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D’eusures et d’usuriers. Chap. XXII.

La Coustume aux chapitre Dvsuriers, et De fief et de gage.

Es chatels aux vsuriers ramainent au Duc selon l’ancienne coustume de Normandie, pour refraindre ceux qui viendront apres, de la conuoitise des vsuriers.

Vsure est faite en trois manieres. Vne manière est quand celuy qui achete s’oblige à payer aucune chose plus que le prix, pource que l’on luy donne terme de payer. Raison comment, P. a affeuré son cheual à G, au feur de dix liures, eten ce se sont accordez Et pource que P. n’a pas les deniers, G., luy donne terme de quarante iours, par conuenant qu’il luy payera lors douze liures pour le cheual. Illec est vsure faite de quarante sols. Ainsi doit l’en entendre des deniers prestez : car quand l’en paye par conuenant plus que ce qui fut presté, tout est tenu pour vsure. En la vente du cheual dont nous auons parlé, et en tels marchez, sont les deniers du prix ainsi comme prestez : quand terme de quarante iours est donné par conuënant, de les payer, pour payer quarante sols ou plus.

La seconde manière est quand vne chose d’vne essence est baillee pour chose d’vne autre essence mieux vaillant1, à payer à terme : si comme l’en preste orge pour auoir fourment, ou ceruoise pour vin.

La tièrce manière est en mort-gage. L’en appelle mort-gage. quand cil qui tient la chose en gage a les fruicts et les issues, et n’en conte rien. Si comme s’aucun baille sa terre en gage pour quarante liures, tout ce que cil qui la tient reçoit des issues de la terre par dessus son chatel, est tenu à vsure3.

Le chatel des vsuriers n’est forfait, fors de ceux qui ont vsé d’aucune des manières d’vsure dessusdites, en l’an qu’ils sont morts. Car nul ne doit stre tenu à vsurier, qui an et iour a cessé d’vsure mener, apres ses derraines vsures.


Loys xij 1510.

P Our obuier qu’aucunes vsures ne se commettet en nostre pays de Normandie, auons enioint et enioignons à tous nos Iusticiers et Officiers, que sans dissimulation, et a toute diligence, sur peine de suspension de leurs offices, et d’amende arbitraire, chacun en son destroit et iurisdiction, senquierent de ceux qui commertent vsures manifestes, et par contracts feints et simulez : et procedent contre les coulpables selon disposition de droict, et l’exigence des cas.

Itemauons interdit et defendu, interdisons et defendons à tous Notaires de receuoir aucuns contracts vsuraires, sur peine d’estre priuez de leurs estats, et d’amende arbitraire4.

Et afin que chacun soit plus enclin à denoncer ceux qui commettent telles vsures, Nous ordonnons que ceux qui les denonceront à Iustice, auront la tierce partie des amendes qui en viendront et istront. Et aussisitels delateurs par l’ysué du procez estoyent trouuez calomniateurs, seront punis comme de raison.



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Mieux vaillant.

Ceste Coustume est conforme à l’opinion de monsieur du Moulin en son liure analytique d’vsures, où il diffinit vsure estre toute accession de profit au sort principal, pour l’vsage ou dilation du payement dudit sort : soit qu’il soit deu pour cause de prest, ou de vente, ou d’autre cause quelconque : et soit que le sort consiste en deniers, ou autre chose. Vray est qu’il adiouste qu’en vsure directe et formelle le profit doit estre successif, à la raison et pourportion du sort, et du temps. Mais c’est vsure interpretatiue quand la succession n’est successiue, ains momentance et à une fois : pource qu’elle est mise au lieu de l’vsure, comme quand on appose quelque peine au cas qu’on ne paye au terme, laquelle peine quand elle est mise en fraude de l’vsure, est vsure interpretatiue. Et appert par son opinion, et par ceste Coustume, que le vray obiect et suiet de l’vsure, est la dilation de rendre et payer le sort principal : ou la concession de l’usage de la pecune deué : à prendre pecune largement, comme font les Iurisconsultes, pour tout sort qui consiste en nombre, poix, ou mésure de chose fungible. l pecuniae. ff. de verb. signific.1


1

ADDITIO.

Molin . in d. tract. num. 17. 18. et se4. affirmat quod vsura propriè et strictè sumpta solùm tadit in mutuo, quide substantia mutui est, vt sit officium gratuitum et quod recipiens obligetur ad restituendum idem genus, et ne quid vlira-l. si tibi detem. in princip. et l. rogasti. S. si tibi. ff. si cert. petat. ltem quum rei mutuatae dominium transferatur in mutuo in accipientem, vt illa ei libere vti liceat, vsusque rei non sit separatus a consumptione ipfius rei, si quid exigat ur ex ipso vsu, illa exactio, ite raptus, uerè et propriè vsura est : vt docetPanorm . in rub. de vsur.


3

Est tenu à usure.

De droict aussi les fruicts et les issues de la terre engagee, doiuent estre contez et deduits sur le sort principal : de sorte que si les fruicts se montent autant que le sort, la terre doit estre renduë : et de droict canon c’est vsure de gaigner les fruicts de la terre engagée.


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D’amende arbitraire.

Par arrest du 14. de Feurier 1529. Coquerel pour auoir par douze contracts subsecutifs et prochains l’un de l’autre contracté illicitement auec le Villain : c’est à sçauoir de l’auoir fait obliger en rente pour tradition de dlques victuailles, et pour arrierages, et aussi pour argent content, lequel conté deuant les Tabellions, estoit par luy incontinent et sans s’en dessaisir, retiré, fut, sans autre inquisition super solita feneratione, condamné en grosse amende, renuoyé comme prestre à son Diocesain, pour le delict commun : le sort principal adiugé au Roy comme chose vsuraire : à predre : c’est à sçauoir ce qui estoit prouenu à l’vrilité dudit le Villain, sur iceluy le Villain. et l’outreplus sur ledit Coquerel. L un des Tabellions receuans lesdits contracts, condamné à faire amende honnorable, et l’autre à luy assister : et neantmoins tous deux condamnez en grosses amendes, et déclarez inhabiles de tenir ni exer cer aniamais charges royales. De rentes vsurairés voyez cy dessus au ti. de vé. De rente hiypotheques 4

Par ordonnance du ROy Philippe le Bel, raicte en l’an 1 311. laquelle est en Latin estoit defendu de frequenter et exercer griefues vsures, sur peine de confiscationde corps et de biens : c’est à sçauoir en exigeant plus d’un denier par semaine, quatre denierspar mois, ou quatre sols par an, pour liure : qui est à la raison de vingt pour cent. Et aux foires de Champaigne qui tenoitnt six fois par an, qui eust prins ou exigé sous couleur d’interest ou autrement, plus de cinquante sols de profit de foire en foite, pour cent liures deuës à cause de prest, ou de change, fust enchieu en la peine susdite, Estans suiets à la mesme peine tous ceux qui eussent fait aucuns contracts feints et simulez en fraude desdites usures, ou icelles frequentées sous le manteau de quelque autre. coutract que ce fust. N’estoit pourtant defendu que tout creancier ne peust sans chestre puny, exiger interest legitime, outre le sort à luy deu à cause de prest, ou d’autre contract licite, duquel on peut raisonnablement et licitement demander interest : pourueu que ledit interest n’eust excede les fommes dessusdites.. Lequel excez eust fait prefumer le contract estre fait én fraude desdites vsures, et le reputer usuraire et punissable de ladite peine. En outre estoit defendu par ladite ordonnance de renouueler les obligations du passé, pour conuertir au sort principal les usures profit ou interest qui en estoit deu par le cours du temps : sur peine d’encoutir ladite peine ipso facto. Estoit aussi ordonné que nul ne fust tritu payer ou rendre ce qui estoit par luy deu, en plus grande valeur que ne valoit la monnoye lors du contract et de la tradition d’icelle, selon le cours qu’elle valoit par les ordonnances du Roy. Qui est à dire que si la monnoye estoit montée de prix, le detteur pouuoit conter et rabatre la plus value. Mais cela doit estre entendu selon la matière sujette de ladite ordonnance : c’est à sçauoir quand le creancier receuoit profit du contract : car par ce moys il en eust receu double profit.

Finalement estoit defendu par ladite ordonnance de faire escrire aux contracts faits hors les foires de Champaigne, qu’ils eussent esté faits durant lesdites foires, pour iouyr des priuileges d’icelles : sur peine de la confiscation de la dette, et de peine de faux aux Notaires qui scientement l’auroient escrit contre vérité.

Ledit ROy Philippe par autre ordonnance de l’an 1312. veut les vsures de menue. quantité estre corrigées et punies : et ceux qui les receurGt, useront et frequenterot, ainsi que sels Dieu et droiture, et le profit publie sera à faire : mais non pas de la peine desusdire de confiscation de corps et de biens, comme lesdites griefues vsures importables aux suiets, et en brief temps deuorans et consumans leur substace. Et veut que tous ceux à qui seront à la fin demandees lesdites vsures de quelque quantité ou manière qu’elles soient, ne soient tenus de les payer : et que ceux qui les auront payces, puissent user de repetition. Qui est conforme au droict canon : iusques là que l’heritier de l’vsurier est suiet à la restitution des vsures receuës par le defunct duquel il est heritier e. cum tu. etc. tuan nos. ex. de vsur.


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ADDITIO.

De gage. Voyez cy dessus l’annotation mise sur le titre De gage. liu. vij