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De prescriptions ce exceptions. Chap. XXIX.

L y a deux manieres d’exceptions ou defenses. Les vnes sont dilatoires, les autres peremptoires. Les dilatoires sont fins de non receuoir, ou de non proceder : lesquelles sont temporelles, etse doiuent proposer deuant la contestation, et d’icelles, les vnes sont déclinatoires de iugement, comme incompetence de Iuge, ou litispendence, les autres sont dilatoires du payement, comme quand on demande deuant le terme. Les exceptions peremptoires sont perpetuelles, pource que tousiours ont lieu, et resistent au demandeur, et periment sa demande, comme allegation de payement, et autres. Lesquelles se doiuent proposer apres la cause contestee, si elles ne sont telles qu’elles empeschent l’entree du procez, qu’on peut aussi nommer fins de non receuoir, comme sont prescription, serment, sentence, et transaction, que vocantur exceptiones litis finita. Et du nombre d’icelles sont celles qui sont fondees sur les ordonnances de ce titre. Toutesfois bien souuent le defendeur conteste et prend defense, sans preiudice de ses fins de non teceuoir, qu’il reserue à proposer auec ses autres exceptions peremptoires, par protestation que droict luy sera fait au preallable sur ses fins de non receuoir. Mais quant aux exceptions de litispendence, et incompentence de Iuge et siege, elles empeschent contestation sur le principal, et se doiuent proposerauant toutes fins tant de non receuoir que peremptoires. Et doit ladite litispendence l qui est quand on allégue procez estre pendant par deuant autre Iuge pour la mesme chose, et entre mesme par. tiey estre verifiee par les actes du procez, sans surce appointer les parties en preuue, autrement l’on n’y doit auoir regard pour lors, mais doit on ordonner au defendeur contester en principal, sans preiudice de ladite litispendence. Laquelle estant deuant le Iuge superieur, il peut ottroyer mandement à celuy qui est adiourné en second procez par deuant le Iuge inferieur, pour faire defenses audit Iuge inferieur de cognoistre dudit procez, et à la partie aduerse d’en faire poursuitte ailleurs que par deuant iceluy Iuge superieur, où ledit procez à esté premièrement introduit. Il y a des exceptions qui se proposent pour causes d’opposition contre vne execution : dont sera parlé en son lieu. Parquoy venons à parler de celles que ce titre nous promet, apres auoir aduerty le lecteur qu’auons scientement omisicy le Chapître de Desrenesqui est à dire exception ou defensey escrit en nostre Coustume, pource qu’il parle plus de la manière de prouuer la desrene, que de la difference des exceptions et defenses. Et viendra mieux à propos cy apres, quand nous traiterons des preuues.


La Coustume.

P Rescription est vne perclusion de response procréée de temps precedé et escheu. Aucune prescription est faite d’heure : comme es reuocations des ventes qui sont faites és villes et bourgs, qui est de l’espace d’vn iour naturel. L’autre prescription ou prolonguement de temps est qui forclot la voye de respondre, en semonces qui sont faites de respondre l’héritage deuant que quinze iours soient attains et escheus.


Loys Xi. 1510.

A Vons ordonne et ordonnons que tous drapiers, apoticaires, boulenagers, pasticiers, serreuriers, chaussetiers, tauerniers, cousturiers, cordonniers, seliers, bouchers et autres gens de mestier, et marchans vendans et distribuans leurs denrees et marchandises en detail, demanderont d’orenauent, se bon leur semble, payement de leursdites denrees, ouurages, et marchandises par eux fourmies, dedans six mois1, à conter du iour qu’ils auront baillé ou liuré la première denree ou ouurage, ensemble ce qu’ils auront baillé ou liuré depuis iceluy iour dedans six mois. Et lesdits six mois passez, ne seront plus receus à faire question ne demande de ce qu’ils auront fait fourny ou liuré, dedans iceux six mois : Sinon qu’il y eust arrest de conte2 , cedule ou obligations 3 , ou interpellation, ou ſommation, iudiciaire 4 faite dedans le temps dessusdit.

P Ource que souuent plusieurs nos suiets prennent seruiteurs sans faire aucun marché ne conuenant auec eux de leurs loyers et salaires : et durant leurs seruices baillet argent à leursdits seruiteurs pour leursdits loyers, sans en prendre quittances : lesquels seruiteurs apres le décez de leurs maistres demadent aux heritiers leursdits loyers et salaires par fraude et malice, sçachans lesdits heritiers n’estre informez des payemens qu’iceux seruiteurs ont receu durant la vie de leursdits maistres, et des conuenans qui pourroient auoir esté faits auecques eux : Et aussi en y a plusieurs qui long temps apres leurs seruices demadent leurs loyers par fraude et malice : sçachans que les autres seruiteurs, par lesquels se pourroient prouuer les payemens ou conuenans qu’ils pourroient auoir auec leursdits maistres, sont morts, ou se sont absentez : dont nosdits suiets sont grandement trauaillez et molestez, et plusieurs plaintes, procez et querelles en sortent : Nous poury obuier auons ordonne que lesdits seruiteurs dedans vn an, à conter du iour qu’ils seront sortis hors de leurs seruices, demanderont, se bon leur semble, leursdits loyers et salaires ou gages. Es ledit an passé n’y seront receus, ains en seront deboutez par fin de non receuoir. Et si ne pourront demander ledit an, que les loyers et gages des trois dernieres annees qu’ils auront seruiSi ce n’est qu’il y eust conuenant ou obligation par escrit, ou des annees precedentes interpellation ou fommation suffisante.5


Charles viij.

P Ource que souuent aduient qu’apres le trespas des procureurs, les heritiers d’iceux demandent grans restes et salaires, et aussi demandent souuent ce qui a esté payé ausdits procureurs, voulons et ordonnons que d’orenauant lesdits procureurs facet registre de ce qu’ils auront receu, etrece. uront des parties : et ne soyent receus à en faire demande de parauant vn an ou deux, sans grande et euidente cause. Et se telles questions aduiennent, qu’elles soyent vuidces et decidees legerement sans charge ou despens des parties.6


Loys xij. 1510.

P Ource que la pluspart de nos subiets au temps present vse d’achats et ventes de rentes, que les aucuns appellent rentes à prix d’argent, les autres rentes volans, pensions, hypotecques, ou rentes à rachat, selon la diuersité des lieux et pays où se font iceux contracts : a cause desquels contracts plusieurs sont mis à poureté et destruction, pour les grans arrierages que les acheteurs laissent courir sur eux, qui montent bien souuent plus que le principal : pour le payement desquels faut vendre tous leurs biens, et tombent eux et leurs enfans en mendicité et misere : Et aussi souuent les acheteurs perdent le principal et arrièrages, pource que le vendeur auparauant auoit vendu à plusieurs autres semblables rentes, les payemens desquelles et les arrierages surmontent les biens du vendeur, et le dernier perd son principal et arrièrages : moyennant lesquels contracts se font plusieurs fausses ventes, fraudes, et tromperies, desquelles sortent plusieurs procez tant criminels que ciuils, et plusieurs y perdent leur auoir, tant vendeurs qu’acheteurs : a ces causes nous desiras pourquoir à l’indemnité de nos suicts, considerans tels et semblables contracts estre odieux et à restraindre : Auons ordonné et ordonons que les acheteurs de telles rentes hypotecques ne pourront demander que les arrierages de cinq ans, ou moins. Et si outre cinq ans, aucune annee d’arrièrages estoit escheué, dont n’eussent fait question ne demande en iugement, ne seront receus à la demanderaains en seront deboutez par fin de non receuoir. Et en ce ne sont comprinses les rentes foncieres, portans seigneurie directe ou censiuë.

Ne les rentes constituees pour recompense d’héritage, comme pour amendement de partage, ou en faueur de mariage au lieu de la legitime : supposé que lesdites rentes soyent executoires. Car sans cela on ne peut demander que trois annees d’arrierages desdictes rentes, soyent foncieres, feigneuriales ou autres, comme il a esté dit au titre De fieffe de fons à rente.

De la prescription de dix ans contre les lettres de releuement a esté dit au titre prochain precedent.


Loys Hutin en la chartre aux Normans.

P Rescription ou la tenue de quarante ans suffise à chacun en Normandie d’oresnauant pour titre competant7 en toute Iustice haute ou basse, ou de quelconque autre chose que se soit. Et s’aucun de la duché de Normandie de quelconque condition ou estat qu’il soit, aucunes des choses dessusdites aura possidees par quarante anspaisiblement, qu’il ne soit sur cemolesté en aucune manière de nos Iusticiers, ne souffert estre molesté.

Et qui le contraire voudra faire, il ne soit de rien ouy ne receu en aucune manière : combien que le droict de la Coustume, et ordonance de nostre besael8, soyent euidemment contraires à ses choses. Et ce voulons estre gardé, nonobstant tout vsage au contraire. Non pourtant nous ne voulons par ce faire aucun preiudice à nous, ni à autres, és causes du droict de patronage des eglises. Ainçois voulons garder fermement la constitution9, et la Coustume sur ce faite sans enfraindre.


Fin du huitième liure.



1

Dedans six mois.

Rebuf. sur ceste ordonnance, est d’opinion que les six mois limitez par icelle, doiuent estre contez du iour de la dernière liuraison des denrees et marchandises venduës en detail, et baillees pour un seul affaire, et que la premiere liuraison se refère à la derniere, et n’est le tout reputé que pour vne liuraison. Comme si vn apoticaire baille des drogues à un malade durant le temps de trois mois pourvne seule maladie, il en pourra demander le payement dedans six mois apres lesdits trois mois passez. Mais ceste opinion me semble directement contraire aux paroles de ceste ordonnance, qui dit expressément qu’on les doit demander dedans six mois à conter du iour qu’on aura baillé la premiere denree. Qui est à dire qu’il faut que la premiere denree qu’on demande ait esté liurée depuis six mois prochains precedens la demande, et cosequément les autres denrees depuis liurees. Et puis l’ordonnance met. Et lesdits six mois passez, ne seront plus receus à faire demade de ce qu’ils auront liuré dedans iceux six mois. Ou ie pese qu’il faille lire par negatiue. Ce qu’ils n’auront liuré dedans iceux six mois. Quoy que soit l’usage a ainsi interpreté ceste ordonnance, et se doit ainsi entendre qu’il ny a que les denrees liurées deuant les six mois prochains precedens la demande qui soient prescrites, et non pas celles qui seroient prouuées auoir esté liurées dedans iceux six mois. Car ce ne seroit pas raison que la prescription des premieres fist perdre celles qui ont esté depuis liurees, sinon qu’il y eust six mois passez depuis la liuraison de chacune denree qu’on voudroit demander.


2

Arrest de conte.

Rebuf Soit verbal, ou par escrit. Et est ainsi approuué par le commun vsage : combien qu’Imbert tienne qu’il est requis que le conte soit arresté par escrit. L’opinion duquel est reprouuce par Rebuf.


3

Cedule ou obligation.

Ou promesse verbale, comme il se pratique chacun iour. Mais. ientens que ceste promesse fust faite depuis la liuraison, pour perpetuer l’action en vertu de ladite promesse : qui doit estre d’aussi grande vertu et efficace, comme si elle estoit portée par escrit. D’auantage Rebuf. dit ceste ordononce n’auoir lieu, quand celuy qui a receu les denrees et marchadises sçait bien qu’elles sont encores deuës : pour ce qu’il seroit en maunaise foy, et feroit contre sa conscience d’en refuser le payement. Et pourtant qu’il est bon de le faire interroguer par le Iuge, s’il sçait pas bien qu’elles sont deuës. Et à ce est conforme la Coustume d’Orléans qui porte qu’il seroit suiet de iuter s’il a paye ou non. Et où il ne voudroit iurer auoir payé, en ce cas seroit tenu de payer, nonobstant ladite prescription, en affermant par le demandeur. Toutesfois on pe ut soustenir le contraire, veu que la partie est deboutce de son action, et demande par fin de non receuoir : et qu’en actions personnelles on ne peut faire cas de la mauuaise foy, esquelles la prescription coutt en hayne de la nonchalance du crean cier : et que le droict disant que le possesseur de mauuaise foy ne prescrit point, ne se peut entendre ny estendre ausdites actions personnelles, pource qu’en icelles le prescriuant ne possede tien, lugé par ar. de Grenoble le 8. de Mars l459.


4

Interpellation ou sommation iudiciaire.

Imbert est d’aduis que ceste disiunctiue doit estre conuertie en copulatiue : et que l’ordonnance a vsé de ces deux mots, interpellation et sommation, pour signifier et donner à entendre plus cléremet ce qu’elle vouloit dire. Parquoy ne faut prendre interpellation pour simple demande faite hors iugement, à la différence de la sommation iudiciaire. Rebuf. est d’aduis contraire, et qu’interpellation est icy prinse pour admonition, requisition, ou demande faite hor iugement deuant un Notaire auec deux tesmoins, ou deuant deux tesmoins seulement qui doit suffire pour interrompre la prescription attendu qu’es propositionsdisiunctiuës il suffit une partie d’icelles estre accomplie : et qu’autrement ce mot de sommation iudiciaire seroit superflu. Quant à moy ie suis d’un tiers aduis, c’est qu’interpellation doit estre prinse pour adiournement, pource qu’en telles prescriptions qui courent par la negligence de demander ce qui est deu, il faut pour le moins adtiournement pour rompre la prescription : et ne peut estre rompue par la seule denGciation faite hors iugement. Et par ainsi l’interpretation sera conforme au droict comun. loint que le mot d’interpellatio emporte signifiance de rompre, empescher, et destourber. Ce qui conuient à l’interruption de la prescription, qui ne peut estre faite à moins que par adiournement. Et par ce moyen ne seront superslus ces mots, ou sommation iudiciaire.


5

Imbert etRebuf . entendant que le conuenant doit estre par escrit : et qu’il ne suffiroit de le prouuer par tesmoins, sont aussi d’opinion que la sommation faite hors iugement en presence de deux tesmoins sans adiournement seroit suffisante. Et peut-on adiouster auec ceste prescription d’vn an, les autres semblables : comme de nonreceuoir complainte ou Haro apres l’an, et les brefs possessoires, clameurs de marché de bourse, les mineurs apres leur an profitable à rappeler les saisines de leurs ancesseurs : ceux qui voudroient intenter procez en vertu de lettres Royaux ou mandement de Iustice surannez : poursuiuir arrests faits au precedant an et iour, ou procez interrupts et discontinuez d’an et de iour : à reclamer choses saisies comme gayues, ou varech, ete.


6

Par ordonnance du Roy Loys xij. faite en l’an 1498. est ordonné que les Greffiers ne pourront demander le salaire des procez par eux receus, si non qu’ils le demadent dedans trois ans apres lesdits procez finis.

Il y a aussi prescription de trois, procedante de la peremption d’instance, dont sera parle en son lieu.


7

Titre competent.

Habet ergo hec possestio vim constituti, ainsi qu’à la possession immemoriale selon droict in l. hoc iure. S. ductus aquae. ff de aq. quotid, et esti. Et faut noter ce que dit Paul. de Castr. in l. 1. C. de bon-mater. qu’en prescription statuaire ou coutumière il n’est besoin de prouuer titre, afin que le statut ou la coustume adiouste quelque chofeu droict commun, par lequel le titre est requis auec la possession. Et à lieu telle prescription en choses hereditales et actions reelles, ou dependentes de realité. Mais en choses mobiliaires et actions personnelles, hors les cas dessusdits, prescription de trente ans a lieu : laquelle aussi à lieu en teneure par omosne, comme il a esté dit cy deuant au titre De teneure par omosne. Et n’a lieu en ce Royaume l’vsucapio des meubles par trois ans, laquelle est introduite de droict, insti. de usucap. ainsi que monsieur Bohier a noté sur la Coustume de Bourges ti. De praescrip. S. 7. Et soit noté pour regle generale, que prescription est interrompue par adiournement, encores qu’il soit fait par deuant Iuge incompetent, comme Papon dit auoir esté iugé par arrest du Parlement de Paris le 17. de Iuillet 1515.


8

Nostre besael.

Le Roy Loys viii.


9

La constitution.

Du Roy Philippe Auguste cy dessus inseree au titre De patronnage. d’eglise : là où a esté parlé de la prescription de patronnage.9


9

ADDITIO.

Ce ne peut estre Philippe Auguste, d’autant que la chartre intitulee Philippe, selon le texte inseré en nostre Coustumier audit Tit. De patron. d’eglise, s’adresse nommément à Robert archeuesque de Rouen. Durant le regne dudit Philippe ne se trouue aucun Archeuesque de ce nom de Robert et de Guillaume, en l’eglise archiepiscopale et metropolitaine de Normandie. Item la charte est donnee en Lyse-bonne, pays de Portugal, où ledit Philippe Auguste durant son temps, ne fist aucun voyage. Pourquoy ie suyvroye plustostM. Guillaume Rouille , lequel sur ladite charte dit, par credence, qu’elle est emance de Philippe tiers surnommé le Hardy, qui eut guerre contre Pierre Roy d’Arragon, pour les inhumanitez par luy comises e nuers les Siciliés, et Charles Roy de Sicile, frère du Ron sainct Loys, et oncle dudit Philippe : lequel fut en personne en ladite guerre, où il fist long seiour à la grade confusion et des Arragonois et de leur Roy qui y fut tué. Rouille ne déclare l’Archevesque qui pour lors cathedroit à Roüen, estimant que ce fust vn Robert nommé en ladicte charte, mais du regne dudit Philippe 3. il n’y en a eu aucun de ce nom. Bien se trouue Guillermus de Flauacourt au rang des Archeuesques de Roüen 58. Qui fait iuger l’erreur, de l’apposition de Robert, en ladite charte. Veu mesinement le Coustumier Latin, où est inseree ladite charte en termes Latins dedice non à Robert, ni à Guillaume, ny à aucun nommément, mais à l’Archeuesque de Roüen, en non appellatif. Or audit Coustumier Latin est subsequutiuement contenue vne response à ladite charteper Guillermii archiepiscopii Rothomagesem et suffragancos sua metropolis, qui est ce Guillaume de Flauacourt, lequel fut ordonné et receu archeuesque en l’an 1278. ayant long temps regy et gouuerné son eglise, et iusques à son decez aduenu en l’an 1306. et ledit Philippe ;, depuis l’an 1270. régna iusques en l’an 1286. Qui fait conformer le temps de l’un à l’autre.