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DCXX.

Et pour le regard de la maison retenue par le Vendeur, les choses demeureront en l’état qu’elles étoient.

Ces deux Articles & le DexxI, devoient être placés immédiatement aprés le DOIx, parce qu’ils traitent de la même matière & de cas semblables. Le Propriétaire de deux maisons contigués ou adjacentes l’une à l’autre, semble avoir confondu les servitudes qui sont en l’une & en l’autre, suivant ces paroles de la Loi 30. ff. De servitiulibus urbanorum prediorum, rapportées sur l’Article CLXXIII. Si quis cdes que suis cdibus serviebant cûm emisset, traditas sibi accepit, confusa sublataque serviius est. Ce qui dépend de cette re-gle, que res sua nemini servit : c’est pourquoi la Coûtume ordonne, que ce Propriétaire en méttant hors de ses mains une partie de sa maison, ou une des deux maisons qui lui appartiennent, doit spécialement & nommément declarer dans le contrat d’aliénation, quelles servitudes il veut retenir sur l’he-ritage dont il se dessaisit, ou quelles il constitue sur l’héritage dont il demeure possesseur ; c’est-à-dire, qu’il doit bien expliquer l’endroit, la grandeur la hauteur, la mésure & l’espèce de ces servitudes, autrement, l’héritage vendu demeure libre au préjudice du vendeur : & quant à l’héritage retenu par le vendeur, les choses demeurent au même état qu’elles étoient auparavant l’aliènation, & lors d’icelle ; c’est-à-dire, sujettes aux servitudes dont elles avoient les marques : ce qui se rapporte aux paroles qui sont immédiatement aprés celles qui ont été citées de ladite Loi trentieme. Et si rursus rendere vult, neninaiim imponenda servitus est, alioquin libere veneunt ; ausquelles il faut ajouter les Loix & & 3, in initio, ff. Communia prodiorum urbanorum & rusIicorun, qui font connoître les principes de ces décisions, ausquelles l’Article CExV de la Coutume de Paris est conforme. Voyez ce qui a été dit sur l’Article CLXXVIII.1 Basnage rapporte un Arrêt du y de Juillet 1666, par lequel il fut jugé qu’un bailleur à fieffe d’une partie de la maison dont il étoit Propriétaire, jouiroit des vues qu’il avoit sur la partie baillée à fieffe, encore qu’il ne les eût pas réservées par le contrat ; il ajoute, que cela fut jugé suivant l’Artiele Dexx, qui dispose, qu’à l’égard de l’héritage retenu par le vendeur, les choses doivent demeurer au même état qu’elles étoient. Mais il semble que c’est une mauvaise interprétation de cet Article Dexx ; car les choses doivent demeurer au même état à l’égard des servitudes passives ; mais non à l’égard du droit de servitude qu’on peut avoir sur le fonds aliéné : car ce droit, c’estA-dire, cette servitude active est éteinte & perduë par l’Article précédent DCXIX, qui déclare expressément, que l’héritage vendu ou aliéné demeure libre au prejudice du vendeur. On pourroit dire, pour soutenir l’Arrêt & accorder les Articles DexIx & Dexx, que les servitudes apparentes & vi-sibles sont conservées au vendeur ou bailleur à fieffe, sur l’héritage qu’il baille & met hors de ses mains, parce que l’acheteur ou preneur à fieffe, doit être présumé avoir bien voulu l’héritage à cette condition de souffrir la servitude qu’il n’a point ignorée, & contre laquelle néanmoins il n’a rien stipulé : Ubi

enim judicium emptoris ibi fraus venditoris non poiest esse, suivant le dire deCiceron , au troisieme Livre des Offices, cité par le Commentateur deLouet , S. 1. Mais il y auroit encore plus de raison à dire, que par l’Arrêt on n’a pas jugé que le bailleur à fieffe auroit une servitude de vue sur la maison qu’il avoit fieffée ; mais qu’on a jugé précisément qu’il ne boucheroit pas les femêtres, au moyen desquelles il avoit vue sur ladite maison : en quoi il y a bien de la différence, parce qu’en maintenant lesdites fenêtres, on jugeoit que la maison que le bailleur retenoit en ses mains, demeureroit au même état qu’elle étoit lors du contrat, conformément audit Article Dexx, mais en lui attribuant une servitude de vue, on auroit contrevenu manifestement à l’Article DCXIX, qui dispose, que l’héritage aliéné demeure libre des servitudes. qui n’ont point été expressément réservées, & au préjudice de celui qui a fait Paliénation : de sorte qu’il semble qu’on doit dire, que par ledit Arrêt le preneur à fieffe ne pouvoit pas faire fermer les fenêtres qui étoient en la maison retenue par le bailleur ; & que néanmoins cela ne le privoit pas du droit de faire batir & élever une muraille, par laquelle la vue sur son fonds seroit ompêchée ; ce qu’on ne peut pas faire quand il y a une servitude de vuc, dont l’effet propre est de priver le Propriétaire du fonds servant, de rien innover qui empèche l’usage de la servitude.


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L’Article Dexix est conforme à la Loi Guidquid ro Commun pred. quidquid venditor ditUlpien , servitutis nomine sibi recipere vult nominatim recipi oportet ; la disposition de l’Article Dexx est générale, soit que l’alienation se fasse à Titre de vente, de donation entre-vifs ou legs testamentaires : ce qui peut arriver par rapport aux legs des acquets ; Cujas a en effet remarqué sur le Livre y des Questions dePapinien , qu’il falloit à cet égard porter le même Jugement sur les dispositions testamentaires, idem juris est in ultimis voluntatibus ac contractibus.

On ne doit cependant pas plus étendre le sens de cet Article Dexx en faveur de l’acquereur que d’un cohcritier, il faut le limiter aux servitudes apparentes & continues, comme aux servit, ides d’égouts, d’appui, &c. La Cour, par un Arrêt récent, rendu par rapport sur un appel du Bailliage d’Avranches, nous a retracé cette interprétation, il a été décidé par cet Arrét que l’acquereur d’un héritage de la campagne ne peut, en vertu de l’Article Dexx, exercer pour le faire valoir un passage sur le fonds de son vendeur, sur le prêtexte que le vendeur en usoit ainsi avant la vente, des que l’acquereur peut en faire l’exploitation par un autre chemin, quoiqu’un peu plus long & un peu plus difficile.

On a rendu en Grand Chambre un Arrêt le 15 Juillet 1757, dont l’espece mérite d’être rapportée. Une femme donne à titre de Fieffe le rez-de-chaussée d’une maison, avec une petite cour, en exemption de toutes charges, elle retient le haut de la maison, dans l’appartement retenu il y avoit une dale qui fluoit par une gouttière de plomb, régnante du haut en bas, pour porter les eaux dans la petite cour ; le représentant du fieffataire est inquieté par celui qui représente le fieffant, pour le contraindre à laisser fluer la gouttieère : celui-cil, apres plusieurs approchemens devant le Bailli de Caen, obtient l’effet de sa demande. Sur l’appel le représentant le fieffataire foutenoit que l’Article DexxIx imposoit au vendeur la nécessité de déclarer la servitude qu’il vouloit retenir, & que l’Article Dexx n’avoit lieu que dans le cas où lui-même auroit agi contre le successeur du fieffant ; cependant la Cour confirma la Sentence. Cet Arrét paroit conforme à l’Arrêt du y Juiller 1Sb8, cité par Pesnelle, on ne pouvoit pas présumer que cette femme en fieffant une partie de sa maison, eût eu intention de se priver d’un droit tres-utile & qui étoit apparent.