Si vous souhaitez signaler des coquilles dans ce passage, vous pouvez écrire à Morgane Pica (ingénieure d'étude du projet), en précisant l'URL et le titre du passage.


De la Teneure par hommage. Chap. IIII.

La Coustume en pareil titre.

H Ommage est promesse de garder foy des choses droiturieres et necessaires de donner conseil et aide. Et eil qui fait homage doit estendre les mains entre celles à celuy qui le reçoit, et dire ces paroles, le deuien vostre homme, à vous porter foy contre tous : sauue la feauté au Duc de Normandie.

Car à nul autre qu’au Roy qui est souuerain seigneur et Duc de Normandie, nese fait hommage sans ceste reseruation, comme auons dit dessus au titreDu Roy , Duc de Normandie, Et ne se fait hommage expres qu’à raison des fiefs nobles, comme auons ia noté au titre prochain precedent. Lequel honmage n’est deu que par la mort et mutation de l’homme, et non par la mort ou mutation du seigneur. Car on n’est tenu faire hommage qu’vne fois en sa vie. Ce qui n’est pas vniuersel par toute la France Car en aucuns pays la foy faut tant du costé du seigneur, que du costé du vassal Et n’est le seigneur tenu receuoir son vassal par procureur s’il n’est deuement exoiné. a faute duquel hommage le seigneur peut user de prinses de fief. Mais faut noter que tant que le seigneur dort, le vassal veille : c’est à dire que tant que le seigneur est negligent à user de prinses de fief, le vassal iouyra de son fief, et fera les fruicts siens, combien qu’il n’ait fait ses foy et hommage. Et depuis que le vassal a esté receu à homme, et a fait son hommage, le seigneur ne peut plus user desdites prinses de son fief, qui attribuent pour droict de leuees, le relief ou autres droicts pecuniaires : si la reception de l’hommage n’est faite sous condition resolutiue, si dedans certain temps. les autres droicts seigneuriaux n’estoyent faits et payez. Car le seigneur y peut apposer ceste condition, comme n’estant tenu de receuoir l’hommage sans le payement desdits droicts. Mais sans ladite condition il peut user d’arrest sur les leuees excroissantes sur les héritages tenus de luy, pour le payement desdits droicts, ou venir par action à les demander. On peut aussi user desdites prinses de fief és heritages non non bles par defaute d’homme ou adueu non baillé, lequel adueu ou escroe est au lieu de l’hommage : pource qu’autre hommage ne sens fait. Toutesfois aucuns tiennent ceste opinion, que si le relief est receu par le seigneur, par cela il recognoit à homme le tenant, et l’inuestit et met en possession de sa terre, et pourtant ne peut plus apres vser de prinses de fief attributiues de leuées, par defaute d’adueu ou escroe. Bien peut-il contraindre le tenant à bailler adueu ou escroe, par amendes, et saisie des héritages apres plusieurs sommations ou prefixions de ce faire, sans toutesfois faire les fruicts siens. Or est la manière de proceder esdites prinses de fief, telle que’ensuit. C’est à sçauoir que’le Preuost de la seigneurie doit rapporter icelles prinses par trois iours de Dimanche, à l’ouye et issue de la grad’messe parroissial du lieu où les héritages sont assis, faisant sçauoir à tous qu’il prend et met en la main du seigneur iceux héritages ( qui doyuent estre déclarez par le menu, et par bouts et costez s’ils sont roturiers ) à faute d’homme, droicts et deuoirs seigneuriaux non faits : et que s’il ne se presente aucun à homme pour faire et payer lesdits droicts et deuoirs seigneuriaux, dedans le temps coustumier, qui est de quarante iours, l’adiudication se fera par Iustice desdites prinses de fief, et seront lesdits héritages retrais et reunis au demaine de la seigneurie. Et doit ledit rapport estre fait presence de tesmoins qui soyent inscripts au procez verbal ou relation du Preuost. Veu lequel aux plets ensuyuans de la seigneuriel qui doiuent estre termez et criez quand ils ne tiennent ordinairement il’adiudication desdites prin ses se doit faire apres ledit temps passé, s’aucun ne se presente à homme. Et est requis qu’apres ladite adiudication lesdites prinses soyent realisees et executees dedans l’a et iour : autrement elles sont tenues pour nulles, et de nul effect et valeur. Mais en usant d’arrest en vertu d’icelles prinses dedans l’à et iour, sur les leuees desdits héritages, icelles leuees sont acquises au seigneur : lequel à ce moyen est suict payer les aireures et semences à celuy qui les a faites. Et dés lors en auant peut bailler à louage à son profit lesdits héritages iusques aux hoirs venans, ou qu’aucun se presente à homme, qui face apparoir de droict en iceux héritages, et offre faire ses deuoirs : ou bien peut renouueler chacun an lesdites prinses de fief. Et si l’homme se presente et offre faire ses deuoirs apres l’adiudication des prinses et les quarante iours ensuyuis, on ne luy peut contreuenir la leuee, pourueu qu’il la trouue en essence sur son heritage. Mais il sera tenu payer les frais desdites prinses, et de ce qui sien est ensuyuy. Et par quelque temps que les héritages soyent tenus en la main du seigneur à faute d’homme, il ne les peut prescrire : ains est tenu les rendre à son homme, toutesfois et quantes qu’il se presente et offre faire ses deuoirs, ainsi qu’il fut iugé par arrest, pour Burel contre le sieur du Desert le premier iour de Iuillet 1513. Mais aucunes coustumes de ce Royaume, comme celles de Paris, Bourges, et Orléans, font en ce distinction : c’est à sçauoir que le seigneur feodal ne prescrit point le fief de son vassal par faute d’hommes comme aussi le vassal ne prescrit point la foy et hommage qu’il doit à son seigneur par quelque laps de temps qu’il ait tenu la chose feodale sans en faire hommage : combien qu’il puisse prescrire les profits escheus des droicts et deuoirs seigneuriaux. Mais. le seigneur censier peut bien prescrire la chose baillee en cens. Et quant au cens ( que nous appellons rente seigneuriale ) il ne se peut prescrire au moins à toro, mais bien à tanto. Item deux seigneurs peuuent bien prescrire l’un contre l’autre la teneure d’on fief. Et soit noté que le seigneur qui a iouy à titre de prinses de fiefa faute d’homme, n’est suiet de rabatre aucune chose en payement des reliefs et treziemes. Mais aussi pendant que l’héritage est en sa main il ne peut rien demander des arrièrages de la rente qui en est deuë.

Or est à sçauoir qu’on est tenu bailler adueu et denombrement des fiefs nobles, à ceux de qui ils sont tenus par hommage : et mesmes à l’aisné de qui on tient par parage. quand il le baille au chef seigneur duquel le fief est tenu par hommage, tant pour son que pour ses paragiers. Pareillement les hommes qui tiennent en roture sont sujet. bailler adueu ou escroe à leur seigneur de ce qu’ils tiennent de luy. Et s il y a des soustenans ou puisnez, ils baillent escroe ou déclaration à l’aisné de ce qu’ils tiennent sous luy, afin que l’aisné baille escroe de tout au seigneur tenant noblement. Mais ceux qui tiennent en bourgage, n’en baillent point : ne pareillement ceux qui tiennent par aumosne, sinon qu’ils fussent tenans de fief noble. L’adueu baillé, si le seigneur ne le blasme dedans l’an et iour, il demeure pour passé. Et s’il y a procez sur les blasmes de l’adueu, le vassal cependant ne sera dessaisy. Mais si l’homme desauoue à tenir de son seigneur, il perd à perpétuité ce qu’il en tient. Et s en peut le seigneur ensaisiner, declaration iudiciaire sur ce premièrement faite. Que si la teneure d’vn fief est demandee par deux seigneurs, le tenant d’iceluy doit obtenir mandement du Iuge superieur pour adiourner lesdits seigneurs, afin de voir mettre et deposer en Iustice la teneure droicts et deuoirs seigneuriaux dudit fief. Et en ce faisant, au cas que lesdits seigneurs en demeurent en procez, congé de Cour est donné au tenant : lequel est permis iouyr dudit fief, en consignant en main de Iustice les arrierages de la rente par luy deué, et autres profits de fief si aucuns en sont deus, ou en soy constituant depositaire de Iustice pendant le descord desdits deux seigneurs, affirmation par luy faite au preallable, s’il en est requis, auquel d’iceux seigneurs il a accoustume de payer.


La Coustume au chapitre De feauté.

E Ntre les seigneurs et leurs hommes doit estre foy gardee, en telle maniere que l’un ne doit faire force à l’autre, ne mettre main violentement sur luy. Et s aucun est de ce accusé encourt, et conuaincu, il est tenu a perdre le fief, de quoy il deuoit porter foy à son seigneur. Et se tel meffait est trouue au seigneurs1, qu’il ait mis la main sur son homme, l’hommage sera à celuy qui est par dessus : et l’homme sur qui le seigneur aura mis la main, ne payera rente de son fief, fors celle qui est deue au chef seigneur. Et si tel meffait est trouué en l’homme, il perdra la terre : et toute la droiture qu’il y a, remaindra au seigneur.


Ladite Coustume aux chapitres de teneure par hommage de pleges : et De detteurs.

H ommage est adiointe pleuine. Car l’homme doit pleuir son seigneur en toutes Cours, s’il est suy de meffait qui appartienne à sa personne : et qu’il sera adroit aux termes qui luy seront mis. Et si est tenu à pleger son corps, s’il est tenu en prison, et à le pleger de suyr ses clameurs, et de ses amendes, et de ses namps deliurer, et de dettes, et d’emprunts, tant comme la rente qu’il luy doit d’vn an, se peut estendre. Mais aucun n’est tenu à le pleger de plus que les rentes et redeuances qu’il luy doit en vn an, valer. Et ce doit on entendre se les hommes sont presens là où le seigneur a mestier de pleges donner. Mais les resseans2 sont tenus d’aller pleger leur seigneur en la T viconté, ou en l’assise, mais que ce soit à ses despens, et il est tenu à les garder qu’ils n’y ayent dommage. Et s’il les laisse encourir en dommage de la pleuine, ils ne seront pas puis tenus de le pleuir, deuant qu’il leur aura satisfait de l’autre pleuine, et des dommages qu’ils y auront cus.



1

Au seigneur.

Namin omnibus dominus vasailo suo mutuam vicem reddere tenetur. Et par le droict ou vsage des feudes, le seigneur est dit mettre felonnie contre son vassal, aussi bien que le vassal contre son seigneur. Et suyuant ce texte, en l’Eschiquier de Pasques tenu à Caen en l’an 1302. entre messire Guillaume d’Orbec cheualier d’une part, et Giuillaume Auber tenant par hommage dedit cheualier, et contre luy plaintif en outrages et mal façons de corps d’autre, et le Procureur du Roy pour vne autre part, fut dit que ledit Auber deuoit estre quitte et deschargé des rentes qu’il faisoit audit cheualier, et des faisances et redeuances, et luy deuoyent demourer en fons et possesion et proprieté, par raison de ses droicts desdites mal.-façons : et que le Roy auroit l’hommage dudit Auber, et tout ce que ledit cheualier faisoit au Roy par raison du tenement dudit Auber, et la Cour et vsage. Item en l’Eschiquier de Pasques 1395. entre le sieur de Guerar-ville d’une part, et Martin Dardanc d’autre. Sur ce que ledit Dardane par vne amende qu’auoit faite ledit sieur en mal. façons de corps, tendant à soy en aller luy et son héritage quittes et exemps de la Iustice et seigneurie dudit sieur, et sondit héritage estre tenu du Roy : ledit sieur, dit que ledit Dardane ne tenoit de luy par hommage, mais par main d’aisné, et ainsi que ses heritages ne deuoyent estre exemps de sa iurisdiction. Et par ledit Dardane dit que puis que lesdits heritages estoyent tenus par hommage dudit sieur, et passans par main d’aisné, sa requeste estoit bonne. Iugé fut que la requeste estoit raisonnable, et luy fut accordee, et s estend ce texte à ceux mesmes qui tiennent en fief roturier, lesquels ne laissent à tenir par hommage, combien qu’ils ne facent hommage expressement entre les mains du seigneur, comme il a esté dit au prochain titre. Et icy noteray l’arrest allégué par monsieur Papon doné à Paris le quatorzieme de Iuin mille cinq cens quarantehuict, entre le Cote de Tonnerre et ses suiets dudit lieu. Par lequel lesdits suiets requerans estre mis en la sauue-garde du Roy contre leurdit seigneur, furent deboutez de leur requeste. Et enioint aux parties de soy comporter ensemble, et chacun endroit soy, a sçauoir le seigneur usant de la puissance et authorité qu’il a sur ses suiets, et eux de l’obeissance et honneur qu’ils doyuent, officieusement et deuement.


2

Les resseans

sont les hommes tenans de luy et demourans sur sa seigneurie, qui sont d’autant plus obligez que les autres qui ne sont resseans.2


2

ADDITIO.

Ceste coustume toutes fois est hors d’vsage, comme si par vn tacit consentement elle estoit abrogee. Aussi elle estoit contre raison.