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DECLARATION DU ROI, Touchant les Pensions e Dois des Religieuses.

Du mois d’Avril 1693.

L OUIs, par la grace de Dieu, Roi de France & de Navarre : a tous a ceux qui ces présentes Lettres verront, SALUT. Le zele avec lequel Nous employons l’autorité qu’il a plû à Dieu de nous donner, pour maintenir en toutes choses la discipline Ecclesiastique, & les Ordres que nous donnâmes. dans les années 1666 & 1667, touchant l’établissement des Monasteres & la réception des Personnes qui embrassent la Profession Religieuse, marquent assez le desir que Nous aurions de voir observer dans leur purcté, les Regles. les plus étroites qui ont été faites sur ce sujet : mais comme quelques-uns des Monasteres que l’on a laissé établir dans notre Royaume, & particulièrement depuis le commencement de ce siecle, n’ont eu aucuns biens assurés lors de leur établissement, & que plusieurs n’ont encore qu’une portion médiocre de ce qui est nécessaire pour leur subsistance, les Supérieurs de ces Maisons ont cherché des secours à leur nécessité, dans les Dots qu’elles ont recues des Personnes qui y sont entrées ; & quelques Monasteres qui ne se trouvoient pas dans le même besoin, n’ont pas laissé d’augmenter encore par cette voie, les biens considérables qu’ils avoient, même par les Fondations qui en avoient été faites. Nos Parlemens ont réprimé ce défordre, dans des occasions où l’on avoit donné des sommes excessives pour l’entrée de quelques Personnes dans des Monasteres, & ils ont même taché d’en empécher la continuation par les Arréts généraux qu’ils ont rendus : cependant comme ces Arrêts n’ont pas eu le succes que l’on doit attendre de la Justice de leurs dispositions, & que les voies dont on s’est servi pour en éluder l’exécution, se sont trouvées encore plus préjudiciables à nos Sujets, que ce qui avoit été pratiqué auparavant Nous voyons la nécessité qu’il y a d’y apporter des remédes tels que l’ordre de l’Eglise & le bien de notre Etat peuvent désirer : & en attendant que la Paix que nous souhaitons avec tant d’ardeur, nous mette plus en état de procurer un si grand bien, Nous ne voulons pas différer plus long-temps à em-pEcher un abus que l’on ne sçauroit tolèrer, & à pourvoir en même-temps par provision à la subsistance des Monasteres qui en ont un véritable besoin, par une voie qui a été approuvée & pratiquée par les plus saints Prelats, depuis & en exécution du dernier Concile, & qui ne sera pas onéreuse aux Fa-milles de nos Sujets. a CEs CAUSEs, de l’avis de notre Conseil, & de notre certaine science, pleine puissance & autorité Royale, Nous avons statué & ordonné, statuons & ordonnons par ces Présentes signées de notre main, que les Saints Décrets & Ordonnances & Réglemens, concernant la réception des Personnes qui entrent dans les Monasteres pour y embrasser la Profession Religieuse, seront exécutés ; ce faisant, défendons à tous Supérieurs & Supérieures d’iceux, d’exiger aucune chose, directement ou indirectement, en vue & considération de la réception à la Prise de l’fabit ou de la Profession : Permettons néanmoins aux Monasteres des Carmélites, des Filles de Sainte-Marie, des Ursulines & autres qui ne sont point fondés, & qui sont établis dans nôtre Royaume depuis l’an 1600, en vertu de Lettres Patentes bien & dûement enrégistrées en nos Cours de Parlement, de recevoir des Pensions via-geres, pour la subsistance des personnes qui y prennent l’Habit & y font Profession : voulons qu’il en soit passé des Actes pardevant Notaires, avec leurs Peres, Meres, Tuteurs ou Curateurs, à la charge que lesdites Pensions ne pourront, pour quelque cause & sous quelque prétexte que ce puisse être, excéder la fomme de cinq cens livres par chacun an, dans notre bonne Ville de Paris, & autres dans lefquelles nos Cours de Parlement sont établies ; & celle de trois cens cinquante livres dans toutes les autres Villes & lieux de notre Royaume ; & que pour la sureté desdites Pensions, l’on puisse assigner des fonds particuliers, dont les revenus ne puissent être saisis jusqu’à concurrence desdites Pensions pour dettes créées depuis leur constitution ; faisant des-àprésent main-levée de toutes les Saisies qui pourroient en être faites & ce nonobstant toutes surséances & Lettres d’Etat : enjoignons à nos Cours & Juges de leur ordonner, lorsqu’elles leur seront demandees. Permettons pareillement ausdits Monasteres, de recevoir pour les meubles, habits & autres choses abfolument nécessaires pour l’entrée des Religieuses, jusqu’à la somme de deux mille livres une fois payer, dans les Villes où nosdites Cours de Parlement sont établies, & jusqu’à celle de douze cens livres dans les autres Villes & lieux, dont il sera passé des Actes pardevant Notaires : & en cas que les parens & héritiers des personnes qui entreront dans lesdits Monasteres, ne soient pas en volonté ou en état d’assurer lesdites Pensions viageres, en tout ou en partie, permettons ausdites Supérieures de recevoir des sommes d’argent, ou des biens immeubles qui tiennent lieu desdites Penfions, pourvu que lesdites sommes d’argent ou la valeur desdits biens immeubles n’excede pas la somme de huit mille livres dans les Villes où nos Cours de Parlement sont établies, & ailleurs celle de fix mille livres ; & qu’où l’on voudroit donner une patie en argent ou immeubles, & l’autre en Pensions moindres & audessous desdits cinq cens livres, & trois cens cinquante livres, lesdites fom-mes d’argent ou biens immeubles, que l’on pourra donner pour suppléer ausdites Pensions, soient réduites & réglées sur le même pied & suivant la même proportion : Voulons que les héritages que l’on pourra donner à cet effet, soient estimés préalablement, par des Experts qui seront nommés d’office par nos principaux Juges des lieux, lesquels donneront ensuite permission ausdits Monasteres, de les recevoir par forme d’alimens & au lieu de Pension viagere, & qu’il soit passé des Actes pardevant Notaires, de la délivrance desdites fommes d’argent ou des biens immeubles qui seront ainsi donnés : Voulons que les Dots & Pensions ci-devant promis & constitués, même pendant & depuis l’année 1667, par les parens ou tuteurs d’aucunes Religieuses, ayent dieu, nonobstant tous Jugemens & Arrêts qui pourroient avoir été rendus au contraire, à condition que si lesdits Dots ou Pensions se trouvent excéder les fommes réglées ci-dessus, elles demeureront réduites, suivant notre présente Déclaration, en cas que les peres, meres, frères & seurs desdites Religieuses le demandent, dans six mois aprés l’enregistrement & la publication qui en sera faite dans nos Cours. Permettons aux autres Monasteres, même aux Abbayes & Prieurés, qui ont des revenus par leurs Fondations, & qui prétendront ne pouvoir entretenir le nombre des Religieuses qui y sont, de re-présenter aux Archevéques & Evéques, des états de leurs revenus & de leurs charges, sur lesquels ils nous donneront les avis qu’ils trouveront à propos, touchant les Monasteres de cette qualité, où ils estimeront que l’on pourra permettre de recevoir des Pensions desdites sommes d’argent, où des immeuples, de la valeur exprimée ci-dessus, & sur le nombre des Religicuses qui y seront recues à l’avenir, au-delâ de celui qu’ils croyent que lesdits Monasteres peuvent entretenir de leurs revenus, pour les avis desdits Archevéques & Eveques vus, y être pourvu, ainfi qu’il appartiendra. Défendons aux femmes. veuves & filles qui s’engagent dans ies Communautés séculieres, dans lesquelles l’on conserve fous l’autorité de la Supérieure, la jouissance & la propriété de ses biens, d’y donner plus de trois mille livres en fonds, outre des Pensions viageres, telles qu’elles sont marquées ci-dessus. Défendons pareillement aux peres, & à toutes autres personnes, de donner directement ou indirectement ausdits Monasteres & Communautés, aucunes choses autres que celles qui sont expliquées par notre présente Déclaration, en considération des personnes qui y font Profession & qui s’y engagent, à peine de trois mille livres d’aumone contre les donateurs, & de la perte par iesdits Monasteres & Communautés qui les auront acceptés, des choses données, si elles sont en nature, ou du payement de la valeur, si elles n’y sont pas ; le tout applicable au profit des Hôtels-Dieu & des Hopitaux géneraux des lieux. N’entendons néanmoins comprendre dans la présente disposition, les donations qui seroient faites aux Mo-nasteres, pour une rétribution juste & proportionnée des Prieres qui y pourroient être fondées, quand même les Fondateurs y auroient des parentes à quelque degré que ce puisse être. Voulons qu’à l’égard des Communautés des Personnes séculieres & régulieres, qui ne sont point confirmées par nos Lettres-Patentes notre Edit du mois de Décembre 1688, soit incessamment exé-cuté, & à l’égard de celles que l’on ne jugera pas nécessaire de confirmer ou transférer, Nous déclarons des-à-présent nulles toutes les acquisitions & donations d’héritages, rentes ou autres immeubles, faites par elles à leur profit : Voulons que lesdits biens, pour ce qui est des Communautés de Personnes régulieres, soient donnés aux Monasteres dans lesquelles les Archevéques ou Evéques des lieux jugeront à propos d’envoyer les Religicuses qui se trouveront dans lesdites Communautés ; & pour ce qui est de celles des Personnes séculières, lesdits biens soient donnés aux Hôtels-Dieu & aux Hopitaux généraux des lieux où lesdites Communautés étoient établies. Ordonnons au sur-plus, que notre Edit du mois de Décembre de l’an 1688, contenant les formalités qui doivent être observées pour l’établissement des Communautés se-culieres & régulieres, soit ponctuellement exécuté, même à l’égard des transsations des Monasteres & Communautés d’un lieu ou d’une maison à une autre, lesquelles ne pourront être faites qu’apres que toutes les formalités portées par ledit Edit, pour les premiers établissemens desdits Monasteres, auront été observées : enjoignons aux Juges & Officiers d’y tenir ponctuellement la main, & de prononcer contre les Communautés qui seront établies ou transférées, sans avoir fatisfait ausdites formalités, les peines portées par notredit Edit.

SI DONNONs EN MANDEMENT à nos amés & feaux les Gens tenans notre Cour de Parlement de Roüen, que ces Présentes ils ayent à faire lire, publier & enrégistrer, & le contenu en icelles garder & observer de point en point selon leur forme & teneur, sans y contrevenir ni souffrir qu’il y soit contrevenu, en quelque sorte & manière que ce soit : CAR tel est notre plaisir. En témoin de quoi, Nous avons fait mettre notre Scel à cesdites Presen-tes. DONNE à Versailles, le vingt-huitieme jour d’Avril, l’an de grace mil fix cent quatre-vingt-treize ; & de notre Regne le cinquantieme. Signe, LOUIs : Et plus bas, Par le Roi, PHELY PEAux. Et scellée du grand Sceau de cire jaune.

Registrée és Régisires de la Cour, oui & ce requérant le Procureur-Général du Roi, pour être executée selon sa forme & teneur ; & lue à l’Audience d’icelle seante. a Roüen, en Parlement, le 19 Mai 1893. Signé, PACQUES.