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DLXXXIV.

Celui qui veut renchérir à son profit particulier, doit laisser la quatrieme partie au profit commun, & tenir Etat, comme dit est, ausdits Pleds ou Assises ; & à faute de ce faire, sera évincé, & condamné, & par corps, aux dépens, dommages & intérêts, même à la folle-enchere, tant envers le Décrété que les Opposans, pour la liquidation de laquelle sera procédé à nouvelle proclamation ausdits Pleds ou Assises.

On propose plusieurs questions sur cet Article. La première, si une femme séparée s’étant renduë adjudicataire en un Décret, peut être condamnée par corps à la folle-enchere, & même si elle a pû y obliger sa dot ; Videtur quod sic, parce que la femme mariée peut bien obliger son corps & sa dot pour le fait de marchandise publique, ut didtum est sur l’Article DXXXVIII ; & partant à plus forte raison, elle peut la même chose, en contractant en Jugement pour cause d’un Décret, dont l’utilité est publique. On dit au contraire, que la femme séparée ne peut obliger sa personne ni ses biens dotaux, que pour de certaines causes, entre lesquelles le Droit coutumier n’a point mis l’adjudication par Decret. Il y a eu des Arrêts pro & contra. Il semble que depuis l’Ordonnance de 1687, qui en l’Article VIII, du Titre des Contraintes par corps, à statué, que les femmes ni les filles ne peuvent s’obliger ni être contrainles par corps, sinon pour cause de marchandise publique, ou de siellionar procé-dant de leur fait, on ne pourroit condamner les femmes ni les filles par corps à la folle-enchere, & partant on ne les devroit pas recevoir à enchérir aux Décrets, à moins qu’elles ne baillassent caution, ou que cela ne fût agréée par les créanciers.1 Une seconde question est, si le Seigneur peut prétendre le treizieme de la folle-enchere ? Il a été jugé, que la folle-enchere ne faisant point partie du prix de l’adjudication, mais étant une peine de la témérité de l’enchérisseur, le treitieme n’en étoit pas dû, par un Arrêt du 27 de Juillet 1638, rapporté parBasnage .

Une troisieme question est, si le treizieme est dû de l’enchere au profit particulier ? Il a été jugé qu’il est dû, parce qu’il fait partie du prix de l’adjudi-cation ; mais qu’il ne se devoit payer que sur le quart qui alloit au profit commun : & que pour les autres trois quarts, qui étoient pour le profit particulier de l’adjudicataire, le treizieme en étoit du par l’adjudicataire, sauf son recours contre le décreté ou ses héritiers : l’Arrêt est du 9 de Juillet 167r.

Une quatrieme question, si les deniers consignés par l’adjudicataire étant perdus par un cas fortuit, ou par la banqueroute du Receveur des Consignations, c’est au décreté, ou si c’est à ses créanciers à porter cette perte ; On a jugé par plusieurs Arrêts, que c’étoit au créanciers ;Louet , C. 50. où l’on peut voir les raisons pro & contra. Il semble qu’on peut opposer contre la décision & les raisons de ces Arrêts, qu’on ne peut objecter aux créanciers aucune faute ayant fait tout ce qu’ils pouvoient & devoient faire pour la conservation de leurs droits ; & qu’au contraire, le décreté est toujours en faute, n’ayant pas payé ses créanciers, & les ayant réduits dans la nécessité de faire décreter ses héritages, & de faire faire par la Justice, la distribution du prix provenu de l’adjudication d’iceux. Ce même Auteur propose une autre question au nombre suivant, si cette perte ausdits cas, doit être portée par tous les créanciers au marc la livre, ou leulement par les anciens créanciers, qui eussent été payés des deniers consignés ; La question, aprés l’avoir traitée in utranique partem, est laissée indécile. Il a éte jugé contre un appellant, que son appel ayant empéché que les créanciers qui avoient été colloqués, n’eussent été payés par le Réceveur des Confignations, devoit porter la perte arrivée par la banqueroute de ce Receveur, par un Arrét de la Grand’Chambre, rapporté parBasnage , du 20 de Novembre 164t, dont on doit inférer, que si le décreté avoit empéché par son appel ou ses contestations à l’état, qu’un créancier ne fût utilement colloqué, la perte des deniers consignés par l’adjudicataire, seroit à son dommage.2


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Le nouveau Réglement contient dans le Titre a des principes clairs & propres à fixer le sens de cet Article. Il est dit dans l’Article XIV : ) L’adjudicataire des biens saisis par décret sera tenu aux prochains Plaids ou Assises, apres l’adjudication finale, de reD présenter le brever de garnissement du prix de son adjudication, dont il lui sera accordé n acte, lequel contiendra l’envoi en possession des biens adjuges, s’il y a lieu ; & de suite py l’état sera déclaré ouvert, &c. n Cette disposition qui donne un nouveau jour au texte, ne dispense pas l’adjudicataire qui manque de garnir, des contraintes & condamnations que la Ceûtume proronce contre lui, elle les confirme au contraire. Il est maintenant inutile d’agiter cette question, si célèbre chez les Auteurs, si dans le cas de la revente à la folle enchère de l’adjudicataire, l’excédent de la première adjudication finale vient à son bénéfice, elle est décidée contre lui : car dés que la vente est résolue par l’inexécution de la condition essentielle, dit M. deHéricourt , Padjudicataire qui n’a plus de droit sur le bien, ne peut profiter de l’augmentation du prix s’il en supporte la diminution, ce n’est point comme propriétaire, mais à cause des dommages & intérêts dont il est tenu envers les créanciers & la partie saisie, pour avoir manqué, par sa faute, à exécuter l’engagement qu’il avoit contracté avec la Justice.

On doit procéder à l’état dans le mois du jour qu’il aura été déclaré ouvert, & les créanciers qui se trouveront en ordre, doivent être colloqués des fommes qui leur sont dues, & on leur en délivre Etécutoire sur le Receveur des Consignations, sans qu’il soit besoin d’attendre la clôture de l’état ; mais quand il y a des contestations sur des oppositions antérieures ou privilégiés, les Juges ont la liberté d’ordonner sur ces oppositions une instrue-tion convenable, & en laisser le montant en surséance aux Consignations pendant l’instruction elle ne peut cependant retarder la collocation des autres éréanciers, Article XX & XXI du Réglement : observez que ces Articles concertent avec ce que j’ai ci-devant avancé.


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Une Déclaration du 21 Mars 1765, accorde aux Réceveurs des Consignations de cette Province, au moyen des différentes attributions qui leur ont été faites par les Edits de Juin 1685, Avril 1694, & Septembre 1704, pourvu qu’ils justifient avoir payé la finance ordonnée par le dernier Edit, dix-huit deniers pour livre sur le prix des immeubles ju-fficiairement vendus ou délaissés à un ou plusieurs créanciers dont six deniers sont à la charge de l’adjudicataire ; mais au défaut de justification elle regle leurs droits dans la méme espèce à douze deniers par livre. Par Arrét rendu aux Chambres assemblées le 1o Août-1y8s, il a été ordonné aux Receveurs des Consignations & aux autres personnes y denommées, d’exprimer dans le solvit, qu’ils seront tenus de mettre au bas des actes, bre-vers, &c. les sommes qu’ils recevront, en expliquant en détail l’espece, qualité & quantité des droits qu’ils percevront, le titre en vertu duquel se fera la perception, & speci-fieront nommément ce qui sera recu au-dala du droit primitif, en vertu des augmentations progressives qui auront pu y être ajoutées. Un autre Arrét du 16 Août de la même année fait défenses aux Receveurs des Consignations du resfort de prendre & exiger aucuns droits de consignation sur les objets privilégiés, payés avant la consignation sur les capitaux des rentes, dont les biens décretés ou délaissés en Justice étoient chargés, & qui n’ont pas fait partie de la valeur de l’effet abandonné ou du bien réel du créancier décreté, & sur le prix des lors & ventes & treizieme, dans le cas où l’acquereur en seroit chargé, & généralement de ne s’attribuer ni percevoir aucuns droits que des deniers & valeur des effets qui auront réellement & de fait entré dans leur caisse. On avoit déja débouté, par Arrét rendu en 1720, la veuve d’un Receveur des Consignations, des droits de consignation, reclamés sur une distraction de fonds obtenue par un cohéritier jusqu’à la concurrence de 48000 livres, pour avoir acquitté des dettes communes de la succession, mais à l’égard des sommes sujettes aux droits de consignation, les lroits appartiennent au Receveur dulieu où se tient l’état, au préjudice du Receveur au district duquel l’adjudication a été faite.