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De la Iurisdiction seculière contre les clers, et de la Iurisdiction ecclesiastique contre les lays, en matieres ciuiles. Chap. XIIII.

La Coustume au chapitre De clercs et de personnes de saincte eglife.

Es clercs, et personnes de saincte eglise, ou religieux sont quittes de plaider en Cour laye, fors pour cas qui appartiennent à fief lay.

Consequemment le Iuge lay cognoit contre les clers et gens d’eglise, de toutes actions reelles et dependentes de realité, comme de fiefs terres et héritages, ou du louage d’iceux, et de rentes foncieres ou hypoteques, et des executions et demandes faites pour les arrierages desdites rentes : soit que lesdites actions procedent de vente ou autre contract, ou bien de prescription, succession ou autrement. Et fut dit en l’Es chid. de la S. Michel 1348. que le Iuge royal pourroit reuoquer la cognoissance de la cause meuë en cas d’héritage par deuant le Iuge d’eglise, supposé que contestation fust sur ce donnée par deuant iceluy Iuge, et faire cesser le Iuge d’eglise, et venir les parties plaider par deuant luy : mais que la reuocation fust faite, ains qu’il y eust sentence donnee par le Iuge d’eglise, etiam apres la sentence de laquelle le condamné pourroit appeller comme d’abus, en respondant de secondes procedures volontaires. Car les suiets du Roy ne peuuent proroguer iurisdiction en Cour ecclesiastique. Et si le Procureur ou Aduocat du Roy en icelle Cour le permet, il en est amendable, comme il fut dit par arrest donné entre Pepin et Iubert, lez de Iuil. 1529. Et s’il y auoit sentence donnee en ladite Cour ecclesiastique, le Procureur general du Roy en pourroit appe der comme d’abus, et faire tout cesser par la cour de Parlement, et renuoyer les parties proceder tout de nouueau par deuant le Iuge ordinaire.

Pareillement le Iuge royal cognoit des cas Royaux contre toutes personnes ecclesiastiques, comme du possessoire, des matieres beneficiales et decimales, et autres spirituelles : du petitoire des dismes infeudees, qui à cause de l’infeudation sont reputees prophanes et temporelles : du bref de patronnage d’eglise, et autres cas ci dessus recitez au Tit.des hauts Iusticiers . Et puant à la puissance du Iuge seculier sur les clercs en cas de crime, en sera taité en son lieu.


Charles ix-tenant les Estats à Orléans, l’an 1560.

T Outes personnes ecclesiastiques pourront etre indifferemment executez en leurs meubles : Sauf és ornemens seruans et destinez à l’eglise leurs liures, et vestemens ordinaires et necessaires. Ceste ordonnance est aussi ci dessus mise au titre des Euesques, etc. art 95.


Au style de proceder.

L Es lettres et gages passez en Cour d’eglise, et sous les seaux des Cours ecclesiastiques, ne portent aucune execution, et ne prennent pied en aisnesse en Cour laye, iusques à ce qu’ils soyent recognus ou verifiez en Cour laye.1


La Coustume au chapitre De teneure par aumosne, et au chapitre De fief lay et d’aumosne.

P Vre aumosne est en quoy le Prince ne retient rien de terrienne iurisdiction, ne de dignité. Et de ce la iurisdiction et dignite appartient du tout à l’eglise. Et tous les fiefs qui par trente ans ont esté tenus comme aumosne en paix, sans contredit, et sans entrerompre les possessions doyuent estre tenus pour aumosne, et appartiennent à la Cour d’eglise : et n’en est aucun tenu refpondre en Cour laye. Et se contens naist de ce, il doit estre terminé en la Cour au Duc, et sceu par l’enqueste. Car pource que la iurisdiction. des fiefs appartient au Duc de Normandie, les contens qui naissent de la manière comme ils sont tenus, doyuent estre terminez en sa Cour, pourtant que longue tenue ne luy tolle.

Au diocese de Roüen y a vicontes des aumosnes, qui est Iuge temporel, et qui cognoist des lieux d’aumosne dudit diocese, et des clameurs de Haro, qui y sont faits, et és lieux d’immunité. Voyez ci apres aux titre De teneur par aumosnes, et de bref de fief lay, etc.


La Coustume au chapitre D’empeschement de succession.

P Ource que plusieurs mariages sont celez, et ne sont pas publiez apertement, de quoy par saincte eglise doit enqueste estre faite, il n’appartient à la Cour laye à iuger si les enfans sont bastars ou legitimes. Car si saincte eglise les tient à loyaux, la Cour laye les y tiendra. Et pource que le plus pro chain hoir doit auoir la saisine de son ancesseur, s aucun dit qu’il fut fils au mort, ou neueu, ou plus prochain hoir, et veut mettre sus à cil qui est en sai sine qu’il soit batard, pource ne perdra-il pas sa saisine. Mais si l’autre veut bailler pleges qu’il le prouuera à bastard dedans l’à et iour, il aura lettres du Bailly, qui iront à leur ordinaire2 en ceste forme, Comme il eust esté plet par deuant nous entre P. et G. pour l’héritage Roger, de quoy l’en ne nie pas qu’il ne fust pere de P. non pourtant G. le veut tenir à bastard : Et pourtant que le plet de ceste chose vous appartient, nous vous enuoyons la cause de bastardie, pour en determiner dedans vn an et vn iour : et ce que fait en aurez, nous remanderez au terme. Lors ira l’ordinaire auant en la cause, selon que droict luy semblera. Et quand l’an sera passé3, ils doyuent reuenir à la Cour, ou ainçois, si la cause est auant finee. Et s’il est prouué à bastard, l’héritage reuiendra à l’autre : et s’il ne peut estre prouué, l’autre n’y aura rien.


La Coustume au chapitre D’usuriers.

S I contens naist entre le Prince et l’eglise des chastels qui sont forfaicts, en telle manière enqueste en doit estre faite, sçauoir si le mort auoit fait chose dont son chastel deust estre forfaict. Et à celle enqueste, qui doit estre faite en la Cour au Prince, doit estre appelé l’Euesque ou son procureur. Et doit icelle enqueste estre faite en la première assise. Ne le Bailly n’est tenu à luy faire sçauoir, fors au prestre en quelle paroisse ce est aduenu. Et s’il est mis à non sçauoir si le chastel est forfait, ou non, l’Euesque en ordonnera comme il deura. Car il appartient à luy d’ordonner des chastels aux morts generalement4. Et se l’vsure au mort n’est prouuee apertement, l’Euesque ne doit pas estre despouillé de sa droiture. Car les droicts speciaux ne peuuent pas abatre les communs, s’ils ne sont aperts à tous.


Au chapître D’homicide de soy-mesme.

A V Prelat appartient d’ordonner des chastels de ceux qui meurent forcenez, enragez, ou phrenetiques, puis qu’ils n’ont sentiment pour en ordonner.


François. 1539.

N Ous auons defendu et defendons à tous nos subiets de faire citer ne conuenir les lays pardeuant les Iuges d’eglise, és actions pures personnel les, sur peine de perdition de cause, et d’amende arbitraire.

Et auons defendu à tous Iuges ecclesiastiques, de bailler ne deliurer aucunes citations verbalement, ou par escrit, pour faire citer nosdits suiets purs lays, esdites matieres d’actions pures personnelles, sur peine aussi d’amende arbitraire.

Et ce par manière de prouision quant à ceux dont le faict a esté receu sur la possession d’en cognoistre, et iusques à ce que par nous autrement en ait esté ordonné. Et sans en ce comprendre ceux qui en auroyent obtenu arrest donné auec nostre Procureur general, s’aucuns y a. Sans preiudice toutesfois de la iurisdiction ecclesiastique és matieres de sacremens, et autres pures, spirituelles, et ecclesiastiques, selon la forme de droict. Et aussi sans preiudice de la iurisdiction temporelle et seculière cotre les cleres mariez et non mariez, faisans et exerçans estats et negotiations, pour raison desquelles ils sont tenus et ont accoustumé respondre en Cour seculiere : où ils seront contrains de ce faire tant és matieres ciuiles que criminelles, ainsi qu’ils ont fait par ci deuant.

Le Iuge ecclesiastique est aussi en possession de faire citer par deuant luy ceux qui sont suspects de lepre, et les faire visiter et esprouuer, pour les separer d’auec les sains, s’ils en sont trouuez entachez. Toutesfois Papon allégue l’arrest de Paris donné és grans iours de Moulins, le 12. d’Octobre 1534. par lequel la cognoissance d’un lepreux lay et separation d’iceluy appartient au Iuge lay : et seulement les Iuges d’église s en peuuent messer, si le lepreux est prestre, ou clère non marié : combien qu’auparauant ils entreprinssent sur tous lepreux, se fondans en ce que sous la Loy au souuerain Sacrificateur appartenoit de discerner la lepre d’auec la lepre.


Loys xij. 1510.

A Ce que les iurisdictions ecclesiastiques et temporelles ne s’empesechent, ains s’aident et confortent fraternellement l’vne l’autre, Auons enioint et enioignons à tous Iuges ecclesiastiques de nostre Royaume, qu’en toutes citations qui seront d’orenauant par eux ottroyees en leurs Cours ecclesiastiques contre gens lays, ils expriment les causes d’icelles citations, afin que lesdits gens lays citez puissent estre aduertis si la cognoissance de la matière appartient ausdits Iuges ecclesiastiques. Et pareillement auons interdit et defendu, interdisons et defendons à tous nos Iuges, et autres Iuges temporels de nostredit Royaume, de non decerner aucunes inhibitions, lettres de recours, et autres semblables lettres, sans premierement auoir veu la citation, et par icelle cognu que la cognoissance leur appartient. Esquelles inhibitions, lettres de recours, et clameurs, ils seront tenus esdits cas exprimer les causes de leurs inhibitions, telles que si prouuees estoyent, la cognoissance leur appartiendroit, et non ausdits Iuges ecclesiastiques. Et si autrement sont faites, n’y sera obey.

Aussi par arrest de la Cour donné le 10. de Ianuier 1511. certain mandement citatoire decerné par l’official de Bayeux, pour interdire au Bailly de Caen, la cognoissance de certain homicide pretendu auoir esté commis par mesçire Robert Gaste-blé, et à pour citer le Procureur du Roy pour voir proceder à l’elargissement dudit Gaste-blé, fut déclaré nul et abusif. Et defendu à tous Iuges ecclesiastiques d’user de tels mandemens citatoires contre l’authorité du Roy et de ses Officiers.


Ledit Charles ix. esdits Estats d’Orléans.

N E pourront aussi les Prelats, gens d’eglise ou officiaux, decerner monitions, et vser de censures ecclesiastiques, sinon pour crime et scandale public.

Sur ce faut noter ce que dit Papon en ses arrests, qu’apres l’accusation formée en matière criminelle, on ne peut user de censures, sans excepter l’accusé : pource que l’accusation presuppose information. Car en soy aidant de censures apres l’accusation et l’accusé ouy, il y auroit deux absurditez : l’une qu’il seroit tenu s accuaccuser et soy infamer : l’autre qu’ayant denié en ses interrogatoires, il seroit tenu par le moyen desdites censures venir contre son faict. Et pour user de censures és procez intentez faut auoir permision du Iuge partie appelee. Et s’il y a opposition à la publication d’icelles, faut adiourner l’opposant par deuant ledit Iuge pour en dire les causes. Sur quoy nous noterons l’arrest donné le 25. de May 1520. sur la publication de certain monitoire obtenu par le sieur de Thury contre les detenteurs de certaine cedule, ou qui par dol et fraude en auroyent esté dessaisis, et opposition à ce mise par le Procureur general du Roy, pour raison de la clause y apposee, etiam contra scientes, participes, et consentientes : Par lequel arrest fut dit qu’audit monitoire ledit sieur de Thury seroit adiouster ces mots, Exceptis aduocatis, procuratoribus, et solicitatoribus partis aduerse, qui in consilio cause aliquid senserint, viderint, aut audierint. Par arrest de la Cour donné le 9. d’Aoust Issa-entre l’Euesque de Constances pretendant astreindre les thresoriers de S. Martin d’Auxais, à rendre leurs comptes deuant luy, d’vne part, et lesdits thresoriers d’autre : ouy sur ce le Procureur general du Roy, qui auoit remonstré que ce seroit vne merueille use vexation pour les thresoriers, et coust pour les eglises parochiales, qu’ils deussent rendre leurs comptes deuant les Euesques, et qu’il deust suffire qu’ils les rendissent deuant les Archidiacres en faisant leurs visitations par chacun an : fut dit et ordonné que lesdits thresoriers seroient tenus rendre leurs comptes par chacun an pardeuant l’Archidiacre ou son commis sur le lieu : et en sa negligence, pardeuant autre personne ecclesiastique qui par ledit Euesque seroit commis, appellez ausdits comptes ceux qui pour ce feroyent à appeler.


Fin du troiſieme liure.



1

Voyez ci apres au titreD’obligations faites par cedules priuees .


2

a leur ordinaire.

c’est à dire, au diocesain. Et notez par ce texte conforme à droict, a que combien qu’un Iuge puisse cognoistre de la question incidentelle, de laquelle autrement il ne pourroit cognoistre : Fallit tamen quando question incidens est alterius fori, comme en ce cas. Toutes fois s’il estoit question tant seulement du faict du mariage, et non de la validité d’iceluy, comme si on disoit que le pere et la mere ne contracterent L iamais mariage ensemble, le Iuge lay en pourroit bien cognoistre.


3

Quand l’an sera passe.

Quod si intra annum G. non potuerit probare quod obiecit, secularis. iudex, nion obstante questione status, poterit causam de hareditate motam audire et decidere.


4

C’est à entendre de ceux qui meurent sans auoir fait testament, et non pas de ceux qui ont fait testament : car les executeurs en ordonneroyent. Et en ce cas s’il y auoit discord pour les meubles du trespassé, le Prelat n’en cognoistroit pas, mais le Iu ge lay : si l’action n’estoit personnelle, et le querellé personne priuilegiée, Sur ce nous noterons les arrets qui ensuyuent. L’Archeuesque de Roüen ou ses officiers auoient decerné mandement pour proclamer l’execution du testament d’un nommé Cardon, pource que les denommez executeurs y auoyent renoncé. L’effect duquel mandement est empesché par le Procureur general du Roy, disant Cardon estre bastard et decede sans hoirs, et partant les biens dudit Cardon appartenir au Roy. L’Archeuesque disant, que ce nonobstant Cardon auoit peu disposer de son meuble. Par arrest donné le S. de Iuin 1502-ledit Archeuesque est permis cognoistre du benefice d’inuentoire desdits biens, et adiudication d’iceluy. Par arrest du 6. de Iuin 1511. entre Guillaume Goder et l’Archeuesque de Roüen, ledit Archeuesque suyuant la possession par luy affermée d’auoir de temps immemorial la iurisdiction de faire faire inuentoire des meubles de ses suffragans decedez, quand il n’y a heritiers, ou executeurs qui veulent prendre la charge de l’hoirrie ou execution testamentaire : et en possession de faire vendre lesdits meubles, et d’en faire distribuer les deniers aux crediteurs : fut permis et authorisé à faire et tenir l’estat des meubles demourez par le trespas de l’Euesque de Seez, et faire distribution des deniers aux crediteurs d’iceluy defunct en leur rang et degré.

Meautis pour auoir payement de quarentecinq liures de despens à luy adiugez par la Cour sur Maistre Guillaume Vesnier prestre, auoit fait faire arrest sur les biens dudit Vesnier trouuez apres son décez : desquels le maistre de intestats s’estoit depuis saisi par inuentoire. Parquoy auoit ledit Meautis presenté requeste pour faire inhiber ledit maitre des intestats. Laquelle signifiee, l’Archeuesque de Rouen prenant le faict pour ledit maistre des intestats, auoit allégué et mis en faict qu’à luy ou ses officiers à cause de sa iurisdiction, appartient de cognoistre des inuentoires, venduë, et distribution des biens de ceux qui decedent en son diocese, sans faire testament : disant auoir esté ainsi iugé pour les biens de Laual, Euesque de Scez : et que ledit Vesnier estoit mort intestat, parquoy la cognoissance de ses meubles luy appartenoit. Soustenu au contraire par ledit Meautis, disant que l’arrest dont s’aidoit ledit Archeuesque estoit tout autre cas, eu regard signantement que ledit Archeuesque auoit preuenu la iurisdiction laye, Surquoy est dit que l’execution dudit Meautis sera faite et parfaite : que lesdits biens seront par vn huissier inuentoriez, et puis vendus au lieu accoustumé : et que s’il y a oppositions, elles seront vuidees par deuant les conseilliers commissaires sur ce deputez. Et defendu audit Archeuesque de troubler ledit Meautis en sa iurisdiction, et condamné en ses despens, le premier iour de Iuil. 1513.