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DLXXIV.

L’Adjudicataire doit tenir état de son enchère à la seconde Assise ensuivant l’Adjudication, si c’est Fief Noble, & aux seconds Pleds, si c’est Terre Roturiere ; & lors dudit Etat, représenter les deniers sur le Bureau, pour être distribués aux Opposans, sans que le Juge l’en puisse dispenser, ores que les Opposans le consentissent sur peine à l’Adjudicataire de payer les arrérages des rentes, & intérêts des deniers au denier dix en son propre & privé nom, jusqu’à ce que les deniers des encheres ayent été actuellement garnis ; sauf, en cas de renchere au profit particulier à consigner l’Obligation, si elle n’est contredite, pour argent comptant ; & à ces fins, elle doit être mise au Greffe quinze jours avant l’Etat, pour être communiquée aux Opposans & autres Créanciers.

Il a été remarqué au commencement de la quatrieme Partie du Diseours général, comme les seconds Pleds & la seconde Assise se doivent entendre en cet Article. Les intérêts au denier dix, ausquels l’adjudicataire est condamnable par ce même Article, ne se sont pas jugés depuis la réduction des rentes faites en 1602 qu’à raison du denier quatorze, & présentement ils ne doivent être jugés qu’au denier dix-huit, comme on le doit inférer de l’Article C dudit Réglement de rébé, à moins qu’il n’y eût des créanciers opposans pour des rentes constituées au denier dix ou quatorze, auquel cas il seroit juste de condamner l’adjudicataire aux arrérages de ces rentes, qui auroient couru depuis l’adjudication, qui lui auroit été faite, & qui seroit devenue nulle, faute par lui d’en avoir payé le prix.1


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Je ne mioccuperai point à désigner sur cet Article, ceux qui ne peuvent être adjudicataires, je me renferme dans deux observations : 10. Si le décrétant, les créanciers & la partie sailie s’opposent à ce que le bien mis en décret soit adjugé à une personne qui n’est point sujette à la contrainte par corps, quand cette personne n’a point de biens apparens pour répondre de la folle enchere, ou qu’elle ne peut engager son bien, on n’autorise point l’adjudication, à moins que l’adjudicataire ne donne des Suretés. 26. Les Juges dans la Jurisdiction desquels le décret est poursuivi, ne peuvent se rendre adjudicataires, parce qu’il est à craindre qu’ils n’abusent de l’autorité que leur donne leur charge, pour se faire adjuger à vil prix le bien décreté, au préjudice du saisi & de ses créanciers. lover les Articles OXxxII de l’Ordonnance de Blois ; CXVII de celle de 162y, & le Réglement du Parlement de Normandie du a Décembre 1699.

Terrien , Liv. 10, Chap. 10, rapporte un Arrét de l’Echiquier, par lequel il est défendu aux adjudicataires d’entrer en possession des fonds décretés avant le garnissement du prix, à peine de restitution des fruits, & aux Juges de les y autoriser, à peine d’amende arbitraire.

La déclaration de l’adjudicataire, dit le Président le Maître, qu’il a enchéri pour un autre, ne le décharge point de l’obligation de consigner au défaut de celui pour lequel il prétend avoir agi, & telle est aussi notre Jurisprudence, attestée parBérault .

Je ne crois pas en effet que celui qui a déclaré avoir encheri au nom d’un tiers, en soit quitte pour représenter son cessionnaire, sur-tout lorsque la déclaration a été faite par un acte séparé, & long-temps aprés l’adjudication : car parmi nous il suffit qu’elle soit faite avant l’ouverture de l’état ; comme l’adjudicataire a contracté personnellement avec la Justice & pour lui seul, il doit garnir ou être condamné à la folle enchere, sauf son recours. Si on s’engage. dans un autre parti, on courra les risques de voir chaque jour les intérêts du décrétant, du saisi & des creanciers compromis ; un adjudicataire passera impunément, aprés coup, une déclaration en faveur d’une personne insolvable.

Bérault rapporte un Arrêt du 18 Août 1541, par lequel il fut jugé que l’adjudicataire devoit consigner le prix total de l’adjudication, quoiqu’une maison, qui faisoit partie des biens vendus par décret, eût été brulée depuis par cas fortuit. Forget rapporte un Arrêt du 10 anvier 160s, en plus forts termes, puisqu’il étoit question d’héritages dévastes dans le temps. des guerres civiles. Bérault pense cependant que quoique l’adjudicaire soit obligé de garnir son enchere, il peut demander lors de l’état, une défalcation ; & Basnage décide géneralement que lorsqu’il y a un appel interjetté du décret, qui a empéchs l’adjudicataire de jouir, les pertes semblent devoir être à la charge des créanciers.

Ce n’est point remplir le vou de la Loi que de déposer les deniers à la caisse du Receveur des Consignations, il faut encore qu’ils y restent jusqu’au moment de leur distribu-tion ; & on a condamné, par Arrét du 20 Février 1688, un adjudicataire qui avoit retiré de la caisse une somme consignée, à en payer les intéréts aux créanciers perdans ou au saisi, quoique lors de la tenue de l’état elle eût été mise en surseance, à cause d’une contestation & que l’acquereur l’eût rétablie dans la caisse immédiatement apres la contestation ter-minée. VoyesBasnage .

Du temps de M. leMaître , la folle enchere n’étoit observée qu’en faveur du Roi ; on ne pratiquoit que la contrainte par corps contre les adjudicataires des biens des particuliers vendus par décret :Godefroy , sous l’Article DLXXXIV, observe qu’il est au choix du décré-tant & des créanciers de prendre cette derniere voie, ou de faire procéder à une nouvelle adjudication à la folle enchère de l’adjudicataire.

Si l’adjudicataire ne garnit point, ou si les encheres sont défavouées, on ne peut retourner sur le précédent enchérisseur, qui peut avoir colloqué ses deniers, ayant vu son enchere couverte : Basnage rapporte un Arrét qui paroit contraire à cette décision généralement recue ; mais il a été rendu du consentement de toutes les Parties intéressées.