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CHAPITRE VINGT-QUATRIEME. DE SERVITUDES.
L E mot de Servilude s’entend de trois manieres. Par la premiere, il signifie l’effet de cette constitution du Droit des Gens ; en conséquence de la-quelle, l’homme est privé de sa liberté, & est assujetti au service & à la domination d’autrui. Par la seconde, qui se subdivise, il signifie un Droit sur la chose d’autrui, en vertu duquel cette chose fert, ou à une personne, ou à une autre chose : si elle sert à une personne c’est la servitude personnelle, par laquelle une personne a droit de s’éjouir de tout ou d’une partie de l’usage qu’on peut avoir d’un héritage ; tels sont l’usufruit, l’usage & l’habitation : c’est la seconde manière dont se doit entendre le mot de Servilude. Que si cette chose sert à une autre chose, c’est la servitude prédiale, par laquelle un héritage seit à l’héritage d’autrui, & c’est la troisieme signification du mot de Servilude, suivant laquelle le Titre de ce Chapitre se doit entendre.
Cette servitude prédiale se subdivise en celle de la Ville & en celle des Champs. ou rustique, ce qui ne se distingue pas tant par le lieu que par l’usage : Car en matière de servitude, on appelle héritages de la Ville, tous les bâtimens faits pour servir à l’habitation, en quelque lieu qu’ils soient placés, aussi-bien dans les Champs que dans la Ville ; comme au contraire, on appelle héritages. des Champs, tout ce qui ne consiste point en bâtiment ; ce qui comprend tant les terres de la Campagne, que les jardinages & les cours qui sont dans les Villes. La distinction de ces servitudes se fait par rapport à la principale partie, qui est la dominante ; c’est à-dire, qu’on appelle une servilude de Ville, celle qui est due à un bâtiment, & servilude rustique, celle qui est due à un héritage, qui ne consiste point en bâtiment : Dont il faut conclure, qu’on ne peut avoir aucune de ces servitudes prédiales, si on n’a des héritages proche des héritages qui sont chargés de ces mêmes servitudes.1
Mais quoique la Coûtume n’ait spécifié que peu de servitudes, comme celles de vues & d’égout, & les droits de passage dans une cour, ou de puiser de l’eau dans un puits, dont les deux premieres sont des exemples des servitudes de Ville, & les deux autres sont des servitudes rustiques, néanmoins, ce qu’elle ordonne aux Articles DCVII, DCIX, DCXIX, DCXX & DCXXI, se doit entendre généralement de toutes les autres servitudes qu’elle n’a point particulierement designées. Au reste, ce Chapitre, outre les servitudes, traite des murs qui séparent les héritages des voisins, en neuf Articles ; sçavoir, depuis le DCX, jusques y & compris le DCXVIII, & des Chemins Royaux, en un Article, qui est le dernier.
DCVII.
Droiture de servitude de vues, égouts de maisons & autres choses semblables, par la Coûtume générale de Normandie, ne peut être acquise par possession & jouissance, fut-elle de cent ans, sans titre ; mais la liberté se peut racquérir par la possession de quarante ans continuels, contre le Titre de Servitude.
Cet Article est composé de deux parties, dont chacune renferme une maaime fort remarquable. La premiere est, que le droit de servitude ne se peut acquérir par aucune possession sans titre, fut-elle de cent ans. La seconde est, qu’on peut acquérir la liberté contre la servitude, par une possession de quarante ans. Quant à la premiere, il est à propos de se souvenir d’une exception qui est faite par duMoulin , en sa Note sur l’Article CCXXx de la Coûtume de Blois, où il enseigne, que quoique par ledit Article Cexxx, le droit d’égout, non plus que celui des autres servitudes, ne se puisse acquérir sans Titre, par quelque temps que ce soit, cela ne se doit pas entendre, quand il y a un ouvrage bâti sur le fonds d’autrui pour l’usage de la servitude : Non intelligitur de siillicidio incorporato, & incdificato visibiliter, vel quiescente super fundo vicini : Parce qu’un ouvrage, comme a ditCoquille , sur le second Article du Titre des Seriatudes reelles, ne prouve pas une simple souffrance, mais une entreprise qui est un acte de véritable possession & saisine 113. Conformément à cette doctrine, le Commentateur deLouet , S. 1, rapporte deux Arrêts, par lesquels il a été jugé, que le droit de ces égouts construits sur le fonds d’autrui, se peut acquerir & prescrire sans Titre ; l’un est du 20 de Novembre 1574, confirmatif de la Sentence des Juges d’Amiens & l’autre est du 19 d’Avril 16o8. donné pour servir d’interprétation à l’Article CLXXXVI de la nouvelle Coume de Paris ; lequel Article dispose, que le droit de servitude ne s’acquiert point par longue jouissance, quelle qu’elle soit, sans Titre. Il y a eu un semblable Arrêt rendu au Parlement de Roüen, au rapport de Monsieur Guéroult, Sieur du Saussay, entre de la Grange Chirurgien, & Madeleine Durcdent femme civilement séparée de Nicolas de Morteing, Huiilier aux Eaux & l’orcts ; par lequel il fut jugé, qu’une chausse de cloaques, qui étoit batie sur la cour dépendante de la maison dudit de la Grage, & même une galerie qui étoit élevée sur ladite cour, pour aller au siege desdits cloaques n’étoit point une servi-tude, mais un droit de propriété qui n’avoit point besoin de Titre, de sorte que ladite Duredent, à qui appartenoit ladite maison, dont dependoient ladite chausse de cloaques & ladite galerie, fut maintenue en la possession qu’elle en avoit, avee dépens. Il semble qu’il faudroit dire la même chose d’un acqueduë bari sur le fonds d’autrui, pour la conduite des caux ; & qu’un ouvrage qui fait partie du fonds, attribue une véritable possession, en vertu de laquelle on peut prescrire.2
a l’égard de la seconde maxime, il n’est pas difficile d’expliquer comment on peut prescrire la libération des servitudes, qui consistent en quelqu’action. & usage de la part du possesseur de l’héritage, auquel elles sont ddes : car il est évident que la prescription qu’on peut acquérir contre ces servitudes est par le non usage d’icelles pendant le temps de quarante ans. Et partant les servitudes de passage, d’abreuver ses bestiaux, ou de puiser de l’eau, se peuvent perdre si on est quarante ans sans faire aucun usage ou exercice de ces servitudes. Mais il y a des servitudes qui ne consistent en aucun usage, mais uniquement en ce que les Propriétaires des héritages servans, ne peuvent faire de certaines choses qui appartiennent par un droit de liberté. Comme, par exemple, la servitude de ne pouvoir batir que jusqu’à une certaine élévation, ou de ne pouvoir batir en un certain endroit, de peur de nuire aux vûes de l’héritage voisin, ou de ne pouvoir avoir de fenêtres en une certaine partie de sa maison, sont des servitudes qui subsistent & se maintiennent sans aucun usage ou action, & consistent seulement à empècher que le voisin ne se remette en possession de la liberté qu’il auroit, s’il n’en étoit pas privé par la servitude à laquelle son héritage est assujetti. Donc l’unique moyen par lequel on peut prescrire la libération de ces sortes de servitudes, n’est pas un non usage, mais plutôt un usage contraire à la servitude, si celui dont le fonds est servant, fait quelqu’entreprise ou ouvrage contraire à la servitude, s’il éleve son bâtiment, s’il bâtit où il ne devroit point batir S’il ouvre des fenêtres, où il n’en pouvoit avoir ; car si ces entreprises subsistent pendant qua-rante ans, elles produisent par un effet de prescription, la libération de ces servitudes. Basnage rapporte un Arrêt du premier de Juin 168o, par lequel un Propriétaire qui avoit servitude, par laquelle le voifin ne pouvoit bâtir d’éeurie, ni garder de fumier en sa maison, fut maintenu au droit de cette servitude, encore que la maison servante eût été venduë plusieurs fois sans la charge de cette servitude, & qu’il y eût plus de cent ans que la servitude eût été constituée.3
Mais quoique la libération des servitudes soit favorable, il est néanmoins d’un usage constant, qu’il n’est point nécessaire pour conserver le droit de servitude sur un héritage décrété, de s’opposer au Décret, qui ne peut être passé au pré-judice des droits propriétaires & fonciers. Ce qui est contraire à la Jurisprudence du Parlement de Paris, par laquelle il faut s’opposer au Décret, pour conserver les servitudes, à moins qu’elles ne soient visibles & apparentes, comme il a été remarqué sur l’Article DLXXVI. VoyezLouet , S. 1.
DCVIII.
Quiconque a le fonds, peut faire bâtir & édifier dessus & par-dessous sondit héritage, & y faire Puits, Caves & autres choses licites, s’il n’y a Titre au contraire.
Ce que la Coûtume appelle fonds en cet Article, est appellé en l’Article CLXXXVII de la Coutume de Paris, le sol, ou l’étuge du rez de chaussee ainsi les deux Coûtumes expriment diversement le Proverbe Latin, cujus est solum, ejus est usque ad coelum. Elles conviennent de plus, par la limitation qu’elles donnent l’une & l’autre à la maxime qu’elles proposent, qu’on peut batir pardessus & pardessous, s’il n’y a titre au contraire. Par cette limitation, on doit entendre, ou un droit de servitude, ou que la propriété d’uns maison peut appartenir divisément à plusieurs ; car un peut avoir le dessous, un autre l’étage du milieu, & un autre l’étage de dessus : c’est pourquoi on a jugé, qu’une maison ayant été décretée un particulier avoit pû reclamer la cave, dont il n’avoit point été dépossédé par la saisie, quoiqu’elle fût dessous la maison décrétée, & qu’il ne se fût point opposé pour en demander la distraction ; parce que cette cave fut estimée être une propriété, & non pas une servi-tude, par deux Arrêts du Parlement de Paris, rapportés par le Commentateur deLouet , S. 1.
On rapporte sur cet Article quelqu’autres limitations ; car outre qu’on ne peut pas faire sur son fonds quelques ouvrages, qu’en gardant de certaines distances & épaisseurs prescrites par la Coutume, pour la sûreté & conservation des héritages du voifin, par les Articles DexI, DexII, DeXIII & DexIV, on n’y peut planter qu’à une certaine distance du fonds d’autrui. Cette distance est reglée diversement par plusieurs Coutumes : on estime généralement en Normandie, qu’on ne peut planter d’arbres fruitiers ou hauts arbres, sinon dans la distance de sept pieds de l’héritage du voisin, que si nonobstant cette distance, les branches nuisent à l’héritage du voifin, ou par leur ombre, ou parce qu’elle s’étendent trop au-dessus, on peut les faire rétrancher, de sorte qu’elles ne s’élevent pas plus de quinze pieds en haut, suivant la Loi 1. S. deinde, f. De arboribus cedendis, ou afin qu’elles ne couvrent pas son héritage. On a même jugé par un Arrêt du 2 d’Août 1669, rapporté parBasnage , que le voisin pouvoit avoir les fruits qui tomboient d’un arbre voisin sur ses héritages.4
a l’égard des haies qu’on plante pour servir de séparation à son héritage. d’avec celui du voisin, elles doivent être plantées dans la distance d’un pied & demi par quelques Coutumes, ce qui se pratique en Normandie.
DCIX.
En faisant partage & division entre cohéritiers ou personniers de chose commune, dont l’une partie sert à l’autre, les vues & égouts demeurent comme ils sont lors du partage, si par les lots & partages, il n’est expressément dit du contraire.
Par personniers, la Coûtume signifie ceux qui possedent une même chose par quelque droit de communauté ou de société, à titre universel ou particulier.
Le partage fait entre cohéritiers ou personniers, est un titre valable pour établir des servitudes par cet Article : car puisqu’avant le partage, on ne pou-voit pas dire, sinon improprement, qu’un héritage qui appartenoit à un seul, ou qui étoit possédé indivisément par plusieurs, se servit à lui-même, quoniam nemini res sua servit : & qu’apres le partage les choses demeurent au même état qu’elles étoient avant ; & qu’ainsi il arrive qu’une partie de l’héritage sert à l’autre qui en est divisée, on doit conclure, que le partage est un titre légitime pour constituer des servitudes, encore qu’il n’y en ait rien expressément stipulé par l’acte des partages. Il est donc à propos que les partageans, qui n’ont point spécifié ni défigné les servitudes qu’ils ont sur la part de leurs copartageans, fassent faire des descriptions ou des Proces verbaux de l’état au-quel est l’héritage lors du partage, afin d’être précautionnés contre les difficultés qu’il pourroit y avoir à en faire la preuve dans la suite du temps : vu prin-cipalement que par l’Article DXXVII, nul n’est tenu d’atiendre preuve de son héritage par tentoins, & qu’il est requis une preuve par écrit qui soit tout u moins sous la signature privée de ceux qui ont contracté ensemble. a quoi sont conformes les Articles CexV & CexVI de la Coutume de Paris, qui ordonnent, que toutes les servitudes retenues sur un héritage partagé, doivent être déclarées spécialement, tant pour l’endroit, grandeur, hauteur, me-sure, qu’espece de servitude ; & que la destination du père de famille pour les servitudes, n’est valable, que quand elle est ou a été donnée par écrit.
Les servitudes de vue & d’égout, se doivent interprêter dans cet Article DCIx, comme elles l’ont été dans le DCVII, non comme limitatifs, mais comme des exemples démonstratifs des servitudes plus ordinaires & plus connuës : & partant il faut dire, qu’au cas de ce même Article Dolx & toutes choses généralement à l’égard des servitudes, demeurent comme elles étoient lors du partage, s’il n’est autrement dit & expressément.5
On demande, quand une maison a été partagée, comment les réparations. & réédifications en doivent être faites, lorsque cela n’a point été stipulé dans le partage ; On convient qu’un chacun des partageans doit conserver & maintenir la portion qui lui est échue, en y faisant les menues & moyennes répa-rations, telles que doit faire un usufruitier pour la conservation de la chose dont il a la jouissance : mais quant aux réédifications, il paroit que tous les partageans ayant intéret que la maison subsiste, & par conséquent soit rétablie ( parce que le partage n’en a été fait, qu’afin qu’un chacun d’eux eût la commodité de la jouissance ; ce qui n’empêche pas que la propriété de tout le composé ne soit demeurée commune ) doivent contribuer à proportion de la valeur de leurs parts, aux frais de la réédification, suivant le raisonnement deCoquille , sur l’Article III du Titre des Serviludes, & suivant qu’il est ordonné par l’Article DCXVII, pour la réédification du mur métoyen.6
DCX.
Tout mur & paroi, auquel sont construites armoires, fenêtres ou corbeaux, attribuent le mur à celui du côté duquel sont lesdites armoires ou fenêtres, sinon en cas qu’il s’en trouvât des deux côtés, auquel cas ledit mur est censé métoyen.
DCXI.
De tout mur métoyen, chacun des voisins auquel il appartient, peut s’aider, & percer ledit mur tout outre, pour asseoir ses poutres & sommiers en bouchant les pertuis ; même pour asseoir les courges & consoles des cheminées, à fleur dudit mur ; & est tenu en édifiant le tuyau ou canal de ladite cheminée, laisser la moitié dudit mur entier, & quatre pouces en outre pour servir de contre-feu : Et ne pourra le voisin mettre aucuns sommiers contre, ni à l’endroit de ladite cheminée qui aura été premierement bâtie.
DCXII.
En tout mur métoyen, le voisin ne peut, sans le consentement de son voisin, faire vues, ne contre icelui faire égouts ou cîternes, ne peut aussi le hausser en son intégrité, mais bien fe pourra aider de ladite moitié, & le hausser, si ainsi est que le mur soit assez fort & épais, pour commodément porter la structure, & servir aux choses pour lesquelles il est haussé.
DCXIII.
Contre mur métoyen aucun ne peut faire chambre aisées ou cîternes, sinon en faisant bâtir contre-mur de trois pieds d’épais en bas, & au-dessous du rez de terre, à pierre, chaux & sable, tout à l’entour de la fosse destinée ausdites chambres ou cîternes.
DCXIV.
Qui veut faire forge, four ou fourneau contre le mur métoyen, doit laisser demi-pied de vuide d’intervalle entre-deux du mur, du four ou forge, & doit être ledit mur d’un pied d’épaisseur, & sera ledit mur de pierre, brique ou mouaillon.
DCXV.
En mur métoyen, ne peut l’un des voisins, sans l’accord & con-
sentement de l’autre, faire faire fenêtres ou trous pour vues, en quelque manière que ce soit, à verre dormant ni autrement.
DCXVI.
Toutefois, si aucun a mur à lui seul appartenant, joignant sans moyen à l’héritage d’autrui, il peut en icelui mur avoir fenêtres, lumieres ou vues, pourvu qu’elles soient sept pieds en haut, tant au premier que second étage, le tout ferré & vitré, sans qu’il puisse ouvrir, & que cela puisse préjudicier son voisin voulant batir contre, s’il n’y a Titre particulier au contraire.
DCXVII Il est loisible à un voisin, contraindre par Justice son voisin à faire refaire le mur métoyen, & édifice corrompu menaçant ruine, & d’en payer chacun sa part, selon la portion qu’ils ont audit mur ou édifice métoyen, & s’il n’est métoyen, le propriétaire peut être contraint à le redresser ou abattre.
DCXVIII.
Relais ou armoires ne sont marque de propriété, si elles ne sont accompagnées de pierre de taille traversant tout le mur.
Ces neuf Articles sont touchant les murs qui séparent les héritages des voisins, principalement dans les Villes. La Coutume de Paris s’est encore mon-trée plus exacte que celle de Normandie, à régler cette matiere, comme étant importante, ce qui paroit par un tres-grand nombre d’Articles rédigés sous le Titre de Servitudes. Ces murs ou appartiennent en propriété à un des voisins, ou sont communs entre ceux dont ils separent les héritages. Ils sont réputés communs, quand ils n’ont aucune marque de propriété, ou que ces marques se trouvent dans les deux côtés du mur : mais afin qu’elles attribuent droit de propriété à celui du côté duquel elles ontété apposées, il faut qu’elles soient accompagnées de pierre traversante tout le mur, par l’Art. DCXVIII, d’autant que cera fait connoître qu’elles n’ont pas été mises à l’insçu du voisin, à l’exclusion duquel la propriété est établie. Ces marques ont divers noms : la Cou-tume les appelle armoires, fenêtres, relais & corbeaux, aux Articles Dex & DCXVIII. Celle de Paris les nomme des jambes, parpaignes, chaines, filels & corbeaux, aux Articles CCVII & CCXIV : ce sont termes d’Architecture, dont la signification doit être connue par les Experts, que la Coûtume de Paris, aux Articles CLXXXIV & CLXXXV, appelle Iurés, parce qu’auparavant de faire leur visitation & rapport, ils doivent prêter serment en Justice d’attester la vérité. Une autre marque de la propriété d’un mur est, quand le batiment est porté entièrement sur toute l’épaisseur du mur ; car le mur est réputé appartenir entierement au Propriétaire de ce batiment.
Or du mur commun, l’usage en appartient à l’un & à l’autre des voisins, de telle sorte qu’un chacun d’eux peut percer toute l’épaisseur d’un mur, pour asseoir les poutres & sommiers, à la charge de boucher les pertuis, suivant l’expression de l’Article DexI. Mais d’autant que de la chose commune l’usage. en doit être commun, il semble qu’aux termes de la Coutume de Paris, en l’Article CCVIII, les poutres ne doivent être mises que jusqu’à l’épaisseur de la moitié du mur, & au point du milieu, en faisant mettre jambes, chaines & corbeaux, pour pourvoir à la conservation & fortification du mur : ce nonobstant, la Coûtume admet une prévention sur le mur commun, en un cas exprimé audit Article DexI, qui est, quand on fait une cheminée contre & à fleur du mur commun ; car en ce cas, le voisin est exclus de pouvoir mettre aucuns sommiers contre & à l’endroit de la cheminée qui aura été premièrement bâtie, quoique suivant la forme & l’espace prescrit par le même Article, ce qui a été ordonné par une considération publique de prévenir les incendies.
La Coûtume a spécifié plusieurs choses, qu’on ne peut absolument entreprendre sur le mur commun & métoyen, comme de le percer pour avoir des vues ou en recevoir du jour non pas même par verre dormant, par l’Article DCXV ; c’est pourquoi les fenêtres sont une marque de la propriété du mur, par l’Article Dex. On ne peut de plus hausser & élever le mur commun en son intégrité, mais seulement le hausser sur la moitié, pours’en servir, si le mur est assez fort & épais, pour soutenir la structure & les charges pour lesquelles on entreprend de l’élever : on ne peut en outre faire contre le mur métoyen, ni égouts, ni citernes, ni cloaques, ni four, ni forge, mais il faut observer les distances & les épaisseurs prescrites par la Coutume, aux Articles DCXIII & DCXIV. Ce qui doit s’observer à plus forte raison à l’égard du mur, dont le voisin est propriétaire, & en cas de contravention, il faut, faire visiter l’ouvrage par Experts ou Jurés, dont les parties conviendront ou qui, faute d’en convenir, seront nommés d’office, comme il est porté par les Articles CLXXXIV & DLXXXV de la Coutume de Paris, lesquels ont été pris de l’Ordonnance de Charles I, de l’an 1567.
Or quand le mur métoyen menace ruine ou commence à se corrompre on peut contraindre le voisin à contribuer aux frais de la réédification par proportion, par l’Article DCXVII, pourvu que la ruine ou la corruption ne soient pas arrivées par la faute d’un des voisins ; car en ce cas, ce seroit à lui seul à payer les frais : comme s’il avoit amassé des terres de son côté contre le mur, qui l’eussent renversé ou ébranlé. Que si les héritages des deux voifins ne sont point séparés, la Coutume de Paris, aux Articles CCIx & Cex, a statué qu’on peut contraindre son voisin à faire la clôture & séparation à communs frais, pour les héritages des Villes & Fauxbourgs, & non des héritages de la campagne. D’ailleurs, au cas de refus ou de l’impuissance d’un-voilin de contribuer aux frais du rétablissement, l’autre pourra faire ordonner qu’en rebatissant le mur, il lui demeurera propre : comme quelques Cou-tumes disposent, que celui qui fait les frais pour la conservation ou rétablissement des choses communes, au refus des personniers d’y contribuer, gagnera les fruits à leur exclusion ; ce qui est suivant la Loi 52. 8. idemt respondie, ffa Pro socio, & la Loi si ut proponis, C. De aedificiis privatis. Que si le mur est propre & non commun, le propriétaire peut être contraint de le réédifier, quand il y a nécessité de se clorre, comme aux Villes & Fauxbourgs, ou de-
Pabattre quand il n’est point nécessaire de se clorre, comme aux héritages ées champs. C’est ainsi qu’il faut interprêter la fin de l’Article DCXVII.
Si on ne peut réparer ou réédifier sans passer sur l’héritage du voisin, ni même sans y faire quelque dommage, le voisin est tenu de le souffrir, à la charge qu’on remettra au plutôt les choles en bon état, suivant plusieurs Coûtumes, & la Loi Si quis sepulehrum, ff. De religiosis & sumpiibus funerum : Ce qui s’observe en toutes les autres réparations ou réédifications, qui se font dans les Villes. C’est par une raison semblable, que le voisin doit donner passage à son voisin, pour la culture de ses héritages & pour en recueillir les fruits : car ce passage n’est pas dû par un droit de servitude, mais est une condition. &’une dépendance naturelle, provenante de la situation des héritages, semblable à celle par laquelle les lieux bas sont soumis à ceux qui sont plus éle-vés, qua loca inferiora superioribus subjiciuntur. VoyezLouet , C. 1. Or le propriétaire d’un mur ne peut pas y percer des fenêtres qui se puissent ouvrir & fermer, s’il sépare sans moyen les héritages du voisin ; mais peut seulement y mettre du verre qui ne puisse être ouvert : c’est ce que la Coutume de Paris en l’Article CC, appelle fer maillé ou verre dormant : ce qu’elle explique en l’Art. suivant CCI, en ces termes : Fer maillé, est rreillis dont les trous ne peuvent être que de quaire pouces en tous sens ; é verre dormant, est un verre aitaché, scelle en plutre, qu’on ne peut ouvrir. Ce verre dormant doit être placé à sept pieds au-dessus ; tant du premier que des autres étages & non dans une moindre élevation, par l’Article DexVI, & partant la Coutume n’accorde pas, à parler proprement, la vue sur l’héritage du voisin, mais seulement quelque jour & lumière : ce qui fait douter s’il faudroit observer la Coutume de Paris, qui ordonne en l’Article CCII, qu’on ne peut prendre vues droites sur son voisin, s’il n’y a six pieds de distance entre la vue & l’héritage du voifin : Com-me aussi, qu’on ne peut prendre vucs de côté s’il n’y a deux pieds de ladite distance ; ce qui a son fondement sur la Loi Imperatores, ff. De servitutibus urhanorum prediorum. Mais le contraire est pratiqué en d’autres Coutumes, comme d’Anjou, CCCCLV, du Perche, CCXVI, qui permettent d’ouvrir des fenêtres, encore que d’icelles il n’y ait distance jusqu’à l’héritage du voisin, que de demi-pied.
Il est à propos d’ajouter à tous ces Réglemens l’Article CXCII de la Coutume de Paris, qui contient un cas omis dans celle de Normandie, & néanmoins assez ordinaire & important, qui est que celui qui a place, jardin ou autre lieu vuide ( ce sont les termes dudit Article CXCIIy qui joint immédiatement au mur d’autrui, ou à mur métoyen, & il veut faire labourer & fumer, il est tenu faire contre-mur de demipied dépaisseur ; & s’il a terres jectisses, il est tenu de faire contre-mur d’un pied d’épaisseur : ce qui étoit exprimé par l’ancien Coutumier de France, cité parChopin , & qui en ajoutoit la raison, qui est afin que le fondement du mur voisin ne s’évase pas faute de terre joignant.
La Coutume a de plus omis à désigner les marques par lesquelles on doit juger quand un fossé qui sépare les héritages de deux voisins dans la campagne, est propre ou commun, ce qu’il est néanmoins important de pouvoir discerner.
On répute le fossé propre à celui sur le fonds duquel où le jet a été mis, c’esta-dire, la terre qui a été tirée pour creuser le fossé, a été jettée & déposée ou la plante en douve, c’est-à-dire, sur le penchant du fossé, a été plantée, parce qu’on doit presumer qu’on n’a pas mis la terre ni la plante sur le fonds d’autrui. Si donc il se rencontre que le jet & la plante soient sur les deux bords du fossé, on le doit juger commun, comme aussi, s’il n’y paroit ni jet ni plante sur aucun des bords du fossé, de la même manière qu’un mur est censé commun, quand il n’y a aucune marque de propriété particulière à un des voisins. Voyez ce qui a été remarqué sur l’Art. LXXXIII.7
DCXIX.
Quand aucun met hors de ses mains partie de sa maison qui a vues & égouts, ou autre servitude sur une autre qu’il retient à soi, il doit spécialement & nommément déclarer qu’elles servitudes il retient sur
l’héritage qu’il met hors de ses mains, ou quelles il constitue sur le sien, tant pour l’endroit, grandeur, hauteur, mesure, qu’espece de servitude, autrement, l’héritage vendu demeurera libre au préjudice du Vendeur.
DCXX.
Et pour le regard de la maison retenue par le Vendeur, les choses demeureront en l’état qu’elles étoient.
Ces deux Articles & le DexxI, devoient être placés immédiatement aprés le DOIx, parce qu’ils traitent de la même matière & de cas semblables. Le Propriétaire de deux maisons contigués ou adjacentes l’une à l’autre, semble avoir confondu les servitudes qui sont en l’une & en l’autre, suivant ces paroles de la Loi 30. ff. De servitiulibus urbanorum prediorum, rapportées sur l’Article CLXXIII. Si quis cdes que suis cdibus serviebant cûm emisset, traditas sibi accepit, confusa sublataque serviius est. Ce qui dépend de cette re-gle, que res sua nemini servit : c’est pourquoi la Coûtume ordonne, que ce Propriétaire en méttant hors de ses mains une partie de sa maison, ou une des deux maisons qui lui appartiennent, doit spécialement & nommément declarer dans le contrat d’aliénation, quelles servitudes il veut retenir sur l’he-ritage dont il se dessaisit, ou quelles il constitue sur l’héritage dont il demeure possesseur ; c’est-à-dire, qu’il doit bien expliquer l’endroit, la grandeur la hauteur, la mésure & l’espèce de ces servitudes, autrement, l’héritage vendu demeure libre au préjudice du vendeur : & quant à l’héritage retenu par le vendeur, les choses demeurent au même état qu’elles étoient auparavant l’aliènation, & lors d’icelle ; c’est-à-dire, sujettes aux servitudes dont elles avoient les marques : ce qui se rapporte aux paroles qui sont immédiatement aprés celles qui ont été citées de ladite Loi trentieme. Et si rursus rendere vult, neninaiim imponenda servitus est, alioquin libere veneunt ; ausquelles il faut ajouter les Loix & & 3, in initio, ff. Communia prodiorum urbanorum & rusIicorun, qui font connoître les principes de ces décisions, ausquelles l’Article CExV de la Coutume de Paris est conforme. Voyez ce qui a été dit sur l’Article CLXXVIII.8 Basnage rapporte un Arrêt du y de Juillet 1666, par lequel il fut jugé qu’un bailleur à fieffe d’une partie de la maison dont il étoit Propriétaire, jouiroit des vues qu’il avoit sur la partie baillée à fieffe, encore qu’il ne les eût pas réservées par le contrat ; il ajoute, que cela fut jugé suivant l’Artiele Dexx, qui dispose, qu’à l’égard de l’héritage retenu par le vendeur, les choses doivent demeurer au même état qu’elles étoient. Mais il semble que c’est une mauvaise interprétation de cet Article Dexx ; car les choses doivent demeurer au même état à l’égard des servitudes passives ; mais non à l’égard du droit de servitude qu’on peut avoir sur le fonds aliéné : car ce droit, c’estA-dire, cette servitude active est éteinte & perduë par l’Article précédent DCXIX, qui déclare expressément, que l’héritage vendu ou aliéné demeure libre au prejudice du vendeur. On pourroit dire, pour soutenir l’Arrêt & accorder les Articles DexIx & Dexx, que les servitudes apparentes & vi-sibles sont conservées au vendeur ou bailleur à fieffe, sur l’héritage qu’il baille & met hors de ses mains, parce que l’acheteur ou preneur à fieffe, doit être présumé avoir bien voulu l’héritage à cette condition de souffrir la servitude qu’il n’a point ignorée, & contre laquelle néanmoins il n’a rien stipulé : Ubi
enim judicium emptoris ibi fraus venditoris non poiest esse, suivant le dire deCiceron , au troisieme Livre des Offices, cité par le Commentateur deLouet , S. 1. Mais il y auroit encore plus de raison à dire, que par l’Arrêt on n’a pas jugé que le bailleur à fieffe auroit une servitude de vue sur la maison qu’il avoit fieffée ; mais qu’on a jugé précisément qu’il ne boucheroit pas les femêtres, au moyen desquelles il avoit vue sur ladite maison : en quoi il y a bien de la différence, parce qu’en maintenant lesdites fenêtres, on jugeoit que la maison que le bailleur retenoit en ses mains, demeureroit au même état qu’elle étoit lors du contrat, conformément audit Article Dexx, mais en lui attribuant une servitude de vue, on auroit contrevenu manifestement à l’Article DCXIX, qui dispose, que l’héritage aliéné demeure libre des servitudes. qui n’ont point été expressément réservées, & au préjudice de celui qui a fait Paliénation : de sorte qu’il semble qu’on doit dire, que par ledit Arrêt le preneur à fieffe ne pouvoit pas faire fermer les fenêtres qui étoient en la maison retenue par le bailleur ; & que néanmoins cela ne le privoit pas du droit de faire batir & élever une muraille, par laquelle la vue sur son fonds seroit ompêchée ; ce qu’on ne peut pas faire quand il y a une servitude de vuc, dont l’effet propre est de priver le Propriétaire du fonds servant, de rien innover qui empèche l’usage de la servitude.
DCXXI.
En division d’héritage entre cohéritiers, si une Cour & un Puits leur sont communs pour passer & repasser par la Cour, pour puiser de l’eau au puits, le propriétaire pourra faire clorre de muraille la Cour, & fermer de Portes, parce que les cohéritiers pour leur usage auront chacun une clef des serrures ; & ne pourra ladite Servitude être possédée par autre personne que par celui ou ceux lesquels possedent les héritages, à cause desquels est due ladite Servitude.
Une cour & un puits peuvent être dits communs, par rapport à l’usage que quelques-uns des communs ont par le droit de propriété ; & les autres communs, par le droit de servitude : ce que cet Article a bien distingué, en dé-alarant que le Propriétaire peut faire clorre la cour commune de murailles, & la faire fermer de portes, dont les communs auront chacun une clef pour leur usage ; en quoi il a été pourvu à la sûreté du Propriétaire, & à l’usage de la servitude, dont il n’y a que les possesseurs du fonds dominant qui se puissent servir, ne la pouvant céder, ni en communiquer l’usage à d’autres : ils doivent même en user civilement, de manière que le Proprietaire n’en soit pas tropincommodé.9
DCXXII.
Tout Chemin Royal doit avoir pour le moins quatre toises, & ne peuvent les Propriétaires faire Plants & Fossés qui l’étrecissent.
Par Chemin Royal, on doit entendre les grands & célebres Chemins qui conduisent de Ville en Ville : ce sont ceux qu’Ulpien en la Loi 2. 8. 4it Pritor, ff. Ne quid in loco publico, dit avoir été appellés par les Grees Royaux, & par les Romains, tantot Prétoriens, tantôt Consulaires. Par la Loi des douzeTables, ces Chemins devoient être larges de huit pieds dans leur droiture, & de seize pieds dans les détours : Octo pedes in porredtum, sexdecim in anfractum, id est, ubi flerum est, l. 8. ff. De servitutibus prediorum rusticorum.
La Coûtume veut que ces Chemins ayent indistinctement quatre toises de largeur ; c’est-à-dire, vingt-quatre pieds, dont chacun soit de douze pouces, ce qui est suivant la mesure royale ; & ce qu’il faut néanmoins limiter quand la nature du lieu le peut souffrir. Ce n’est pas que les autres Chemins ne puissent être dits Royaux, d’autant qu’ils sont d’un droit commun, & inter Regalia Et c’est ce qui a fait juger, que les Chemins qui séparent les terres, ne doivent point être compris dans la mésure des héritages, parce qu’ils n’appartien-nent pas aux Particuliers qui ont des terres adjacentes, mais au Public : ce qui n’empêche pas que les arbres qui sont plantés proche ou dessus, n’appartiennent aux Particuliers, & non au Roi ni aux Seigneurs de Fief, par l’Article CCCLIX de l’Ordonnance de Blois.
On ne peut prescrire contre la largeur des Chemins ; cette Ordonnance au même Article, ayant déclaré, que ies Chemins doivent être rétablis en leur ancienne largeur nonobstant toutes usurpations, & par quelque laps de temps. qu’elles puissent avoir été faites : Par la même raison, on ne les peut détourner ni empirer ; & en tous ces cas les voisins sont tenus de souffrir qu’on les élargisse, qu’on les remette en leur ancien lieu & qu’on les répare à leurs dépens, même avec amende.
L’action pour la réparation & rétablissement des Chemins, est populaire, cuivis de populo pates ; mais elle s’intente avec l’adjonction du Procureur du Ros ou Fiscal : car quoique vi & publice sint de Regalibus, elles sont néanmoins une matière de police, que les Hauts-Justiciers peuvent régler dans leur territoire. On a douté si les Hauts-Justiciers pouvoient connoître des crimes commis dans les grands Chemins, qui sont dans l’etenduë de leur Justice ; mais on a jugé en leur faveur, au préjudice des Juges Royaux suivant l’avis deBacquet , en son Traité des Droits de Justice, Chapitre y, & deLoyseau , en son Livre des Seigneuries, Chapitre 9. n. 79. l’Article & du Reglement de 1686, l’a atresté.10 Bien qu’il ne soit ici disposé que des Chemins Royaux, c’est-à-dire, grands. & célebres, que la Coutume déclare ne pouvoir être étrecis par aucuns plants ou fossés, il faut entendre la même défense à l’égard des autres Chemins publies, mais moins importans, comme ceux de travers qui conduisent aux Che-mins Royaux, ou aux Bourgs & Villages, & quoique la largeur n’en doive pas être réglée comme celle des grands Chemins Royaux, elle doit néanmoins être telle, que deux charrettes à côté l’une de l’autre y puissent commodément passer. Voyez la différence qui est entre les grands Chemins, les vicinaux & les particuliers, dans ladite Loi 2. ff. Ne quid in loco publico, &Louet , C. 2. où il enseigne, que les réparations des Chemins publies, se font aux dépens de ceux qui ont des héritages voisins, & qu’on ne peut être dispensé de cette charge par aucun privilége : Viarum enim publicarum munitiones non persone sed locorum munera sunt. Mais quant aux Chemins particuliers, qui sont ceux qui sont sur le fonds appartenant aux particuliers, c’est à ceux qui s’en servent à les réparer, & il suffit au propriétaire de souffrir le passage ; satis esi fundi domino patientiam presture.11
vicinaux, mais on ne doit pas tenter d’en multiplier l’idée pour éluder cette disposition de la Coûtume ; nulle servitude sans Titre.
Comme les Hauts-Justiciers connoissent des délits commis dans les grands chemins, on les a encore maintenus dans le droit de connoître de la voirie sur l’étendue de leur HauteJustice ; la question a été ainsi jugée par Arrét de Grand Chambre du 1I Ianvier 1737 en-tre M. le Duc de Luxembourg, propriétaire de la Haute-Justice de la Ferté-en-Brai & le Procureur du Roi du Bureau des Finances ; la même difficulté s’étant présentée de nouveau dans la même Chambre le as Juin suivant, elle rendit pareil Arrét au profit de M. de Rochechouart, Seigneur Haut-Justicier de Préaux. Observez que ces Arrêts ont été artaqués par un pourvoi au Conseil, & que l’instance est actuellement pendante entre le Parlement & les Tréforiers de France établis dans les trois Généralités de la Province.
FIN.
Basnage , sur le préambule de ce Chapitre, dit que les personnes & les choses étoient libres & exemptes de servitude par le droit de la nature ; mais que l’avarice & l’ambition ont détruit la liberté & ont introduit l’esclavage sur les personnes, & la servitude sur les biens. M. Lalaure, Traité des Servitudes réelles, Liv. 1, Chap. 2, admettroit volontiers, avecBasnage , que la servitude personnelle ne doit son être qu’à l’avarice & à l’ambition, mais il croit être bien fondé à donner aux servitudes réelles une origine moins déshonorante pour l’humanité ; & il faut avouer que ces conjectures ont beaucoup de force. Je ne puis donner qu’un précis tres-court de ses raisonnemens ; l’espèce humaine s’étant multipliée, les uns habiterent le pied des montagnes, les autres se placerent sur le sommet ; ceux qui fixerent leur demeure au pied d’une montagne, furent forcés, par la situation dulieu, de recevoir les eaux ou la fonte des neiges, & c’étoit une espèce de servitude imposée par. la nature. L’industrie ayant fait naître le commerce, les hiommes se rapprocherent, les Législateurs qui firent le partage des terres, pour assurer la propriété à ceux à qui ils les distribuerent, firent planter des bornes, qui servirent à former la distinction des héritages ; & pour conserver une juste égalité dans les partages, ils accorderent à ceux dont le terrein etoit moins arrosé & moins gras, la faculté de pouvoir prendre & puiser de l’eau dans le terrein voisin qui en étoit abondamment fourni, & d’y faire abreuver leurs bestiaux, d’y aller, d’y passer, & même d’y avoir un réservoir ; aussi les servitudes imposées dans le premier établissement, par l’autorité publique, s’appelloient leges & conditiones. agrorum. M. la Laure nous présente un autre spectacle : un pere de famille acquiert des maisons voisines les unes des autres, il veut se procurer des jours, des vues, & donner des écoulemens aux eaux ; il agit en maître, il fait construire des canaux, fait ouvrir des portes, des fenêtres, en bouchent d’autres, & enfin forme de nouveaux passages : personne ne pouvoit combattre l’exécution de ses projets, il a usé du droit de propriété, mais il meurt : des héritiers divisent ce qu’il a réunt ; & les accords qu’ils font dans leurs partages, relativement à ces jours, à ces portes ou à ces canaux, deviennent des constitutions de servitudes. Ces idées sont belles, on remonte avec plaisir avec M. la Laure à un plan originel ; il flatte d’autant plus, qu’on trouve les premiers coups de pinceau dans d’Avezan , de l’origine des Servitudes, dansBrodeau , sur l’Article CLXxxVI de Paris ; & dans, Préambul. sur le Titre 13 d’Orléans ; mais il est bien à craindre que la Lande plûpart des Servitudes n’ayent pas une origine aussi pure, & nous sommes souvent forcés de reconnoître que si on excepte les Servitudes naturellement nécessaires, il en est peu qui ne soit le fruit de l’usurpation.
UO Les Servitudes, qui sont l’objet de ce Titre, peuvent être définies des droits qui assujettissent un fonds au service d’un autre fonds qui appartient à un autre propriétaire. Les Servitudes se divesent générale nent en Servitudes d’un usage indispensable, comme l’écoulement des caux du fonds superieur sur le fonds inférieur, le passage sur le onds voisin, quand notre fonds y est enclavé de toutes parts, & en Servitudes établies pour une plus grande commodité, comme le droit d’avoir des jours sur une maison qui ne nous appartient point ; elles sont dues aux édifices & batimens destinés à l’habitation de Phomme, comme le droit d’égout, le droit d’appuyer son mur sur l’édifice proche du sien, ou aux héritages de la campagne, comme le droit de passage, celui de prise d’eau ou de pascage. Il y a des Servitudes individues & d’autres dividues, les Servitudes sont individues soit parce que l’usage n’en peut être divisé : telle est la Servitude de chemin ; car on ne peut pas en nême-temps marcher & ne pas marcher, partim ire, partim stare, soit parce qu’elle est due toute entiere & solidairement. On appelle Servitudes dividues celles dont l’on conçoit la division, quoique cela soit tres-difficile ; comme le droit de tirer un nombre de voitures de chaux, faible & autres matieres d’espèce semblable, ou relativement à leur fin, comme dit duMoulin , qui regarde comme dividu le droit de passage pour recueillir les fruits dans certaines sai-sons de l’année. On distingue enfin les Servitudes en continues & discontinues visibles & latentes, les unes sont sensibles aux yeux, & leur usage ne requiert point le fait de l’homme, quand elles sont une fois établies, comme le droit d’égout, le droit d’appui ; les autres ne paroissent que quand on les exerce, & leur usage requiert toujours des faits nouveaux : tels sont les droits de chemin & de passage.
l’aurois entré dans un plus grand détail des Servitudes qui appartiennent aux batimens, & de celles qui sont plus spécialement dues aux simples héritages, mais on trouve ce détail dans les Auteurs. Je ne puis cependant oublier une question résolue par Basnage d’une manière assez diffuse, je la rappelle succinctement ; il s’agit de l’usage des eaux. Le propriétaire d’un fonds dans lequel l’eau a sa source, peut en faire tel usage qu’il veut, la refuser à ses voisins, & s’en servir à leur préjudice pour son plaisir ou pour son utilité, le droit que les voisins auroient à la source seroit une Servitude ; mais si l’eau d’une riviere ou d’un ruisseau coule, par exemple, naturellement le long d’un pré, & n’y prend pas sa source, le propriétaire du pré peut en faire usage pour son utilité ; mais il ne peut l’intercepter entierement ni en priver ses voifins. Vuyer la Loi a, au Cod. de servitute & aquâ, & la Loi S, au Cod. méme Titre.Henrys , Tom. 2, quest. 7s ;Mornac , sur le S. si initium de la Loi é, au Dig-de Edendo, & les Arrêts de ce Parlement, cités sur l’Article CeIx de la Coutume.
Deux choses caractérisent les Servitudes, dit M. l’Avocat-Général Chauvelin : la premiere, lorsque la maniere dont on possede est contraire au droit commun ; la seconde lorsque pour la commodité d’un héritage la liberté de l’héritage voisin est restreinte, ainsi l’exercice d’un droit ordinaire est bien different d’une Servitude : Arrêt du Parlement de Paris du 6 Février 1710 :Augeard , Tome 2, édition de 1756. Vover, sur les Servitudes, Capola d’ Avezan ; Maximes de Lhommeau ; Coquille ; Ferriere &Basnage .
Dans l’ancien droit Romain les servitudes d’héritages ne pouvoient être acquises par preseription ; mais auparavant la Loi Scribonia, on pouvoit prescrire les servitudes de batimens ; Justinien permit d’acquerir toute servitude par prescription.
Le droit commun du Pays coûtumier a embrassé une Jurisprudence entièrement opposée à celle que Justinien avoit introduite : on n’y distingue point, comme à Toulonse, le droit de servitudes continues d’avec celui de servitudes discontinues, pour soumettre les unes à la prescription de trente ans, & les autres à celle d’un temps immémorial :Vedel , surCatelan , Liv. 3, Chap. S. Les servitudes rustiques n’ont point une Jurisprudence différente des servitudes urbaines, comme à Lyon ou dans le Ressort du Parlement de Dijon ;Bretonnier , surHenrys , Tome a, quest. 80. Enfin les servitudes visibles & accompagnées de vestiges extérieurs, sont régies par la même Loi que les servitudes latentes : toutes servitudes, de quel-qu’espece qu’elles puissent être, y sont imprescriptibles, & ne peuvent subsister sans un titre valablement perpétué ; les servitudes même d’un usage nécessaire ne peuvent être l’effet de la seule possession ; le propriétaire, qui a fouffert le passage sur son fonds, est toujours en droit de reclamor un dédommagement, & même en rente foncière, suivant la Jurisprudence actuelle de notre Province arrestée par un Arrêt du 5 Mars 1736.
La disposition des Coutumes est fondée sur la faveur de la liberté, & sur ce qu’il ne paroit pas convenir que des actes souvent ignorés ou accordés à la familiarité, tournent en un droit formé & exigible.
Cependant nous avons des Contumes qui s’écartent de cette regle contumière, nulle Servitude sans Titre ; les unes disposent que la possession immémoriale supplée au Titre, de ce nombre sont herg ; S. Winox, Rub. 14, Article Iil, Rub. 15, Article l ; Bruges, Tit. 22, Article I ; Douay, Chap. 9, Article Il ; Grand Perche, Article CCXVI, Liége, Chap. 9 Article Xl : Orchies, Chap. 8, Artiele III ; Merz Evéché, Tit. 16, Article V. Marsal, Article LXXYI. D’autres disent que la Servitude s’acquiert par la prescription comme les autres biens & actions, ou par une possession de quarante ans. Alost, Rub. 4, Article I, Il, III ; Amiens, Article CLXV ; Auvergne, Chap. 17 Article Il & IV ; Châlons Article CXLIV ; Chaulny, Article LXix ; la Gorgue. Article XIII & XLV : Meez, Viile & Cité, & Pays Messin, Tit 13, Article I. Il & XIx ; Nieuport, Rub. 15, Article Ix, Ponthieu Article CXV ; S. Omer, Bailliage, Article XXl ; S. Omer Ville & Echevinage, Articie CXXx ; Toul, Article CVII ; Valenciennes, Article XCIII, Vermandois, Ar-tiele Cxl. V.
Une Sentence contradictoire, avec trente années d’exécution, paroit à quelques Auteurs remplacer le défaut du titre constitutif de servitude ; si cette Sentence n’est déclaratoire que de la nue possession, elle est inurile eût-elle été exécutée pendant un siecle ; la question a été jugée ainsi par un Arrêt rapporté par Bérault ; mais si la Sentence énonce un titre positif non contesté, il y auroit quelquefois de la rigueur à forcer, aprés un leng laps de temps, celui qui est troublé dans la servitude dont il a toujours joui à le renrésenter.
Des transactions anciennes, des actes subsequens, qui ne contiennent que des faits possesfoires, qui ne donnent aucune idée d’un titre primitif, ne peuvent fonder une servitude, à cause que la disposition de la Coutume est absolument négative.
Nous avons deux Arrêts célebres sur cette matière : les Religieux de Séez reclamoient une portion de la Grange dimèresse de Dussy, ils en établissoient la possession & la propriété sur une Sentence du 9 Juillet 16oy, qui, sur la poursuite du Curé, les avoit condamnés à la réparation de la Grange ; tous leurs Baux, jusqu’en 1745, la plûpart passés avec les Curés, chargeoient le fermier de son entretien pour leur part contributive, ils s’étayoient en outre de l’Article DxxI de notre Coûtume & de l’Article CXVII du Réglement de 16b8a le Curé se renfermoit dans la disposition de l’Article DEVII de la même Coutume, demandoit la représentation du Titre primordial, & avoit justifié que la Grange étoit située sur le domaine de la Cure ; par Arrêt du 22 Mars 1757, le Curé de Dussy a été déchargé de la demande des Religieux de Séez. Le Chapitre d’Avranches avoit eu auparavant la même prétention contre le Curé de Marcé, il justifioit d’une transaction du quinzieme siecle ; mais parce que dans la transaction produite on y avoit énoncé ces termes, Grangia dicti Curati, & à cause de la situation de la Grange sur le fonds de la Cure, on n’a point eu d’égard à la possession immémoriale du Chapitre, appuyée sur la transaction : la Cour a pensé que les Curés de Marcé avoient pu accorder l’usage de cette Grange au Chapitre d’Avranches ; mais que cet usage ne remplaçoit point un Titre : Arrêt du 3 Février 1735.
Le décret n’est point un titre constitutif de servitude c’est ce que développe en peu de mots M.Auzanet , sur l’Article CCII de la Coutume de Paris : n le décret & adjudication n d’une Maison, en l’état qu’elle étoit, n’est suffisant pour conserver les vues qui subsistoient n lors de la saisie réelle & de la poursuite du décret, mais il est nécessaire de rapporter un n titre particulier des vues : ainsi jugé par deux Arrêts donnés, l’un au Rapport de M. Riant, n en la quatrieme des Enquêtes, le premier Mars 16oû, & l’autre en la cinquieme des Eny quêtes, auiRt apport de M. Hatte le 2o Juillet 1611. nCe que dit M. Auzanet de la servitude de vue, s’étend a toutes espèces de servitudes ; j’ajoute que quand même il seroit fait mention d’une servitude quelconque dans la saisie, dans les criées, & même dans l’adjudication finale, l’adjudicataire ne seroit pas moins obligé de représenter un Titre indépendant de celui de l’adju lication, & il ne faut tirer aucun argument de ce qu’on lit dans M. le nCamus , sur l’Atticle CCXVI de Paris : n le décret forcé est un titre suffisant pour conn server à l’acquereur le droit de servitude active, dont jouissoit le saisi, pourvu que dans la saisie réelle, affiches, criées & adjudications il en soit fait mention : n car l’adjudicataire ne peut avoir un droit plus ample que celui du saisi ; or le saisi, nonobstant sa pos-session auroit été obligé de représenter le titre constitutif de la servitude : il faut donc que Padjudicataire subisse la même Loi, & telle est l’opinion de Ferrière sur l’Article CLXXXVI de la même Coûtume : opinion qui doit être certainement suivie parmi nous.
Le larmier qui auroit été suspendu pendant plus de quarante ans sur un fonds du voisin, ne fait point présumer un Titre de servitude : Arrêt du 17 Juillet 1742. Mais un canal plaqué par le propriétaire de la maison contre le pied de son mur, sur le terrein du voisin, entraine la prescription du fonds par une possession quadragénaire & éclipse toute idée de servitude ; celui qui l’a placé sur ce terrein, est réputé avoir possédé le terrein en maître parce qu’il avoit lieu de croire l’être ; & le voisin, par un silence aussi long, est cense l’aroit abandonné : Tai toujours donné ce sens à la note de duMoulin , sur l’Article CexXx de Blois.
Les servitudes étant une fois établies, observez-en les principes généraux ; on doit en user civilement, autant que l’usage en est nécessaire, & de façon que le fonds assujetti ne devienne pas infructueux au propriétaire ; il faut les interprêter dans le sens étroit de leur Titre, & il n’est pas permis de les étendre d’un cas à un autre, ni d’un fonds à un autre fonds, quoique le Titre des servitudes renferme les accessoires nécessaires pour en rendre l’exercice possible : consultez souvent duMoulin , in extricatione divid. & individ.
On a jugé, d’aprés ces principes, qu’un droit de pressurage ne donnoit entrée dans la masure, de la situation du pressoir à celui à qui le droit étoit dû, que dans le temps que les fruits seroient pressurés : on a aussi obligé par Arrét du 14 Juin 1729, un cohéritier qui avoit stipulé par le Titre des partages, la liberté d’édifier à sa maison un troisieme étage, a suivre dans sa nouvelle construction la hauteur des deux anciens étages, & de réduire en outre le troisieme à la hauteur d’un des autres. On peut encore citer une autre espèce un bourgeois, marchand ou artisan, a le droit de faire passer ses eaux sur la maison de son voisin : cette maison est dans la suite occupée par des personnes d’autre condition, comme Rôtisseurs, Chaircutiers, Taneurs, Teinturiers, faiseurs de favon, & autres de tels mêtiers, ils ne pourront pas y faire passer leurs eaux, dit Desgodets à cause de la puanteur : cependant, cette décision qui paroit juste est assujettie à la qualité du Titre & des incommodites occasionnées par le genre de profession de ceux qui l’occnpent.
La prescription contre les servitudes, introduite en faveur de la libération des fonds, éprouve bien des interruptions.
Quand le fonds dominant est divise entre plusieurs cohéritiers, elle est due solidairement à chaque portion du fonds quoiqu’elle doive être exercée de la même façon, senguli in solidum sed eddem utuntur : duMoulin . Un seul des cohéritiers, en l’exercant, la conserre avant le partage pour tous étant in dividue.
Dans la servitude de prise d’eau, si la source tarit & renait, même aprés la prescription, la servitude se rétablit, d’autant qu’on ne peut imputer aucune faute au propriétaire du fonds dominant, tandis que la source est tarie.
Celui qui a le droit de chemin, avec chevaux & chariots, le conserve en y passant seul, d’autant que le droit de passer seul fait partie du droit de passer avec chariots & chevaux.
Quand le chemin qui doit la ervitude s’éboule ou devient impraticable on peut en exiget. un autre sur le détenteur de partie du fonds servant, quoiqu’il l’ait possédé comme libre pendant plus de quarante ans, quia quemadmodum plures socii fundi dominantis habent singuliin solidum jus servitutis active, plures socii fundi servientis debent illud singuli in solidum passive ; duMoulin , Novus intelledtus quatuor legum.
Quand les batimens servans & dominans ont été détruits, l’utilité publique exige que dans le cas de réédification les servitudes soient rétablies, sur-tout si elles consistent dans un droit prohibitif ; car le batiment servant ne peut être reconstruit que sous la condition du premier batiment.
Quand un fonds doit deux servitudes de différentes espèces, l’une peut subsister, quoique l’on ait prescrit contre l’autre
Ferrière , sur l’Article CLXXXVI de la Coutume de Paris, Gl. 2, n. 7 & suivant, observe que quoiqu’on ait négligé l’usage d’une servitude pendant un temps suffisant pour en acquerir la preicription, si cette servitude est exercée de nouve, u, & qu’il n’y ait point d’opposition elle reprendra sa force ; car la prescription est une exception qui doit être proposée, & celui qui ne la propose point est censé y renoncer.
Les servitudes qui consistent à empécher ne se prescrivent que du jour que l’on y a contre, enu : en voici un exemple Un particulier avoit acquis une maison, assujettie à la servi-tude de ne pouvoir bâtir d’écuries, l’acquereur vend cette maison, sans expression de la servitude ; elle est ensuite revendue : aprés cent ans écoulés depuis la premiere vente, le dernier acquereur veut construire une écurie, on s’y opposa ; l’opposition fut recue par Arrêt, fauf l’action en garantie des differens acquereurs entr’eux.
Celui qui a le sol d’un héritage, ditDesgodets , doit jouir de tout ce qui est dessous son sol, de quelque profondeur que ce puisse être, s’il n’y a point de Titres contraires, soit pierre, sable, glaise, maçonnerie, source d’eau, & généralement tout ce qui se peut nommer. Cette décision, qui est celle de nôtre Coutume, se trouve dans les Articles CLXXXVII de Paris, CXC de Melun, LXxiV d’Estampe, LXxiV & LXXVI de Montfort, XCVI & CXCVIII de Mantes, CXLVI de Vermandois, & CCCLXVI de Reims : elle est absolument de droit commun.
Quand il n’y a point de réglement général sur la hauteur & les alignemens des édifices, chacun peut batir sur son fonds à telle élévation & ainsi qu’il juge à propos, quoique la situation & l’état de l’édifice nuisent aux jours du voisin ; car il n’use alors que de son droit : on a rendu en conséquence un Arrêt du premier Juin 1753, au Rapport de M. l’Abbé le Danois, entre Nicolas & loly, Gloria, propriétaire de deux maisons, séparées par une cour vend une des maisons, avec une portion de la cour, aux Auteurs de Joly, à charge de faire construire un mur de séparation ; Gloria vend dans la suite l’autre maison, avec le surplus de la Cour à Nicolas ; Nicolas, en rebâtissant sa maison, prend sept pieds de sa cour & éleve à trois pieds du mur de séparation de Joly, un batiment composé de cinq étages, avec plusieurs croisées ; Joly intente action contre Nicolas pour le faire condamner à démolir son bâtiment encommencé le Juge de Dieppe l’ordonne ainsi ; la Sentence est confirmée par la Jurisdiction des Hauts-lours de l’Archevéché, sur l’appel Nicolas est déchargé par l’Arrét de l’action de Joly : Nicolas usoit en effet de son droit. Il n’en est cependant pas ainsi lorsque la manière de batir tend à préjudicier la liberté naturelle du fonds du voisin par des assujettissemens ; ainsi si mon voisin batit de maniere que les eaux défluantes de son toit m’incommodent, j’ai, ditBasnage , une action contre lui pour l’obliger à porter ses eaux, s’il n’a point de Titre qui impose cette charge à mes fonds ; mais aussi l’humanité exige de moi, que s’il ne peut construire ou réparer qu’en passant sur mon terrein, je lui prête le passage, & je souffre, pour parler le langage vulgaire, le tout de l’échelle. Des Auteurs pensent cependant que quand le tour d’échelle n’a point été stipulé, il n’est point dû, & qu’il faut alors couvrir à échelles volantes ; mais si une maison est commune entre plusieurs ; quoique celui qui a la cour ne soit pas chargé du tour d’échelle, l’opi-nion recue est qu’il est tenu de le souffrir, parce qu’il a intétét que la maison soit couverte.
Les avances & faillies sur les rues sont défenduës par l’Article XCV de la Coûtume d’Orléans ; cependant M. le Président de Lamoignon a bien observé que l’on peut avancer l’égout de sa couverture sur une rue, chemin, sentier & place publique, pourvu que l’extrémité de la couverture soit élevée de maniere que les passans n’en souffrent pas une incommodité notable : Arrétés des Servitudes, Article XVI.
Ceux qui batissent dans les Villes peuvent tenir leurs matériaux devant leurs maisons, en laissant dans la rue un espace suffisant pour y passer les chariots & carosses.
Nos Commentateurs décident, sous cet Article, qu’entre copartageans les servitudes qui sont accompagnées de quelque ouvrage extérieur & qui sont perpétuellement inhérentes aux fonds, subsistent sans aucune stipulation, ainsi les vues, les égouts, les sommiers, qui, par l’effet du partage, se trouvent appuyés sur le fonds d’un cohéritier, n’ont point besoin pour se soutenir d’une clause de réservation ; mais les servitudes discontinues & latentes doivent être expressément stipulées : il seroit inutile à leur égard d’alléguer l’usage du pere de famille ; & Basnage dit que dans le cas du défaut d’expression, un cohcritier ne pourroit obtenir de son cohéritier un passage qu’en dédommageant. Aussi, par Arrét rendu le S Fevrier 16oz, au Rapport de M. de Marguerie, on a évincé un cohéritier malgré sa possession, d’exercer un passage sur l’allée de son coheritier, & les Juges regarderent comme une maxime, qu’il ne falloit pas étendre cette servitude par l’exemple des vues & égouts. M. d’Argentré est d’avis contraire sur l’Article CCexIIXx de l’ancienne Coutume de Bretagne : il dit que les cohéritiers se doivent réciproquement les servitudes, au moins endommageant, comme lorsqu’il n’y a pas de chemin : il va plus loin, car il prétend qu’il suffit de prouver que l’on est du même sang, pour faire présumer de droit l’ancienne cohérédité, probard consunguinitate res de consortio presumitur, S servitutem deberi ex divisionis lege.
On a fort bien remarqué que la servitude de vues subsistant comme elle étoit au temps. du partage, un cohéritier ne peut batir devant la maison de son cohéritier, ni boucher les vues, s’il n’y est expressement autorisé par l’acte de partage.
On a encore observé sur la fervitude d’égouts, qu’un cohéritier ne peut allonger l’égout, ni le changer d’un endroit à un autre, sans le consentement de son cohéritier.
Les servitudes qui sont établies en vertu du Titre de partage, subsistent nonobstant toute mutation de propriété, si ce n’est qu’elles soient éteintes par la confusion ou autres moyens de droit.
Quand la maison est divisée par étages, chacun des propriétaires doit entretenir l’aire & le plancher au-dessus avec les murs en proportion de son étage, & celui qui a le dernier étage avec le grenier, doit en outre entretenir la couverture ; l’entretien de l’escalier est à la charge des propriétaires des étages à eux appartenans, & dans la proportion qu’ils s’en servent ; tous les propriétaires contribuent aux réparations & entretiens des fondations.
Cette regle a lieu, quelques aliénations que l’on fasse dans la suite.
Il y a des ouvrages qui répandent une fumée si épaisse chez les voisins, ou des odeurs si incommodes, qu’il n’est point permis de les faire sans un Titre qui prouve leur consentement, nisi et rei servitus talis admittatur ; ce sont les termes de la célèbre Loi Arisio : on a jugé sur ce principe au Parlement d’Aix, par Arrét du 28 Janvier 167z, que le propriétaire de la partie inférieure d’une maison n’y pouvoit faire de forge, parce qu’elle incommoderoit, gravi fumo, l’autre propriétaire, & rendroit la partie haute comme inhabitable : Journal du Palais, Tome 1. On a jugé par Artét rendu en la Grand’Chambre de ce Parlement le 10 Mars 1758 que les voisins d’une manufacture de chapeaux n’avoient point d’action. pour se plaindre des incommodités qui resultent de l’exhalaison du charbon de terre & des buées contre un marchand de galons & une autre voisine ; il n’étoit point justifié par le Proces-verbal que les galons eussent recu aucun dommage, & la description exacte de la position des batimens, prouvoit qu’il étoit impossible que la manufacture des chapeaux pût, à cette voisine, causer le moindre préjudice ; ainsi pour interdire à un propriétaire d’une maison la liberté d’y faire ce qu’il lui plait, il faut que les voisins en recoivent une incommodité tres-notable : Arrêtés de Lamoignon, des Servitudes, Article XXXIII.
La Coutume de Paris, Article CLXxxIy, contient un principe général, propre à terminer toutes les discussions en matière de servitude, c’est de faire faire la visitation des lieux par les Jurés-Experts qui dressent leurs rapports sur les objets énoncés dans le Jugement préparatoire. Loye ; l’Edit du mois de Mai 169y, portant création de Jurée-Architee-tes, & de Jurés-Entrepreneurs-Maçons.
Quand les armoires, fenêtres ou corbeaux traversent la totalité du mur, c’est une présomption de la propriété en faveur de celui des voisins, du côté duquel sont les armoires, fenêtres ou corbeaux : car si ces signes ont été placés lors de la construction du mur, il n’y a eu que le proprietaire du mur qui ait cu le droit de les y faire placer, si ces ouvrages au contraire n’ont été faits que depuis que le mur a été construit, ils proclament également la propriété : car nul n’auroit pu percer le mur s’il ne lui avoit pas appartenu. La Coûtume de Laon, Article CCLxxl, indique encore un autre monument de la propriété, c’est lorsque le mur porte entièrement l’édifice du voisin ; car alors comment contester le mur à celui qui a la propriété de l’édifice.
L’Article CexI de la Coûtume de Paris dispose que tous murs séparant cours & jardins sont réputés mitoyens, s’il n’y a Titre contraire : Auzanet dit que par argument de l’Article CCV la même décision a lieu entre voisins par rapport aux murs qui sépurent les mai-sons & édifices, chacun à proportion & jusqu’à la hauteur de son héberge. L’Article CCXIV de cette Coûtume est conforme à l’Article Dex de celle de Normandie, & les Parisiens expliquent leur Article CexiV suivant la clause qui est inserée dans le nôtre, & dont nos Réformateurs ont composé l’Article DexVIII.
La Coûtume de Paris a des dispositions relatives à l’Article DexI, qui, étant d’une utilité. publique dans les Villes considérables & bien peuplées, devroient être généralement recues ; elle permet de batir contre le mur non mitoyen en dédommageant le propriétaire, & d’abattre le mur mitoyen, quand il ne peut supporter les charges que l’un des voisins veut y appli-quer, en le reconstruisant à ses frais ; on peut encore observer sous cet Article, que de méme que le voisin ne peut mettre ses fommiers contre, ni à l’endroit de la cheminée qui aura été premièrement bâtie, on ne peut aussi appliquer de nouveau une cheminée contre le mur mitoyen, dans l’endroit où les sommiers de la maison voisine se trouvent placés d’ancienneté.
On ne peut à Paris mettre ses poutres que jusqu’à l’épaisseur de la moitié du mur, Article CCVIII, notre Coutume est plus sage, car en ne donnant de portée à une poutre que la moitié de certains murs mitoyens, s’il arrive le moindre deversement à ces murs les poutres se trouveront en risque de tomber avec les planchers qu’elles supportent. Aussi, dans les Arrêtés de M. de Lamoignon, Article XXVII, des Servitudes, on lit que si les propriétaires de deux maisons posent leurs poutres en même endroit, chacune poutre ne pourra excéder l’épaisseur de la moitié du mur mitoyen ; mais si les poutres sont posées en des endroits différens, elles pourront comprendre l’épaisseur entière du mur, c’est rentrer dans notre Coûtume ; mais l’Article XXXV des mêmes Arrêtés y est totalement opposé, il porte qu’aucun ne peut enfoncer des cheminées ni atres dans le corps du mur mitoyen, & que pour les appliquer contre le mur, il doit être fait contre-mur de tuilots ou autre chose suffisante de demi-pied d’épaisseur. M. leCamus , sur l’Article CLXXXIY de Paris, cite cependant plusieurs Coutumes conformes à la nôtre.
L’Article CCVII de la Coutume de Paris explique bien ces mots de l’Article Dexl de nôtre Couûtume : En bouchant les pertuis, celui qui veut asseoir ses poutres sur le mur mitoyen, y est-il dit doit y faire mettre des corbeaux de pierre de taille pour soutenir les poutres en rétablissant le mur ; mais dans les lieux où cette sorte de pierre ne seroit point commune, il seroit à propos de prescrire l’usage des corbeaux ou crampons de fer. Cette disposition, ditBasnage , doit être observée dans tous les Pays, lorsque le mur ne suffit pas pour supporter les charges.
La Coutume de Paris surpasse encore en prévoyance l’Article DexII de la nôtre ; elle autorise le voisin à élever le mur mitoyen en son intégrité à ses frais il peut même, en pre-nant sur son terrein, renforcer le mur ; il est rare que la moitié d’un mur puisse porter la structure d’un batiment, & il est assez ordinaire au contraire qu’il fasse crouler tout l’édifice.
Basnage croit cependant notre Article plus juste que l’Article CXCV de Paris ; car pourquoi, dit-il, priver le copropriétaire de sa moitié du mur, ce qui arrivera si le plus diligent peut hausser à son gré le mur mitoyen ; cependant il faut avouer que cette surélévation du mur entier est d’une grande utilité quand le mur est assez solide pour supporter l’exhaussement.
L’Article DexIII ne prescrit point la nécessité d’avoir des latrines dans sa maison, l’Article CXCIII de Paris en a fait une Loi pour la Ville & les Fauxbourgs ; cette Loi devroit être le droit commun des Villes importantes des Provinces. Habebis iocum extra ad quemt egrediaris ad requisita nature, Deuteronome, Chap. 24.
On ne comprend point dans l’epaisseur du contre-ntur, prescrite par notre Coutume, celle du mur mitoyen.
Le propriétaire des latrines est tenu de les faire curer de maniere que les voisins n’en fouffrent pas d’incommodité & quand elles sont communes, chacun des propriétaires doit contribuer aux frais, & supporter à son tour les vuidanges : Article CexLiz, d’Orléans.
L’Article DoxIV exige qu’il y ait un demi-pied de vuide & intervalle entre le mur mitoyen & le dehors du mur du four pour rafraichir l’air, diminuer la chaleur, & prévenir les incendies ; le grand intéret de cet objet m’occasionne une digression pour rappeller un Arrêt du Parlement du a7 Novembre 1717, par lequel il est fait défenses à tous ouvriers de construire des cheminées de bois, à peine de roo livres d’amende : ordonne la démolition de celles qui seroient construites, & des fours attenans aux maisons, sauf à faire cons-truire des fours éloignés des bâtimens ; enjoint de faire nettoyer les cheminées aux termes des Réglemens ; ordonne que le Proces de ceux qui iront fumer dans les écuries, étables & autres pareils endroits, sera fait comme à des incendiaires volontaires ; fait défenses à toutes personnes d’envoyer chercher du feu par des enfans au-dessous de douze ans, & à qui que ce soit d’en donner à peine de 50 livres d’amende. L’embrasement général qui a dévasté, en 178s, tout le Bourg de Bolbec, a fait naître un sage Réglement de la Cour du 8 Août de la même année : la Cour ordonne par ce Réglement que dans l’an de sa publication, les maisons & batimens des Aubergistes & autres personnes publiques, les fours, forges ou fourneaux, les écuries, étables, latrines & autres bâtimens semblables, étant dans l’enceinte des bourgs, fauxbourgs, cours & rues adjacentes & actuellement couverts en paille seront couverts en tuile ou ardoise, à peine de démolition & de 10y liv. d’amende ; fait défenses sous les mêmes peines de réparer autrement qu’en ardoise ou taile les couvertures actuelles des bourgs & fauxbourgs à mesure qu’elles dépériront sauf aux habitans des bourgs, ou par défaut de tuile ou d’ardoise, il est d’usage de couvrir en bardeau ou essente, de faire à la Cour leurs représentations. Ce Réglement renouvelle les dispositions de l’Arrét du a7 Novembre 1717, ensemble de ceux qui font défenses de réposter les cendres dans les greniers de faire des feux les jours de saint Iean, de saint Mar-tin & autres, & de porter des torches de paille ou des cordes brayées, à peine d’amende, & d’être les contrevenans poursuivis extraordinairement : il y est encore fait défenses, sous les mêmes peines, de tuer & bruler les porcs dans les bourgs & fauxbourgs, dans les cours, rues, places & enceintes des marchés.
Notre Coûtume a ouis, en cet endroit, deux décisions contenuës dans les Articles CLXXXVIII & CXCII de Paris : Par la premiere, on ne peut faire étable contre un mur mitoyen qu’en faisant un contre-mur de huit pouces d’épaisseur, de hauteur jusqu’au rez de la mangeoire, les contre-murs sont aussi nécessaires dans tous les lieux où l’on entasse des fumiers contre les murs mitoyens ; car les fumiers ont une humidité chaude, acre & mordicante qui ruine le mur en fort peu de temps ; c’est par la même raison que chaque voisin doit avoir un évier ou canal le long du mur mitoyen pour la conduite des eaux pluviales : La seconde décision, comprise dans l’Article CXCII, est expliquée par M. Pesnelle.
L’Article DCXV est fondé, non-seulement sur ce principe général que dans les choses possédées par indivis la condition de celui qui défend l’innovation est toujours la meilleure, mais sur l’avantage qui doit en résulter pour le bien de la paix & de la concorde entre les voisins. M.Bretonnier , surHenrys , Tome 2, quest. 8o, dit que la stipulation, par laquelle un voisin accorderoit des vues pleines sur sa maison, seroit contraine au droit commun : Idem est pedem inferre ac oculos in domum alienam.Basnage , sur l’Article DexVI, observe que comme nôtre Coutume ne restreint la liberté du propriétaire du mur, immédiatement joignant le fonds d’autrui, que relativemectuer, premier & second étage ; on peut demander si ce propriétaire peut avoir des vues libres au troisieme ; & aprés avoir rapporté un Arrêt, qu’il prétend n’avoir pas décidé la question, il estime que l’on doit tolérer les fenêtres ordinaires au troisieme étage, pourvu qu’elles soient au-dessus de la hauteur d’appui, ainsi cet Auteur donne au voisin une lumière libre, mais il retranche les vues, & pour ainsi parler le regard sur le fonds de l’autre voisin.
Le même Auteur estime que l’on peut prendre des vues droites sur les champs & héritages du voisin, quand ils ne sont point clos de murs. Voyey le Journal des Audiences, Tome 3, Liv. 2, Chap. 23.
Chacun peut avoir, dit M. de Lamoignon dans ses Arrétés, Article XXVI, ibid, dans un mur à lui appartenant des vues au-dessus de la couverture de la maison voisine, de telle hauteur que bon lui semble.
L’obligation où sont les voisins de réparer le mur mitoyen, est une suite de la copropriété. Observez qu’il n’est pas nécessaire pour contraindre le voisin à la contribution de la démolition & reconstruction du mur mitoyen, qu’il soit pendant & corrompu tout ensemble il suffit qu’il soit penchant en surplomb considérablement d’un côté ou de l’autre, pour qu’il soit condamné à être démoli & refait, quand même il ne seroit pas corrompu ; la regle la plus usitée est que quand un mur est déversé de plus de la moitié de son épaisseur sur sa hauteur, il est condamnable : il en est de même si le mur est corrompu, sans cependant surplomber, ainsi, dans l’un ou l’autre cas, le voisin a une action contre son voisin pour l’obliger à réédifier le mur à frais communs : il faut cependant distinguer l’usage du mur mitoyen qui surplombe, car quelque déversement qu’ait un mur de clôture, pourvu qu’il ne menace point d’une ruine prochaine, on le laisse subsister ; mais si celui à qui on avoit demandé la reconstruction de ce mur l’avoit refusé, S’il venoit à tomber, il seroit tenu du dommage que sa chûte auroit causé, comme arbre, treillage & autre chose qu’il auroit écrasé en tombant. Poyes Desgodets &Goupy , sur l’Article CCV de la Coutume de Paris.
Quand sur l’action intentée par le voisin, l’autre voisin ne comparoit pas, on ordonne que Proces-verbal de l’état du mur sera dresse par experts ; & si les réparations sont de consequence, on les bannit au rabais :Basnage . Il est de maxime que l’on déclare le voisin en contumace déchu de sa copropriété, on le condamne en outre aux frais de la démolition, & aux dommages & intérêts de l’autre voisin. On permet quelquefois, ditBérault , à ce voisin, par forme de dedommagement, d’employer sans distinction tous les matériaux capables de servir.
Basnage rapporte, sous l’Article DexVII, un Arrét du a Mai 168y, par lequel il fut ordonné qu’il seroit fait un mur mitoyen, & aux frais communs des propriétaires, entre deux jardins situés dans la Ville de Roüen, quoiqu’ils fussent separés par des haies depuis plus de quarante ans.
Par Arrét du Parlement de Paris de l’an 1588, rapporté sous cet Article parBérault , le propriétaire du quart d’une maison qui menaçoit ruine fut condamné de mettre la maison dans un état qui fit cesser le péril de la chûte, sauf son recours contre ses copropriétaires.
Il a été jugé, par Arrét du mois de Novembre 172z, qu’un copropriétaire d’un mur de bauge pouvoit le démolir & édifier un mur en pierre ou moilon, parce qu’en cas que l’épaisseur du mur ne fût pas suffisante, il la fourniroit de son côté.
Le voisin, qui a refusé de contribuer aux frais de la réfection du mur mitoyen, peut purger sa contumace en remboursant légitimement le voisin, il peut même s’exempter de toute contribution en abandonnant son droit de proprieté : Arrêt du 20 Avril 1727. Cependant s’il s’agit d’un mur de clôture de conséquence, & que les deux voisins soient riches, il n’est pas juste que l’un des voisins soit déchargé des impenses par l’abandonnement d’un terrein de peu de valeur, puisqu’il benéficiera toujours dans ce cas du mur, quoiqu’il ne soit point mitoyen.
L’Article DoxVIII de la Coûtume suppose qu’aucun des voisins n’a de Titre de propriété car la présomption doit rendre hommage à la vérité, cette présomption est au reste fon-dée sur la conduite ordinaire des hommes, le voisin n’auroit pas en effet souffert que son voisin eût placé dans le mur des témoins muets d’une propriété exclusive, si le mur avoit été commun. Voyez ma Note sur l’Article Dex.
L’Article Dexix est conforme à la Loi Guidquid ro Commun pred. quidquid venditor ditUlpien , servitutis nomine sibi recipere vult nominatim recipi oportet ; la disposition de l’Article Dexx est générale, soit que l’alienation se fasse à Titre de vente, de donation entre-vifs ou legs testamentaires : ce qui peut arriver par rapport aux legs des acquets ; Cujas a en effet remarqué sur le Livre y des Questions dePapinien , qu’il falloit à cet égard porter le même Jugement sur les dispositions testamentaires, idem juris est in ultimis voluntatibus ac contractibus.
On ne doit cependant pas plus étendre le sens de cet Article Dexx en faveur de l’acquereur que d’un cohcritier, il faut le limiter aux servitudes apparentes & continues, comme aux servit, ides d’égouts, d’appui, &c. La Cour, par un Arrêt récent, rendu par rapport sur un appel du Bailliage d’Avranches, nous a retracé cette interprétation, il a été décidé par cet Arrét que l’acquereur d’un héritage de la campagne ne peut, en vertu de l’Article Dexx, exercer pour le faire valoir un passage sur le fonds de son vendeur, sur le prêtexte que le vendeur en usoit ainsi avant la vente, des que l’acquereur peut en faire l’exploitation par un autre chemin, quoiqu’un peu plus long & un peu plus difficile.
On a rendu en Grand Chambre un Arrêt le 15 Juillet 1757, dont l’espece mérite d’être rapportée. Une femme donne à titre de Fieffe le rez-de-chaussée d’une maison, avec une petite cour, en exemption de toutes charges, elle retient le haut de la maison, dans l’appartement retenu il y avoit une dale qui fluoit par une gouttière de plomb, régnante du haut en bas, pour porter les eaux dans la petite cour ; le représentant du fieffataire est inquieté par celui qui représente le fieffant, pour le contraindre à laisser fluer la gouttieère : celui-cil, apres plusieurs approchemens devant le Bailli de Caen, obtient l’effet de sa demande. Sur l’appel le représentant le fieffataire foutenoit que l’Article DexxIx imposoit au vendeur la nécessité de déclarer la servitude qu’il vouloit retenir, & que l’Article Dexx n’avoit lieu que dans le cas où lui-même auroit agi contre le successeur du fieffant ; cependant la Cour confirma la Sentence. Cet Arrét paroit conforme à l’Arrêt du y Juiller 1Sb8, cité par Pesnelle, on ne pouvoit pas présumer que cette femme en fieffant une partie de sa maison, eût eu intention de se priver d’un droit tres-utile & qui étoit apparent.
On ne conclut point des termes de cet Article que celui qui a le droit de puiser de leau à un puits en ait la copropriété ; la Coutume ne désigne qu’une servitude, son intention ast d’en modérer l’usage, de facon que le Propriétaire du fonds dominant trouve sa commodité, sans géner à l’exces le propriétaire du fonds qui la doit. On conclut de-là qu’il n’est-point permis de puiser de nuit par affectation, d’autant qu’il est aisé pendant le jour de sefournir de l’eau dont on a besoin. Le propriétaire, qui a ce droit de servitude, répond non-seulement des vols de ses préposés, mais même de leur négligence : Bérault ; & c’est une regle que s’il est obligé par le Titre aux réparations d’entretien ( ce qui arrive plus ordinairement à l’égard des eaux dont la conduite se fait par des tuyaux ) la prescription contre la servitude court du jour de son refus d’y satisfaire.
Basnage , sur le Préambule des Servitudes, traitant du droit de passer au travers d’une maison, dit qu’il est à propos de limiter cette liberté jusqu’à une certaine heure du soit, comme de neuf heures quand le Titre ne fait point mention de l’heure. Il a été jugé par Arrét du 21 Mars 1738, sur un appel d’une Sentence de Police du Bailliage de Roüen, que la porte d’une allée commune seroit fermée à neuf heures en hyver, & à dix heures en éte ; ce qui a beaucoup de rapport avec la décision deBasnage .
Les chemins des anciens Romains surpassoient, sans doute, les nôtres en solidité comme les nôtres les surpassent en beauté & en agrément : Les Lettres-Patentes de Henri 11 du 19 Pévrier 1552 ; & l’Ordonnance de Blois, Article CCCLVI, sont exécutées dans la plupart des Provinces du Royaume, & le voyageur semble maintenant parcourir des avenues plantées en ordre symétrique, qui l’invitent à prendre le frais dans les ardeurs de l’été.
Mais plus on a pris de précaution pour les embellir & les rendre d’un acces facile, plus on doit réprimer avec sévérité ceux qui les dégradent, les souchévent ou empietent sur leur terrein ; l’action en ce dernier cas pour le revendiquer est imprescriptible, parce que la defense vient d’une Loi prohibitive, qui a pour motif l’intérét public. On a la voie de coercion par saisie & amende contre ceux qui sont obligés à leur entretien & réparation Quand ils deviennent impraticables malgré les précautions que l’on a pu prendre, l’utilité publique au-torise à s’ouvrir un passage sur les terres voisines ; ce remede est en bien des cas tres-efficace pour bannir la négligence. Voyer la Note sous l’Article IX.
Un Arrêt du Conseil du 1a Mars 1741 contient des dispositions utiles à la conservation des grands chemins, il y est fait défenses d’ouvrir des carrieres de pierre de taille, molon, glaise, marne ou mine sur les bords & fossés des routes & grands chemins, sinon a trente toises de distance, du bord ou extrémité de la largeur des chemins, à compter du pied des des arbres, S’il y en a de plantés ; & lorsqu’il n’y a ni arbres ni fossés, les carrieres ne peuvent s’ouvrir qu’à la distance de trente-deux toises, qui se mefurent à compter de l’extrémité des chemins, à peine de 3oy livres d’amende, confiscation des outils, & des dom-mages & intérés : ce même Arrét défend de pousser les rameaux ou rues des carrieres du côté des chemins : Coutume de Normandie, edition de 1742.
L’Article LXXXIII de la Coutume qui dispofe qu’en faisant la clôture de ses fonds on doit garder les sentes ou sentiers pour le voisiné, occasionne une ruse moderne ; on niet en problême la qualité de la plupart des chemirs de passage qui ne contiennent qu’un droit de servitudes, des visites d’Experts, des accessions de lieux, des plans figurés sans exactitude, des preuves testimoniales, des Certificats mandiés, des raisonnemens métaphysiques, tels sont les moyens pour remplacer un Titre qui manque : Il est vrai qu’il y a des chemins