanciers. des levées sur leurs héritages ; il conseille aux créanciers de faire arrét avant la Saint Iean, à charge de le réitérer quand elles seront amobiliées : un Réglement de la Cour du S Juin 1682, déclare les saisies faites par les créanciers des levées de leurs débiteurs, la veille de la Saint Jean, bonnes & valables, & déclare nulles les ventes que les débiteurs en auroient faites le lendemain du jour de Saint Iean.

Le sarrasin n’étant communément qu’en pampre ou feuille le lendemain de la Narivité de Saint Iean, & n’étant bon à récolter qu’environ à la moitié du mois de Septembre ; il semble qu’il y a de la précipitation à le déclarer meuble des la fin de Juin ; on doit penser qu’au temps de la réformation de la Coutume, ce grain n’étoit pas d’un aussi grand usage qu’aujourd’hui mais il faut un Réglement pour interprêter la décision générale.

Au reste, la disposition de la Coûtume ne doit pas géner les propriétaires, on a par ce principe condamné la prétention des Hauts-Justiciers & Seigneurs de Fiefs, qui sous le prétexte de conserver leur gibier s’ingéroient d’interdire aux propriétaires la liberté de couper, avant la Saint Iean, les trefses, luzernes & autres grains en verd, destinés pour la nourriture de leurs bestiaux, par un Réglement de la Cour du 23 Mars 1741, renouvelle le 13 Mai 1745 : ces Réglemens prononcent des peines séveres contre les Juges qui, au lieu d’en maintenir l’exécution, favoriseroient des vues contraires au bien public.

La Coutume de Paris dit que le bois coupé est meuble, Article XCII, notre Coûtume a une disposition négative qui est beaucoup plus forte, puisqu’elle porte que le bois n’est réputé meuble, s’il n’est coupé.Ferriere , Article Cexx de Paris, Gl. 2, n. 16 & Gl. 3.

S. d4, n. 4, prétend que quand la coupe du bois-taillis est prête à faire lors du mariage, elle tombe dans la communauté, sans déduire le prorata du temps antérieur au mariage : c’est bien réputer le bois-taillis meuble, dans le temps ordinaire de la coupe, encore qu’elle n’ait pas été faite. Nous ne suivrions point cette idée en Normandie ; & quand le proprietaire auroit laissé passer le temps de la coupe, le bois taillis ne seroit pas moins immeu-ble jusqu’au temps où il seroit coupé. Le bois-taillis est bien considéré comme un fruit, mais suivant le droit commun aprés qu’il est percu, c’est-à-dire, séparé de la terre.


4

Routier, dans sa Pratique Bénéficiale, Part. 1, Chap. 5, Quest. 2, prouve bien que quand les Curés décedent dans le Diocese d’Evreux, aprés les premieres Vépres, & dans les autres Dioceses de la Province, le Samedi-Saint aprés l’eau-benite, que l’on appelle ordinairement l’eau-benite de Paques, les Curés ont acquis les fruits de leur Benéfice. Il rapporte cependant un Arrêt du 12 Mars 1717 rendu en la première des Enquêtes, au Rapport de M. de Gravoron, sur l’appel d’une Sentence du Bailliage d’Avranches, entre le sieur Bagot, nouvellement pourvu de la Cure de Landelle & les héritiers du dernier Titulaire, qui paroit contraire à sa décision : l’Arrét fut rendu contre les héritiers ; mais Rou-tier observe que le motif de l’Arret étoit fondé sur ce que le fait du déces du dernier Titulaire, aprés l’eau-bénite de Paques, n’étoit pas suffisamment établi ni prouvé.


5

Il est assez difficile d’établir une regle générale sur cette matière, le motif qui porte à placer une chose au rang des meubles ou des immeubles, est tiré plutôt du fait que du droit, verbum mobilium non ad legum vel Legistatorunt ambiguuni, sed ad fadtun s communent loquendi usum refertur, ditDupont , sur Blois, Chap. 11. D’Argentré , sur l’Art. CCCCVIII de Bretagne, Gl. 2, n. 2, s’exprime d’une maniere précise, onine igitur mobile, dit-il, cum applicatione perpetuâ corporibus alterius nature, id est, imniobilibus adhibitum, insertum, offixum, infossum est, immobile fit quia alterius corporis diverse nature pars sit & per se censeri desinat.Brodeau , sur l’Article CXC de Paris, dit que le meuble de cette qualité, étant incorporé à l’immeuble, n’est plus possédé comme une chose mobiliaire, particulière, détachée & subsistante d’elle-même, mais comme une partie intégrale & indivise d’un corps. immobilier.

La perpétuité de la demeure & l’incorporation de la chose mobiliaire à un édifice, à un corps immobilier, ne se présume pas : lorsque la destination a été faite par le locataire ou fermier, elle n’est que passagere, puisqu’elle ne peut être que pour le temps de la durée du Bail ; ainsi, comme le locataire ou le fermier peut enlever ce qu’il a fait apres que le Bail est fini, cet ouvrage n’a aucun caractere d’immobilité. On peut envisager autrement l’usufruitier, tel que le Titulaire d’un Benéfice ou la Douairiere. On présume d’abord que l’usu-fruitier n’a voulu travailler que pour lui & pour le temps de son usufruit : & quand rien ne résiste à cette présomption, la regle la plus générale est de permettre aux héritiers de l’usufruitier d’ôter tout ce qui peut être enlévé sans fraction ni dététioration ; mais on décide que les ouvrages sont inséparables de la chose, lorsque les circontances annoncent une destination perpétuelle, & qu’il paroit que l’intention de l’usufruitier a été d’améliorer le bien dont il jouissoit.

Les glaces, dont on orne aujourd’hui les manteaux de cheminées, ou les entre-deux des fenêtres, sont réputées immeubles, si elles sont scellées en platre & mises par le propriétaire à perpétuelle demeure ; la distinction de droit, à l’égard des Statues, esti que si elles sont retenues avec quelques pattes ou crampons de fer qui soient scellés dans la muraille ou sur des piédestaux qui tiennent au rez-de-chaussée, elles font partie de la maison ; mais si elles ne sont point ainsi attachées, elles sont meubles. On a jugé au Parlement de Paris, par Arrét du 11 Juillet 1738, rapporté dans le Recueil de M. du Rousseaud de la Combe, Chap. 38, meubles, douze bustes, placés à la galerie du Château du Bouchet, par le propriétaire, quoique les piédestaux fussent scellés à chaux & à ciment sur le plancher, parce qu’ils étoient séparés du mur, auquel ils n’étoient ni incorporés ni attachés. MaisBardet , Tom., Liv. 3, Chap. 56, rapporte un Arrêt du 11 Juillet 1829, par lequel il a été jugé que des statues mises par un Chanoine de Mâcon, dans une galerie qu’il avoit faite à sa maison canoniale & à l’escalier de cette galerie, étoient immeubles, parce qu’elles étoient attachées au mur, qu’il avoit été fait des jambages qui avançoient d’environ un pied pour les foutenir, & que toute la galerie étoit peinte, excepté à l’endroit des statues, ce qui établissoit une destination perpétuelle.

On peut aujourd’hui compter sans danger les pièces d’artillerie parmi les meubles elles ne servent qu’à égayer les fêtes de la campagne : dans les temps reculés, l’artillerie des Châteaux, destinée pour leur défense en temps de guerre en étoit inséparable, parce que son objet étoit perpétuel.

Les ornemens d’une Chapelle, principalement lorsqu’il y a un Service fondé à perpétuité, suivent le sort de la Chapelle, & sont réputés immeubles, comme en étant une dé-pendance nécessaire.

D’Argentré ne voit qu’avec douleur démeubler les caisses d’orangers ou autres arbustes tares qui décorent un parterre : l’agrément, ce maître des François, auroit dû leur faire adopter l’opinion de M. d’ Argentré ; cependant elle n’a pas prévalu.

Les matériaux, préparés ou amenés sur le lieu pour batir, tiennent nature de meubles, quare fit ut quandiu corporis sui sunt ( mobilia ) dit d’Argentré , Article COCeXVIII, n. 7, talia judicanda sunt qualia natura esse ostendit, sine consideratione destinationis & attributionis praparate. Bainage rapporte, apresBérault , un Arrét qui ne semble pas d’abord conforme au sentiment de M. d’ Argentré : par cet Arrêt on déclara compris dans le préciput roturier de l’ainé, des matériaux destinés par le pere commun, à la construction d’un pressoit ; mais dans le fait, au temps de la mort du pere, le bariment étoit tres-avancé & on avoit déjâ commencé de le couvrir : on crut donc pouvoir, sans injustice, déférer à une destination aussi marquée. La regle proposée par M. d’Argentré , doit, hors ce cas, être régardée comme certaine : mais les matériaux d’une maison démolie pour la reconstruire, restés sur le lieu & destinés à la reconstruction, suivent la nature du batiment : Bérault ; Arrêtés de Lamoignon, de la qualité des Biens, Article XV.

Les bestiaux destinés au labourage d’une terre, ou donnés à chaptel, sont toujours meubles ; cela est conforme à la définition de M. d’Argentré . Corpora que apta sunt situm mutare S localiter transferuntur.

Les pailles & les engrais ont tantôt été jugés meubles, & tantût jugés immeubles, suivant la différence des espèces & des circonstances. On a jugé par Arret du 13 Août 1743, que l’usufruitier avoit pu léguer les pailles & les engrais qui se trouveroient sur le fonds au temps de son déces : cependant si ces pailles & engrais sont d’un u’age nécessaire à l’exploitation d’un corps de ferme, on les envisage comme des accessoires du fonds : Arrêt du y Juil-let 1628. Stramenta S sterquilinium stercorandi gratiâ comparatum jure res immobiles censeri :Dupont , sur le Titre 11 de Blois.

Les moulins, soit à eau ou à vent, sont immeubles des qu’ils ne se peuvent transporter & sont assis sur un fonds, hoc in genere mobilibus tribuuntur molae trusatiles & afinarie, dit d’Argentré, Article CCCCXVIII, n. 9, quandiu mobili strudurd sunt, nam immobili imposita emmobiles fiunt & per se censeri desinunt ; mais les moulins à bac ou sur bateaux, sont meubles, si ce n’est, dit du Moulin sur Bourbonnois, Article CCLXxxII, qu’ils soient banaux. Le même Auteur, sur l’Article CCLXXXVII, décrit ainsi le pressoir immobilier : Intellige prelum inedificatum in domo id est defussum aut alias incorporatum, alioquin prelum dudile mobile est ; il fait la même distinction à l’égard des Cuves ; & leBrun , en cet endroit, décide que la partie de la Cuve, qui est enfoncée en terre, rend toute la Cuve immobiliaire.

Nos Auteurs nous représentent les Cuves & Chaudieres des Teinturiers & Brasseurs comme des matériaux de considération, des ouvrages en cuivre qui ont une destinition évidente : c’est pourquoi entre cohéritiers elles sont réputées immeubles dans la succession de celui qui en a fait la dépense, & elles passent avec la maison pour faciliter le commerce.

Les Auteurs étrangers ne réputent immeubles les Cuves & Chaudieres, que quand elles sont enclavées dans la construction de la maison, de sorte qu’il soit nécessaire de démolir pour les enlever ; mais si l’ouvrage auquel elles sont atrachées peut être détruit sans aucune dégradation de la maison, ils pretendent qu’elles conservent leur nature de meubles. VoyesMaillard , sur Artois, Article CXlIV, in fine : nous n’avons point reçu cette distinction.

Les Presses d’Imprimerie ont été jugées meubles dans la succession du célèbre Robert Etienne. VoyesBrodeau , Article CXC de Paris, n. 8.


6

Plusieurs Coûtumes placent les rentes constituées dans la classe des meubles, quand même elles auroient une hypotheque spéciale : deux motifs de cette décision, 15. Les rentes constituées n’ont leur fondement que dans la tradition de simples deniers qui sont meubles de leur nature ; & l’hypotheque, qui est un accessoire du principal, n’en doit pas déterminer la qualité. 20. La faculté perpétuelle de rachat, qui, comme nous le verrons dans la suite, est essentielle à ces rentes, en rend toujours la durée incertaine. DuMoulin , S. Od, depuis le nombre s’jusqu’au nombre 2r a fixé la véritable qualité des rentes constituées : il prouve qu’elles doivent être réputées immeubles indépendamment de toute clause de réalisation & d’hypotheque générale ou spéciale, & nonobstant le réméré. Sussicit reditum perpetuo durure posse, ut jure immobilium censeutur, etiamsi alias reditus posi certum tempus vel quandoque redimibilis sit, quia sufficit re ipsa, & habitu perpetuun esse ; licet habeas incertum refolutionis statum, nihilominus perpetuum dicitur, stabilitas enim successiva, sive frudtus successivus adha rens facit immobilibus comparari. Mais il ajoute en même-temps. une exception, si ce n’est, dit-il, dans le cas de fraude & de déguisement d’un contrat de vente, sous l’apparence d’un contrat d’échange : limito in materid fraudis vel simulationis de contractu venditionis ad contradtum permutationis. Dans cette diversité de Jurisprudence nous n’avons pas considéré, par rapport aux rentes, cette instabilité dans la duree qui les caracterise, ce pouvoir arbitraire de les éteindre à chaque instant : nous y avons remarqué un produit régulier qui renait tous les ans, à l’exemple des fruits des héritages, avec une faculté d’amortir casuelle & indépendante de la volonté du créancier ; ainsi nous avons mis ces rentes au rang des immeubles, mais sous la limitation de du Moulin ; des quion a voulu les échanger contre des héritages, nous n’y avons plus vu, comme ditBasnage , d’assiette assurée, ni cette perpétuité que la fiction ne peut donner, & qui n’est réservée qu’à la nature.

M. de Saligny, sur l’Article CXxxl de Vitry, qui répute meubles les rentes constituées, dit que leur qualité peut être changée par le changement du domicile du créancier, mutatione persona mutatur qualitas rei : de sorte qu’elle n’est bien constante qu’au temps du déces du créancier, si ce n’est que le changement du domicile fût fait en fraude d’un tiers.

Luyes, dans le Journal du Palais, Tome, un Arrét du Parlement de Paris du 1o Août 1687.

LeBrun , de la Communauté, Tomez, Liv. 1, Chap. s, Sect. 2. Distinct. 1te trouve de l’inconvénient dans notre manière de régler les rentes constituées par la situation des biens qui y sont hypothéqués ; car, suivant notre Jurisprudence, dit-il, une rente affectée, tant sur des biens de Paris où les rentes sont censées immeubles, que sur des biens de Reims où les rentes sont réputées meubles, sera en partie immobiliaire & en partie mobiliaire ; on peut ajouter consequemment que cette rente, étant transmise par succession, sera propre en partie, & en partie meuble, pour êviter cette étrange bigarrure, il semble que dans la succession d’un homme mort, domicilié en Normandie, on doit considérer une rente affectée sur des biens situés hors la Province, comme rente Normande, suivant l’opinion deFroland , & la régler par la Coutume de Normandie, nonobstant les préjugés contraires que Basnage administre sous l’Article CCexxix de la Coutume, qui peuvent avoir pris naissance dans des faits particuliers ; c’est ce qui m’a porté à m’en éloigner sous les Art. CCLXx & CCexxIx de la Coûtume.


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Les servitudes réelles comme le droit de Passage & autres servitudes de cette espèce sont immobiliaires, parce qu’elles appartiennent aux fonds ; mais l’usufruit étant du aux personnes, il ne paroit pas devoir entrer dans la même catégorie. Cependant la Coûtume en a décidé autrement : la défense d’aliéner donner, vendre ou hyporhéquer qui concerne les héritages, la Coûtume l’applique à l’usufruit ; la vente de l’usufruit donne même ouverturé au retrait, Article DII de la Coutume, ususfrudtus inter immobilia computatur.Pithou , sur Troyes, Articles XXI & XCV,Brodeau , surLouet , D, n. 23.


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Basnage observe que si les rentes seigneuriales sont dues à cause des fruits, il eût paru plus naturel d’en avoir déclaré les arrérages meubles comme du temps de la récolte ; mais notre Coutume s’est expliquée d’une manière si précife qu’il n’est pas possible de lui donner une autre interprétation. Suivant les Mémoires qui ont servi aux Arrêtés de M. le Président de Lamoignon, les arrérages de censives & redevances seigneuriales, & les rentes foncieres, sont acquis & amobiliés du jour & terme de leur échéance : c’est avoir évité une espèce de reproche, que Godefroy fait à notre Coûtume, d’avoir distingué les rentes foncieres des rentes seigneuriales.


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Basnage a cru qu’il étoit besoin de beaucoup de raisonnement pour fixer le sens de cet Article par rapport aux fermages ; il n’est cependant point obseur. Les Réformateurs, pour régler la qualité des fermages, ont décidé qu’il falloir consulter le temps ordinaire, & marqué par la Coutume pour la récolte, & ne pas s’arrêter à l’échéance du terme. Il paroit singulier qu’un Fermier, en anticipant ou en différant la récolte, fixât arbitrairement la qualité des biens d’une succession ; aussi la question a été décidée en faveur des héritiers aux meubles, par deux Arrêts des a8 Septembre 163z & 18 Mars 1633 : il s’agissoit dans le fait de ces Arrêts de fermages, & la succession avoit été ouverte quelques jours apres la Saint Iean ; mais la Cour ordonna que sur le prix du fermage, il seroit fait déduction de la valeur des fruits qui sont réputés immeubles jusqu’au premier jour de Septembre. L’ai appris, depuis ma premiere édition, que ces Arrêts n’étoient point approuvés du Barreau : je dois indiquer les moyens dont Basnage se fert pour soutenir l’opinion contraire. Quand un propriétaire, dit-il, jouit d’un héritage par ses mains, & qu’il décede aprés la Saint Iean, les levées qui lui appartenoient sont censées meubles, & c’est l’espèce de l’Article DV ; mais si l’héritage est donné à ferme, les levées appartiennent au fermier, & les fermages au propriétaire ; & c’est le cas de l’Article Dx, qui décide que les fermages sont censés meubles du jour que les fruits sont percus : si les fermages étoient amobiliés apres la Saint Jean, l’Article deviendroit inutile, & il ne seroit pas même véritable. Cet Auteur ajoute, d’apres M. d’Argentré , que la récolte des fruits se fait ordinairement dans les mois d’Roût & de Septembre. Ne pourroit-on pas répondre que la Coutume n’a eu d’autre intention que celle de déclarer les fermages meubles, quoique le terme de paiement ne fût pas encore échu : qu’elle s’est servie de ces termes, du jour que les fruits sont percus, pour éviter la répétition de l’Article DV, & que les fruits que l’on appelle en cette Province fruits percus, sont ceux qui sont réputés l’être, à la différence des autres Coûtumes où les fruits ne sont meubles que quand ils sont séparés du sol ; & qu’à l’égard des héritiers, il doit être indifferent que le propriétaire ait joui par ses mains ou par un fermier qui le représente ; C’étoit, ce semble, l’avis deBérault . Cependant, comme le fermage est le prix des fruits de toute espece que la terre porte ; & que les uns sont amobiliés, aprés la Nativité de Saint Iean-Baptiste, les autres aprés le premier jour de Septembre on peut également soutenir que la Coutume doit être suivie littéralement, & que les fermages ne sont censés meubles que du jour que les fruits sont percus.

L’Article CCVII de la Coutume d’Orléans, Tit. 10, dispose que les arrérages des rentes foncieres ou constituées & loyers de maisons, sont réputés meubles, lors seulement que les-termes de paiement seront échus. De reconnoit que cet Article est contraire au droit commun, & qu’il ne doit être observé qu’entre le mari & la Lande femme : il eroit cependant qu’il est fondé sur cette raison, qu’à Pégard des loyers & arrérages de rentes il n’est rien dû qu’à l’échéance du terme de paiement. Du Moulin a bien établi le contraire, S. 1, Gl. 1, n. 62, in fructibus civilibus attenditur tempus quo incipiunt deberi, hine est quod in pensionibus domuum, vel mercedibus operarum, que tempus successivum habent, & quotidié deberi incipiunt, inspicitur rata ad acquisitionem inter emptorem S ven-ditorem.

Le même Auteur, n. 53, établit que les fruits qui tombent en un seul instant, sont aussi-tût au rang des meubles in fructibus civilibus qui non successivo tenpore sed semel, & in momento deberi incipiunt, debet attendi tempus quo semel coeperunt deberl.,,. S statim quod feudum venditum est debentur jura feudalia, S illico eorum obligatio esi formata 8 cessit.


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Quand nous lisons l’Article XVIII de la Coutume de Paris, nous sommes tentés de la croire, en ce point, conforme à la nôtre ; aussiFortin , dans sa Conférence, ne manque pas de citer notre Coûtume. Somme de deniers donnée par pere, mere, aieul ou aieule, ou autres ascendans, à leurs enfans, en contemplation de mariage, pour être employée en achat d’héritage, encore qu’elle n’ait été employée est réputée immeuble, à cause de la destination, Article XCIIl de Paris. Voila des traits de ressemblance ; mais vovons les conséquences que les Parisiens ont tirées de leur Loi, & celles que nous avons déduites de la nôtre. On admet à Paris trois ordres de stipulation ; la simple stipulation en achat d’héritage ou de propre en faveur de la future épouse ; la stipulation en faveur de la future épouse, des siens ou de ses hoirs ; & enfin la stipulation en faveur de ceux de son estoc & ligne. Chaque de ses stipulations a des effets differens, la simple stipulation d’emploi ou de propre, en faveur de la femme, n’est jamais que contre la Communauté, & donne à la femme ou à ses héritiers la faculté de reprendre ses deniers apres la dissolution ; mais elle ne rend ces deniers ni propres de disposition ni propres de succession, & encore moins à l’égard de ses héritiers ; ils vont donc au plus proche héritier comme de simples meubles. L’effet de la stipulation de la seconde espèce est de rendre les deniers propres entre les enfans & descendans de la femme ; de sorte que si de plusieurs enfans, les uns décedent aprés les autres, les deniers demeureront propres entre ses enfans & descendans, tant qu’il y en aura, à l’exclusion du pere, qui ne pourra hériter de ces deniers, qu’apres le déces du dernier mourant des enfans : car alors ces deniers reprennent leur nature de meubles suspenduë par la clause du contrat de mariage. La troisieme stipulation a lieu au profit des collatéraux de la femme, & rend les deniers propres de ligne à leur égard, soit en la succession de la femme ou dans celle des enfans qui lui ont succédé ; mais dans quel cas les parens collatéraux de la ligne paternelle de la femme, préferent. ils les parens collatéraux de sa ligne maternelle, & vice versâ, quand les héritiers des deux lignes concouroient-ils ensemble ; Je ne traiterai point ces questions, consultez leBrun , des Succes-sions, Chap. 1, Sect. 3, il vous expliquera la valeur de ces réalisations.

Nous n’avons point besoin, en Normandie, de stipuler que les deniers donnés pour mariage des filles, par pere, mere, aieul ou autres ascendans, ou par leur frere, & destinés pour être leur dot, seront employés en héritages afin de leur communiquer la qua-lité d’immeubles ; ils deviennent par l’acte un propre dans la personne de la fille qui tient côté & ligne. Nous avons admis, il est vrai la nécessité de cette stipulation, lorsque la fille est dotée par un étranger ou tout autre de ses parens qui n’est pas désigné par la Coutume ; & sans cette stipulation, la dot de la fille tiendroit nature de meuble dans sa succes-sion, au lieu qu’elle lui fait tenir nature d’acquet.

La dot, dans le premier cas, au défaut d’enfans sortis du mariage de freres ou seurs de la femme, & des ascendans, passe aux parens du côté & ligne dont la dot procede : si elle a été dotée par sa mère ses parens maternels en héritent au préjudice des parens paternels, on y suit enfin toutes les regles de la succession au propre.

Dans le second cas, la dot, au moyen de la stipulation qu’elle sera convertie en héritage, devient un propre maternel dans la personne de ses enfans.

Nous avons deux Arrêts, rapportés parBasnage , qui confirment nos maximes. Dans le fait du premier, qui est du SAvril 1858, une femme avoit été colloquée pour sa dot, à l’ordre des deniers du décret des biens de son mari : sa collocation étoit aux mains du Receveur des Consignations quand elle mourut ; par l’Arrét, les deniers furent ajugés à l’héritier au propre. L’autre Arrêt, qui est du a Mai 1681, est dans le même esprit ; il declara immobiliaire & propre l’opposition du fils, formée au décret des biens de son pere pour le paiement de la dot de sa mere, & accorda aux enfans de l’opposant un tiers coutumier sur les deniers de la collocation.

Nous avions cependant outré notre Jurisprudence : on estimoit autrefois, en Normandie, propre de ligne, la dot que la fille s’étoit constituée de ses deniers, de sorte qu’elle étoit ajugée dans sa succession aux héritiers des propres, à l’exclusion des héritiers aux acquets. Bérault rapporte un Arrêt du 8Août 1580, qui décide de même ; & Basnage nous a transmis les Arrêts de l’Arcanier & de Bizet, qui contiennent l’erreur autorisée par l’Arrét de 1580. La Cour a enfin fait publier, dans les Bailliages du ressort, un Arrét en Régle-ment du 2y lanvier 1vas, qui ordonne que de la totalité des biens dont sera composée la dot des femmes, la partie qui leur sera provenue des meubles à elle échus de la succession de leur pere & parens collatéraux, sera censée acquêt, d’où il fuit évidemment que la dot qu’elle-même s’est constituée doit être réputée acquét.

Quoique la dot soit immeuble & propre, il ne faut pas en conclure que le don mobil d’une somme de deniers qui fait partie de la dot, puisse acquerir dans la personne du mari la qualité d’immeuble, ni dans la personne du fils celle de propre. Il est bien vrai que par la Jurisprudence le mari en peut demander l’intérét au débiteur de la dot comme de la dotmême ; mais il est des capitaux qui produisent intérêt sans être immeubles : d’ailleurs la Coûtume n’introduit une fiction qu’en faveur de la dot, & il n’est pas permis d’étendre la fiction d’un cas à un autre. Il est vrai qu’il y a bien des rapports entre le don mobil & la dot ; mais la similitude est un argument qui prouve qu’il n’y a que de la ressemblance & non pas de l’identité entre ces deux objets ; & j’estime que le don mobil étant encore dû au temps du décés du fils, n’est qu’un effet mobilier dans sa succession.


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La Coutume de Paris, Article RéV, contient une des exceptions portées par l’Article Dxill de notre Coûtume, il y est dit que si les rentes qui appartiennest a des mi-neurs, sont rachetées pendant leur minorité, les deniers du rechat ou leur remploi en autres rentes ou héritages, sont censés de même nature & qualité d’immeubles qu’étoient les rentes ainsi rachetees poûr retourner aux parens du côté & ligne dont les rentes procédoient. Tous les Commentateurs ont remarqué que le motif de cet Article avoit été d’empécher les tuteurs ou curateurs d’intervertir l’ordre des successions des mineurs Sur ce principe on a jugé au Parlement de Paris, par Arrêt du mois de Mars 1vad, que les deniers provenus du remboursement d’une rente de propre fait à un mineur auquel a’oit succédé un autre mineur, étoient propres dans la personne de ce second liéritier, aussi décédé en minorité. Remarques deCochin , Tom. 8.

Quand le tuteur a constitué en recte des deniers appartenans au mineur, & que la renteest amortie dans le cours de la tutelle, il n’y a pas lieu à la fiction ; mais si le mi-cur l’isic-la rente dans sa su cession, & qu’elle soit remboursée à un autre mineur son héritier les deniers de l’amortissement seront réputés proptes dens la pe sonne de cet ficritier, jusqu’à ce qu’il ait atteint sa majorité : ainsi jugé par Arrêt du 2 Mirs 1740. Dans le fait, une mineure dûment autorisée avoit fait don à son mari, par son contrat de mariage, de Puniversalité de ses meubles ; on jugea par cet Arrét que les deriers du remboursement qui lui avoit été fait d’une rente dont elle avoit hérité d’un mineur n’étoient point compris dans cette donation. Il et est de même si l’héritier du mineur décede en minorié : & par Arrét du 8 Août i7ço, on débouta la mere héritière aux meubles & acquêts de sa fille ni-neure, des deniers provenans d’une constitution faite au benéfice de son frère, décédé avant elle en minorité.


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L’Article XLl du Réglement du y Mars 1673, sur le fait des Tutelles, qui permet de constituer les deniers des mineurs, à charge de les rendre au temps de leur majorité, n’est pas du goût de tout le monde, Bérault a réfuté cet usage en forme, il est aussi condamné par l’Article XCVI des Arrêtés de Lamoignon, des Tutelles ; cependant s’il est question de l’établissement d’une fille, ou de l’achat d’un Office, il fournit d’utiles ressources.Brodeau , sur l’Artiele XCIV de Paris, rapporte un Arrêt du même Parlement du rs Janvier 1622, qui est conforme à la disposition de notre Réglement ; & il a été jugé, par Arrét du Parlement de Roüen du 30 Mai 1747 que le mineur ne perdoit point ce privilége par l’émancipation.

Voyez le Traité des Minorités, page 155 ; Frain & Hévin Chap. 77.

Quoique la constitution soit temporelle, elle est réputée immobiliaire, & elle n’est point comprise dans un legs universel de meubles.


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Nous rapprochons, autant qu’il nous est possible, les Offices des autres patrimoines des familles ; c’est dans cotte vue qu’il a été jugé le ay Novembre 1739, que le propriétaire d’un Office de Notaire, qui, pour prix de cet Office, avoit accepté une rente de constitution sur le Titulaire, pouvoit se faire renvoyer en possession de son Office faute de paie-ment, sans être obligé de prendre la voie de licitation ; on opposoit que le capital de la rente n’éroit qu’une somme mobiliaire, & que le Roi ayant donné des provisions la charge lui appartenoit. On a encore jugé, par Arrét du 8 Mars 1742, la vente d’un Office de judicature à fonds perdu sujette à rescilion, parce que dans le Traité il n’y avoit pas égalité de risque entre le vendeur & lacquereur ; mais en partant d’un autre principe, il suffit u mari, qui s’est fait pourvoir d’un Office cédé par sa femme, d’en rapporter le prix, sans y. comprendre les frais de provision & de réception : Arrét du 8 Fevrier 1743.


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Plusieurs Auteurs ont décide que les pépinieres doivent être réputées meubles ; c’est Pavis de M. d’ Argentré : la raison que l’on en rend paroit sensible. Les pépinieres ne sont industriées que pour en transplanter les arbres d’un lieu dans un autre, on ne peut pas même les regarder toujours comme une amélioration du fonds ; car les arbres qu’on y leve sont un obiet de commerce, on peut en disposer & les vendre comme tout autre meuble. Notre Coûtume s’éloigne de cette opinion ; elle ne regarde pas simplement les cas possibles, elle envisage la destination ordinaire des pépinières : la fin que l’on fe propose en les industriant, c’est d’employer les arbres qui en proviennent sur ses héri-tages.

C’est par grace que la Coutume admet le fermier au partage des pépinieres industriées pendant son bail, car elles suivent le fonds ; l’intention de la Coutume est d’inviter le fermier à cette amélioration par l’appas du gain : on stipule dans les baux en bien des endroits de la Province, que le fermier sera tenu d’élever une pépinicre à ses frais ; cette clause, qui est licite, déroge à la Coutume.

Le consentement du principal fermier, dans la dernière année de son bail, ne suffit pas pour autoriser le sous-fermier à faire une pépiniere, dont le propriétaire soit obligé de faire raison : Arrêt du 7 Mai 1613.Bérault .


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IIy a dans le Recueil des Ordonnances de Néron & Gyrard un Edit du mois d’Octobre tobo qui déclare les Navires & les Vaisseaux meubles, & non suscepribles d’hypothe-que ; cet Edit doit être interprété conformément au Texte de notre Coûtume & à la Jurisprudence des Arrêts. La Loi est concue en ces termes : n’Voulons qu’à l’avenir tous Na-7 vires, Frégates, Bateaux & autres Vaisseaux de quelque grandeur, nature & qualitén qu’ils puissent être, soient censes & réputés meubles, sans qu’ils puissent être pris ni n considérés comme mmeubles dans les ventes, achats, traités & compositions qui en n pourront être faites, à quelque prix & sommes qu’ils puissent monter, ni être chargés n ni rendus susceptibles d’aucunes hypotheques, failis, vendus ou adjugés, ni les denters n qui en proviendront distribués d’autre façon ni manière que ceux qui proviennent de la n vente des autres meubles, nonobstant tous Edits, Ordonnances & Déclarations, Lsan ges, Coûtumes & autres choses à ce contraires, auxquelles nous avons dérogé & dé-n. rogeons par ces Présentes, CXC. n

M. deValin , dans son Commentaire sur l’Ordonnance de la Marine, dit que plusieurs dispositions de cet Edit sont abrogées par l’Ordonnance : elle porte en effet, Titre 143 Article I, que tous Navires & autres Vaisseaux pourront être saisis & décretés par autorité de Justice, & que les priviléges & hypotheques seront purgés par le décret. M. deValin . reconnoit, qu’à l’égard de la distribution des deniers du décret, on fuit l’ordre hypothécaire, nonobstant l’Edit de 1obb, en Normandie & dans les pays où les meubles en gé-néral sont susceptibles d’hypotheques.

Mais hors le cas de décret, tous Navires & autres Batimens de mer sont réputés meubles ; & c’est sur ce principe que la même Ordonnance, Tit. 10, Article I, les déclarc non sujets à retrait lignager niâ aucuns droits Seigneuriaux. L’oyerGrimaudet , Liv. 4. Chap. 17.

Loccenius de jure Marit. Liv. 3, Chap. 6, n. 4 ; d’Argentré , de Laudim. Cap. 1, 8. 27 ; Stracha de Navibus, Part. 2, n. 31.

Basnage rapporte un Arrêt du 18 Mai 1638, par lequel il a été jugé que quoiqu’un Navire eût été saisi en Picardie, & que l’on y eût établi un Commissaire, le maître du Na-vire, l’ayant amené à Dieppe, & le propriétaire l’ayant vendu l’acheteur qui étoit de bonne foi ne pouvoit pas être dépossedé ; le saisissant devoit s’imputer sa négligence à garder le Navire.


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D’Argentré decide que le poisson est meuble quand la bonde de l’Etang est levée, etiam post epistomiorum appertionem, si quidem congruo nec anticiputo tempore fiat, pisces pro mobilibus & frudtibus separatis habentur ; il en est, à plus forte raison de même, quand il est en réservoir ; car étant une fois hors de l’Etang, soit qu’il soit conservé pour vendre ou pour l’usage particulier d’une maison, c’est, dit duMoulin , sur l’Article CCLxxxV de Bourbonnois un véritable meuble. Les pigeons au volet sont meubles ; mais ceux de colombier & de fuie sont immeubles, quia animum revertendi habent, ex consuetudine enim avolare & revolare solent :Brodeau , sur Paris, Article XCI. Les abeilles & les lapins de garennes suivent aussi le fonds, à la différence des lapins de clapier ; car ces derniers sonturer rang des meubles.