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EXTRAIT D’AUTRE ARREST DV PARLEMENT, Rendu en conformité de l’Arrêt de la Cour ci dessus, contre un Aubergiste.

Du 19. Août 1729.

E NTRE Messire David Aubry, Chevalier, Seigneur de Gauverville, Vanecroq & autres lieux, appellant de Sentence renduë au Bailliage de Roüen, le 4 Février dernier ; sur l’action intentée par Jean-Baptiste Bichot, Aubergiste en cette Ville, aux fins d’avoir condamnation sur ledit Sieur de Cauverville, de trois mille & tant de livres, tant pour les Billets de feu son fils, que Mémoires de fournitures à lui faites par ledit Bichot, &c.

Quis Perchel, Avocat pour ledit sieur de Cauverville, lequel a dit que l’action de Bichot est la plus téméraire & la plus insoutenable qui ait jamais paru, il prétend se faire payer par le sieur de Cauverville pere de quatre Billets montans à 2360 liv. que le feu sieur de Cauverville fils a faits au bénéfice de lui Bichot, pour les prétenduës nourritures qu’il dit lui avoir fournies dans son Auberge, en différens temps, depuis 1723 jusqu’en 1727, &c. Le sieur de Cauverville espere que la Cour ne lui refusera pas ses Conclusions : elles sont, sous son bon plaisir, que ledit sieur de Cauverville sera recu opposant contre l’exécution de l’Arrêt du 31 Mai dernier, faisant droit sur son opposition, qu’il sera rapporté comme surpris ; faisant droit sur l’appel dudit sieur de Cauverville, mettre l’appellation & ce dont est appellé au néant, corrigeant & réformant, qu’il sera déchargé des condamnations contre lui prononcées, faisant droit sur l’appel de Bichor, que l’appellation sera mise au néant, avec dépens.

Thouars, Avocat de Bichot, lequel a dit que le pere n’est point obligé aux dettes de ses enfans, ce principe est incontestable ; mais il leur doit la nourriture & l’entretien, selon son état & ses facultés, &c. Pourquoi conclut qu’il plaise à la Cour, en recevant la Partie opposante pour la forme, la débouter de son opposition, & ordonner que l’Arrêt de la Cour sera exécuté, avec dépens.

Et le Chevalier, Avocat-Général du Roi, lequel a dit que quelque favorable que soit l’action pour le payement des alimens, néanmoins cette faveur ne peut militer contre un pere, pour les alimens & pour la fourniture de vin faite à son fils majeur, sans son aveu & sans son agrément, par un Aubergiste informé de la pension annuelle que le pere payoit a son fils, ainsi que des sujets de mécontentement du pere contre le fils. Quand ces motifs particuliers ne se présenteroient pas tels qu’ils sont, dans l’elpèce de la Cause qui s’offre aujourd’hui à décider, le bien public s’opposeroit à l’introduction d’une action semblable de la part des Aubergistes contre les peres ; ce seroit donner ouverture aux fils de famille de se loustraire de l’obéissance & du respect qu’ils doivent à leurs Parens ; ce seroit leur faciliter la voie, & leur faire naître le desir de quitter la maison paternelle, pour se retirer dans une Auberge, afin d’y mener un genre de vie plus libre & plus licencieuse, comme aussi de se livrer au libertinage, & pour e’y soutenir, d’avoir recours à des emprunts usuraires, soit d’argent, soit d’étoffes & marchandises, dont l’usage n’est que trop fréquent malgré les prohibitions portées par les Ordonnances & par les Réglemens. Et comme en l’année 1514 la Cour fit un Réglement, qui a quel-qu’application à la question présente, dont les fondemens se trouvent dans le Sénatus-consulte Macédonien, il estime qu’il ne seroit pas inutile d’en renouveller le souvenir & l’exécution, afin de retenir ceux qui n’en ont pas l’idée présente, dans la facilité qu’ils ont de prêter, de vendre, ou de faire crédit à des enfans de familie, par la juste crainte d’être privés de l’action pour s’en faire payer, même aprés la mort des peres de famille : pourquoi il estime qu’il y a lieu de recevoir la Partie de Me Perchel opposante à l’exécution de l’ArrEt rendu par défaut, le 3i Mai dernier ; faisant droit sur son opposition, en ce qui touche l’appel interjetté par la Partie de Me Thouars, mettre l’appellation au néant ; en ce qui touche l’appel interjetté par la Partie de Me Per-chel, mettre l’appellation & ce dont est appel au néant ; émendant, décharger la Partie de Me Perchel de la condamnation de la somme de mille livres portée par la Sentence dont est appel : au surplus, faisant droit sur son Requisitoire, ordonner que l’Arrêt ce la Cour en forme de Réglement, du premier Septembre 1514, sera exécuté selon sa forme & teneur ; que lecture en sera faite au Bailliage de Roüen, l’Audience séante, & qu’il sera affiché ou besoin sera, LA COUR, Parties ouies, & le Procureur-Général du Roi, a recu celle de Perchel opposante à l’Arrêt de la Cour, ayant égard à son opposition, sans s’arrêter audit Arrêt, faisant droit au principal, en ce qui touche l’appel de la Partie de Thouars, a mis & met l’appellation au néant ; & en ce qui touche l’appel de la Partie de Perchel, a mis & met l’appellation & ce dont est appel au néant, émendant, l’a déchargée de la condamnation de mille divres contr’elle, prononcée, condamne ladite Partie de Thouars, en douze livres d’amende & aux dépens de la Cause d’appel, les dépens de la Cause principale compensés, & faisant droit sur le Requisitoire du Procureur-Général, ordonne que l’Arrét de Réglement de 1514, sera imprimé, lu & publié l’Audience du Bailliage de Rouen séante, affiché en cette Ville, & par-tout ailleurs où besoin sera, le tout à la requête du Procureur-Général. Fa1T à Roüen, en Parlement, le dix-ncuvieme jour d’Août mil sept cent vingt-neuf, Par la Cour. Signé, AUZANET.