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De querelle qui naist de mesdit. Chap. XXVII.

La Coustume.

Elles querelles naissent de ledenges que les vns dient aux autres. Et pour ce doit-l’en sçauoir que les vnes des ledenges sont criminelles, et les autres simples. La criminelle est celle de quoy homme auroit deseruy à perdre vie, ou membre, si c’estoit vérité qu’on luy dit. Sicome aucun reproche à autre larcin, ou homicide, ou aucun autre crime de quoy il eust deseruy à estre condané à mort dechoneste. Et pource doit-l’en sçauoir que se plainte est faite de ledenge, et cil qui en est querelé, le cognoit, ou il en est attaint, la Iustice luy doit faire griefuement amender par le chatel. Et si doit faire amende à celuy qui est ledengé, si qu’il se prenne par le bout du nez et die, De ce que le l’ay appelé larro, ou homicidesou ce de quoy il est attaintyi ay mentyecar ce crime n’est pas en toy, et de la bouche dot ie l’ay dit, ie suis mésonger. Et ce doit estre fait en assise, ou en plets, ou en eglise à iour solennel : à ce qu’il appere que le vice qu’il luy mit sus, ne soit pas en luy : pource que celuy qui luy dit, s en recognoist à mensonger.1


Au Style de proceder.

S V’Il estoit clerc, il ne seroit pas condamné à soy desdire publiquement, lainsi que la Coustume contient : car il seroit infame. Mais seroit condamné enuers partie en amende profitable2, taxce par Iustice. Et si demourroit vers le Roy en amende du procez.


Ladite Coustume.

L’En doit sçauoir que s’aucun a dit à autre ledenge criminelle, et il le reCognoist, et est prest de le prouuer, il le pourra bien prouuer, se la querelle est telle qu’elle luy appartienne : sicomme d’occire son pere, sa mere, tou son frere, ou de larcin qu’il luy a fait, ou aucune telle chose de quoy il soit le plus prochain3 à en faire la suite.

En simple ledenge se cil qui l’a dit, en est attaint, il le doit amender à la Iustice, et a celuy qui ledengea : et doit dire simplement que la villanie qu’il luy dit par follie, n’est pas en luy.


Audit Style.

M Atieres d’iniures de dict qui ne sont criminelles, se manient selon les traditions des matieres mobiliaires4.



1

ADDITIO.

Ceste façon de se desdire, et prendre par le nez n’est en vsage : mais est la condamnation arbitraire selon qu’il a esté dit cy dessus.


2

Amende profitable.

Il y a doncques deux sortes d’amende, qui se font à la partie ciuile. L’vne est amende honorable, l’autre est profitable ou pecuniaire. La première irroge infamie, la seconde non, selon la coustume generale de France, et la loy premiere. C. de modo mulctarum. Combien que de droict indifféremment celuy qui est condamné en matière d’iniures est rendu infame. Et ne peuuent les deux estre adiugées à la partie ciuile : ains se doit contenter de l’une ou de l’autre, et déclarer par sa conclusion à laquelle des deux il tend. Et si on luy adiuge amende profitable, on n’a point accoustumé d’adiuger dommages et interests : car telle amende est au lieu d’iceux. L’amende honorable aussi se fait à Iustice en cas deicrime, quand il est commis contre l’honneur de Dieu, l’auctorité du Roy, et la chose publique. Et se fait en ceste manière que le delinquant estant à genoux, nue teste et nuds pieds, et quelque fois en chemise, tenant vne torche ardente en ses mains, récognoit son offense, et en requiert pardon à Dieu, au Roy et à Iustice. Et auec ceste amende honorable qui se fait à Iustice, on a bien accoustumé de condamner aussi le delinquant en amende pecuniaire enuers le Roy. D’auantage faucun est trouué auoir poursuyui calumnieusement vne accusation de quelque grief crime, il est ordinairement condamné en telle amende honorable, mesmes enuers la partie ciuile : pource que nous n’vsons point de peine de Talion. Qui plus est Papon allégue arrest de Paris : par lequel un clère non marié fut condamné à faire amende honorable, pour auoir irreueremment respondu, estant examiné de bouche par deux de messieurs de la Cour.


3

Le plus prochain.

Encores qu’il ne fust le plus prochain, et que l’accusation du crime ne luy appartinst pour en emporter interest ciuil : toutesfois il pourroit bien estre receu à le prouuer par le benefice du Procureur du Roy, qui en feroit instance pour l’interest public. Et en le prouuant ne seroit raisonnable qu’il fust mis en amende de l’injute. Eum enim qui nocentem infamauit, non est bonum et aquum ob eam rem condemnari. Peccata enim nocentium et oportet et expedit nota esse. Et notez icy vne manière de prouuer et poursuyuir les crimes, qui est par voye d’exception, dont est traité in c. 2. de ord. cogni. Mais si le defendeur ckuenu en matière d’iniures, pour toutes defenses dit qu’il neles veut soustenir, ni aduouër, mais au contraire qu’il récognoist le demandeur homme de bien, et non coulpable ne taché de ce qu’emporte l’iniure, il doit euiter les amendes tant honorable, que profitable. Doit neantmoins estre condamné aux despens de l’iastance, et à luy defendu de plus iniutier ne diffamer le demandeur sur certaine peine. Et permis au demandeur faire publier tel iugement pour toute reparation, ainsi que Papon dit auoir esté iugé par arrest de Paris. Ce qui semble estre contraire au texte de nostre Coustume, disant que si celuy qui est querelle de ledenge le cognoistiil le doit griefuement amender tant à Iustice, qu’à celuy qui est ledengé.


4

Mobiliaires.

Esquelles toutesfois le Iuge ne doit appointer les parties à éscrire, mais. apres icelles ouyes les doit appointer à faire venir leurs tesmoins : ou leur faire droict sur le champ, si le cas y est dispose. Et en ledenge criminelle on doit proceder extraordinairement, quand elle est deniee, ainsi qu’en autres crimes.