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De bref de nouuelle dessaisine. Chap. III.

La Coustume.

l’En doit sçauoir que bref de nouuelle dessaisine1 est estably par ces paroles, Commande à P. qu’à droit et sans delay, il ressaisisse T. d’vne terre qui est assise en la parroisse2 de Marbeuf : dont il l’a dessaisi à tort et sans iugement3 puis le derrain Aoust deuant cestuy4 . Et ſ'il ne le fait, ſemo le recognoiſſat 5 du voisiné, qu’il soit aux premieres assises de la baillie. Et fay dedans ce voir la terre, et estre la chose en paix.

La terre doit estre arrestee en la main au Prince, et n’en doit estre mise hors deuant que la querelle soit finie. Et s aucun de ceux qui en plaident v met la main, de ce le corps de luy doit estre mis en prison et retenu iusques antant qu’il ait amendé, et rendu ce qui a esté empire par son meffait.

L’en doit sauoir que des dessaisines les vnes sont de terres, les autres d’herbages, les autres de rentes, les autres de faisances, les autres de autres de frachises, les autres de seruices : de quoy les brefs se varient selon les diuers termes où ils doiuent estre receus. Des terres de quoy le fruict fut cueilly en Aoust, l’en fait le recognoissant du derrain Aoust deuant cestuy : pource que eil en est dessaisi en cestuy, qui en fut saisi en l’autre, ou puis que la saisine des fruicts est cueillie en Aoust. Ainsi est il des herbages, et des pasturages.

Des rentes doit le recognoissant estre fait du derrain terme à quoy les rentes sont deuës, deuant cestuy, en quoy la dessaisine est faite quand la renteest eontretenuë : si comme le terme de payer la rente, fut à Noel, l’enqueste doit estre faite du derrain Noel, deuant cestuy : et ainsi doit l’en entendre des autres termes6.

L’en doit sçauoir que les vnes saisines sont renouuelees tous les ans, et sont appelees annuelles : sicomme des terres qui sont cultiuces d’an en an, et des rentes qui chacun an sont renduës. Les autres sont plus tardiues : sicomme les aides sont payees de tiers7 an en tiers an, de quoy enqueste doit estre faite, sçauoir se cil qui se plaint de nouuelle dessaisine, en fut saisi au derrain terme deuant cestuy qu’elle fust cueillie.

Ainsi est il des faisances et seruices qui ne viennent pas d’an en an, mais d’auenture, ou de grace : sicomme le pasnage et les autres fruitages qui viennent par la grace de Dieu, et non pas d’an en an : mais aucunesfois a soustenir le peuple. D’auenture escheent les seruices : si comme quand les escluses d’aucune eau despiecent, ou rI conuient renouueler les fossez, ou rappareiller les maisons, ou telles choses qui ne viennent pas d’an en an, mais d’auenturerparquoy l’en demande les seruices accoustumez à les rappareiller. Et se ils sont niez, le recognoissant doit estre fait du derrain pasnage deuant cestuy, et de la derraine fois que les escluses furent faites, ou les fossez rappareillez : à sçauoir se la saisine que l’en demande ores fut lors euë. Et ainsi doit l’en entendre de toutes les choses qui ne sont pas faites chacun an : mais quand la nature en aduient, et la nature des choses le requiert.

Dessaisine de pasnage est faite quand il aduient, et il est contretenu : et ainsi des choses dessusdites. Car l’en doit sçauoir que sielles aduiennent, et elles sont contretenues : se cil qui les doit auoir se taist, qu’il ne monstre à la Iustice dedans l’an et iour, qu’elles luy sont contretenues, recognoissant de nouuelle dessaisine n’en doit puis estre soustenu.


Audit chapitre, et au chapitre De la faute au plaintif.

L’En doit sçauoir que se le plaintif se defaut, l’autre s en partira sans iour8. Et la terre qui fut prinse en la main au Prince, pour la faute à celuy qui se defaut doit estre deliurée au defenseur. Et se le plaintifveut plus plaider contre luy, il le fera semondre de nouuel : et ainsi renouuellera leplet, et cil qui est querele se defendra lors, ainsi comme se le plet fust maintenant commence. Et pource doit l’en sçauoir que le plaintit perdroit sa querelle par sa defaute, se le temps estoit passé en quoy l’en se peut plaindre de nouuelle dessaisine : c’est vn an et Vn iour. Car dedans l’an et le iour, que l’homme est dessaisi, il se doit plaindre. Car la defaute du demandeur aneantit le plet qu’il a meu9.


Au chapitre De bref de nou des.

En telle querelle ne peut auoir qu'vne exoine 11 & vne defaute.


Au chapitre De pelerins et marchans.

E T si doit l’en sçauoir que ces recognoissans ne doiuent estre mis en delay pour excusation de croix, ne pour ost : ains doiuent estre tousiours poursuyuis12.


Aux chapitres De veuë, et De la defaute au plaintif.

loLi En doit sçauoir qu’en bref de nouuelle dessaisine ne peut aucun appeler garant. Car l’en ne doit pas souffrir qu’aucun retiene d’autruy la possession par soy ne par autre : ne qu’il la trouble par sa folle hardiesse, et qui que le face, il le doit amender.


Au Style De proceder.

E N cause de bref de nouuelle dessasine ne peut estre appelé aucun gaprat. s’il n’est ainsi que le defendeur sur qui le bref a esté prins, soit louager : auquel cas il doit faire venir le proprietaire de l’héritage : ou s’il n’est acquisiteur depuis la dernière annee precedente le bref, pourquoy il ne sçauroit parler de la possession d’icelle annee : et en ce cas doit auoir son vendeur : et n’en arrester le plet que pour vne dilation seulement.


La Coustume au chapitre De veuë.

Se les iureurs13 dient que T. eut la saisine fieffal, comme il a affermé, et que P. l’en dessaisist, la saisine luy sera renduë, et P. l’amendera. Apres doit l’en enquerir des dommages que T. acus par la dessaisine, en herbages, ou en autres issues de la terre qui a esté veuë-et à leur dict les rendra P. a T. à la value. qui vausissent, sils fussent venus à leur droit temps.

Se les iureurs dient que T. n’estoit pas faifi feodalement, mais de prest14, ou de gage, ou par louage, ou par aucune telle raison : et il ne veut rendre à P. le fief qu’il requiert, iaçoit ce que le terme qu’il auoit15, soit passé : la saisine remaindra à P. et l’autre l’amendera. Se ceux qui ont este enquis de ceste saisine sont non sachans du termes la saisine ramaindra à cil qui la tient 16 : et le plaintif prouuera, s’il veut, le terme qu’ils ne sçauoyent pas.

En plet de nouuelle dessaisine doit l’en regarder, sur toutes choses, la manière de la saisine : et comme elle estoit euë, car toute saisine ne doit pas estre renduë à cil qui la requiert. s’auoun baille de son gré, ou par iugement à vn autre la saisine qu’il a : s’il la requiert, il ne l’aura pas. S’aucun requiert lasaifine, où il a entré à force, ou quiil receut de tel qui rien n’y auoit : s’il est ainsi, telle saisine ne luy doit pas estre renduë. Car on doit hayr17 toute saisine e qui est prinse à force, ou en larcin.

L’en appelle saisine à force qui n’est euë à aucun droit, mais contre droit, par force ou violence : sicomme vn homme met un autre hors de son champ, ou de sa maison, ou d’autre saisine, par force : et celuy qui en fut mis hors l’a depuis euë sans force18. ceste saisine ne doit pas estre renduë, se cil qui fit la force, la requiert.

Saisine est eue par larcin20, quand elle est ostee à celuy qui l’auoit sans son sceu, et celément, si comme le Preuost ou autre qui a la garde d’aucune terre, en baille la saisine à vn autre, sans le sceu de celuy à qui elle est. c’est saisine cue par larcin : et se le seigneur l’a cuë sans force, et l’autre la requiert par brefpourtant qu’il soit ainsi recognu21, elle ne luy doit estre renduë.

Entel cas se la saisine est recognue, et la manière de la dessaisine est mise à non sçauoir par les iureurs, la saisine sera renduë au dessaisi. Car se la saisine est loyal, c’est certaine chose que la dessaisine est dessoyal.

Et si doit l’en sçauoir que s’aucun est dessaisi par iugement, il ne pourra pas rappeler le saisine par bref : iaçoit ce qu’elle deust etre sienne par droict. se le iugement n’est auant desiuge.



1

Bref de nouuelle dessaisine.

ce bref est appelé en droict, Interdictum recuperandae possestionis, vel restitutorium, et au pays de France, Reintegràde : par lequel il est commandé que on rende la possession de la terre à celuy qui a tort en a esté dessaisi.


2

En la parroisse.

Il faut declarer la parroisse où l’héritage est afsis, et les bouts et costez d’iceluy.


3

a tort et sans iugement.

Pource qu’il n’appartient à aucun quelque droict qu’il ait en vn héritage, d’en dessaisir par voye de faict celuy qui en est en possession. Et n’est suiet le possesseur plaider sur la proprieté, iusques à ce qu’il soit cognu et diffini de la possession, quia naturalis et ciuilis ratio facit, ut alius posiideat, alius à posiidente petat. Et encores est le possesseur si fauorable qu’il n’est suiet monstrer le titre de sa possession : ains luy suffit titre alléguer, et possession prouuer. Ideo maonum est commodum possidendi.


4

Puis le derrain Aoust deuant cestuy.

Par cecy est aisé à entendre qu’on obtient ce bref pour vne leuee emportee en l’Aoust instant : et que pour paruenir à son intention, il faut prouuer qu’en l’Aoust prochain precedent on auoit paisiblementet sans contredit despouillé l’héritage.


5

Semond le recognoissant.

Combien que la forme de ce bref cy dessus escrite, soit encore en vsage, et accoustumee d’estre inseree en ses propres termes, aux mandemens que Iustice baille aux impetrans dudit bref : toutesfois elle n’est pratiquee, ne executee, en ce que par icelle il est mandé au Sergent semondre le recognoissant du voisiné, et faire termer la veuë, pource que par ordon. d’Eschid. telles veuës qui se souloyent faire au commencement des matieres hereditales, sont abolies. et au lieu de ce suffit bailler déclaration de l’héritage : et ne se terme plus de veué sinon quand les parties siy condescendent, pour terminer la question et le descord d’entre eux, de quoy sera parlé en fot lieu. Le Sergent doncques qui a receu le mandement, doit seulement faire assignation à la partie contre qui il est obtenu à comparoir aux prochaines assises pour proceder sur ledit bref : et sans veuë termer, sequestrer la leuee emportee, et le fons à l’aduenir. Car ledit bref de sa nature rend les choses descordables sequestrees, et en main de Iustice.


6

Des autres termes.

Cecy ne doit pas estre entendu quand la rente est contredite par celuy qu’on pretend estre obligé à icelle. Car il y a autres voyes introduites pour en poursuyuir le payement, comme execution et iustice manuelle. Mais s’entend quand la rente est contre-tenue par autre que par l’obligée et qu’on en est dessaisi, par ce que un autre à receu le payement du dernier terme, auquel cas se faut pouruoir par ce bref, et prouuer sa possession, et payement du prochain terme precedent cestuy dont on est dessaisi,


7

De tiers an en tiers an.

Comme monneage, ou fouage.


8

Sen ira sans iour.

Cecy se doit entendre, et est ainsi pratiqué que si le demandeur se defaut au premier iour, congé de Cour est donné au defendeur. Mais depuis qu’il a comparu et contesté, il faudroit deux defauts pour le mettre en amende par iugement, comme il est dit apres au texte.


9

Aneantit le plet qu’il a meu.

Il y a plus que les interdits possessoires ne se perpétuent par contestation, comme actions personnelles. Ainçois tout ainsi que par un an l’on perd possession, aussi par un an l’on perdl’interdit possessoire : Car si le procez est interrupt par vn an, l’instance est perimee : et ne peut estre reprinse par lettres Royaux.9


9

ADDITIO.

Papon en ce mesme lieu allegue, arrest donné à Paris declatatif de cest an, qui se prend non en l’an du proces encommencé, mais de l’an apres, qui sont deux ans, ores que le premier ait esté à la pluspart sans poursuite : car un seul acte tient couuerte la prescription de l’an. Il y a semblable forme de prescription annale en matière de clameur de marché de bourse, où le clamant doit continuellement poursuyuir sa clameur, sans la laisser tomber en mterruption d’an : autrement ipso solo cursu temporis anni, il est euincé sans espoir d’y estre par apres receu, comme il a esté iugé par arrest donné le 7. iour d’Auril 1571. au profit de maistre Iaques de la Bretigniere, Anuocat enla Cour. Cest arrest est conforme, et à nostre Style, et à l’Ordonnance de Moulins, artic, is.


11

Vne exoine.

Entendez de l’exoine de mal resseant : auec laquelle on pourroit bien auoir exoine de voye deCour, qui chet en tous cas. Et faut entendre par ce texte, que par le second defaut, ou la seconde exoine de mal resseant, on seroit mis en amende par iugement, par laquelle la veuë seroit termée.


12

Tousiours poursuyuis.

Cat telles matieres sont prouifoires, et requièrent celérité.


13

Se les iureurs.

C’est à dire, les tesmoins iurez et examinez en l’enqueste.


14

De prest.

C’est ce que le droict appelle, Precario posiidere.


15

Le terme qu’il auoit.

De iouyr par louage, par gage, ou autrement.


16

a cil qui la tient.

Quia cum obscura sunt iura partium, fecundum possessorem iudicari solet. S. rerinendae. insti. de interdi.


17

on doit hayr.

De odio violenti possessoris vide in l. si quis in tantum, et in l. si quando. C’onde vi.


18

Sans force.

Si quis possestionem alterius violenter, vel ignorante domino ingressus fuerit, potost per dominum statim cum sciuerit repelli etiam violentes : nec ex tali repulsione competit repuiso contra dominum interdictum possessorium. Nam vim vi repellere licet : ac per vim possesiionem suam tueri Alias spoliatus ante omnia restituendus est, etiam prado : nec potest quastio dominij referri ab co qui rem abstulit.18


18

ADDITIO.

Il y atexte bien formel, in l. si quis ad fundum. C. ad leg. Iul. de vi public. ibi, quid si omissa interpellalione vin posiidenti intulerit : cc.


20

Par larcin.

C’est ce que le droict dit, clam enim posiidere. Clam enim posiidere dicitur is qui furtiue ingressus est, co ignorante quem sibi controuersiam facturum suspiciabatur, et ne faceret timebat.


21

Ainsi recognu.

C’est à dire, prouué par les tesmoins d’enqueste, que la Coustume appelle le recognoissant du voisiné.