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La Coustume.

L E monneage est vne aide de deniers1 qui est deu au Duc de Normandie2 de trois ans en trois ans, afin qu’il ne face changer la monnoye qui court en Normandie. Et doit l’en sçauoir qu’il y a deux ans quittes : et au tiers doiuent payer le monneage tous ceux qui ont meuble, et qui sont resseans és terres esquelles il doit estre payé.

De cest aide doyuent estre quittes tous religieux, tous clercs qui sont en sainctes ordres3, les Sergens fieffez des eglises, tous ceux qui ont benefice en saincte eglise, et tous le Cheualiers4, et les enfans qu’ils ont de leurs femmes espousees6, les vefues femmes qui n’ont vaillant vingt sols d’annuelle rente, ou quarante sols de meubles, hors leurs robes, et les oustils7 de leurs maisons, doyuent remaindre quittes du monneage.

Plusieurs sont quittes de cest aide par la franchise de leurs maisons, ou des lieux où ils sont. Les autres en sont quittes par la franchise que le Prince leur a donnee anciennement : les autres par le don au Duc de Normandie, qui est confermé par sa charte. Et s’il est certaine chose qu’ils ayent eu charte de ceste quittance, et ils l’ayent perduë par aucune mescheance, ou elle est brisee, ou arse par aucune auanture de feu : ils ne doyuent pas pourtant perdre leur franchise, se la renommee8 du pays le tient ainsi communement.

Tous ceux qui ont en leur membre de Haubert, preuost, fournier, ou monnier, pourtant qu’ils ayent four, ou moulin à ban, sont quittes du monneage : et chacun Baron en sa baronie à sept Sergens9 qui en sont quittes.

Toutes femmes mariees en sont quittes : car elles ne peuuent rien auoir pour elles Atout ne soit à leurs maris. Car pource que l’homme et la femme sont deux en vne chair, et que leur possession ne doit estre qu’vne, de quoy le mary a la seigneurie, ils doyuent estre quittes par vn monneage.

L’on doit sçauoir qu’il y a plusieurs lieux en Normandie qui oncques ne payerent cest aide : si comme la chastellenie S. Iaques, le val de Mortaigne, et aucuns autres lieux qui oncques ne payerent monneage.

Tous les autres, forts ceux que nous auons exceptez, qui tiennent feu et lieu10, doyuent payer le monneage, pourtant qu’ils aient meuble qui y puisse suffire auenamment. Mais les robes, les licts, et les oustils, ne doyuent pas. en ce estre contez pour meuble. Et pource souloit-il estre appelé fouage. car ceux le payent principalement qui tiennent feu et lieu.


1

De deniers.

C’est à sçauoir, de douze deniers.


2

Au Duc de Normandie.

Les autres Ducz qui ont esté erigez en Normandie leuent cest aide sur les resseans de leurs duchez. Aussi fait l’Archeuesque de Roüen en la ville de Dieppe, et autres terres à luy baillees en eschange : pource qu’elles luy ont esté baillees auec tout droict Royal.


3

Sainctes ordres.

c’est à sçauoir, sousdiacres, diacres et prestres, ceteri ordines vocantur minores, qui sunt ostiarius, lector, exorcista, acolutus.


4

Cheualiers.

Sous ce mot sont entendus tous Nobles.4


4

ADDITIO.

Equestris, scilitet ordinis. quia licet a principio duo tantùm ordines Roma fuerint, Senatorius et Plebeius : Equestris ordo qui medium teneret adiectus est Qui poiteà tantae fuit ampliiudinis, vt Senatorio prope par suerit. Equites autem dicti quod equis publicis mererent. Horum insigne anulus aurtus, quo à Plebe diftinguerentur. Hinc torquati, qui vulgo cocleati et aurati equites hodie vocitantur


6

De leurs femmes espousees.

Par ceci les bastars des Nobles sont exclus de ceste exemption.


7

Les oustils.

Vtrumhoc cerbo intelligi debeant instrumenta ad artificii genus aliquod pertinentie, an omne domesticum instrumentum quod neque argento aurove facto, vel vesti annumeratur, vide in l. 1. 8. supellectiles. ff. de supellec leg.


8

La renommee.

Notez par ceci qu’un priuilege, et consequemment tout titre heredital, se peut prouuer par la commune renommee, et recognoissant du voisiné.


9

Sept Sergens.

La Glose dit que par ce mot sont entendus feruiteurs, et non pas Preuosts. Mais ie suis d’aduis contraire : et que le texte entend parler de ministres de Iustice, soit qu’ils soyent appelez Sergens, ou Preuosts.


10

Qui tiennent feis et lien.

La Glose dit que les enfans estans au pouuoir paternel, en sont quittes par le monneage que paye leur pere. Car ils ne peuuent auoir rien qui soit leurs, mais est tout à leur pere. Mias s’ils estoyent hors du pouuoir paternel, ils paye royent chacun d’eux monneage, pourueu qu’ils eussent vaillant chacun vingt sols de meuble. Toutesfois s’ils n’auoyent point de pere, et ils demouroyent tous ensemble, ne tenans qu’un feu et lieu, sans auoir parti la succession de leur pere, ils ne payeroyent qu’un monneage par la main de l’aisné.